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CA RENNES (4e ch.), 24 novembre 2022

Nature : Décision
Titre : CA RENNES (4e ch.), 24 novembre 2022
Pays : France
Juridiction : Montpellier (CA), 4e ch. civ.
Demande : 21/04212
Décision : 22/399
Date : 24/11/2022
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 7/07/2021
Numéro de la décision : 399
Référence bibliographique : 5806 (logique loi/décret), 5819 (décret du 18 mars 2009, application dans le temps), 6302 (architecte, clause d’avis ordinal)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 9946

CA RENNES (4e ch.), 24 novembre 2022 : RG n° 21/04212 ; arrêt n° 399 

Publication : Judilibre

 

Extrait : « L'article 7.3 du contrat de maîtrise d’œuvre conclu entre M. et Mme X. et la société d'Architectures Terre & Ciel stipule « qu'en cas de différent portant sur le respect du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le Conseil régional de l'ordre des architectes dont relève l'architecte, avant toute procédure judiciaire sauf conservatoire. Cette saisie intervient à l'initiative de la partie la plus diligente. »

Il ne fait pas débat que la fin de non-recevoir ne peut pas être soulevée lorsqu'est retenue la responsabilité décennale de l'architecte.

Les maîtres de l'ouvrage font grief au tribunal d'avoir déclaré irrecevables leurs demandes à l'encontre de l'architecte et de son assureur dans le cadre de la responsabilité contractuelle du premier. Ils soutiennent que la clause de saisine préalable de l'ordre des architectes avant tout procès crée un déséquilibre significatif entre les droits des parties puisqu'elle a pour effet d'entraver l'exercice d'une action en justice. Ils estiment que cette clause est abusive, l'architecte ne rapportant pas la preuve contraire. La société Axens et la MAF contestent le caractère abusif de cette clause. Elles font valoir que la clause de saisine préalable constitue une démarche amiable qui s'inscrit dans le cadre de l'évolution législative en favorisant la conciliation préalable au procès. Elles font observer que la saisine pour avis est une consultation qui ne lie pas les parties et n'entrave pas l'accès aux juridictions. Elles soulignent la réciprocité de la clause.

Aux termes de l'article L 132-1 du code de la consommation dans sa version applicable au litige « […] ». En l'espèce, l'article R. 132-2, 10° devenu R. 212-2, 10° qui institue dans les contrats conclus entre des professionnels et des non professionnels ou des consommateurs, une présomption du caractère abusif de la clause n'est entrée en vigueur que le 18 mars 2009 et n'est pas applicable au contrat du 21 mars 2008 contrairement à ce que font plaider les parties. Il incombe donc aux maîtres de l'ouvrage de rapporter la preuve du caractère abusif de la clause.

Cette clause, qui figure sur des contrats types rédigés par l'ordre des architectes, est connue des professionnels, mais de l'est pas des consommateurs. L'impossibilité de régulariser la saisine de l'ordre des architectes en cours d'instance entrave l'accès à la justice de M. et Mme X. Il s'en déduit l'existence d'un déséquilibre entre les parties. La clause litigieuse sera donc réputée non écrite.

Par ailleurs, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, l'action directe du maître d'ouvrage contre l'assureur de responsabilité de l'architecte n'est pas soumise au respect de la clause du contrat d'architecte prévoyant la saisine préalable du conseil de l'ordre. La MAF sera en tout état de cause tenue de garantir les maîtres de l'ouvrage si la responsabilité de la société Axens est retenue. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE RENNES

QUATRIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 24 NOVEMBRE 2022

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 21/04212. Arrêt n° 399. N° Portalis DBVL-V-B7F-R2C5.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Hélène RAULINE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Brigitte DELAPIERREGROSSE, Présidente de chambre,

Assesseur : Madame Nathalie MALARDEL, Conseillère,

GREFFIER : Madame Françoise BERNARD, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS : A l'audience publique du 13 octobre 2022

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 24 novembre 2022 par mise à disposition au greffe, date indiquée à l'issue des débats : 17 novembre 2022 prorogée au 24 novembre 2022

 

APPELANTES :

Compagnie d'assurance SOCIÉTÉ MAAF ASSURANCES SA

[Adresse 5], [Adresse 5], Représentée par Maître Charles OGER de la SELARL ARMEN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES

SARL G. PLATRERIE CARRELAGE

[Adresse 2], [Adresse 2], Représentée par Maître Charles OGER de la SELARL ARMEN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NANTES

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

né le [date] à [Localité 8], [Adresse 1], [Adresse 1], Représenté par Maître Aurélie GRENARD de la SELARL ARES, Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représenté par Maître Emmanuelle OLLIERIC, Plaidant, avocat au barreau de NANTES

Madame Y. épouse X.

née le [date] à [Localité 6], [Adresse 1], [Adresse 1], Représentée par Maître Aurélie GRENARD de la SELARL ARES, Postulant, avocat au barreau de RENNES, Représentée par Maître Emmanuelle OLLIERIC, Plaidant, avocat au barreau de NANTES

Société AXENS

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège [Adresse 3], [Adresse 3], Représentée par Maître Claire LIVORY de la SELARL CLAIRE LIVORY AVOCAT, Plaidant, avocat au barreau de NANTES, Représentée par Maître Sylvie PELOIS de la SELARL AB LITIS / PÉLOIS & AMOYEL-VICQUELIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES

Société MAF ASSURANCE

prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Es qualité d'assureur de la Société d'ARCHITECTURE TERRE ET CIEL ayant fait l'objet d'une fusion-absorption par la SARL AXENS, [Adresse 4], [Adresse 4], Représentée par Maître Claire LIVORY de la SELARL CLAIRE LIVORY AVOCAT, Plaidant, avocat au barreau de NANTES, Représentée par Maître Sylvie PELOIS de la SELARL AB LITIS / PÉLOIS & AMOYEL-VICQUELIN, Postulant, avocat au barreau de RENNES

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS ET PROCÉDURE :

Suivant contrat du 21 mars 2008, M. et Mme X. ont confié à la société Terre et Ciel, aux droits de laquelle vient la société Axens, assurée auprès de la Mutuelle des Architectes Français (MAF), la maîtrise d’œuvre complète de la construction de leur maison d'habitation à [Localité 7].

Ils ont chargé la société Diogo J. des lots maçonnerie, voirie, réseaux divers, ravalement, revêtements de sol et la société G. Plâtrerie Carrelage du lot doublages et plafonds, ces deux sociétés étant assurées auprès de la MAAF Assurances.

La réception a été prononcée le 20 février 2009 avec des réserves qui ont postérieurement été levées.

La société Diogo J. a été liquidée.

Se plaignant de désordres affectant leur maison et après avoir fait diligenter une expertise amiable par l'intermédiaire de leur assureur de protection juridique, M. et Mme X. ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Nantes aux fins d'expertise. Il a été fait droit à leur demande par ordonnance du 3 octobre 2013.

L'expert, M. U., a déposé son rapport le 18 octobre 2016.

Par actes d'huissier des 24, 27 avril, 7, 9 mai et 9 juin 2018, M. et Mme X. ont fait assigner devant le tribunal de grande instance de Nantes la société Axens et la MAF, la société G. Plâtrerie Carrelage, ainsi que la MAAF en sa double qualité d'assureur des sociétés Diogo J. et Gauthier, aux fins d'indemnisation de leurs préjudices.

Par un jugement en date du 1er juin 2021, le tribunal judiciaire a :

- débouté la société MAAF Assurances et la société G. de leur exception de nullité de l'assignation ;

- déclaré M. et Mme X. irrecevables en leurs demandes fondées sur la responsabilité contractuelle de droit commun de la société Axens ;

- condamné la société MAAF Assurances, en qualité d'assureur de la société Diogo, à payer aux époux X. la somme globale de 25.230,70 euros au titre des travaux de reprise des carrelages et salle de bains (désordre n° 1) ;

- condamné la société MAAF Assurances, en qualité d'assureur de la société Diogo, à payer à M. et Mme X. la somme de 7.423,46 euros au titre des travaux de reprise des seuils et des terrasses (désordres n°2 et 5) ;

- condamné la société MAAF Assurances, en qualité d'assureur de la société Diogo, in solidum avec la société Axens et la MAF, son assureur, à payer à M. et Mme X. la somme de 7.564,33 euros en réparation des désordres d'infiltrations par les menuiseries (désordre n°3) ;

- condamné la société MAAF Assurances à garantir la société Axens et la MAF de cette condamnation à hauteur de 60 % ;

- dit que la MAF accorde sa garantie dans les limites et conditions de son contrat ;

- condamné in solidum la société G. et la MAAF, son assureur, à payer aux époux X. la somme de 3.949,20 euros au titre des travaux de reprise des fissures intérieures (désordre n°4) ;

- dit que les sommes allouées au titre des travaux de reprise seront indexées sur l'indice BT01 entre le 14 octobre 2016 et le jugement ;

- condamné in solidum la société G., la MAAF, en sa double qualité d'assureur de la société Gautier et de la société Diogo, la société Axens et la MAF à payer aux époux X. les sommes de :

- 3.839,40 euros au titre de leurs frais de déménagement et de relogement ;

- 3.543 euros au titre de la perte d'exploitation de M. X. ;

- 10.000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance ;

- 1.000 euros pour leur préjudice moral ;

- condamné la société MAAF Assurances, en qualité d'assureur de la société Diogo, à garantir les sociétés Axens et MAF de ces condamnations à hauteur de 80 % ;

- ordonné l'exécution provisoire ;

- condamné in solidum la MAAF Assurances, en qualité d'assureur des sociétés Diogo et Gauthier, la société G., la société Axens et la MAF à régler les dépens, ainsi qu'à régler à M. et Mme X. la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société MAAF Assurances, en qualité d'assureur de la société Diogo, à garantir la société Axens et la MAF de ces condamnations à hauteur de 80 %.

La société G. Plâtrerie Carrelage et la MAAF Assurances en sa double qualité d'assureur de la société G. et de la société Diogo J. ont interjeté appel de cette décision le 7 juillet 2021.

L'instruction a été clôturée le 4 octobre 2022.

 

PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Dans leurs dernières conclusions en date du 24 février 2022, au visa des articles 1792 et suivants du code civil, les sociétés G. Plâtrerie Carrelage et MAAF Assurances demandent à la cour de :

- réformer le jugement en ce qu'il a condamné la MAAF à indemniser les époux X. au titre des désordres n° 1, 2, 3, 5 et 6 imputables à la société Diogo J. ;

- réformer le jugement en ce qu'il a fait droit aux demandes des époux X. au titre des préjudices immatériels ;

Statuant de nouveau,

- débouter M. et Mme X. de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de la société G. Plâtrerie Carrelage et de la MAAF Assurances ;

Subsidiairement,

- confirmer la condamnation de la société Axens et de son assureur la MAF solidairement avec la MAAF et la société G. Plâtrerie Carrelage au titre des préjudices immatériels ;

- condamner M. et Mme X. à verser à la société MAAF Assurances une somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner les mêmes aux entiers dépens de l'instance.

[*]

Dans leurs dernières conclusions en date du 12 septembre 2022, M. et Mme X. demandent à la cour de :

Sur l'appel principal de la société MAAF et de la société G. Plâtrerie Carrelage,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- condamné la MAAF à garantir son assurée, la société Diogo J., au titre des désordres n° 1, 2, 3, 5 et 6 ;

- condamné la société G. Plâtrerie Carrelage et son assureur la MAAF au titre du désordre n°4 ;

- condamné in solidum la société MAAF, en qualité d'assureur de Diogo J. et de la société G. Plâtrerie Carrelage, la société G. Plâtrerie Carrelage, la société Axens et son assureur la MAF en réparation des préjudices immatériels ;

- débouter la société MAAF, ès qualités, et la société G. Plâtrerie Carrelage de leur appel ;

Sur l'appel incident de la société Axens et de son assureur la MAF,

- confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a :

- condamné la société Axens et son assureur la MAF au titre du désordre n°3 ;

- condamné in solidum la société MAAF, ès qualités, la société G. Plâtrerie Carrelage, la société Axens et la MAF en réparation des préjudices immatériels ;

- débouter la société Axens et la MAF de leur appel ;

Sur l'appel incident de M. et Mme X.,

- les recevoir en leurs demandes et les déclarer bien fondés ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a jugé irrecevables les demandes de condamnation de M. et Mme X. dirigées à l'encontre d'Axens et de la MAF à garantir Axens de ses fautes contractuelles ;

- infirmer le jugement en ce qu'il a estimé que le désordre n° 1 n'était pas de nature décennale ;

- l'infirmer en ce qu'il a estimé que la société Axens n'engageait pas sa responsabilité au titre des désordres n° 1 et 2 ;

- condamner en conséquence in solidum les sociétés Axens, MAF et MAAF à indemniser M. et Mme X. au titre des désordres n° 1 et 2 ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum les sociétés MAAF, Axens et MAF en réparation des désordres d'infiltration par les menuiseries (désordre n°3) ;

- l'infirmer en ce qu'il a retenu le montant de 3.543 euros au titre de la perte d'exploitation subie par M. X. ;

- condamner in solidum les sociétés Axens, MAF et MAAF à payer aux époux X. la somme de 4.220 euros TTC sauf mémoire au titre de la perte d'exploitation de M. X. ;

- l'infirmer en ce qu'il n'a pas tenu compte de l'actualisation demandée par les époux X. du coût des travaux ;

En conséquence,

- condamner in solidum les sociétés G. Plâtrerie Carrelage et son assureur MAAF à payer à M. et Mme X. la somme actualisée de 4 177,49 euros TTC au titre de la réparation du désordre n°4 ;

- condamner in solidum la société Axens, la MAF et la MAAF à payer à M. et Mme X. la somme actualisée de 40.639,31 euros TTC au titre de la réparation des désordres n° 1, 2 et 3 ;

- condamner in solidum la MAAF à payer aux époux X. la somme actualisée de 2.407,81 euros au titre de la réparation du désordre n° 5 ;

- indexer ces sommes sur l'indice BT01 du coût de la construction ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné in solidum la société Axens, la MAF et la MAAF, ainsi que la société G. Plâtrerie Carrelage à payer aux époux X. la somme de 3.938,40 euros TTC sauf mémoire au titre des frais de déménagement et de relogement, la somme de 10.000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance et la somme de 1.000 euros en réparation de leur préjudice moral ;

À titre infiniment subsidiaire,

- au cas où, par impossible, la cour ne retiendrait pas le caractère décennal des désordres n° 1 et 4, confirmer le jugement en ce qu'il a retenu la responsabilité contractuelle de la société DKC et de son assureur la MAAF au titre du désordre n° 1 et de la société G. Plâtrerie Carrelage et de son assureur la MAAF au titre du désordre n°4 ;

- l'infirmer en ce qu'il a écarté la responsabilité de la MAF au titre des désordres n° 1 et 2 ;

- condamner la MAF au titre des désordres n° 1 et 2 ;

- en conséquence, condamner in solidum les sociétés MAF et MAAF à payer aux époux X. la somme actualisée de 40 639,31 euros TTC au titre de la réparation des désordres n° 1, 2 et 3 ;

En tout état de cause,

- débouter la société Axens et son assureur la MAF de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

- débouter la MAAF et la société G. Plâtrerie Carrelage de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

- ordonner l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir ;

- condamner in solidum les sociétés Axens, MAF, MAAF et Gauthier Plâtrerie Carrelage à payer à M. et Mme X. la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

[*]

Dans leurs dernières conclusions en date du 19 juillet 2022, les sociétés Axens et MAF demandent à la cour de :

- infirmer le jugement rendu le 1er juin 2021 par le tribunal judiciaire de Nantes en ce qu'il a retenu la responsabilité de la société Axens et a condamné son assureur la MAF à :

- payer à M. et Mme X. la somme de 7.564,33 euros en réparation des désordres d'infiltrations par les menuiseries (désordre n°3) ;

- la somme de 3 938,40 euros au titre de leurs frais de déménagement et de relogement ;

- la somme de 3.543 euros au titre de la perte d'exploitation de M. X. ;

- la somme de 10.000 euros en réparation du préjudice de jouissance de M. et Mme X. ;

- la somme de 1.000 euros en réparation du préjudice moral de M. et Mme X.

- payer à M. et Mme X. la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

À titre principal,

- débouter la MAAF, la société G. Plâtrerie Carrelage et les époux X. de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

À titre subsidiaire,

- réduire dans leur quantum les sommes sollicitées ;

- condamner la MAAF prise en sa qualité d'assureur de la société Diogo J. et de la société G. Plâtrerie Carrelage à garantir en intégralité la société Axens et la MAF de toutes condamnations susceptibles d'être prononcées à leur encontre ;

- constater que la MAF alloue sa garantie dans les conditions et limites du contrat ;

En tout état de cause,

- condamner les parties succombantes au versement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

1. Sur la recevabilité des demandes de M. et Mme X. à l'égard de la société Axens et de la MAF :

L'article 7.3 du contrat de maîtrise d’œuvre conclu entre M. et Mme X. et la société d'Architectures Terre & Ciel stipule « qu'en cas de différent portant sur le respect du présent contrat, les parties conviennent de saisir pour avis le Conseil régional de l'ordre des architectes dont relève l'architecte, avant toute procédure judiciaire sauf conservatoire. Cette saisie intervient à l'initiative de la partie la plus diligente. »

Il ne fait pas débat que la fin de non-recevoir ne peut pas être soulevée lorsqu'est retenue la responsabilité décennale de l'architecte.

Les maîtres de l'ouvrage font grief au tribunal d'avoir déclaré irrecevables leurs demandes à l'encontre de l'architecte et de son assureur dans le cadre de la responsabilité contractuelle du premier. Ils soutiennent que la clause de saisine préalable de l'ordre des architectes avant tout procès crée un déséquilibre significatif entre les droits des parties puisqu'elle a pour effet d'entraver l'exercice d'une action en justice. Ils estiment que cette clause est abusive, l'architecte ne rapportant pas la preuve contraire.

La société Axens et la MAF contestent le caractère abusif de cette clause. Elles font valoir que la clause de saisine préalable constitue une démarche amiable qui s'inscrit dans le cadre de l'évolution législative en favorisant la conciliation préalable au procès. Elles font observer que la saisine pour avis est une consultation qui ne lie pas les parties et n'entrave pas l'accès aux juridictions. Elles soulignent la réciprocité de la clause.

Aux termes de l'article L 132-1 du code de la consommation dans sa version applicable au litige « dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Des décrets en Conseil d'Etat, pris après avis de la commission instituée à l'article L. 132-2, peuvent déterminer des types de clauses qui doivent être regardées comme abusives au sens du premier alinéa.

Une annexe au présent code comprend une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être regardées comme abusives si elles satisfont aux conditions posées au premier alinéa. En cas de litige concernant un contrat comportant une telle clause, le demandeur n'est pas dispensé d'apporter la preuve du caractère abusif de cette clause.

Ces dispositions sont applicables quels que soient la forme ou le support du contrat. Il en est ainsi notamment des bons de commande, factures, bons de garantie, bordereaux ou bons de livraison, billets ou tickets, contenant des stipulations négociées librement ou non ou des références à des conditions générales préétablies.

Sans préjudice des règles d'interprétation prévues aux articles 1156 à 1161, 1163 et 1164 du code civil, le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat. Il s'apprécie également au regard de celles contenues dans un autre contrat lorsque la conclusion ou l'exécution de ces deux contrats dépendent juridiquement l'une de l'autre.

Les clauses abusives sont réputées non écrites.

L'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.

Le contrat restera applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans lesdites clauses.

Les dispositions du présent article sont d'ordre public.»

En l'espèce, l'article R. 132-2, 10° devenu R. 212-2, 10° qui institue dans les contrats conclus entre des professionnels et des non professionnels ou des consommateurs, une présomption du caractère abusif de la clause n'est entrée en vigueur que le 18 mars 2009 et n'est pas applicable au contrat du 21 mars 2008 contrairement à ce que font plaider les parties.

Il incombe donc aux maîtres de l'ouvrage de rapporter la preuve du caractère abusif de la clause.

Cette clause, qui figure sur des contrats types rédigés par l'ordre des architectes, est connue des professionnels, mais de l'est pas des consommateurs. L'impossibilité de régulariser la saisine de l'ordre des architectes en cours d'instance entrave l'accès à la justice de M. et Mme X. Il s'en déduit l'existence d'un déséquilibre entre les parties.

La clause litigieuse sera donc réputée non écrite.

Par ailleurs, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, l'action directe du maître d'ouvrage contre l'assureur de responsabilité de l'architecte n'est pas soumise au respect de la clause du contrat d'architecte prévoyant la saisine préalable du conseil de l'ordre. La MAF sera en tout état de cause tenue de garantir les maîtres de l'ouvrage si la responsabilité de la société Axens est retenue.

 

2. Sur les désordres :

2.1. Sur les désordres affectant le carrelage (désordre n° 1) :

Il résulte de l'expertise la mise en œuvre d'un carrelage collé sur une chape anhydrite avec un chauffage par le sol.

L'expert a constaté plusieurs désordres distincts affectant le carrelage.

a) Il a constaté la désagrégation des joints entre les carreaux du sol de la cuisine et du séjour.

Il impute ce désordre à la composition des joints qui entraine des cavités.

b) Il a relevé des écarts variables (de 2 à 4 mm) et insuffisants entre les éléments de carrelage au mépris du DTU 52.2 qui prévoit un minimum de 3mm. Il précise que cette non-conformité aux règles de l'art n'est pas à l'origine de la désagrégation des joints.

c) Il a constaté la désagrégation des joints à la jonction entre les parois faïencées avec le sol carrelé. Il en attribue l'origine à un écart insuffisant permettant la tenue du joint en ciment mis en œuvre et préconise un joint souple.

d) Il a constaté dans la chambre parentale quatre carreaux fissurés au droit de la porte de distribution avec la salle de bains avec un léger désaffleurement.

Il indique que ce désordre a pour origine un joint de fractionnement obstrué par un joint en ciment.

e) M. U. indique que l'utilisation d'un joint en ciment blanc en surépaisseur en périphérie de la douche à l'italienne ne modifie pas l'étanchéité globale de cette cabine, mais ne peut assurer une tenue pérenne de ce joint.

Il souligne que les fissurations autour de la porte de la salle de bains présentent un risque de coupure pour les personnes.

Il conclut que les autres types de désordres n'empêchent pas l'utilisation des locaux.

Selon l'expert, l'absence de joint de fractionnement dans la chambre parentale aurait dû être relevée par le maître d’œuvre (page 25 du rapport d'expertise). Il ne retient pas sa responsabilité pour le surplus.

 

2.1.1. Sur la nature des désordres :

M. et Mme X. contestent la qualification des désordres opérée par le tribunal qui n'a pas retenu leur nature décennale. Ils soutiennent que le caractère généralisé de la désagrégation des joints qui aggrave la migration des infiltrations d'eau en partie basse des cloisons de doublage et les écarts entre les éléments de carrelage rend nécessairement l'ouvrage impropre à sa destination. Ils ajoutent que l'expert a relevé un risque de coupure pour les personnes.

La cour constate que les maîtres de l'ouvrage opèrent une confusion entre le critère de gravité décennale et l'étendue des réparations lorsqu'ils assurent, à tort, que la généralisation du dommage justifie l'application de la garantie décennale et invoquent l'arrêt de la cour de cassation du 17 septembre 2020 (n° 19-16.142). Or, pour démontrer la nature décennale du désordre, ils doivent prouver son impropriété à destination ou une atteinte à la solidité de l'ouvrage. Ils procèdent également à un amalgame entre les différents types de désordres qui doivent être examinés séparément.

a) Contrairement à ce que soutiennent M. et Mme X., l'expert n'a constaté aucune infiltration ou humidité dans la cuisine et le séjour, pièces dans lesquelles les joints entre les carreaux se désagrègent. Ce désordre relève de la responsabilité contractuelle.

b) S'agissant du non-respect au DTU en raison des faibles écarts entre les carreaux, il s'agit d'une non-conformité aux règles de l'art sans dommage, M. U. précisant qu'elle n'est pas à l'origine de la dégradation des joints. En l'absence de dommage, l'allégation d'un désordre ne peut être retenue.

c) Il n'est pas davantage évoqué par l'expert un risque d'infiltration en raison de la désagrégation des joints entre le sol et la paroi faïencée. Il s'agit d'un désordre intermédiaire.

e) S'agissant de la douche à l'italienne, l'expert ne précise pas l'inéluctabilité du désordre et il n'est démontré aucune infiltration alors que le délai d'épreuve de dix ans est échu depuis le 20 février 2019.

Par ailleurs, si l'expert a évoqué le 18 mars 2015 un nouveau désordre d'humidité dans la cloison séparative entre la salle de bain et la chambre n° 1, celui-ci n'a pas réalisé d'investigation puisqu'il n'en était pas saisi. Sept années après ces constatations, M. et Mme X. ne produisent aucun élément sur l'éventuelle persistance du dommage et son origine, ainsi que l'ont relevé les premiers juges. Il s'ensuit qu'aucun désordre d'humidité ou d'infiltration imputable aux constructeurs n'est démontré.

d) En revanche, il est incontestable que les fissures sur les quatre carreaux situés dans la chambre parentale, qui entrainent un danger pour les personnes, constituent un désordre de nature décennale, contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges.

 

2.1.2. Sur les responsabilités :

2.1.2.1. La société Diogo J.

Elle a posé les carreaux fissurés dans la chambre parentale (d). Sa responsabilité fondée sur l'article 1792 du code civil pour ce désordre est engagée.

Les fautes du carreleur dans la composition des joints (a), l'insuffisance d'écart entre les murs faïencés et les sols carrelés (c) la pose d'un joint ciment en périphérie de la douche (e) dans les autres pièces sont démontrées. Sa responsabilité contractuelle est engagée pour ces désordres.

 

2.1.2.2. La société Axens

L'architecte investi d'une mission de maîtrise d’œuvre complète est tenu envers le maître de l'ouvrage d'une présomption de responsabilité dont il ne peut s'exonérer que par la preuve d'une cause étrangère (Civ., 4 février 2016, n° 13-23.654). Le moyen pris du défaut d'imputabilité du désordre à sa mission ne peut donc prospérer.

La responsabilité de plein droit de la société Axens est donc engagée au titre des carreaux fissurés et la garantie de la MAF est mobilisable. Le jugement est infirmé.

S'agissant des désordres intermédiaires, M. et Mme X. soutiennent que l'architecte n'a pas rempli sa mission de surveillance des travaux.

La société Axens ne pouvait connaître la composition des joints et déceler l'écart insuffisant entre les murs et le sol lors de ses visites de chantiers. Sa responsabilité contractuelle ne sera pas retenue.

 

2.1.2.3. Sur la garantie de la MAAF

2.1.2.3.1. La garantie de la MAAF pour le désordre relatif aux fissures des carreaux de la chambre parentale de nature décennale est mobilisable.

2.1.2.3.2. S'agissant des autres désordres, la MAAF soutient, d'une part, qu'ils relèvent d'une garantie facultative que n'a pas souscrite la société Diogo J. et, d'autre part, que la garantie responsabilité civile de la police Multirisques concerne les travaux de l'assuré lorsqu'ils ont causé un dommage aux tiers.

M. et Mme X. répliquent que la clause 5-13 du contrat, trop générale et sujette à interprétation, n'est pas formelle et limitée, en sorte qu'elle ne leur est pas opposable.

Il s'infère des conventions particulières et des conventions générales de l'assurance multirisques Multipro que la MAAF assure (page 2) les bâtiments de l'assuré et leur contenu, sa protection financière, le vol et le vandalisme, le bris de glace et des enseignes, sa responsabilité civile professionnelle défense recours.

Il résulte de l'ensemble des pièces susvisées que la société MAAF garantit la responsabilité décennale de son assurée, la société Diogo J., et les conséquences pécuniaires des dommages corporels ou matériels garantis, subis par un tiers pendant l'exercice de ses activités, le dommage matériel étant défini comme (page 4 ) « toute détérioration, destruction ou disparition d'une chose ou d'une substance, toute atteinte physique à des animaux. »

Il suit de là que la MAAF ne garantit pas la responsabilité contractuelle de droit commun de son assurée contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges. Le moyen pris de l'absence d'opposabilité de l'article 5.13 est en conséquence sans objet.

 

2.1.2.4. Sur l'indemnisation :

Le tribunal a alloué à M. et Mme X. la somme de 25.230,70 euros au titre des désordres du carrelage, en ce compris la dépose et repose des éléments de cuisine et de la pompe à chaleur.

En l'absence, d'une part, de garantie de la MAAF des travaux de la société Diogo J. et, d'autre part, de la responsabilité de l'architecte pour les désordres intermédiaires, seuls seront indemnisés les travaux de reprises au titre des carreaux fissurés de la chambre parentale. La surface de cette dernière est de 30m². Il convient de reprendre le carrelage de la chambre.

Les devis produits en 2020 par les époux X. pour actualiser les travaux de reprises reprennent en tout point les postes vérifiés par l'expert. Il convient en conséquence de les prendre en compte.

Au regard du travaux devisés le 15 septembre 2020 par la société Ganacheau, le coût des travaux de reprise du carrelage de la chambre parentale est fixé à 1.000 euros.

La société Axens, la MAF et la MAAF seront condamnées in solidum au paiement de cette somme aux maîtres de l'ouvrage.

Le jugement est infirmé.

 

2.1.2.5. Sur les recours en garantie :

Il résulte de l'expertise que le joint en ciment obturant le joint de fractionnement était décelable par l'architecte. Sa part de responsabilité sera fixée à 20%, les manquements dans l'exécution des travaux de carrelage par la société Diogo J. étant prédominants (80%).

La MAAF, en qualité d'assureur de la société Diogo J., sera condamnée à garantir la société Axens et la MAF, qui en font la demande, dans ces proportions.

 

2.2. Sur les désordres de maçonnerie :

2.2.1. Sur la garantie de l'activité maçonnerie de la société Diogo [D] par la MAAF :

La MAAF conteste garantir l'activité maçonnerie exercée par la société Diogo J. pour le chantier de la maison des époux X. Elle fait valoir que la date de déclaration d'ouverture du chantier le 15 juillet 2008, qui correspond au démarrage effectif du chantier par la société Diogo J. qui devait procéder à l'excavation et couler la dalle, est antérieure à la souscription de la garantie pour l'activité maçonnerie.

Elle produit les conditions particulières de la police d'assurance souscrite le 21 juillet 2008 par la société Diogo J. et les conventions spéciales 5B et multirisques dont l'assuré a mentionné avoir eu connaissance.

L'article L. 241-1 du code des assurances dans sa rédaction applicable au litige dispose que : « Toute personne physique ou morale, dont la responsabilité décennale peut être engagée sur le fondement de la présomption établie par les articles 1792 et suivants du code civil, doit être couverte par une assurance.

À l'ouverture de tout chantier, elle doit être en mesure de justifier qu'elle a souscrit un contrat d'assurance la couvrant pour cette responsabilité.

Tout contrat d'assurance souscrit en vertu du présent article est, nonobstant toute stipulation contraire, réputé comporter une clause assurant le maintien de la garantie pour la durée de la responsabilité décennale pesant sur la personne assujettie à l'obligation d'assurance. »

Selon l'article A 243-1 Annexe 1 du même code, applicable au litige, le contrat couvre, pour la durée de la responsabilité pesant sur l'assuré en vertu des articles 1792 et 2270 du code civil, les travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier, pendant la période de validité fixée aux conditions particulières.

L'article 9-2 des conditions générales de la police d'assurance relatif à la durée et au maintien de la garantie décennale dans le temps stipule que l'assureur garantit pour les désordres de nature décennale les travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier pendant la validité des présentes conventions, l'ouverture de chantier étant définie en page 4 de la police comme la déclaration règlementaire faite auprès de l'administration au commencement des travaux.

Ainsi que le rappellent M. et Mme X., il est constant qu'il résulte des articles L. 241-1 et A. 243-1 précités, et des clauses types applicables au contrat d'assurance de responsabilité pour les travaux de bâtiment figurant à l'annexe 1 de ce second article, que l'assurance de responsabilité couvre les travaux ayant fait l'objet d'une ouverture de chantier pendant la période de validité du contrat d'assurance, et que cette notion s'entend comme le commencement effectif des travaux confiés à l'assuré, ce qui nécessite de rechercher la date à laquelle ont commencé les travaux de l'assuré. Il ne peut donc être dérogé à ces dispositions d'ordre public par des dispositions contractuelles de sorte que la clause énoncée à l'article 9 du contrat d'assurance de la MAAF n'est pas applicable.

Toutefois, l'ordre de service des lots VRD et maçonnerie réalisés par l'assuré sont datés du 4 juillet 2008 et mentionnent la date de démarrage des travaux le 15 juillet 2008.

L'avenant n° 1 au lot maçonnerie concerne l'ajout d'options pour un montant de 4.083,84 euros TTC, que le maître de l'ouvrage ne détaille pas, sur un marché de 82.289,45 euros TTC. Il n'est pas de nature à justifier du report du commencement des travaux.

Il s'ensuit que la société Diogo J. n'était pas assurée pour l'activité maçonnerie pour le chantier de la construction de la maison des époux X., contrairement à ce qu'a jugé le tribunal.

Dès lors, M. et Mme X. sont mal fondés à rechercher la garantie de la MAAF, en qualité d'assureur de la société Diogo J. pour les désordres n°2,3,5 et 6.

 

2.2.2. Les désordres :

2.2.2.1. Sur la désagrégation des seuils de la porte du garage et du bureau (désordre n°2)

L'expert a constaté que ces seuils se désagrègent. La nature décennale du désordre eu égard au déplacement en fauteuil roulant de M. X. n'est pas contestée.

Il a été vu que la responsabilité de plein droit de l'architecte, qui n'invoque pas de cause étrangère, est engagée et la garantie de son assureur décennal est due.

2.2.2.2. Sur les infiltrations au niveau des menuiseries (désordre n°3)

L'expert a constaté des taches brunes et une humidité importante de part et d'autre des portes-fenêtres des deux chambres et du bureau au niveau de la baie coulissante orientée au sud, à l'ouest et dans la cuisine sur la façade ouest.

Selon l'expert les menuiseries ont été posées sur un surbot en béton avec un rajout de mortier par la suite pour réaliser le seuil. Il attribue les infiltrations à une absence de traitement d'étanchéité à la liaison entre le surbot et l'enduit.

M. U. estime que l'ajout d'un seuil maçonné après la pose de l'enduit aurait dû être signalé par le maître d’œuvre. Il estime qu'il aurait dû être mis en œuvre un dispositif constructif différent ou un traitement d'étanchéité avant la réalisation de ce seuil.

La nature décennale du désordre ne fait pas débat, l'humidité portant atteinte au clos et couvert. L'impropriété à destination de l'ouvrage retenu par le tribunal est démontrée.

La société Axens et la MAF réitèrent leur moyen pris de l'absence d'imputabilité du désordre à l'architecte.

En l'absence de preuve d'une cause étrangère, la responsabilité décennale de l'architecte investi d'une mission complète est engagée.

2.2.2.3. Sur la chape des deux terrasses et sur les fissurations extérieures (désordre n°5 et 6)

Le tribunal a condamné la MAAF en qualité d'assureur décennal de la société Diogo J. pour les désordres liés à la désolidarisation de la chape par rapport à la dalle de la terrasse à l'entrée de la maison et d'une fissuration liée à l'absence d'un joint de fractionnement pour la terrasse située côté jardin et au titre des désordres intermédiaires s'agissant des fissurations sur les murs extérieurs.

Ces désordres étant liés à l'activité maçonnerie non garantie par la MAAF pour ce chantier, le jugement sera infirmé de ce chef.

 

2.2.3. Sur l'indemnisation des désordres de maçonnerie :

L'expert a évalué les désordres de maçonnerie à 14 987,79 euros TTC. M et Mme X. demandent la réévaluation de ce montant suivant devis du 14 décembre 2020 à 15 725,78 euros TTC.

Au titre des désordres 2 et 3 et au regard du devis précité, les sociétés Axens et MAF seront condamnées au paiement de la somme de 8 338 euros TTC à M. et Mme X..

 

2.3. Sur les microfissures des cloisons et du plafond (désordre n°4) :

Un sas a été réalisé pour passer du séjour à la chambre parentale. L'expert a constaté dans le doublage du sas des fissures et une lézarde de 5mm de largeur. Selon M. U., ce désordre du doublage a pour origine le bridage au point de jonction entre la partie courante et l'imposte du sas auquel il peut être remédier par un joint creux sur toute sa périphérie.

M. U. a constaté sur un coffre du soffite entre la cuisine et le séjour constitué de plaques en placoplâtre posées sur des rails une fissure verticale ainsi que des fissures sur le faux plafond de la cuisine et du salon constitué de briques plâtrières posées avec des crochets.

Selon l'expert, les fissures au-dessus des baies trouvent leur origine dans une légère flexion du panneau en brique. Les fissures du soffite sont liées à une ossature en rails qui présente une inertie insuffisante compte tenu de sa longueur et M. U. attribue l'apparition de fissurations en faux plafonds à des défauts généralisés de pose des crochets.

2.3.1. Les responsabilités :

Le tribunal a retenu la responsabilité contractuelle de la société G. Plâtrerie Carrelage.

M. et Mme X. soutiennent que le désordre est de nature décennale en raison du défaut de pose généralisé des crochets et des fissures affectant le sas et le soffite qui ne permettent plus de contrôler les venues d'air dans le séjour.

Il a déjà été vu que le désordre est de nature décennale s'il rend impropre l'ouvrage à sa destination ou s'il porte atteinte à sa solidité peut important qu'il soit généralisé ou pas. L'expert considère que les fissures ne sont pas structurelles et ne concernent que les doublages et faux plafonds. Il ne mentionne aucun courant d'air ou perte thermique dans ses constatations. L'impropriété à destination de l'ouvrage n'est pas démontrée.

C'est à tort que la société G. et la MAAF soutiennent qu'aucune faute du plâtrier en lien avec les dommages n'est prouvée.

Les premiers juges ont exactement retenu la mauvaise exécution des travaux. Alors que les surfaces du sas et la chambre étaient différentes, il n'a pas été réalisé de joint entre elles. Le panneau en brique au-dessus des baies présente une flexion, l'ossature en rails du soffite n'est pas proportionnée par rapport à sa longueur. Enfin, la mise en place des crochets est mal exécutée, l'expert ayant constaté des poses antagonistes avec des crochets tordus qui ne sont pas dans le plan vertical des entraits.

 

2.3.2. Sur la garantie de la MAAF :

La MAAF soutient qu'elle ne garantit pas la responsabilité contractuelle de la société G. Plâtrerie Carrelage.

M. et Mme X. répliquent qu'elle doit sa garantie au titre de l'assurance responsabilité civile professionnelle.

Il incombe au tiers de démontrer par tout moyen la garantie de l'assureur.

Aucun contrat d'assurance ou attestation d'assurance n'est produit. Les maîtres de l'ouvrage ne produisent aucun élément de nature à prouver la garantie par la MAAF en qualité d'assureur de la société G. Plâtrerie Carrelage au titre de la responsabilité contractuelle.

Ils seront déboutés de leur demande de condamnation à son encontre par voie d'infirmation.

 

2.3.4. Sur l'indemnisation :

Le tribunal a alloué la somme de 3.949,20 euros aux maîtres de l'ouvrage. M. et Mme X. réclament la somme de 4 177,49 euros TTC au regard de la réévaluation du devis du 30 juin 2020.

Il sera fait droit à cette demande et la société G. Plâtrerie Carrelage sera condamnée au paiement de cette somme par voie d'infirmation.

 

3. Sur les autres préjudices :

3.1. Sur les frais de déménagement, de garde-meuble et de relogement :

La société G. Plâtrerie Carrelage et la MAAF contestent toute condamnation à leur égard soutenant que l'impossibilité d'occuper le logement pendant les travaux est due à la réfection du carrelage. La société Axens et la MAF s'associent à cette critique et soulignent que l'architecte n'est pas responsable des défauts du carrelage.

Ainsi que l'exposent les époux X., l'impératif du déménagement est commandé par la reprise du carrelage, mais également par celle du faux plafond, des travaux de peinture et des seuils extérieurs.

Le tribunal a, à juste titre, condamné in solidum la MAAF, la société G. Plâtrerie Carrelage, la société Axens et la MAF au paiement de la somme de 3 938,40 euros, montant rectifié par jugement du 6 juillet 2021, à M. et Mme X. Le jugement sera toutefois infirmé dans la limite de la qualité d'assureur de la MAAF de la seule société Diogo J.

 

3.2. Sur la perte d'exploitation :

Le tribunal a alloué la somme de 3.543 euros à M. X. durant les travaux de reprise estimés à un mois par l'expert.

La société Axens et la MAF font valoir qu'il ne démontre pas son préjudice en ne produisant qu'une attestation fiscale indiquant une légère baisse de ses revenus en 2019 sans justifier de lien avec les désordres dénoncés.

La MAAF et la société G. Plâtrerie Carrelage arguent de l'absence de justification de l'impossibilité pour M. X. d'exercer son activité pendant le temps de son relogement.

M. X. expose qu'étant écrivain public, il ne peut exercer son activité libérale à l'extérieur de son domicile où il possède des archives volumineuses. Il réclame à titre incident la somme de 4.420 euros arguant qu'il s'agit de son revenu médian, l'année 2019 sur laquelle se sont basés les premiers juges étant anormalement basse en raison de problèmes de santé.

M. X. produit ses attestations fiscales 2018 et 2019. La moyenne mensuelle de son revenu sur ces deux années est de 3.881 euros.

Les sociétés G. Plâtrerie Carrelage, la MAAF en sa qualité d'assureur de la société Diogo J. et les sociétés Axens MAF, seront condamnées in solidum à payer à M. et Mme X. cette somme par voie d'infirmation.

 

3.3. Sur le préjudice de jouissance :

La MAAF, la société G. Plâtrerie Carrelage, la société Axens et la MAF estiment que ce préjudice chiffré par le tribunal à 10.000 euros n'est pas étayé, que les désordres n'empêchent pas l'habitabilité de la maison.

M. et Mme X. font valoir que M. se déplace en fauteuil roulant, qu'il est gêné dans ses déplacements par les dommages et qu'ils doivent subir l'humidité dans leur maison.

Si le préjudice des maîtres de l'ouvrage est démontré, notamment au regard du handicap de M. X., le montant alloué est excessif au regard des désordres retenus par le présent arrêt et sera réduit à 5.000 euros.

Les sociétés G. Plâtrerie Carrelage, la MAAF en sa qualité d'assureur de la société Diogo J. et les sociétés Axens MAF, seront condamnées in solidum à payer à M. et Mme X. cette somme. Le jugement est infirmé de ce chef.

 

3.4. Sur le préjudice moral :

M. et Mme X. exposent avoir été contraints de multiplier les démarches depuis 12 ans afin d'obtenir la reprise des désordres qui affectent leur maison.

Les soucis et tracas de la procédure qui a duré plus de dix années sont démontrés et justifient l'allocation aux maîtres de l'ouvrage de la somme de 1.000 euros prononcée par le tribunal.

Les sociétés G. Plâtrerie Carrelage, la MAAF en sa qualité d'assureur de la société Diogo J. et les sociétés Axens MAF, seront condamnées in solidum à payer à M. et Mme X. cette somme par voie d'infirmation dans la limite de la qualité de MAAF, assureur de la société Diogo J.

 

3.5. Sur les condamnations au titre des préjudices immatériels et le recours en garantie des sociétés Axens et MAF :

La dette finale au titre des préjudices immatériels, des frais irrépétibles et des dépens sera fixée au prorata des condamnations comme suit :

- la société G. Plâtrerie Carrelage : 32 %

- la MAAF : 6 %

- La société Axens et la MAF : 62 %

Les sociétés G. Plâtrerie Carrelage et la MAAF seront condamnées à garantir les sociétés Axens et MAF dans ces proportions.

Le jugement est infirmé.

 

4. Sur les autres demandes :

Les dispositions prononcées par le tribunal au titre des frais irrépétibles et des dépens sont confirmées.

La MAAF Assurances, en sa qualité d'assureur de la société Diogo J., la société G., la société Axens et la MAF seront condamnées in solidum à payer une indemnité à M. et Mme X. de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel et aux dépens de première instance, en ce compris les frais de référés et aux dépens d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

INFIRME le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour sauf en ce qu'elle a dit que la MAF accorde sa garantie dans les limites et conditions de son contrat,

Statuant à nouveau

DECLARE M. et Mme X. recevables en leurs demandes fondées sur la responsabilité contractuelle de droit commun de la société Axens,

CONDAMNE in solidum la société MAAF Assurances, en qualité d'assureur de la société Diogo J., la société Axens et la MAF, à payer aux époux X. la somme de 1.000 euros au titre des travaux de reprise des carreaux fissurés de la chambre parentale (désordre N°1), somme actualisée en fonction de l'indice BT01 entre le 15 septembre 2020 et l'indice le plus proche de la date du présent arrêt,

FIXE le partage de responsabilité comme suit :

-Diogo J. : 80 %

- la société Axens : 20 %

CONDAMNE la MAAF, en qualité d'assureur de la société Diogo J., à garantir la société Axens et la MAF dans ces proportions,

DEBOUTE M. et Mme X. du surplus de leurs demandes au titre des désordres affectant le carrelage,

CONDAMNE la société Axens et la MAF à payer à M. et Mme X. la somme de 8338 euros TTC au titre des travaux de reprise du lot maçonnerie (désordres n° 2 et 3), somme actualisée en fonction de l'indice BT01 entre le 14 décembre 2020 et l'indice le plus proche de la date du présent arrêt,

CONDAMNE la société G. à payer à M. et Mme X. la somme de 4.177,49 euros TTC au titre des travaux de reprise des fissures intérieures (désordre n°4), somme actualisée en fonction de l'indice BT01 entre le 30 juin 2020 et l'indice le plus proche de la date du présent arrêt,

CONDAMNE in solidum la société G., la MAAF, en sa qualité d'assureur de la société Diogo J., la société Axens et la MAF à payer aux époux X. les sommes de :

- 3.938,40 euros au titre de leurs frais de déménagement et de relogement ;

- 3.881 euros au titre de la perte d'exploitation de M. X. ;

- 5.000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance ;

- 1.000 euros pour leur préjudice moral ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,

CONDAMNE in solidum la MAAF Assurances, en sa qualité d'assureur de la société Diogo J., la société G., la société Axens et la MAF à payer à M. et Mme X. la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance et d'appel,

CONDAMNE in solidum la MAAF Assurances, en sa en sa qualité d'assureur de la société Diogo J., la société G. Plâtrerie Carrelage, la société Axens et la MAF aux dépens de première instance, en ce compris les frais de référés et d'expertise judiciaire et d'appel qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile,

FIXE comme suit la dette finale au titre des préjudices immatériels, des frais irrépétibles et des dépens comme suit :

- la société G. Plâtrerie Carrelage : 32 %

- la MAAF : 6 %

- La société Axens et la MAF : 62 %

CONDAMNE la MAAF Assurances, en sa en sa qualité d'assureur de la société Diogo J. et la société G. Plâtrerie Carrelage à garantir la société Axens et la MAF dans ces proportions.

Le Greffier,                                       P/ Le Président empêché,

B. DELAPIERREGROSSE