TI BORDEAUX, 9 novembre 2004
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1004
TI BORDEAUX, 9 novembre 2004 : RG n° 11-03-003939
(sur appel : CA BORDEAUX (1re ch. sect. A), 30 mars 2006 : RG n° 05/00122)
Extraits : 1/ « La Cour de Justice des Communautés Européennes a, dans un arrêt rendu le 21 novembre 2002, indiqué que la directive n° 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 s'oppose à une réglementation interne qui, dans une action intentée par un professionnel à l'encontre d'un consommateur et fondée sur un contrat conclu entre eux, interdit au juge national à l'expiration d'un délai de forclusion, de relever d'office ou à la suite d'une exception soulevée par le consommateur, le caractère abusif d'une clause insérée dans ledit contrat. Le juge peut donc relever d'office les moyens tirés du non-respect des dispositions d'ordre public du code de la consommation. »
2/ « Pour les découverts en compte et les crédits utilisables par fractions, l'ouverture de crédit est consentie pour une durée limitée à un an, renouvelable à condition que le prêteur indique à l'emprunteur, trois mois avant l'échéance, les conditions de renouvellement du crédit, en application de l'article L. 311-9 du code de la consommation. Le créancier ne justifie pas de l'offre de renouvellement annuel du contrat postérieurement au 12 février 2000, autrement que par un renouvellement intervenu le 12 janvier 2002. Il ne rapporte donc pas la preuve qui lui incombe de ce qu'il a informé en l'espèce l'emprunteur par écrit, de manière complète et explicite, des conditions de reconduction de son contrat lui permettant de revendiquer le caractère contractuel du taux d'intérêt. En conséquence il y a lieu de rejeter la demande de l'organisme de crédit au titre des intérêts contractuels à compter du 12 février 2001, en application des dispositions conjuguées des articles L. 311-9, L. 311-33 du code de la consommation, 1315 et 1907 du code civil. »
TRIBUNAL D’INSTANCE DE BORDEAUX
JUGEMENT DU 9 NOVEMBRE 2004
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-03-003939.
COMPOSITION DU TRIBUNAL : PRÉSIDENT : Pauline de ROCQUIGNY.
GREFFIER : Isabelle TAILLADE faisant fonction de Greffier.
Après débats à l'audience du 5 octobre 2004, le jugement suivant a été rendu :
DEMANDEUR(S) :
SA MEDIATIS
agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité [adresse], représentée par Maître TONNET Georges, avocat du barreau de BORDEAUX
DÉFENDEUR(S) :
Monsieur X.
[adresse], comparant en personne
Madame X.
[adresse], non comparant
QUALIFICATION DU JUGEMENT : Le montant de la demande est supérieur à 3.800 euros ; la décision rendue sera en premier ressort.
Le défendeur ne comparait pas ; il n'a pas été cité à personne ; la décision est en premier ressort, elle sera donc réputée contradictoire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
Par actes d'huissier en date du 18 septembre et 24 septembre 2003, la société la SA MEDIATIS a assigné M. X. et Mme Y. épouse X. devant le Tribunal d'Instance de BORDEAUX en condamnation solidaire au paiement des sommes suivantes :
- 15.906.47 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 16,24 % sur la somme de 13.613,73 euros à compter du 13 août 2003 au titre du solde d'un crédit impayé ;
- 500 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, outre les dépens.
La SA MEDIATIS sollicite en outre l'exécution provisoire de la décision à intervenir.
Par jugement avant dire droit en date du 28 septembre 2004, le Tribunal a ordonné la réouverture des débats afin de permettre aux parties de présenter leurs observations sur le défaut de qualité de la SA MEDIATIS ;
La SA MEDIATIS expose que, selon offre préalable acceptée le 06 mai 1997, elle a consenti à M. X. et Mme Y. épouse X. un crédit utilisable par fractions d'un montant maximum de 21.342,86 euros, remboursable au taux effectif global de 15,48 % au moment de la conclusion du contrat, et que les emprunteurs ont cessé de faire face à leurs engagements.
Elle indique avoir annuellement renouvelé le contrat.
Elle fait valoir que la SA COFINOGA a fait apport de sa branche d'activité de crédit à la consommation par marketing direct à la SA MEDIATIS ;
Elle indique s'en remettre sur la demande de délais de paiement.
M. X. expose qu'il ne conteste pas sa dette mais que, compte tenu de sa situation familiale et ses difficultés financières, il propose de s'en acquitter par versements mensuels de 400 euros.
Mme Y. épouse X., bien que régulièrement assignée à mairie, n'a pas comparu.
Le présent jugement, susceptible d'appel, sera réputé contradictoire.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 3] MOTIVATION :
En application de l'article 472 du nouveau code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond mais le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière, recevable et bien fondée. Il convient de rappeler que l'absence du défendeur ne peut faire présumer qu'il n'a aucun moyen sérieux à opposer à son adversaire et qu'il appartient au juge d'analyser les pièces produites par le demandeur pour fonder sa décision (Cass. civ. 2ème, 10 octobre 1990, Bull. civ., II, n° 190).
Sur la demande au titre du crédit :
La SA MEDIATIS communique aux débats :
- offre préalable de crédit en date du 06 mai 1997 ;
- historique du compte ;
- décompte de la créance ;
- mise en demeure du 15 janvier 2003 ;
- le justificatif de l'apport de la branche d'activité de crédit à la consommation par marketing direct de la SA COFINOGA à la SA MEDIATIS.
Aux termes de l'offre de crédit et de l'article L. 311-30 du code de la consommation, en cas de défaillance de l'emprunteur dans les remboursements, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. En outre le prêteur peut demander une indemnité égale au plus à 8 % du capital restant dû.
La Cour de Justice des Communautés Européennes a, dans un arrêt rendu le 21 novembre 2002, indiqué que la directive n° 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 s'oppose à une réglementation interne qui, dans une action intentée par un professionnel à l'encontre d'un consommateur et fondée sur un contrat conclu entre eux, interdit au juge national à l'expiration d'un délai de forclusion, de relever d'office ou à la suite d'une exception soulevée par le consommateur, le caractère abusif d'une clause insérée dans ledit contrat. Le juge peut donc relever d'office les moyens tirés du non-respect des dispositions d'ordre public du code de la consommation.
[minute page 4]
Sur la déchéance du droit aux intérêts pour non renouvellement de l'offre :
Pour les découverts en compte et les crédits utilisables par fractions, l'ouverture de crédit est consentie pour une durée limitée à un an, renouvelable à condition que le prêteur indique à l'emprunteur, trois mois avant l'échéance, les conditions de renouvellement du crédit, en application de l'article L. 311-9 du code de la consommation.
Le créancier ne justifie pas de l'offre de renouvellement annuel du contrat postérieurement au 12 février 2000, autrement que par un renouvellement intervenu le 12 janvier 2002.
Il ne rapporte donc pas la preuve qui lui incombe de ce qu'il a informé en l'espèce l'emprunteur par écrit, de manière complète et explicite, des conditions de reconduction de son contrat lui permettant de revendiquer le caractère contractuel du taux d'intérêt.
En conséquence il y a lieu de rejeter la demande de l'organisme de crédit au titre des intérêts contractuels à compter du 12 février 2001, en application des dispositions conjuguées des articles L. 311-9, L. 311-33 du code de la consommation, 1315 et 1907 du code civil.
Sur la réduction de l'indemnité de 8 % :
Aux termes des dispositions des articles L. 311-30 du code de la consommation, 1152 et 1231 du code civil, l'indemnité sollicitée s'analyse en une clause pénale qui peut être réduite d'office par le juge.
En l'espèce, le montant réclamé apparaît excessif eu égard à l'avantage qu'a procuré au créancier l'exécution du contrat pendant plusieurs années avec un taux d'intérêt élevé.
Dans ces conditions, il y a donc il y a, donc lieu de réduire à néant le montant de la clause pénale.
Le calcul de la créance est donc le suivant :
- mensualités impayées : 2.352,57 euros
- capital restant dû : 11.911,13 euros
- à déduire les acomptes : 3.210,83 euros
- à déduire les intérêts indûment perçus : 5.059,20 euros
Total : 5.993,67 euros
Il convient donc de condamner solidairement M. X. et Mme Y. épouse X. à payer à la SA MEDIATIS la somme de 5.993,67 euros, qui portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 janvier 2003.
[minute page 5] Compte tenu des propositions de règlement de M. X. et de sa situation familiale et financière, il convient de l'autoriser, conformément à l'article 1244-1 du Code Civil, à se libérer de sa dette par mensualités ainsi qu'il sera prévu au dispositif, étant précisé qu'en cas de non paiement d'une seule échéance à son terme, l'intégralité de la dette redeviendra exigible.
Sur l'indemnité procédurale, l'exécution provisoire et les dépens :
Il ne paraît pas inéquitable de laisser à la charge de la SA MEDIATIS les frais irrépétibles non compris dans les dépens. Il convient de la débouter de sa demande au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.
L'exécution provisoire est compatible avec la nature de l'affaire et est nécessaire compte tenu des propositions de règlement du débiteur. Il convient de l'ordonner.
Il convient de condamner in solidum M. X. et Mme Y. épouse X., partie succombant, aux dépens.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le Tribunal statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort,
Condamne solidairement M. X. et Mme Y. épouse X. à payer à la SA MEDIATIS la somme de CINQ MILLE NEUF CENT QUATRE VINGT TREIZE EUROS ET SOIXANTE SEPT CENTIMES D'EUROS (5.993,67 euros) au titre du solde de l'ouverture de crédit, outre les intérêts au taux légal à compter du 15 janvier 2003 ;
Dit que M. X. pourra s'acquitter de sa dette par 15 versements mensuels de QUATRE CENTS EUROS (400 euros), versés le 10 de chaque mois et pour la première fois le 10 du mois suivant la signification de la présente décision, le solde étant versé le 16ème mois ;
Dit qu'en cas de non paiement d'une seule mensualité à son échéance, l'intégralité de la dette redeviendra exigible ;
Déboute la SA MEDIATIS de sa demande d'indemnité pour frais irrépétibles ;
Ordonne l'exécution provisoire de la présente décision ;
[minute page 6] Condamne in solidum M. X. et Mme Y. épouse X. aux dépens.
Ainsi jugé et prononcé les jour, mois et an susdits.
Le Greffier Le Président
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