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CA POITIERS (2e ch.), 20 juin 2023

Nature : Décision
Titre : CA POITIERS (2e ch.), 20 juin 2023
Pays : France
Juridiction : Poitiers (CA), 2e ch. civ.
Demande : 22/00757
Décision : 23/282
Date : 20/06/2023
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 21/03/2022
Numéro de la décision : 282
Référence bibliographique : 6172 (L. 442-1, exclusion des baux commerciaux), 6209 (baux commerciaux), 8530 (1171 C. civ., procédure)
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CERCLAB - DOCUMENT N° 10331

CA POITIERS (2e ch.), 20 juin 2023 : RG n° 22/00757 ; arrêt n° 282

Publication : Judilibre

 

Extrait : « 21. La nullité d'un contrat, sanction de son absence de validité au moment de sa formation, doit s'apprécier au jour de sa signature.

22. La SAS M.-K. et M. X. font valoir que la notion de déséquilibre significatif n'est pas applicable en matière de baux commerciaux ainsi que l'ont jugé la Cour d'appel de Montpellier le 23 novembre 2021 (n° 18/05844) et celle de Paris le 22 novembre 2022 (n° 20/02499) à la suite d'une décision de la Cour de cassation du 15 février 2018 (17/11.329). Ainsi, selon eux, le texte de l'article 1171 ne peut servir de fondement à la demande de la SCI STUDEL.

23. En réplique, l'intimée invoque un loyer mensuel fixé à seulement 10 % du marché dès lors que le loyer a été fixé par le contrat du 31 août 2018 à 120 € Hors Charges pour 46 m² (2,60 €/m²) alors que les annonces de locaux similaires sont plutôt de 25,60 €/m², charges inclues, soit 1.180€ par mois. La SCI STUDEL rappelle, à la suite du premier juge qu'elle exploitait avant la signature de ce contrat une activité de laverie et que si son chiffre d'affaires demeure inconnu en l'état de la non comptabilisation par M. X., alors gérant, en violation de ses obligations comptables, il relevait toutefois d'une saine gestion pour celui-ci, lorsqu'il était gérant d'affecter ce local à la bonne utilisation et moyennant le bon rapport recettes/coût. 24. Ainsi, selon cette société civile immobilière, ce local aurait pu être utilisé pour développer en interne l'ancienne laverie si elle était jugée insuffisante, ceci, afin que la SCI STUDEL en retire les recettes, plutôt que de confier l'usage de ce local à un tiers en conflit d'intérêt sans contrepartie proportionnée, ou a minima le louer au juste prix.

25. La cour indique dans un premier temps que c'est à tort que l'appelant et M. X. se réfère à l'article 1171 du Code civil dès lors que ni le premier juge, ni l'intimée ne se fondent sur ce texte pour solliciter la nullité du bail et une indemnisation en découlant

26. La cour observe dans un second temps que la SCI STUDEL n'apporte pas la démonstration, qui lui incombe pourtant, d'un avantage disproportionné donné au locataire qui serait contraire à l'intérêt social à la date du 31 août 2018, date de conclusion du contrat. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE POITIERS

DEUXIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 20 JUIN 2023

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 22/00757. Arrêt n° 282. N° Portalis DBV5-V-B7G-GQAS. Décision déférée à la Cour : jugement du 7 février 2022 rendu(e) par le TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de [Localité 5].

 

APPELANTE :

SAS M.-K.

[Adresse 1], [Localité 5], Ayant pour avocat plaidant Maître Philippe MISSEREY de l'ASSOCIATION L.E.A - Avocats, avocat au barreau de POITIERS.

 

INTIMÉS :

Monsieur X.

né le [date] à [Localité 5], [Adresse 3], [Localité 5], Ayant pour avocat plaidant Maître Philippe MISSEREY de l'ASSOCIATION L.E.A - Avocats, avocat au barreau de POITIERS

SCI STUDEL

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, Le [Adresse 2], [Localité 5], Ayant pour avocat postulant Maître Nicolas DUFLOS de la SCP DUFLOS-CAMBOURG, avocat au barreau de POITIERS. Ayant pour avocat plaidant Maître Caroline LECORNUE, avocat au barreau de PARIS.

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 24 avril 2023, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Claude PASCOT, Président, Monsieur Fabrice VETU, Conseiller, Monsieur Cédric LECLER, Conseiller, qui en ont délibéré.

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, - Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

La SCI LE STUDEL, SCI familiale co-créée et dirigée pendant des décennies par Monsieur Z., a fait édifier au [Adresse 2], sur la commune de Poitiers, une résidence dite [Adresse 4] composée notamment de près de 400 appartements d'habitation.

Par procès-verbal du 14 janvier 2011, l'assemblée générale de la SCI STUDEL a nommé Madame F. X., associée de cette société, en qualité de co-gérante.

Par procès-verbal du 20 décembre 2017, l'assemblée générale de la SCI STUDEL a nommé Monsieur X., fils de Mme F. X. et salarié de la société depuis l'année 2007, en qualité de gérant.

Par procès-verbal daté du 26 juin 2019, l'assemblée générale de la SCI STUDEL a rejeté les comptes de l'exercice 2018 et révoqué de leurs fonctions de gérants, à effet immédiat, M. Z., Mme F. X., M. X. et Madame Z. épouse Y., et nommé en qualité de gérant Monsieur W..

Z. est décédé le 30 juillet 2019.

Par assignations délivrées le 17 mars 2020, Mme A. Z. et M. W., en leurs qualités de co-gérants de la SCI, ont engagé à l'encontre de M. X., Mme F. X. et Mme Z. Y. une action en responsabilité, réclamant à titre principal leur condamnation solidaire au paiement d'une somme de 3.082.870,14 € TTC à parfaire, en invoquant des fautes de gestion à raison de graves négligences et d'avantages octroyés sans contrepartie réelle au détriment de l'intérêt social et la plupart du temps à leur profit personnel, ayant notamment consisté :

- dans l'occupation d'appartements de la SCI pour un loyer dérisoire voire inexistant ;

- dans l'octroi de rémunérations excessives et/ou indues ;

- dans l'octroi d'un bail commercial au profit d'une société dans laquelle X. était personnellement intéressé, et un détournement de la clientèle de la SCI ;

- dans une collusion avec la société ODIC au détriment de la société ;

- dans un recours excessif au crédit sans prendre les mesures permettant de rembourser les emprunts ;

- dans une distribution excessive de dividendes au détriment de l'entretien de l'actif immobilier de la SCI, au point de mettre en danger la sécurité de certains occupants et de dégrader l'image de la société.

Par jugement du 29 mars 2021, le tribunal judiciaire de Poitiers a rejeté l'ensemble des demandes formulées par Mme A. Z. et M. W. en qualité de gérants de la SCI STUDEL et les a condamnés ès qualités aux dépens de l'instance et à payer 4.000 euros d'indemnité de procédure aux défendeurs, ensemble, par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Un appel a été interjeté à l'encontre du jugement rendu le 29 mars 2021 par le tribunal judiciaire de Poitiers qui a débouté les nouveaux gérants de la SCI STUDEL de leurs prétentions.

Par arrêt en date du 21 février 2023, la Cour d'appel de Poitiers a infirmé le jugement entrepris sur ce chef et a, statuant à nouveau, notamment retenu qu'une faute de gestion a été commise par Mme F. X. et M. X., en qualité de co-gérants de la SCI STUDEL, au titre de la conclusion du bail commercial avec la SAS COMPTE-K., et les a condamnés au paiement de la somme de 3.000 € en réparation du préjudice que la SCI a subi de ce fait.

La société M.-K. a été créée le 6 juin 2018 pour l'exploitation de la laverie, par X., dont il est associé à 50 % et Président.

Selon contrat de bail commercial en date du 31 août 2018, la SCI STUDEL, représentée par sa co-gérante, Mme F. X., a donné à bail à la SAS M.-K., représenté par M. E. K., un local situé au rez-de-chaussée de la résidence STUDEL, pour une durée de neuf années à compter du 1er septembre 2018, afin qu'elle y exploite une laverie jusqu'alors exploitée par la SCI STUDEL elle-même.

Par acte introductif d'instance du 21 juillet 2020, la SCI LE STUDEL a fait assigner, à comparaître devant le tribunal judiciaire de Poitiers, la SAS M.-K. et M. X., au visa des articles 1848, 1849 alinéa 1er et 1850 alinéa 1er du code civil, 1161 du code civil dans sa version applicable au 31 août 2018, aux fins que le tribunal :

- annule le bail commercial passé le 31 août 2018 entre la SCI STUDEL et la SAS M.-K. en raison de sa contrariété avec l'intérêt social de la SCI STUDEL,

- à titre subsidiaire, annule ledit bail commercial à raison de la fraude commise dans le cadre de sa conclusion,

- en tout état de cause, condamne solidairement la SAS M.-K. et M. X. à lui payer la somme de 327.737,83 €, à parfaire en réparation de son préjudice,

- les condamne solidairement lui payer la somme de 10.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers depens.

Par jugement en date du 7 février 2022, le tribunal judiciaire de Poitiers a statué ainsi :

- Annule le bail commercial passé le 31 août 2018 entre la SCI LE STUDEL et la SAS M.-K.,

- Rejette les demandes indemnitaires dirigées à l'encontre de M. X. à titre personnel,

- Condamne la SAS M.-K. à payer à la SCI LE STUDEL la somme de 3.000 € en réparation du préjudice tenant à une perte de chance résultant de la passation du bail commercial le 31 août 2018,

- Rappelle que le présent jugement est exécutoire de droit à titre provisoire,

- Condamne la SAS M.-K. à payer à la SCI LE STUDEL la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Dit que la SAS M.-K. sera tenue aux dépens.

Pour statuer comme il l'a fait, le tribunal a retenu, concernant l'annulation du bail commercial, que :

- le fait de faire exploiter par une société extérieure l'activité de laverie, exercée auparavant par la SCI STUDEL, n'est pas en soi contraire à son intérêt social ;

- cependant, l'intérêt social n'a pas été respecté en ce que le bail a octroyé à la preneuse des avantages disproportionnés, au regard de la contrepartie financière due à la bailleresse ou des charges lui incombant.

[*]

Par déclaration en date du 21 mars 2022, la SAS M.-K. a interjeté appel partiel du jugement en date du 7 février 2022, en intimant la SCI STUDEL en critiquant expressément les chefs du jugement :

- ayant annulé le bail commercial,

- et l'ayant condamnée à payer à la SCI STUDEL les sommes de 3.000 € en réparation du préjudice tenant à une perte de chance, 2.000 € au titre des frais irrépétibles outre les dépens.

La SCI STUDEL, par premières conclusions transmises par voie électronique en date du 27 juin 2022 a formé appel incident contre les chefs de jugements ayant :

- rejeté les demandes indemnitaires dirigées à l'encontre de Monsieur X. à titre personnel ;

- condamné la SAS M.-K. à payer à la SCI LE STUDEL la somme de 3.000 € en réparation du préjudice tenant à une perte de chance résultant de la passation du bail commercial le 31 août 2018.

Cet appel incident porte également appel provoqué à l'encontre de Monsieur X. suivant exploit daté du 29 juin 2022, aux termes duquel ont été dénoncées la déclaration d'appel et les conclusions des parties.

[*]

La SAS M.-K. et Monsieur X., par dernières conclusions transmises par voie électronique en date du 20 mars 2023, demandent à la cour de :

Au visa des articles 1161, 1178, 1355, 1844-10 et 1848 du code civil, 125 du code de procédure civile, les articles L. 1110-4 du code de la santé publique et 9 du Code de procédure civile,

1°/ écarter des débats la pièce n° 149 de la SCI LE STUDEL à savoir, le dossier médical de Monsieur Z.,

2°/ Réformer le jugement du 7 février 2022 en ce qu'il :

- Annule le bail commercial passé le 31 août 2018 entre la SCI LE STUDEL et la SAS M.-K.,

- Condamne la SAS M.-K. à payer à la SCI LE STUDEL la somme de 3.000 € en réparation du préjudice tenant à une perte de chance résultant de la passation du bail commercial le 31 août 2018, 28,

- Condamne la SAS M.-K. à payer à la SCI LE STUDEL la somme de 2.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile,

- Dit que la SAS M.-K. sera tenue aux dépens.

3°/ Vu l'article 125 du Code de procédure civile, relever d'office la fin de non-recevoir tirée de la chose jugée par l'arrêt du 21 février 2023 et juger irrecevables l'ensemble des demandes formulées contre Monsieur X.

4°/ Subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il rejette toutes demandes dirigées à l'encontre de M. X.

5°/ Y ajoutant condamner la SCI LE STUDEL à payer :

- à M. X. une somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts en application de l'article 1240 du Code civil,

- à la SAS M.-K. et à M. X. une somme de 5.000 € chacun en application de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi que les dépens de première instance et d'appel.

6°/ Débouter la SCI LE STUDEL de toutes demandes, fins, moyens et conclusions.

[*]

La SCI STUDEL, par dernières conclusions RPVA du 23 mars 2023, demande à la cour de :

Vu les articles 1848, 1161 du code civil (dans sa version applicable au 31 août 2018) et 1178 du code civil ;

In limine litis,

- Refuser d'écarter le dossier médical de Z. des débats ;

- Dire infondée la fin de non-recevoir tirée de la chose jugée par l'arrêt du 21 février 2023 quant à la condamnation de M. X. à réparer le préjudice causé à la SCI STUDEL ;

Sur le fond,

- Confirmer le jugement du 7 février 2022 en ce qu'il a annulé le bail conclu le 31 août 2018 entre la SCI STUDEL et la SAS M.-K. à raison de sa contrariété à l'intérêt social de la SCI STUDEL ;

Si par extraordinaire la Cour infirmait le jugement entrepris en ce qu'il a annulé le bail du 31 août 2018 à raison de sa contrariété à l'intérêt social de la SCI STUDEL,

- Annuler le bail commercial conclu le 31 août 2018 entre la SCI STUDEL et la SAS M.-K. à raison de la fraude ou l'abus de droit commis dans le cadre de sa conclusion ;

- Infirmer le jugement du le 7 février 2022 en ce qu'il a rejeté les demandes indemnitaires dirigées à l'encontre de X. à titre personnel ;

- Infirmer le jugement du le 7 février 2022 en ce qu'il a condamné la SAS M.-K. à payer à la SCI LE STUDEL la somme de 3.000 € en réparation du préjudice tenant à une perte de chance résultant de la passation du bail commercial le 31 août 2018 ;

- Dire que la nullité du bail du 31 août 2018 emporte, de plein droit, restitution immédiate des lieux par la SAS M.-K. entre les mains de la SCI STUDEL, incluant l'expulsion de la société M.-K. avec le concours de la force publique au besoin ;

- Condamner solidairement la SAS M.-K. et M. X. à restituer à la SCI STUDEL la différence entre l'indemnité d'occupation « de marché » due et les loyers payés, évaluée à 64.894.46 € au 31 mars 2023, outre 1.180 € par mois du 1er avril 2023 à la libération effective des lieux entre les mains de la SCI STUDEL ;

A titre subsidiaire,

- Restituer à la SCI STUDEL la perte de marge brute évaluée à 51 129 € arrêtée au 31 mars 2023 ;

- Condamner solidairement la SAS M.-K. et M. X. à indemniser la SCI STUDEL du préjudice subi à raison du bail du 31 août 2018, évalué à la somme de 7.252.86 € au titre des travaux supportés par elle à tort, et 10.000 € au titre du préjudice d'image ;

- Assortir les condamnations à intervenir d'une astreinte de 500 € par jour à compter du 8ème jour à compter de la signification de la décision à intervenir ;

- Débouter la SAS M.-K. et M. X. de leurs demandes ;

- Condamner solidairement la SAS M.-K. et M. X. à payer à la SCI STUDEL la somme de 10.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les dépens

[*]

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

La clôture de l'instruction de l'affaire est intervenue suivant ordonnance datée 27 mars 2023 en vue d'être plaidée à l'audience du 24 avril 2023, date à compter de laquelle elle a été mise en délibéré à ce jour.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur la recevabilité de l'action en responsabilité à l'encontre de M. X. :

1. Selon l'article 122 du Code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée.

2. L'article 480 du même code dispose que :

« Le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal, ou celui qui statue sur une exception de procédure, une fin de non-recevoir ou tout autre incident a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.

Le principal s'entend de l'objet du litige tel qu'il est déterminé par l'article 4. »

3. Sur ce point, la SCI STUDEL fait valoir que la Cour est saisie dans le cadre du présent litige d'une demande en nullité du bail, et conséquemment des restitutions et de l'indemnisation du préjudice en résultant (sur le fondement de l'article 1178 al. 4 du Code civil), non de la faute de gestion commise par X. et sa mère objet de l'action en responsabilité reconnue fondée à leur encontre par l'arrêt du 21 février 2023.

4. Selon l'appelante incidente, les parties et les sujets étant distincts, les appelants ne sauraient retirer quoi que ce soit de l'arrêt du 21 février 2023, celui-ci n'ayant pas autorité de chose jugée sur l'action objet de la présente procédure.

5. La SAS M.-K. et M. X. objectent qu'il y a lieu, au regard de l'article 125 du Code de procédure civile, de relever d'office la fin de non-recevoir tirée de la chose jugée par l'arrêt du 21 février 2023 et juger irrecevables l'ensemble des demandes formulées contre Monsieur X.

6. La cour observe que le premier juge avait rejeté l'action en responsabilité de la SCI STUDEL à l'encontre de M. X. du fait qu'une procédure était pendante devant la Cour de Poitiers sur appel du jugement du 29 mars 2021, laquelle visait d'ores et déjà une action en responsabilité directe de M. X. du chef de sa gestion comprenant notamment la passation de ce bail litigieux.

7. La cour observe également que la Cour d'appel de Poitiers dans les motifs de son arrêt daté du 21 février 2023 précité, se référant au jugement du 7 février 2022, déféré aujourd'hui à la cour avait indiqué :

« L'objet du litige ainsi tranché par le tribunal judiciaire, l'annulation du bail commercial, n'est pas le même que celui dont la cour de céans est saisie sur appel du jugement du 29 mars 2021, et les parties ne sont pas les mêmes, puisque F. X. et Z. Y. ne sont pas parties à ladite instance.

Cette décision est donc dépourvue d'autorité de chose jugée sur le présent litige ».

8. Au regard des décisions et principes qui précèdent, la cour indique que l'action en responsabilité dirigée contre M. X., en sa qualité de co-gérants de la SCI STUDEL en raison d'une faute de gestion au titre de la conclusion du bail commercial avec la SAS M.-BRANFER le 31 août 2018, a d'ores et déjà été jugée par la Cour d'appel de Poitiers dans son arrêt du 21 février 2023.

9. Partant, les demandes indemnitaires dirigées à l'encontre de M. X. subi par la SCI STUDEL à raison du bail du 31 août 2018, évalué à la somme de 7 252.86 € au titre des travaux supportés par elle à tort, et 10 000 € au titre du préjudice d'image sont irrecevables.

 

Sur la possibilité de se prévaloir du dossier médical du défunt, Z. :

10. La SCI STUDEL fait valoir que le dossier médical de Z. démontre que celui-ci s'était retiré des affaires depuis l'année 2015 pour être grabataire et en situation de démence vasculaire cérébrale.

Selon l'appelant incident, cet état traduirait l'impossibilité de prendre des décisions éclairées et ainsi, les décisions prises sous son autorité lui auraient été imposées, du moins suscitées dans les intérêts propres de la SAS M.-K. en ce qui concerne la laverie.

11. La SCI STUDEL explique encore que le tribunal judiciaire et la Cour d'appel de Poitiers, respectivement, par jugement du 29 mars 2021 et arrêt du 21 février 2023, l'ont débouté de cette demande pour des motifs erronés en fait et en droit. Il en serait ainsi :

- parce ce que ce dossier n'a été produit que trois jours avant la clôture de l'instruction en contradiction avec le principe du contradictoire ;

- parce que la SCI STUDEL, faute d'être ayant droit, ne pouvait produire le dossier médical, une telle communication violant le droit au secret médical et au respect de la vie privée de Z.

Or, selon elle, rien n'interdit auxdits ayants-droits de le transmettre à quiconque pour le produire en justice dans l'objectif pour lequel il a été communiqué et en outre, elle a formé un pourvoi contre l'arrêt de la Cour d'appel de Poitiers dès le 10 mars 2023, de sorte que ce dernier n'est pas définitif.

12. La SAS M.-K. objecte que ce dossier doit être écarté des débats en ce que sa production constitue une évidente violation du secret médical par la SCI LE STUDEL qui n'est pas en droit d'être en possession de ces pièces et de les utiliser dans le cadre d'une procédure en justice.

13. La cour rappelle que le pourvoi en cassation ne remet pas en cause le caractère définitif des dispositions de l'arrêt du 21 février 2023.

14. La cour observe à la suite que l'ayant droit du défunt, Z. Z., divorcée Y., n'est pas partie à la présente procédure de sorte que la SAS M.-K. ne peut, à son tour, se prévaloir de la violation du secret médical par la SCI STUDEL pour production du dossier médical du défunt.

15. La production de ce document aux débats est ainsi recevable.

 

Sur la nullité du bail commercial :

16. Le bail litigieux ayant été signé le 31 août 2018, il est régi par les dispositions du code civil telles qu'issues de l'ordonnance du 10 février 2016 réformant le droit des obligations entrée en vigueur le 1er octobre 2016.

17. L'article 1128 du Code Civil dispose que :

« Sont nécessaires à la validité d'un contrat :

1° Le consentement des parties ;

2° Leur capacité de contracter ;

3° Un contenu licite et certain. »

La notion de contenu du contrat au sens de cet article est reprise et développée dans les articles 1162 à 1171 du même code.

18. L'article 1169 du même code dispose quant à lui :

« Un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s'engage est illusoire ou dérisoire. »

19. Enfin l'article 1178 du Code Civil prévoit notamment qu'un contrat qui ne remplit pas les conditions requises pour sa validité est nul. La nullité doit être prononcée par le juge, à moins que les parties ne la constatent d'un commun accord.

20. Dans les contrats synallagmatiques, l'obligation de chaque contractant trouve sa contrepartie dans l'obligation envisagée par lui comme devant être effectivement exécutée par l'autre contractant. Dans un contrat de bail, la contrepartie de l'obligation du bailleur consistant dans la mise à disposition du local réside dans le paiement des loyers par le preneur.

21. La nullité d'un contrat, sanction de son absence de validité au moment de sa formation, doit s'apprécier au jour de sa signature.

22. La SAS M.-K. et M. X. font valoir que la notion de déséquilibre significatif n'est pas applicable en matière de baux commerciaux ainsi que l'ont jugé la Cour d'appel de Montpellier le 23 novembre 2021 (n° 18/05844) et celle de Paris le 22 novembre 2022 (n° 20/02499) à la suite d'une décision de la Cour de cassation du 15 février 2018 (17/11.329).

Ainsi, selon eux, le texte de l'article 1171 ne peut servir de fondement à la demande de la SCI STUDEL.

23. En réplique, l'intimée invoque un loyer mensuel fixé à seulement 10 % du marché dès lors que le loyer a été fixé par le contrat du 31 août 2018 à 120 € Hors Charges pour 46 m² (2,60 €/m²) alors que les annonces de locaux similaires sont plutôt de 25,60 €/m², charges inclues, soit 1.180€ par mois.

La SCI STUDEL rappelle, à la suite du premier juge qu'elle exploitait avant la signature de ce contrat une activité de laverie et que si son chiffre d'affaires demeure inconnu en l'état de la non comptabilisation par M. X., alors gérant, en violation de ses obligations comptables, il relevait toutefois d'une saine gestion pour celui-ci, lorsqu'il était gérant d'affecter ce local à la bonne utilisation et moyennant le bon rapport recettes/coût.

24. Ainsi, selon cette société civile immobilière, ce local aurait pu être utilisé pour développer en interne l'ancienne laverie si elle était jugée insuffisante, ceci, afin que la SCI STUDEL en retire les recettes, plutôt que de confier l'usage de ce local à un tiers en conflit d'intérêt sans contrepartie proportionnée, ou a minima le louer au juste prix.

25. La cour indique dans un premier temps que c'est à tort que l'appelant et M. X. se réfère à l'article 1171 du Code civil dès lors que ni le premier juge, ni l'intimée ne se fondent sur ce texte pour solliciter la nullité du bail et une indemnisation en découlant.

26. La cour observe dans un second temps que la SCI STUDEL n'apporte pas la démonstration, qui lui incombe pourtant, d'un avantage disproportionné donné au locataire qui serait contraire à l'intérêt social à la date du 31 août 2018, date de conclusion du contrat.

27. En effet, la production d'annonces non datées de locaux commerciaux (pièce n°30) est, sur ce point, inopérante et en outre, comme le concède elle-même la SCI STUDEL, elle est dans l'impossibilité de rapporter la preuve de l'existence d'un chiffre d'affaire réalisé alors qu'elle assurait ce service ou encore des modalités de fonctionnement de ce service et sa fréquentation de sorte que si ce service était bien prévu « en interne » préalablement à ce contrat, elle ne peut valablement soutenir que l'instauration d'un système externe de laverie a été décidée par ses gérants de l'époque en contradiction avec son intérêt social.

28. La décision sera infirmée de ce chef sans que la cour n'examine l'ensemble des autres demandes des parties découlant de la signature de ce contrat de bail, notamment, la demande de condamnation formée à l'encontre de la SAS M.-K. de la somme de 64.894,46€ (différence entre l'indemnité d'occupation et les loyers payes), le versement de ces loyers étant causés au regard des développements qui précèdent.

 

Sur la demande de dommages et intérêts :

29. L'article 1240 du code civil dispose que « tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

30. L'exercice d'une action en justice et d'une voie de recours, même mal fondée, ne dégénère en abus que si la malice ou la mauvaise foi de son auteur sont démontrées.

31. M. X. explique que l'assignation délivrée à son égard relève d'une véritable intention de nuire qui doit être sanctionnée comme constituant une faute civile. Selon lui, son préjudice moral serait constitué par le stress consécutif à une demande de condamnation personnelle figurant dans l'assignation d'origine à concurrence de 153.825 € considérablement diminuée aujourd'hui ce qui démontre bien le caractère non réfléchi de l'assignation d'origine et la volonté d'impressionner et de faire mal.

32. La SCI STUDEL ne conclut pas sur ce point.

33. La cour relève que M. X. ne démontre pas l'existence d'une mauvaise foi de la SCI STUDEL dans l'exercice de ses droits à intenter une action en justice. Il sera débouté de la demande formée de ce chef.

34. Sur ce point, la décision sera confirmée.

 

Sur les frais de procès :

35. Il apparaît équitable de condamner la SCI STUDEL à régler à M. M. et la SAS K., chacun, une somme de 1.500 €, en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

36. La SCI STUDEL qui échoue en ses prétentions sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme en toutes ses dispositions contestées le jugement du tribunal judiciaire de Poitiers en date du 07 février 2022,

Statuant à nouveau,

Déclare irrecevable les demandes indemnitaires de la SCI STUDEL dirigées à l'encontre de Monsieur X. pour préjudice subi à raison du bail signé le 31 août 2018

Dit que le bail commercial en date du 31 août 2018, signé entre la SCI STUDEL et la SAS M.-K. n'est entaché d'aucune cause de nullité,

Y ajoutant,

Déboute Monsieur X. de sa demande de dommages et intérêts formés à l'encontre de la SCI STUDEL

Condamne la SCI STUDEL à payer à Monsieur X. et la sas M.-K., chacun, une somme de 1.500 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile,

Condamne la SCI STUDEL aux dépens de première instance et d'appel.

LE GREFFIER,                                           LE PRÉSIDENT,