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TGI NÎMES (1re ch.), 8 février 2000

Nature : Décision
Titre : TGI NÎMES (1re ch.), 8 février 2000
Pays : France
Juridiction : TGI Nimes. 1re ch.
Demande : 98/04517
Date : 8/02/2000
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 23/10/1996
Décision antérieure : CA NÎMES (1re ch. A), 23 mai 2002
Décision antérieure :
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1048

TGI NÎMES (1re ch.), 8 février 2000 : RG n° 98/04517

(sur appel CA Nîmes (1re ch. A), 23 mai 2002 : RG n° 00/1142 ; arrêt n° 265)

 

Extraits : 1/ « Attendu qu'il appartenait au service contentieux émetteur de la mise en demeure avant déchéance de terme de préciser selon les différents concours, avec l'état pour chacun des impayés respectifs, des sommes à échoir en les distinguant et sans se borner à faire état de sommes globales ; Attendu qu'une mise en demeure globale et non détaillée pouvait certes autoriser une simple procédure d'inscription d'hypothèque provisoire n'exigeant qu'un principe de créance ; qu'elle ne pouvait au contraire prétendre constituer une sommation capable d'entraîner la déchéance régulière du terme de chaque obligation particulière contractée par les époux X. auprès de la CRCAM du Gard ».

2/ «  Attendu qu'il s'avère que l'établissement financier souscripteur du contrat d'assurance-groupe a en l'occurrence proposé à l'emprunteur qui s'engageait pour des durées allant de cinq à neuf ans des garanties ITT inadaptées compte tenu de l'âge de l'intéressé et de l'importance des endettements en résultant : Mr X. était, selon le cas, sexagénaire à un an ou deux ans près en 1991 et 1992 alors qu'il s'engageait pour cinq, sept voire neuf ans, ce qui réduisait d'autant les périodes garanties en cas d'ITT ; Attendu que ce déséquilibre flagrant de l'économie des garanties ITT proposées en 1991 et 1992 est d'autant plus préjudiciable que lorsque l'intéressé avait emprunté quelques années auparavant en 1985 et 1986, à un âge moins avancé (52-53 ans) les contrats d'assurance groupe souscrits par la CRCAM du Gard offraient ce type de garantie mais pour une plus longue durée, à savoir jusqu'au 65ème anniversaire ; Attendu que ces éléments déterminent des manquements caractérisés et répétés à l'obligation d'information et de conseil incombant à l'institutionnel souscripteur, à l'égard du client profane se voyant proposer une série de contrats d'adhésion devenant caduques seulement un an ou deux ans plus tard ; Attendu que l'état d'incapacité de Mr X. étant avéré il appartiendra en conséquence à la CRCAM du Gard de conserver la charge de tous les débits et mensualités échus depuis la survenance de cet état et à échoir jusqu'à son terme, puisque l'emprunteur a perdu toute chance d'en être garanti par la CNP à cause des manquements directement imputables à cet établissement ».

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NÎMES

PREMIÈRE CHAMBRE

JUGEMENT DU 8 FÉVRIER 2000

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 1998/04517. Le Tribunal de Grande Instance de NÎMES, Première Chambre, a, dans l'affaire opposant :

 

CRCAM DU GARD

[adresse], Demanderesse représentée par SCP TOURNIER avocat.

 

À :

- Monsieur et Madame X.

[adresse], Défenderesse représentée par SCP GOUJON.FAVRE DE THIERRENS avocat.

- CAISSE NATIONALE DE PRÉVOYANCE

[adresse], Défenderesse représentée par SCP REINHARD avocat.

Rendu publiquement, le jugement contradictoire suivant, statuant en premier ressort après que la cause ait été débattue en audience publique le 6 septembre 1999 devant NAMURA Bernard, Vice Président, R PICOT Premier Juge, A.C. ALMUNEAU Juge, assistés de F. NEVEU faisant fonction de Greffier, et qu'il en ait été délibéré par les magistrats ayant assisté aux débats.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Vu l'assignation délivrée à la requête de la CRCAM du Gard le 23 octobre 1996 aux époux X. ;

Vu l'assignation délivrée à la requête des époux X. par exploits séparés des 8 et 11 novembre 1996 à la CRCAM du Gard et à la Caisse Nationale de Prévoyance ;

Vu ensuite l'ordonnance présidentielle du 15 septembre 1997 et la jonction ordonnée par le juge de la mise en état le 28 octobre 1997;

Vu par ailleurs les conclusions signifiées sur le fond :

- par les époux X. le 10 septembre 1998

- par la CRCAM du Gard le 24 septembre 1998

- par La CNP le 22 décembre 1997 et le 23 septembre 1998

Vu enfin l'ordonnance de clôture intervenue le 30 août 1999.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Attendu que la CRCAM du Gard a saisi le Tribunal en exposant que les époux X. avaient bénéficié de sa part de divers concours financiers pour lesquels ces emprunteurs n'avaient pas respecté leurs obligations de remboursement et n'avaient pas régularisé, malgré mise en demeure recommandée avec accusé de réception du 19 février 1996 ; or cet unique document censé emporter déchéance de terme à défaut de règlement sous huitaine s'avère à l'examen insusceptible de produire les effets escomptés par l'établissement prêteur tels qu'indiqués audit document y compris en matière d'assurance ;

Attendu que cet unique document, particulièrement confus, voire contradictoire, se réfère à « un prêt » et à « un contrat d'assurance » alors que les parties étaient liées par plusieurs conventions ; qu'il ne peut être appliqué à tel concours financier plutôt qu'à tel autre, mentionne des sommes non détaillées, sommes au demeurant sans rapport ni proportion avec celles visées dans l'assignation délivrée quelques mois plus tard au titre d'une série de contrats ;

Attendu que l'établissement financier ne pouvait ignorer la distinction à opérer obligatoirement tant au plan juridique qu'au plan comptable entre les nombreux concours consentis aux époux X. dans le cadre de leurs activités agricoles depuis 1985 et 1986 puis en 1991 et 1992, avec pour chaque contrat de prêt un contrat d'assurance-groupe souscrit par la CRCAM du Gard elle-même auprès de la CNP et soumis à la signature des emprunteurs ;

[minute page 3] Attendu qu'il appartenait au service contentieux émetteur de la mise en demeure avant déchéance de terme de préciser selon les différents concours, avec l'état pour chacun des impayés respectifs, des sommes à échoir en les distinguant et sans se borner à faire état de sommes globales ;

Attendu qu'une mise en demeure globale et non détaillée pouvait certes autoriser une simple procédure d'inscription d'hypothèque provisoire n'exigeant qu'un principe de créance ; qu'elle ne pouvait au contraire prétendre constituer une sommation capable d'entraîner la déchéance régulière du terme de chaque obligation particulière contractée par les époux X. auprès de la CRCAM du Gard ;

Attendu que l'action en paiement introduite par la CRCAM du Gard et censée procéder d'une exigibilité anticipée de l'intégralité de toutes les sommes empruntées est en voie de rejet à défaut de déchéance du terme régulièrement acquise pour chaque engagement respectif ; que dans ces conditions les époux X. ne peuvent donc être condamnés au paiement des sommes qui leur sont réclamées ;

Mais attendu qu'ils ne pourraient voir aboutir leur propre action dirigée contre l'assureur-groupe, après avoir été eux-mêmes assignés : les prêts les plus anciens souscrits en 1985 et 1986 ayant été soit soldés pour l'un soit pris en charge pour l'autre par la CNP et ceux contractés courant 1991 et 1992 étant insusceptibles, en toute hypothèse, d'être garantis au titre de l'incapacité temporaire totale ;

Attendu qu'à cet égard, les contrats d'assurance souscrits par la CRCAM du Gard auprès de la CNP et proposés à l'adhésion de Mr X. en 1991 et 1992 prévoyaient que la garantie de l'ITT prendrait fin lorsque l'assuré atteindrait 60 ans ou à son 60ème anniversaire, soit au cas particulier le 15 décembre 1993 ;

Attendu que les époux X. ne sont pas recevables à soutenir qu'aucune clause contractuelle ne prévoit la cessation de garantie à 60 ans, ayant donné leur consentement à l'assurance en signant un bulletin d'adhésion avec remise d'un exemplaire ainsi qu'il résulte des termes de chaque contrat de prêt ou crédit signé par eux-mêmes avec l'établissement financier (article 11 des conditions générales) ;

[minute page 4] Attendu qu'il s'avère que l'établissement financier souscripteur du contrat d'assurance-groupe a en l'occurrence proposé à l'emprunteur qui s'engageait pour des durées allant de cinq à neuf ans des garanties ITT inadaptées compte tenu de l'âge de l'intéressé et de l'importance des endettements en résultant : Mr X. était, selon le cas, sexagénaire à un an ou deux ans près en 1991 et 1992 alors qu'il s'engageait pour cinq, sept voire neuf ans, ce qui réduisait d'autant les périodes garanties en cas d'ITT ;

Attendu que ce déséquilibre flagrant de l'économie des garanties ITT proposées en 1991 et 1992 est d'autant plus préjudiciable que lorsque l'intéressé avait emprunté quelques années auparavant en 1985 et 1986, à un âge moins avancé (52-53 ans) les contrats d'assurance groupe souscrits par la CRCAM du Gard offraient ce type de garantie mais pour une plus longue durée, à savoir jusqu'au 65ème anniversaire ;

Attendu que ces éléments déterminent des manquements caractérisés et répétés à l'obligation d'information et de conseil incombant à l'institutionnel souscripteur, à l'égard du client profane se voyant proposer une série de contrats d'adhésion devenant caduques seulement un an ou deux ans plus tard ;

Attendu que l'état d'incapacité de Mr X. étant avéré il appartiendra en conséquence à la CRCAM du Gard de conserver la charge de tous les débits et mensualités échus depuis la survenance de cet état et à échoir jusqu'à son terme, puisque l'emprunteur a perdu toute chance d'en être garanti par la CNP à cause des manquements directement imputables à cet établissement ;

Attendu en outre que ce dernier, succombant au principal, devra supporter les entiers dépens des instances jointes y compris envers la CNP ; qu'enfin l'application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ne se justifie en équité qu'au profit des époux X. à hauteur d'une somme fixée en équité à 6.000 francs ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, contradictoirement, et en premier ressort.

Déboute la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Gard ;

Rejette les demandes des époux X. à l'encontre de la Caisse Nationale de Prévoyance ;

[minute page 5] Condamne la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Gard à supporter la charge financière de l'ensemble des débits et mensualités échus depuis la survenance de l'état d'incapacité de Mr X. et à échoir jusqu'à cessation de cet état ;

La condamne également aux entiers dépens des instances jointes et à verser aux époux X. une somme de 6.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Rejette le surplus des demandes ;

Le Greffier                   Le Président,