CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 1-2), 9 novembre 2023
CERCLAB - DOCUMENT N° 10483
CA AIX-EN-PROVENCE (ch. 1-2), 9 novembre 2023 : RG n° 22/12186 ; arrêt n° 2023/710
Publication : Judilibre
Extraits : 1/ « Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu'en son montant et la condamnation provisionnelle, que peut prononcer le juge des référés sans excéder ses pouvoirs, n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.
Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.
Enfin, c'est au moment où la cour statue qu'elle doit apprécier l'existence d'une contestation sérieuse, le litige n'étant pas figé par les positions initiale ou antérieures des parties dans l'articulation de ce moyen. »
2/ « S'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés d'annuler une clause insérée dans un contrat considérée comme abusive, comme l'a fait le premier juge, l'application d'une telle clause suppose que sa régularité ne se heurte à aucune contestation sérieuse.
Tout d'abord, l'article 8-1 VI de la loi du 6 juillet 1989 dispose que la solidarité d'un des colocataires et celle de la personne qui s'est portée caution pour lui prennent fin à la date d'effet du congé régulièrement délivré et lorsqu'un nouveau locataire figure au bail. A défaut, elles s'éteignent au plus tard à l'expiration d'un délai de six mois après la date d'effet du congé. Il reste que l'article 40-III de la même loi énonce que l'article 8-1 susvisé n'est pas applicable aux logements régis par une convention conclue en application de l'article L. 831-1 du code de la construction et de l'habitation. Il en est ainsi du contrat de location conventionnée litigieux.
Ensuite, la clause de solidarité des colocataires ne figure pas parmi les clauses réputées non écrites listées à l'article 4 de la loi du 6 juillet 1989.
Enfin, il résulte de l'article L. 212-1 du code de la consommation que, dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Or, il est admis qu'une clause de solidarité des colocataires ne constitue pas une clause abusive dès lors qu'elle est limitée dans le temps. En l'occurrence, la clause litigieuse est limitée à 24 mois, de sorte qu'elle ne crée pas, à l'évidence, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations respectifs des parties aux contrats.
Il s'ensuit que la validité de clause de solidarité, telle qu'elle est stipulée dans le contrat de bail, ne se heurte à aucune contestation sérieuse. Il y a donc lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a déclaré nulle et réputée non écrite comme étant abusive la clause litigieuse et a débouté la société Unicil de ses demandes de condamnation formées à l'encontre de Mme X. »
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
CHAMBRE 1-2
ARRÊT DU 9 NOVEMBRE 2023
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 22/12186. Arrêt n° 2023/710. N° Portalis DBVB-V-B7G-BJ7J7. Décision déférée à la Cour : Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Juge des contentieux de la protection de Marseille en date du 11 août 2022 enregistrée au répertoire général sous le R.G. n° 22/00869.
APPELANTE :
SA UNICIL
SA D'HLM, dont le siège social est [Adresse 2], représentée par Maître Elsa FOURRIER-MOALLIC de la SARL CABINET FOURRIER-MOALLIC, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Maître Léa CAMBIER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
INTIMÉE :
Madame X.
née le [Date naissance 3] à [Localité 6], demeurant [Adresse 1], représentée par Maître Justine CATANI, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Maître Fabien BUISSON de la SELARL SELARL CABINET BORGEL & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 2 octobre 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Angélique NETO, Présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Mme Angélique NETO, Présidente, Mme Sophie LEYDIER, Conseillère, Mme Florence PERRAUT, Conseillère.
Greffier lors des débats : Mme Caroline VAN-HULST.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2023.
ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 9 novembre 2023, Signé par Mme Angélique NETO, Présidente et Mme Caroline VAN-HULST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Par acte sous seing privé en date du 10 janvier 2020, à effet au 13 janvier 2020, la société anonyme (SA) Unicil a consenti à M. Y. et Mme X. un bail d'habitation portant sur un appartement situé résidence [5], [Adresse 4] ainsi qu'un emplacement de stationnement n° 6391.YY, moyennant un loyer mensuel initial de 832,73 euros, outre 85,62 euros de provisions sur charges, pour l'appartement, et un loyer mensuel initial de 56,82 euros, outre 1,54 euros de provisions sur charges, pour l'emplacement de stationnement.
Par lettre recommandée reçue le 28 octobre 2020, Mme X. a informé la bailleresse de son départ du logement.
Par avenant en date du 9 novembre 2020 à effet au 28 octobre 2020, M. Y. est devenu seul titulaire du bail.
Le 12 novembre 2021, la société Unicil a délivré à M. Y. un commandement de payer la somme principale de 3.992,26 euros en visant la clause résolutoire insérée dans le contrat de bail.
Ce commandement a été dénoncé à Mme X. le 16 novembre 2021.
Se prévalant d'un arriéré locatif, la société Unicil a, par actes d'huissier en date du 22 février 2022, assigné M. Y. et Mme X. devant le juge du contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Marseille aux fins de voir constater la résiliation du bail, ordonner l'expulsion de M. Y. des lieux et les voir condamner solidairement à lui verser des provisions.
Par ordonnance en date du 11 août 2022, ce magistrat a :
- constaté que M. Y. s'est désisté de sa fin de non-recevoir ;
- déclaré la société Unicil recevable en ses demandes ;
- constaté que les conditions d'acquisition de la clause résolutoire étaient réunies à la date du 12 janvier 2022 ;
- constaté la résiliation de plein droit des baux portant sur le logement et la place de stationnement ;
- déclaré nulle et réputée non écrite comme étant abusive la clause insérée à l'article VI « Clause de solidarité et indivisibilité » du contrat de location ;
- débouté la société Unicil de ses demandes de condamnation solidaire à l'égard de Mme X. ;
- condamné M. Y. à payer à titre provisionnel à la société Unicil la somme de 6.536,28 euros au titre des loyers, charges et indemnités d'occupation arrêtés au 31 mai 2022, avec intérêts au taux légal à compter de la décision ;
- autorisé M. Y. à se libérer de sa dette sur une durée de 36 mois par 35 mensualités de 181,56 euros et la 36ème correspondant au solde de la dette et aux intérêts, la première mensualité étant payable le 10 du mois suivant la signification de la décision et chaque mensualité étant payable le 10 de chaque mois ;
- dit que les effets de la clause résolutoire seraient suspendus durant les délais de paiement accordés ;
- dit que si cette clause était intégralement payée, la clause résolutoire serait réputée n'avoir jamais joué ;
- dit qu'au contraire, à défaut de paiement du loyer et charges courants à leur terme exact ou d'une seule mensualité à l'échéance fixée :
* la totalité de la somme restant due redeviendrait exigible ;
* la clause résolutoire reprendrait ses pleins effets ;
* à défaut par M. Y. d'avoir libéré les lieux deux mois après la signification d'un commandement d'avoir à quitter les lieux, il serait procédé à son expulsion et à celle de tous occupants de son chef, avec l'assistance de la force publique, si besoin est, et au transport des meubles laissés dans les lieux aux frais de l'expulsé dans tel garde-meuble désigné par ce dernier ou, à défaut, par le bailleur ;
* M. Y. serait tenu de payer à titre provisionnel à la société Unicil une indemnité d'occupation mensuelle égale au montant des loyers mensuels augmentés des charges, soit 985,88 euros, indexée selon les clauses du bail relatives à la révision du loyer et ce, jusqu'à libération effective des lieux ;
* il serait procédé conformément à l'article L. 433-1 du code des procédures civiles d'exécution à la remise des meubles se trouvant sur les lieux, aux frais de la personne expulsée, en un lieu désigné par celle-ci et, qu'à défaut, ils seraient laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l'huissier de justice chargé de l'exécution, avec sommation à la personne expulsée d'avoir à les retirer ;
* il serait, nonobstant toute décision d'expulsion passée en force de chose jugée et malgré l'expiration des délais accordés au locataire, sursis à toute mesure d'expulsion non exécutée à la date du 1er novembre de chaque année jusqu'au 31 mars de l'année suivante, à moins que le relogement de l'intéressé soit assuré dans des conditions suffisantes respectant l'unité et les besoins de la famille ;
- condamné la société Unicil à verser à Mme X. la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté la société Unicil de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en ce compris les sommes éventuellement retenues par l'huissier ;
- condamné M. Y. aux dépens, en ce compris les frais de commandement de payer du 12 novembre 2021 et de l'assignation du 22 février 2022.
Suivant déclaration transmise au greffe le 6 septembre 2022, la société Unicil a interjeté appel de cette décision en ce qu'elle a déclaré nulle et réputée non écrite comme étant abusive la clause insérée à l'article VI « Clause de solidarité et indivisibilité » du contrat de location, débouté la société Unicil de ses demandes de condamnation solidaire à l'égard de Mme X. et l'a condamnée à lui verser la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles.
[*]
Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 10 novembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé plus ample des prétentions et moyens, la société Unicil sollicite de la cour :
- d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a déclaré nulle et réputée non écrite comme étant abusive la clause insérée à l'article VI « Clause de solidarité et indivisibilité » du contrat de location, débouté la société Unicil de ses demandes de condamnation solidaire à l'égard de Mme X. et l'a condamnée à lui verser la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles ;
- de condamner solidairement Mme X. avec M. Y. à lui verser la somme de 5.091 euros à titre de provision à valoir sur les loyers et charges arrêtés au 28 octobre 2022 avec intérêts légal à compter de la date du commandement de payer en application de l'article 1231-6 du code civil, somme à parfaire à la date de la décision à intervenir ;
- de condamner solidairement Mme X. avec M. Y. au paiement d'une indemnité d'occupation provisionnelle mensuelle égale au montant du dernier loyer échu, majoré des charges et autres accessoires, la somme de 985,88 euros, indexés selon les clauses du bail relatives à la révision du loyer, et ce, jusqu'à libération effective des lieux ;
- condamner Mme X. à lui verser la somme de 1.250 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en appel, en ce compris le coût du commandement de payer ;
- juger qu'à défaut de règlement spontané de la décision et en cas d'exécution forcée de celle-ci par voie judiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire dans le cadre des émoluments des prestations mentionnées au numéro 128 du tableau 3-1 annexé à l'article R 444-3 du code de commerce devront être supportés par l'intimée.
[*]
Aux termes de ses dernières conclusions transmises le 7 décembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour un exposé plus ample des prétentions et moyens, Mme X. sollicite de la cour de :
à titre principal,
- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a déclaré nulle et réputée non écrite comme étant abusive la clause insérée à l'article VI « Clause de solidarité et indivisibilité »' du contrat de location, débouté la société Unicil de ses demandes de condamnation solidaire à son égard et l'a condamnée à lui verser la somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles ;
- rejeter les demandes formées par la société Unicil à son encontre ;
- la condamner à lui verser la somme de 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
à titre subsidiaire,
- lui allouer un délai de paiement de 36 mois pour lui permettre de s'acquitter de la dette locative ;
- dire et juger que la solidarité ne s'étend pas à l'indemnité d'occupation ;
- rejeter la demande de sa condamnation solidaire au paiement d'une indemnité d'occupation provisionnelle mensuelle égale au montant du dernier loyer échu, majorée des charges ;
- rejeter la demande de condamnation formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile tant en première instance qu'en appel ;
- laisser les dépens à la charge du demandeur.
[*]
La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée le 18 septembre 2023.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur les demandes de provisions formées à l'encontre de Mme X. :
Aux termes de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence peuvent accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.
Il appartient au demandeur d'établir l'existence de l'obligation qui fonde sa demande de provision tant en son principe qu'en son montant et la condamnation provisionnelle, que peut prononcer le juge des référés sans excéder ses pouvoirs, n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la créance alléguée.
Une contestation sérieuse survient lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.
Enfin, c'est au moment où la cour statue qu'elle doit apprécier l'existence d'une contestation sérieuse, le litige n'étant pas figé par les positions initiale ou antérieures des parties dans l'articulation de ce moyen.
Au terme de l'article 7 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer les loyers et charges récupérables aux termes convenus.
Par ailleurs, devenu occupant sans droit ni titre du fait de l'acquisition de la clause résolutoire, il est tenu de payer une somme équivalente au loyer augmenté des charges à titre de réparation du préjudice subi par le bailleur.
En l'espèce, la société Unicil, qui ne discute pas les provisions qui lui ont été allouées par le premier juge, conteste la décision entreprise en ce qu'elle n'a pas condamné Mme X., solidairement avec M. Y., au paiement de ces sommes comprenant, d'une part, un arriéré de loyers et charges arrêtés au 12 janvier 2022, date de la résiliation du bail, et, d'autre part, des indemnités d'occupations dues à compter du 13 janvier 2022, et ce, jusqu'à libération effective des lieux.
Il n'est pas contesté que Mme X. a régulièrement donné congé des lieux à effet au 28 octobre 2020.
Il reste que les conditions particulières du contrat de location conventionnée stipule dans un article VI intitulé « Clause de solidarité et indivisibilité » que :
Pour l'exécution de toutes les obligations résultant de la présente location, et même après cessation du bail, (notamment pour le paiement des loyers, supplément de loyer, charges, réparations locatives, frais de remise en état et de procédure, indemnités d'occupation, indemnités d'immobilisation s'il y a lieu), il y aura solidarité et indivisibilité entre les signataires intervenant en qualité de preneur (s) ainsi qu'entre l'ensemble des personnes susceptibles de bénéficier du transfert ou de la continuation du bail, notamment sur le fondement de l'article 14 de la loi n° 89-462 de la loi du 6 juillet 1989. En cas d'existence de co-titulaire (s) du bail, celui-ci (ou ceux-ci) seront caution (s) solidaire (s) du paiement des sommes dues au bailleur et ce durant toute la durée du bail. En cas de congé donné par l'un des co-preneurs, ce dernier demeurera garant des loyers et charges pendant une durée de 24 mois à partir du préavis.
S'il n'entre pas dans les pouvoirs du juge des référés d'annuler une clause insérée dans un contrat considérée comme abusive, comme l'a fait le premier juge, l'application d'une telle clause suppose que sa régularité ne se heurte à aucune contestation sérieuse.
Tout d'abord, l'article 8-1 VI de la loi du 6 juillet 1989 dispose que la solidarité d'un des colocataires et celle de la personne qui s'est portée caution pour lui prennent fin à la date d'effet du congé régulièrement délivré et lorsqu'un nouveau locataire figure au bail. A défaut, elles s'éteignent au plus tard à l'expiration d'un délai de six mois après la date d'effet du congé. Il reste que l'article 40-III de la même loi énonce que l'article 8-1 susvisé n'est pas applicable aux logements régis par une convention conclue en application de l'article L. 831-1 du code de la construction et de l'habitation. Il en est ainsi du contrat de location conventionnée litigieux.
Ensuite, la clause de solidarité des colocataires ne figure pas parmi les clauses réputées non écrites listées à l'article 4 de la loi du 6 juillet 1989.
Enfin, il résulte de l'article L. 212-1 du code de la consommation que, dans les contrats conclus entre professionnels et consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat. Or, il est admis qu'une clause de solidarité des colocataires ne constitue pas une clause abusive dès lors qu'elle est limitée dans le temps. En l'occurrence, la clause litigieuse est limitée à 24 mois, de sorte qu'elle ne crée pas, à l'évidence, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations respectifs des parties aux contrats.
Il s'ensuit que la validité de clause de solidarité, telle qu'elle est stipulée dans le contrat de bail, ne se heurte à aucune contestation sérieuse. Il y a donc lieu d'infirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a déclaré nulle et réputée non écrite comme étant abusive la clause litigieuse et a débouté la société Unicil de ses demandes de condamnation formées à l'encontre de Mme X.
Il convient de relever que si la clause de solidarité insérée dans le bail s'applique à toutes les obligations résultant du contrat de location, en ce compris celles dues après la cessation du bail, et en l'occurrence aux indemnités d'occupation qui seraient dues, il en va différemment à l'égard du co-titulaire du bail qui a donné congé des lieux. En effet, dans ce cas, il n'est tenu que des loyers et charges pendant une durée de 24 mois à partir du préavis.
Compte tenu de la date à laquelle la résiliation du bail est intervenue le 12 janvier 2022, l'obligation de Mme X. de régler, à titre provisionnel, les sommes nées à compter du 13 janvier 2022 se heurte à une contestation sérieuse.
Dès lors, la somme non sérieusement contestable à laquelle est tenue Mme X., solidairement avec M. Y., s'élève à 5.338,15 euros à la date du 12 janvier 2022 et après déduction des frais de procédure de 235,42 euros du 24 novembre 2021.
Mme X. sera donc condamnée à payer à titre provisionnel à la société Unicil, solidairement avec M. Y., la somme sollicitée de 5.091 euros à valoir sur les loyers et charges arrêtés au 12 janvier 2022. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 11 août 2022, date de l'ordonnance entreprise, et ce, jusqu'à parfait paiement.
En revanche, la société Unicil sera déboutée de sa demande de voir condamner Mme X., solidairement avec M. Y., au paiement d'une indemnité d'occupation provisionnelle d'un montant de 985,88 euros jusqu'à libération effective des lieux.
Sur la demande de délais de paiement :
L'article 24 V de la loi n° 89-462 du 06 juillet 1989 dispose que le juge peut, même d'office, accorder des délais de paiement dans la limite de trois années, au locataire en situation de régler sa dette locative. Pendant le cours des délais ainsi accordés, les effets de la clause de résiliation de plein droit sont suspendus. Si le locataire se libère dans le délai et selon les modalités fixées par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué ; dans le cas contraire, elle reprend son plein effet.
Par ailleurs, aux termes de l'article 1343-5 du code civil, le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, dans la limite deux années, reporter ou échelonner le paiement des sommes dues.
En l'espèce, Mme X., qui a donné congé des lieux à effet au 28 octobre 2020, ne demande pas la suspension de la clause résolutoire insérée dans le bail. Elle n'est donc pas fondée à solliciter des délais de paiement conformément à l'article 24 V de la loi du 6 juillet 1989.
En revanche, elle peut demander des délais de paiement de droit commun dans la limite de deux années.
Dès lors que Mme X. justifie faire face à un autre loyer d'un montant de 630 euros par mois, outre les charges de la vie courante, alors même que son salaire mensuel s'élève à 1.475 euros, et compte tenu de sa bonne foi, en ce qu'elle ne vit plus avec M. Y. depuis le mois d'octobre 2020, il y a lieu de faire droit à sa demande de délais de paiement en lui accordant 24 mois pour apurer sa dette conformément à ce qui sera dit dans le dispositif de la décision.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
Dès lors que la société Unicil obtient partiellement gain de cause en ce qui concerne sa demande de provision formée à l'encontre de Mme X., l'ordonnance entreprise sera infirmée en ce qu'elle l'a condamnée à verser à cette dernière la somme de 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Mme X. sera tenue aux dépens de la procédure d'appel, lesquels ne peuvent comprendre les sommes que pourraient retenir l'huissier de justice en cas d'exécution forcée de la décision, pas plus que le coût du commandement de payer qui est déjà inclus dans les dépens de première instance mis à la charge de M. Y.
En revanche, l'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en faveur de la société Unicil pour les frais exposés en première instance et en appel non compris dans les dépens.
Mme X., en tant que partie perdante, sera également déboutée de sa demande formée sur le même fondement.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant dans les limites de l'appel ;
Infirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions critiquées ;
Statuant à nouveau et y ajoutant ;
Condamne Mme X., solidairement avec M. Y., à verser à la SA Unicil une provision de 5.091 euros à valoir sur les loyers et charges arrêtés au 12 janvier 2022 ;
Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 11 août 2022, date de l'ordonnance entreprise, et jusqu'à parfait paiement ;
Déboute la SA Unicil de sa demande de voir condamner Mme X., solidairement avec M. Y., au paiement de l'indemnité d'occupation provisionnelle d'un montant de 985,88 euros jusqu'à libération effective des lieux ;
Dit que Mme X. pourra se libérer de sa dette locative de 5.091 euros arrêtée à la date du 12 janvier 2022 au moyen de 24 versements mensuels de 212 euros à verser tous les 5 de chaque mois au plus tard, à compter du 1er mois suivant la notification par le greffe du présent arrêt, le dernier versement devant être ajusté en fonction du solde exigible ;
Dit qu'à défaut de paiement d'une seule échéance, la totalité de la dette deviendra immédiatement exigible quinze jours après une nouvelle mise en demeure par lettre recommandée avec accusé de réception restée infructueuse ;
Rappelle que l'application des dispositions de l'article 1343-5 du code civil suspend les procédures d'exécution qui auraient été engagées par le créancier et que les majorations d'intérêts ou les pénalités encourues à raison du retard cessent d'être dues pendant les délais accordés ;
Déboute la SA Unicil de sa demande d'indemnité formée en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en première instance et en appel non compris dans les dépens ;
Déboute Mme X. de sa demande formée sur le même fondement ;
Condamne Mme X. aux dépens de la procédure d'appel, lesquels ne peuvent comprendre les sommes que pourraient retenir l'huissier de justice en cas d'exécution forcée de la décision, pas plus que le coût du commandement de payer qui est déjà inclus dans les dépens de première instance mis à la charge de M. Y.
La greffière La présidente
- 3529 - Définition des clauses abusives - Cadre général - Contrôle judiciaire - Juge des référés : principe
- 3530 - Définition des clauses abusives - Cadre général - Contrôle judiciaire - Juge des référés : conséquences
- 6054 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Appréciation du déséquilibre - Déséquilibre injustifié - Exécution du contrat - Garanties d’exécution en faveur du professionnel
- 6396 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Location (bail) - Location d’immeuble - Bail d’habitation (4) - Obligations du locataire : garanties accordées au bailleur