JUR. PROX. TOULON, 7 juin 2006
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1094
JUR. PROX. TOULON, 07 juin 2006 : RG n° 91-05-000387
Publication : Bull. transp. 2006. 636
Extrait : « Attendu que Mme X. soutient de plus, que le contrat de déménagement auquel elle a souscrit, est soumis à la prescription décennale, ayant été qualifié de contrat d’entreprise par plusieurs décisions de la Cour de Cassation dont celle du 11 juin 2002 Ch. com. [pourvoi] n° 00-11592 ; Qu’elle prétend que la clause 19 du contrat liant les parties, présente un caractère abusif, en raison du déséquilibre qu’elle crée entre les droits et obligations du déménageur et ceux du particulier ; Que le consommateur ne disposerait ainsi que d’un délai d’un an pour agir, alors que le déménageur disposerait de 10 années, pour obtenir le paiement du prix du déménagement, et ce alors même que cette disposition abusive, n’est pas suffisamment apparente, sur le document liant les parties ;
Attendu cependant, que le délai d’une année, concernant la prescription, a été accepté par Mme X. lors de la signature du devis, faisant force de loi entre les parties, selon les dispositions de l’article 1134 du Code Civil ; Que de plus, l’article 26 de la loi du 12 juin 2003, modifiant l’article 8 de la loi du 20 décembre 1982, énonce que les opérations de transport effectuées dans le cadre d’un déménagement sont considérées comme des transports de marchandises ; Qu’il apparaît ainsi que la clause 19 du contrat liant les parties est conforme, à la volonté des parties, et à l’ordre public, aucune disposition légale, n’interdisant de limiter contractuellement, le délai de prescription de l’action pour agir et ce quelle que soit la qualification donnée au contrat ;
Attendu de plus que ce délai ne paraît pas constituer une stipulation abusive dès lors que les obligations mises à la charge du déménageur dans le contrat litigieux, sont des obligations de résultat faisant peser sur lui une présomption de responsabilité, applicable dans le cadre des règles spéciales du contrat de transport et qui sont tirées des articles L. 133-3 à L. 133-6 du Code de Commerce ; Que le délai pour agir, n’apparaît pas davantage abusif du fait qu’il n’est pas indiqué en caractères suffisamment apparents, alors que Mme X. en a été informé en prenant connaissance des conditions générales de vente inscrites clairement et sans équivoque possible, au verso du devis qu’elle a signé et qui précisait que les conditions générales de vente se situaient au verso ;
Qu’il résulte des dispositions licites du contrat liant les parties, que la demande de Mme X. est prescrite, pour ne pas avoir été engagée dans le délai annal prévu au contrat, et qui expirait en date du 21 septembre 2004 [N.B. lire sans doute 2005, cf. supra] ».
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL DE PROXIMITE DE TOULON
JUGEMENT DU 7 JUIN 2006
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 91-05-000387.
DEMANDEUR :
SARL CATHELAIN DÉMÉNAGEMENTS
[adresse], représenté(e) par Maître RENAUDIN Patrick, avocat du barreau de MARSEILLE
DÉFENDEURS :
Madame X.
[adresse], représenté(e) par Maître CHOUETTE, avocat du barreau de TOULON
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
Juge de Proximité : Madame Francine PAQUET
Greffier : Madame Colette SONNERY
DÉBATS : Audience publique du : 11 avril 2006
Délibéré : 7 juin 2006
JUGEMENT : Rendu en dernier ressort, prononcé par mise à disposition au Greffe le 7 juin 2006 par Madame Francine PAQUET, Juge de proximité, assistée de Madame Colette SONNERY, greffière
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] Par assignation en date du 21 septembre 2005, la SARL CATHELAIN Déménagements, exerçant sous l’enseigne LES DÉMÉNAGEURS BRETONS, [lieu], a saisi la Juridiction de Proximité près le Tribunal d’Instance de TOULON, pour obtenir la condamnation de Mme X., au paiement de :
- la somme de 2.707,60 EUROS, outre les intérêts de retard à compter du 25 août 2003, sur la base d’une fois et demi les intérêts légaux,
- la somme de 1.500 EUROS, en application de l’article 700 du NCPC.
La SARL CATHELAIN Déménagements, représentée à l’audience par Maître RENAUDIN, Avocat au Barreau de MARSEILLE, soutient que la somme principale correspond au solde du prix d’un déménagement effectué en date du 25 août 2003, de [ville T.] à [ville S.], selon devis contrat accepté n° 2XX4 et lettre de voiture n° 1XX7.
La SARL CATHELAIN, soulève la prescription de la demande reconventionnelle de Mme X., sur le fondement de l’article 19 des conditions générales du contrat de déménagement et de l’article L. 133-6 du Code de Commerce, et conteste le prétendu caractère abusif des clauses du contrat. Elle invoque l’absence de reconnaissance du droit du réclamant pour justifier de l’interruption de la prescription, et subsidiairement invoque la présomption de livraison conforme et en cas de condamnation, une indemnité à un quantum limité à la déclaration de valeur dans le contrat, soit un montant total de 700 EUROS. Elle demande que Mme X. soit déboutée de sa demande en réparation d’un préjudice moral et de jouissance, exclu en cas de réparation selon les termes du contrat et la condamnation de Mme X. à la somme de 2.707,60 EUROS, fixée dans la lettre de voiture en raison de difficultés de déplacement non prévues, lors de la remise du devis.
Mme X., représentée à l’audience par Maître CHOUETTE, Avocat au Barreau de TOULON, conteste la fin de non-recevoir, tirée de la prescription de sa demande en réparation pour les avaries subies par son mobilier, lors du déménagement. Elle soutient que le contrat de déménagement est un contrat d’entreprise, qu’il est soumis à la prescription décennale, et que l’article 19 du contrat liant les parties, a un caractère abusif, compte tenu du déséquilibre significatif qu’il entraîne entre les droits et les obligations des parties. Elle invoque l’absence d’inscription de façon très apparente de la clause restreignant le délai d’action à un an, et demande réparation de son préjudice matériel pour la valeur retenue par l’expert, soit une somme de 1.600 EUROS, et de son préjudice moral et de jouissance qu’elle évalue à une somme de 1.500 EUROS, ainsi que la condamnation de la SARL CATHELAIN à une somme de 1.500 EUROS, sur le fondement de l’article 700 du NCPC.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que la demande reconventionnelle de Mme X., est une action autonome, soumise aux règles de fond du droit et de procédure au même titre qu’une demande principale ;
Attendu que la livraison du mobilier s’est faite en date du 25 août 2003, selon lettre de voiture n° 1XX7 datée du 20 août 2003,
Qu’il ressort de l’article 19 des conditions générales de vente du contrat de déménagement situé au verso de la lettre de voiture signée par Mme X. en date du 20 août 2003, qu’il est convenu de manière expresse entre les parties, que les actions en justice pour avarie, perte ou retard doivent être intentées dans l’année qui suit la livraison du mobilier ;
Attendu que Mme X. a assigné en référé la SARL CATHELAIN pour demander une expertise sur les biens abîmés durant le transport ;
[minute page 3] Qu’une ordonnance de référé, a été rendue par le Président du Tribunal de Grande Instance de TOULON, en date du 21 septembre 2004 ;
Attendu que Mme X. prétend que sa demande reconventionnelle par voie de conclusions écrites du 9 février 2006, est formulée dans le délai d’un an à compter de la date de la livraison, dès lors que l’assignation en référé qu’elle a engagée, selon l’article 2244 du Code Civil a suspendu le délai interruptif de la prescription annale, jusqu’au jour du dépôt du rapport de l’expert, le 5 mai 2005 ;
Attendu cependant, que la Cour de Cassation - 3ème Ch. Civ. 19 décembre 2001, a décidé que le délai pour agir n’est suspendu que pendant la durée de l’instance à laquelle a mis fin l’ordonnance nommant un expert ;
Attendu qu’en l’espèce, Mme X. avait jusqu’au 21 septembre 2005, pour engager une action à l’encontre de la SARL CATHELAIN Déménagements, ce qu’elle n’a pas fait ;
Attendu que Mme X. soutient de plus, que le contrat de déménagement auquel elle a souscrit, est soumis à la prescription décennale, ayant été qualifié de contrat d’entreprise par plusieurs décisions de la Cour de Cassation dont celle du 11 juin 2002 Ch. com. [pourvoi] n° 00-11592 ;
Qu’elle prétend que la clause 19 du contrat liant les parties, présente un caractère abusif, en raison du déséquilibre qu’elle crée entre les droits et obligations du déménageur et ceux du particulier ;
Que le consommateur ne disposerait ainsi que d’un délai d’un an pour agir, alors que le déménageur disposerait de 10 années, pour obtenir le paiement du prix du déménagement, et ce alors même que cette disposition abusive, n’est pas suffisamment apparente, sur le document liant les parties ;
Attendu cependant, que le délai d’une année, concernant la prescription, a été accepté par Mme X. lors de la signature du devis, faisant force de loi entre les parties, selon les dispositions de l’article 1134 du Code Civil ;
Que de plus, l’article 26 de la loi du 12 juin 2003, modifiant l’article 8 de la loi du 20 décembre 1982, énonce que les opérations de transport effectuées dans le cadre d’un déménagement sont considérées comme des transports de marchandises ;
Qu’il apparaît ainsi que la clause 19 du contrat liant les parties est conforme, à la volonté des parties, et à l’ordre public, aucune disposition légale, n’interdisant de limiter contractuellement, le délai de prescription de l’action pour agir et ce quelle que soit la qualification donnée au contrat ;
Attendu de plus que ce délai ne paraît pas constituer une stipulation abusive dès lors que les obligations mises à la charge du déménageur dans le contrat litigieux, sont des obligations de résultat faisant peser sur lui une présomption de responsabilité, applicable dans le cadre des règles spéciales du contrat de transport et qui sont tirées des articles L. 133-3 à L. 133-6 du Code de Commerce ;
Que le délai pour agir, n’apparaît pas davantage abusif du fait qu’il n’est pas indiqué en caractères suffisamment apparents, alors que Mme X. en a été informé en prenant connaissance des conditions générales de vente inscrites clairement et sans équivoque possible, au verso du devis qu’elle a signé et qui précisait que les conditions générales de vente se situaient au verso ;
Qu’il résulte des dispositions licites du contrat liant les parties, que la demande de Mme X. est prescrite, pour ne pas avoir été engagée dans le délai annal prévu au contrat, et qui expirait en date du 21 septembre 2004 [N.B. lire sans doute 2005, cf. supra] ;
[minute page 4] Attendu qu’il convient en conséquence de se prononcer au fond, sur la demande principale ;
Attendu que la SARL CATHELAIN demande que lui soit réglée une somme de 2.707,60 EUROS, correspondant au solde du prix de déménagement, Mme X. ayant lors de la signature du contrat versé une somme de 1.000 EUROS, à titre d’arrhes ;
Que la demanderesse réclame ce solde en se prévalant de l’accord donné par Mme X. sur la lettre de voiture de chargement datée du 20 août 2003 et des dispositions de l’article L. 132-8 du Code de Commerce, qui accorde valeur contractuelle à la lettre de voiture ;
Attendu qu’elle prétend que la somme initiale prévue sur le devis signé par Mme X., s’élevant à 3.169,40 EUROS, ne prenait pas en compte les conditions d’exécution du déménagement plus difficiles que celles annoncées initialement par Mme X. ;
Attendu cependant que la lettre de voiture expédition reprend les mêmes conditions que celles prévues sur le devis, à savoir, que le mobilier doit être livré au deuxième étage, sans ascenseur, et sans monte meubles ;
Que si la lettre de voiture expédition indique : « sous réserve de difficultés d’accès », aucune mention ou explication n’est formulée quant à cette réserve qui paraît être de précaution, mais sans cause contractuelle réelle ;
Qu’il y a donc lieu de considérer que l’accord initial concernant le prix du déménagement n’avait pas lieu d’être modifié à la livraison, la lettre de voiture expédition puis livraison, ne formulant aucune modification quant aux conditions d’exécution initiales du déménagement ; Qu’il convient en conséquence de condamner Mme X. à payer à la SARL CATHELAIN, la somme de 2.169,40 EUROS, correspondant au solde du prix du déménagement tel prévu dans le devis contrat signé par les parties en date du 6 juin 2003, outre les intérêts à compter de la date de l’assignation, valant mise en demeure, du 21 septembre 2005, au taux d’une fois et demi, le taux de l’intérêt légal en application de l’article 7 des conditions générales de vente du contrat de déménagement ;
Attendu qu’il paraît équitable en l’espèce de laisser supporter à chacune des parties, les frais irrépétibles qu’elle a pu engager et quine sont pas compris dans les dépens ;
Qu’il convient en conséquence de rejeter les demandes fondées sur l’article 700 du NCPC ; Attendu que Mine X. qui succombe à l’action principale, supportera les dépens de l’instance ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LE JUGE DE PROXIMITÉ, statuant publiquement, par jugement contradictoire et en dernier ressort,
DÉCLARE IRRECEVABLE, la demande reconventionnelle de Mme X.,
CONDAMNE Mme X. à payer à la SARL CATHELAIN, exerçant sous l’enseigne LES DÉMÉNAGEURS BRETONS - [adresse],
- la somme de 2.169,40 EUROS, outre les intérêts de retard sur la base d'une fois et demi le taux de l'intérêt légal, à compter du 21 septembre 2005,
DÉBOUTE les parties de toutes autres demandes.
CONDAMNE Mme X. aux dépens.
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