CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA PARIS (7e ch. sect. A), 27 octobre 1998

Nature : Décision
Titre : CA PARIS (7e ch. sect. A), 27 octobre 1998
Pays : France
Juridiction : Paris (CA), 7e ch. sect. A
Demande : 97/7303
Date : 27/10/1998
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Juris Data
Décision antérieure : TGI PARIS (4e ch. 1re sect.), 14 octobre 1996
Imprimer ce document

 

CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1098

CA PARIS (7e ch. sect. A), 27 octobre 1998 : RG n° 97/7303

Publication : Juris-Data n° 024533

 

Extrait : « Considérant que si l'article L. 132-1 alinéa 1er du code de la consommation dispose qu'est abusive une clause qui a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, l'alinéa 7 prévoit que « l'appréciation de caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat, ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert » ; Considérant que la clause litigieuse définit l'objet principal du contrat qui est d'accorder une garantie de ressources aux assurés licenciés, bénéficiaires des allocations ASSEDIC, qu'elle n'est donc pas susceptible d'être déclarée abusive mais est au contraire fidèle au principe du droit des assurances qui suppose l'existence d'un aléa ce qui n'est pas susceptible de discussion entre les parties ; Considérant que l'aléa doit exister, non seulement au moment de la formation du contrat, mais encore tout au long de son exécution durant laquelle la réalisation du risque doit rester imprévisible ».

 

COUR D’APPEL DE PARIS

SEPTIÈME CHAMBRE SECTION A

ARRÊT DU 27 OCTOBRE 1998

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro d'inscription au répertoire général : 97/7303. Pas de jonction. Décision dont appel : Jugement rendu le 14 octobre 1996 par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de Paris, 4ème chambre.

Date ordonnance de clôture : 7 septembre 1998.

 

APPELANT :

Madame X. épouse Y.

[adresse] Représentée par la SCP TEYTAUD, avoué, Assistée de Maître DOISE, avocat

 

INTIMÉ :

Société Union des Assurances de Paris UAP Incendie Accident

[adresse] Représentée par la SCP MIRA BETTAN, avoués associés, Assistée de Maître BAUDELOT, avocat

[minute page 2]

COMPOSITION DE LA COUR : Lors des débats et du délibéré : PRÉSIDENT : Monsieur Alain DECHEZELLES - CONSEILLERS : Monsieur Michel GASTEBOIS et Mme Viviane GRAEVE.

GREFFIER : Dominique BONHOMME-AUCLERE.

DÉBATS : A l'audience publique du 15 septembre 1998.

ARRÊT : contradictoire, prononcé publiquement par M. Alain DECHEZELLES, président, qui a signé la minute avec D. BONHOMME-AUCLERE, greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3] En mai 1991, le Crédit Lyonnais a accordé à Mme Y. un prêt de 250.000 Francs remboursable en 5 ans ; elle a adhéré à l'assurance garantie de ressource de l'UAP en même temps.

Le 27 juin 1994 Mme Y., ayant perdu son emploi, a sollicité la garantie de l'UAP qui l'a refusée au motif que la perte d'emploi n'était pas consécutive à un licenciement.

Aussi par exploit du 10 février 1995, Mme Y. a-t-elle fait assigner l'UAP aux fins de la voir condamnée avec exécution provisoire à lui régler 17.500 Francs au titre de l'indemnisation pour perte d'emploi prévue par le contrat n° […], du mois d'août 1994 au mois de février 1995, ainsi que 2.500 Francs par mois pour tout mois couru après le mois de février 1995 jusqu'à une reprise d'activité, et à défaut jusqu'au mois de juin 1996, outre 15.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

Elle a porté sa demande initiale à 32.500 Francs du mois d'août 1994 au mois d'août 1995 et au paiement de 2.500 Francs pour tout mois couru après le mois d'août 1995 jusqu'à une reprise d'activité ou jusqu'à la fin de la période de couverture en juin 1996, outre 15.000 Francs de dommages et intérêts et 15.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile.

L'UAP a conclu au débouté.

Par le jugement déféré du 14 octobre 1996, le tribunal a fait droit à ses défenses et a condamné la demanderesse aux dépens.

Celle-ci, appelante, demande à la Cour de condamner l'UAP à lui payer 57.500 Francs au titre de l'indemnisation de perte d'emploi prévue par le contrat UAP n° […], du mois d'août 1994 au mois de juin 1996, fin de la période de couverture contractuelle, les intérêts de droits courus à compter de chaque échéance impayée et dire que ces intérêts seront capitalisés dès lors qu'ils auront été dus pour une année entière ; 15 000 Francs à titre dommages et intérêts et 20.000 Francs au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile outre tous les dépens de première instance et d'appel.

[minute page 4] A l'appui de ses prétentions, elle expose que son contrat à durée indéterminée commencé le 3 mars 1969 a pris fin le 30 novembre 1993, ainsi qu'il résulte de son certificat de travail ; que les deux contrats à durée déterminée dont elle a bénéficié ont duré cinq mois et ne font pas obstacle à la prise en charge du remboursement des mensualités.

Elle estime que la clause excluant les fins de contrat de travail à durée déterminée est abusive et doit être réputée non écrite. Elle soutient que l'UAP n'a pas été de bonne foi en excipant de la clause ci-dessus et que les contrats à durée déterminée sont indissociables du contrat initial, dont ils ont pris la suite ; que la mauvaise foi de son adversaire justifie sa demande de dommages et intérêts.

L'UAP conclut à la confirmation ; au débouté de l'appelante et à sa condamnation à lui payer 15.000 Francs en application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et en tous les dépens.

Au soutien de ses défenses, elle indique que la police prévoit que le bénéfice est acquis aux assurés licenciés, et non à ceux arrivant au terme d'un contrat à durée déterminée, exclusion formellement prévue. Elle soutient que la clause litigieuse définit l'objet principal du contrat et ne peut être déclarée abusive, ceci d'autant plus qu'elle traduit seulement l'aléa, qui est le principe de tout contrat d'assurance.

Elle expose que les contrats à durée déterminée ne sont pas indissociables du contrat initial et qu'ils ont duré 8 mois et demi, ce qui fait obstacle à l'octroi de la garantie.

L'appelante réplique que la clause litigieuse n'entre pas dans la définition de l'objet principal de la police et qu'elle peut être déclarée abusive ; que l'aléa existait lors de la signature du contrat, seul moment à prendre en considération, car l'éventualité d'une mise au chômage était incertaine. Elle affirme ne pas avoir adhéré à la convention de reconversion et rappelle que son certificat de travail prouve qu'elle a été employée jusqu'au 30 novembre 1993, si bien que ses contrats à durée déterminée n'ont pas excédé six mois.

L'UAP répond que, aux termes de la notice, il appartient à son adversaire de démontrer que son chômage à compter du 1er mai 1994 est consécutif à un licenciement, et qu'elle a perçu des allocations ASSEDIC pour toute la période au titre de laquelle elle prétend à garantie. Elle souligne que [minute page 5] Mme Y. a été chômeuse à la suite de l'expiration d'un contrat à durée déterminée, ce qui est exclu des droits, que l'aléa doit exister non seulement au moment de la formation du contrat, mais encore en cours de contrat. Elle rappelle qu'elle est en droit de limiter sa garantie à certains types de risques ; que la durée des contrats à durée déterminée a été supérieure à 6 mois.

Par ultimes écritures, l'appelante souligne que la perte de son emploi n'est pas due à une décision volontaire de sa part, et que l'aléa existait bien à la signature du contrat.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Considérant que la police d'assurance couvre :

« les emprunteurs immobiliers ... du Crédit Lyonnais si lors de l'acceptation du prêt,

- ils exercent à titre principal une activité salariée depuis au moins 6 mois chez un même employeur,

- ils sont susceptibles de bénéficier d'allocations ASSEDIC, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée,

- ils ne sont pas au chômage ou en préavis de licenciement. »

« tout assuré salarié licencié et bénéficiant de l'une des allocations d'assurance chômage prévue par l'article L. 351-12 de la loi du 16 janvier 1979 ».

« L'assurance couvre le risque de chômage total consécutif à un licenciement et donnant lieu à attribution des allocations dont il est fait mention dans cette notice, l'assuré devant être toujours bénéficiaire de la garantie à l'origine du chômage.

Sont exclus : les fins de contrat de travail à durée déterminée (emplois temporaires, saisonniers...) »

Considérant que si l'article L. 132-1 alinéa 1er du code de la consommation dispose qu'est abusive une clause qui a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, l'alinéa 7 prévoit que « l'appréciation de caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat, ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert » ;

[minute page 6] Considérant que la clause litigieuse définit l'objet principal du contrat qui est d'accorder une garantie de ressources aux assurés licenciés, bénéficiaires des allocations ASSEDIC, qu'elle n'est donc pas susceptible d'être déclarée abusive mais est au contraire fidèle au principe du droit des assurances qui suppose l'existence d'un aléa ce qui n'est pas susceptible de discussion entre les parties ;

Considérant que l'aléa doit exister, non seulement au moment de la formation du contrat, mais encore tout au long de son exécution durant laquelle la réalisation du risque doit rester imprévisible ;

Considérant qu'il apparaît des pièces produites que le 4 août 1993, Maître LIBERT ès-qualité d'administrateur judiciaire de la société TREVOIS employeur de Mme Y. a notifié à celle-ci que par contrat de travail du 9 septembre 1993, elle a été engagée par la société V de V - division TREVOIS, repreneur, en qualité d'assistante du directeur des ventes pour une durée de 4 mois et demi du 18 août 1993 au 31 décembre 1993 ;

que par avenant de renouvellement du 20 décembre 1993 la société V de V division TREVOIS a renouvelé le contrat expirant le 31 décembre 1993 pour une durée de 4 mois expirant le 30 avril 1994 ;

qu'à compter du lendemain elle a été au chômage ;

Considérant que le risque garanti concerne le licenciement, et que l'expiration d'un contrat à durée déterminée est formellement exclue ;

Considérant que Mme Y. ne peut prétendre que les deux contrats à durée déterminée dont elle a bénéficié sont indissociables de son contrat initial à durée indéterminée, car ils en sont au contraire totalement distinct ayant fait l'objet de deux écrits séparés pour des durées précises ;

Considérant que Mme Y. ne peut prétendre non plus que son contrat à durée indéterminée est arrivé à expiration le 30 novembre 1993, puisqu'elle a signé le premier contrat à durée déterminée le 9 septembre 1993 à effet du 18 août précédent ;

que l'indication contraire figurant à son certificat de travail est erronée et ne saurait être créatrice de droit ; qu'il en est de même pour les bulletins de salaire faisant remonter son ancienneté au 1er mars 1969 ;

[minute page 7] Considérant qu'ayant fait l'objet de deux contrats à durée déterminée successifs elle a été employée sans interruption du 18 août 1993 au 30 avril 1994, pendant plus de 8 mois ;

qu'elle ne peut donc exciper de la clause contractuelle concernant la reprise d'activité pendant une durée inférieure ou égale à 6 mois ;

Considérant que l'UAP n'a pas manqué à son obligation de bonne foi, mais a respecté ses engagements contractuels en refusant de régler les remboursements au Crédit Lyonnais pour un chômage consécutif à la cessation à la date prévue d'un emploi à durée déterminée, exclusif d'aléa ;

Considérant que c'est donc à bon droit que les premiers juges ont débouté Mme Y. de toutes ses demandes ;

Considérant qu'il n'est pas inéquitable de laisser à la charge de l'UAP les frais irrépétibles qu'elle a exposés ;

Considérant que Mme Y. succombant supportera les dépens et sera donc déboutée de sa demande de ce chef.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement, en matière civile ;

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne Mme Fernande X. épouse Y. aux dépens d'appel, qui pourront être recouvrés par la SCP MIRA BETTAN, avoués associés conformément à l'article 699 du nouveau code de procédure civile.