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6365 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Assurance - Assurances de groupe - Assurance-crédit - Obligations de l’assureur - Perte d’emploi ou chômage

Nature : Synthèse
Titre : 6365 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Assurance - Assurances de groupe - Assurance-crédit - Obligations de l’assureur - Perte d’emploi ou chômage
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
Notice :
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6365 (10 juillet 2020)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CONTRAT

ASSURANCE - ASSURANCES DE GROUPE - ASSURANCE CRÉDIT (7) - GARANTIE PERTE D’EMPLOI OU CHÔMAGE

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)

 

Présentation. La garantie perte d’emploi est, avec l’invalidité, un des risques les plus redoutés par les consommateurs qui souscrivent un prêt, notamment immoibilier, les engageant sur une longue durée. Cependant, compte tenu de la fréquence de survenance de ce risque, il est logique que les contrats contiennent des clauses protégeant l’assureur, sous diverses formes.

A. RISQUE GARANTI : NOTION DE PERTE D’EMPLOI

Dénomination trompeuse des garanties. La Commission des clauses abusives recommande que ne soient pas dénommées « assurance chômage » les garanties ne couvrant que certains consommateurs privés d'emploi dans certaines circonstances et sous certaines conditions restrictives. Recomm. n° 90-01/A-15° : Cerclab n° 2182.

La Commission des clauses abusives recommande que la dénomination des garanties ne couvrant que certains consommateurs privés d'emploi dans certaines circonstances et sous certaines conditions restrictives soit adaptée à leur portée effective. Recomm. n° 90-01/A-16° : Cerclab n° 2182.

Comme pour la garantie invalidité, la Commission a fortement motivé sa position (considérants n° 53 à 57), en se fondant essentiellement sur l’écart pouvant exister entre les mentions du contrat sur les garanties offertes et la façon dont le consommateur peut les comprendre, avec la réalité des garanties effectivement souscrites. Elle a notamment souligné que ne sont généralement couverts que « le chômage donnant droit aux allocations prévues par le code du travail et aux allocations formation ». Sont donc exclues le plus souvent : les personnes ayant dépassé cinquante-cinq ou soixante ans (y compris si elles atteignent cet âge en cours de contrat, la garantie cessant alors de plein droit), ou de moins de vingt-cinq ans, les personnes titulaires d'un contrat de travail à durée déterminée, les personnes employées depuis moins de six mois ou de douze mois chez le même employeur. Sont également exclues les pertes d'emploi impliquant la mise à la retraite ou à la préretraite, les licenciements consécutifs à une faute grave, le chômage non indemnisé, le chômage consécutif à la fin d'un contrat de travail à durée déterminée, le chômage après démission même légitime et indemnisé par les Assedic, les ruptures de contrat de travail par suite de maladie ou d'invalidité. La Commission conclut (considérant n° 57) qu'ainsi, seule une partie des personnes privées d'emploi ou au chômage sont susceptibles de bénéficier des garanties prévues.

Exclusion de la fin des contrats à durée déterminée. La référence aux seuls désavantages subis par l’assuré, sans les comparer avec les avantages recueillis par l’assureur, ne permet pas de caractériser l’avantage excessif obtenu par celui-ci : cassation de l’arrêt ayant déclaré abusive une clause de garantie chômage excluant la couverture de l’arrivée à terme de contrats de travail à durée déterminée. Cass. civ. 1re, 12 mars 2002 : pourvoi n° 99-15711 ; arrêt n° 478 ; Bull. civ. I, n° 92 ; Cerclab n° 2033 (rédaction antérieure à la loi du 1er février 1995), cassant CA Versailles (3e ch.), 9 avril 1999 : RG n° 1996-8735 ; Cerclab n° 1743 (la clause procure un avantage excessif dès lors que, combinée à la disposition qui limite la durée de la garantie, elle assimile, en les sanctionnant de la même manière, les efforts consentis par l'assuré qui occupe un emploi fut-il précaire en cours de période de garantie, à une démission de son poste de travail ou à son inaction prolongée ; ayant pour conséquence paradoxale d'interdire à un assuré chômeur d'occuper un emploi disponible de durée déterminée pendant toute la période garantie, elle porte ainsi atteinte à son droit fondamental au travail).

Exigence d’une perception d’un revenu de remplacement. * Décisions refusant le contrôle. La clause d’un contrat d’assurance crédit relative à la garantie perte d'emploi qui prévoit que l'adhérent doit justifier qu'il bénéficie du revenu de remplacement prévu aux articles L. 351-1 à L. 351-26 C. trav. et que la garantie cesse à la date de cessation de versement du revenu de remplacement, rédigée de façon claire et compréhensible, définit l'objet principal du contrat et ne peut être déclarée abusive en vertu de l’ancien art. L. 132-1 al. 7 [212-1] C. consom. CA Douai (8e ch. sect. 1), 25 février 2016 : RG n° 15/03214 ; Cerclab n° 5560 (rejet du moyen des assurés qui, sous couvert du caractère prétendument abusif de la clause relative aux formalités à accomplir en cas de sinistre, et plus précisément aux pièces à fournir en pareille hypothèse, tend en réalité à mettre en cause l'efficacité de la garantie elle-même et ses modalités d'entrée en vigueur), sur appel de TI Valenciennes, 27 janvier 2015 : Dnd.

La clause définissant l'objet principal du contrat qui est d'accorder une garantie de ressources aux assurés licenciés, bénéficiaires des allocations Assedic, n'est pas abusive et est au contraire fidèle au principe du droit des assurances qui suppose l'existence d'un aléa, lequel doit exister, non seulement au moment de la formation du contrat, mais encore tout au long de son exécution durant laquelle la réalisation du risque doit rester imprévisible. CA Paris (7e ch. A), 27 octobre 1998 : RG n° 97/7303 ; Cerclab n° 1098 ; Juris-Data n° 024533 (clause excluant formellement la cessation d’un contrat à durée déterminée ; N.B. la référence au fait que la clause concerne l’objet principal du contrat est a priori erronée, s’agissant d’un contrat conclu en mai 1991), sur appel de TGI Paris (4e ch. 1re sect.) 14 octobre 1996 : RG n° 95/4303 ; jugt n° 6 ; Cerclab n° 1018 (problème non abordé ; clause appliquée purement et simplement). § N’est pas abusive la clause d’un contrat d’assurance perte d’emploi prévoyant que « la prise en charge... cesse, au plus tard, à la date de la reprise d'une activité rémunérée... ou au jour où les allocations uniques dégressives cessent d'être versée par les Assedic » se justifie par la nécessité d'éliminer de la garantie les situations d'inactivité résultant de la seule volonté de l'assuré, ce qui aurait pour effet de faire disparaître le caractère aléatoire du contrat d'assurance. CA Toulouse (3e ch.), 22 septembre 1998 : RG n° 97/03873 ; arrêt n° 533/98 ; Cerclab n° 837 ; Juris-Data n° 044134, sur appel de TI Toulouse, 28 avril 1997 : RG n° 11-96-002772 ; jugt n° 1333/97 ; Cerclab n° 767 (problème non abordé ; clause appliquée purement et simplement). § Absence de caractère abusif de la clause d’une garantie perte d’emploi exigeant que l’assuré justifie d’un revenu de remplacement tel que celui prévu aux anciens art. L. 351-1 s. C. trav., condition non remplie en l’espèce par l’obtention d’un RMI. CA Nancy (2e ch. civ.), 19 mai 2005 : RG n° 01/01646 ; arrêt n° 1139/2005 ; Cerclab n° 1547 (contrat conclu en 1997 ; clause conforme aux dispositions légales, connue de l’assuré lors de la souscription et qu’il n’a jamais contestée), confirmant TI Épinal, 8 février 2001 : RG n° 11-00-000032 et n° 11-00-000223 ; jugt n° 55 ; Cerclab n° 995 (problème non examiné).

Pour une assurance perte d’emploi exigeant trois mois de chômage continus : les primes prévues au contrat ont été proportionnées à la durée de couverture du risque proposé de sorte que l’assuré ne peut valablement soutenir que la clause subordonnant la prise en charge du risque à la perception ininterrompue des Assedic pendant trois mois aurait pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties à son détriment. CA Douai (8e ch. sect. 1), 29 septembre 2005 : RG n° 04/05952 ; Cerclab n° 1680 ; Juris-Data n° 292392, sur appel de TI Avesnes-sur-Helpe 21 juin 2004 : Dnd.

Exigence d’une lettre de licenciement. Absence de caractère abusif de la clause d’une garantie perte d’emploi exigeant que l’assuré justifie d’une lettre de licenciement. CA Nancy (2e ch. civ.), 19 mai 2005 : RG n° 01/01646 ; arrêt n° 1139/2005 ; Cerclab n° 1547 (clause conforme aux dispositions légales, connue de l’assuré lors de la souscription et qu’il n’a jamais contestée), confirmant TI Épinal, 8 février 2001 : RG n° 11-00-000032 et n° 11-00-000223 ; jugt n° 55 ; Cerclab n° 995 (problème non examiné).

Limitation dans le temps de la garantie. La cour d’appel qui déduit de ses constatations que la clause définissant l’incapacité de travail et prévoyant que la garantie prend fin, notamment, lors du départ en retraite de l’assuré, quelle qu’en soit la cause, y compris pour inaptitude au travail, fixe les limites du risque assuré et est dépourvue d’ambiguïté, retient à bon droit que les assurés ne pouvaient utilement invoquer les dispositions du code de la consommation relatives aux clauses abusives. Cass. civ 1re, 30 novembre 2016 : pourvois n° 15-21724 et n° 15-23004 ; arrêt n° 1361 ; Cerclab n° 6566, rejetant le pourvoi contre CA Paris (pôle 2 ch. 5), 26 mai 2015 : RG n° 13/12396 ; Cerclab n° 5278 (résumé ci-dessous, arrêt contrôlant à titre surabondant).

Pour l’impossibilité d’examiner le caractère abusif d’une clause portant sur l’objet principal du contrat, V. aussi : CA Toulouse (3e ch. sect. 1), 15 octobre 2013 : RG n° 12/00762 ; arrêt n° 617/13, Cerclab n° 4478 (assurance maladie, accident du travail et perte d’emploi ; limitation à douze mois pour chacune des garanties ; l’épuisement des droits au titre de la garantie incapacité de travail n’exclut pas la continuation du versement compte tenu de la persistance des autres garanties), sur appel de TI Muret, 3 février 2012 : RG n° 11-10-0006 ; Dnd.

V. cependant, rappelant ce principe tout en écartant le caractère abusif à titre surabondant : CA Paris (pôle 2 ch. 5), 26 mai 2015 : RG n° 13/12396 ; Cerclab n° 5278 ; Juris-Data n° 2015-012809 (assurance d’un crédit immobilier ; clause non ambiguë faisant cesser la garantie incapacité de travail lors de l'interruption totale de l'activité professionnelle, c'est-à-dire soit à 65 ans, soit à la date de la préretraite ou de la retraite, qu'elle qu'en soit la cause, y compris pour inaptitude au travail ; clause fixant les limites du risque assuré relevant de l’ancien art. L. 132-1 al. 7 [212-1 al. 3] C. consom., et en tout état de cause non déséquilibrée : puisque le risque en cause est intimement lié par sa définition contractuelle à l'exercice d'une activité professionnelle, la cessation définitive de celle-ci peut, dès lors, en constituer le terme contractuel), sur appel de TGI Paris, 17 juin 2013 : RG n° 11/18125 ; Dnd, pourvoi rejeté par Cass. civ 1re, 30 novembre 2016 : précité (V. ci-dessus).

V. pour un contrôle pur et simple : CA Nîmes (ch. civ. 2 A), 25 juin 2009 : RG n° 08/01285 ; Cerclab n° 2455 (assurance crédit ; clause claire écartant la garantie perte d’emploi pour les personnes âgées de plus de 52 ans, âge dépassé par l’assurée lors de la conclusion du contrat ; clause non abusive, relevant de l'équilibre économique de l'opération proposée, l’assurée pouvant négocier une telle garantie ; arrêt relevant qu’aucune cotisation n’avait été perçue à ce titre), pourvoi rejeté par Cass. civ. 2e, 3 février 2011 : pourvoi n° 10-13797 ; Cerclab n° 5219 (dès lors qu’il ne résulte ni de l’arrêt, ni des productions, que l’assurée ait conclu devant les juges du fond à la responsabilité de la banque pour ne pas l’avoir éclairée sur l’adéquation des risques couverts à sa situation personnelle d’emprunteur, il s’ensuit que le moyen est nouveau, mélangé de fait et de droit, et comme tel irrecevable), sur appel de TI Orange, 26 février 2008 : Dnd.

Nature de la garantie : report d’échéances. Certaines assurances couvrent le risque de perte d’emploi, non par une prise en charge temporaire des échéances du prêt, mais par un report de ces échéances en fin de contrat. Depuis la loi du 1er février 1995, à condition d’être stipulée clairement, ces clauses participent de la définition de l’engagement de l’assureur et échappent donc normalement au contrôle de leur caractère abusif. Certaines décisions, antérieures à ce texte, mais parfois aussi postérieures, effectuent cependant cette vérification, en examinant différents arguments, notamment la clarté de la stipulation, le nombre d’échéances prises en compte, la durée de la franchise.

* Droit antérieur à la loi du 1er février 1995. N’est pas abusive, faute de créer un déséquilibre significatif, la clause d’une assurance-crédit prévoyant, passée une période de franchise de trois mois, un report en fin de prêt des mensualités venant à échéance pendant la période de chômage, dans la limite de 18 mois, renouvelable une fois en cas de nouvelle perte d’emploi ; l’avantage offert est réel puisque ce report n'entraîne aucun surcoût pour l'emprunteur, le manque à gagner du prêteur étant pris en charge par l’assureur, alors que l’emprunteur ne paie qu’une prime d’un montant modeste de 2,73 euros par mois et par personne assurée ; les emprunteurs ne montrent pas en quoi les stipulations de la clause en litige seraient contraires aux recommandations de cette commission, notamment la recommandation n° 90-01 invoquée, qui n'ont au surplus aucune force contraignante ; enfin, même si l’art. L. 313-12 C. consom. prévoit expressément en cas de licenciement de l'emprunteur, la possibilité pour le juge saisi de reporter les échéances du prêt sans que cette opération ne génère d'intérêts supplémentaires, ce texte n'a été créé que par une loi de 1993 qui n'existait pas lors de la conclusion du prêt en 1987, et, en tout état de cause, cette clause présente l’avantage de consacrer un droit au report dès lors que les conditions stipulées sont remplies, alors que ce texte, tout comme l’ancien art. 1244-1 C. civ. [1343-5 nouveau] suppose une action judiciaire et laisse au juge un pouvoir d’appréciation. CA Nancy (2e ch. civ.), 31 mai 2012 : RG n° 09/00702 ; Cerclab n° 3891 (arrêt estimant par ailleurs que le mécanisme d'assurance mis en place est exposé clairement et qu’en outre, cette clause faisant partie d'un acte passé en la forme authentique, elle a donc été lue et explicitée par le notaire rédacteur de l'acte et les emprunteurs ont eu la possibilité d'interroger ce professionnel si des doutes ou incompréhensions subsistaient), rejetant le pourvoi contre TGI Briey, 15 janvier 2009 : RG n° 07/00428 ; Dnd. § N’est pas abusive la clause d’un contrat d’un contrat de prêt qui, outre qu'elle est rédigée de façon claire et compréhensible, permet un report des échéances du prêt sans intérêts supplémentaires à l'issue de la période de chômage, et bénéficie aux emprunteurs, même si cette période est limitée à 18 mois. CA Paris (pôle 4 ch. 8), 5 avril 2012 : RG n° 11/10904 ; Cerclab n° 3770, sur appel de TGI Créteil, 5 avril 2011 : RG n° 11/01397 ; Dnd. § N’est pas abusive la clause de report des échéances en fin de prêt dès lors qu’elle présente un avantage indéniable pour l'assuré qui se trouve momentanément en difficulté financière, l'assureur supportant de son côté les intérêts de report et qu'une prise en charge totale aurait eu pour contrepartie une cotisation nettement plus élevée que les 0,40 % dus au titre de la garantie chômage. CA Riom (ch. com.), 29 août 2012 : RG n° 11/02338 ; Cerclab n° 3039 (contrat conclu en 1989, même si l’arrêt se réfère au déséquilibre significatif ; clause stipulant clairement un report en fin de prêt des mensualités venant à échéance pendant la période de chômage, à compter de la quatrième échéance et dans la limite de dix huit mois par période de chômage), cassé par Cass. civ. 1re, 1er octobre 2014 : pourvoi n° 12-27214 ; Cerclab n° 4874 (cassation fondée sur l’application prématurée de la loi du 1er février 1995 à un contrat conclu en 1989), sur appel de TGI Cusset, 1er août 2011 : Dnd, et sur renvoi CA Limoges (ch. civ.), 17 février 2016 : RG n° 14/01364 ; Legifrance ; Cerclab n° 5509 (maintien de la solution : montant de la prime perçue par l'assureur de 0,40 % du montant de l'échéance n'apparaissant pas excessif au regard de la garantie consentie, alors que la prise en charge du règlement des échéances de remboursement du prêt par l'assureur aurait nécessairement eu pour contrepartie une prime d'assurance sensiblement plus élevée ; clause litigieuse n'ayant pas pour effet de conférer au professionnel un avantage excessif).

* Clauses abusives en raison de leur rédaction trompeuse. Caractère abusif d’une clause obscure pour un lecteur profane, laissant croire que l’assurance offrait une garantie totale, dans la limite de 18 mois par période de chômage et un délai de carence de 90 jours, alors qu’elle se limitait à un report des échéances. CA Paris (15e ch. B), 15 juin 2001 : RG n° 1998/17051 ; Cerclab n° 914 ; Juris-Data n° 153910 (arrêt admettant l’existence d’un déséquilibre significatif, alors que le contrat avait été conclu en 1984), sur appel de TGI Paris (9e ch. 1re sect.), 13 janvier 1998 : RG n° 97/17051 ; Cerclab n° 1014 (problème non examiné).

B. MODIFICATION DU CONTRAT

Modification du contrat. Aux termes de l’art. L. 312-9 C. consom. (rédaction inchangée sur ce point par la loi du 1er juillet 2010), devenu l’art. L. 313-29 C. consom. (ord. 14 mars 2016) «Lorsque le prêteur propose à l'emprunteur un contrat d'assurance en vue de garantir en cas de survenance d'un des risques que ce contrat définit, soit le remboursement total ou partiel du montant du prêt restant dû, soit le paiement de tout ou partie des échéances dudit prêt, les dispositions suivantes sont obligatoirement appliquées : […] 2° Toute modification apportée ultérieurement à la définition des risques garantis, aux modalités de la mise en jeu de l'assurance ou à la tarification du contrat est inopposable à l'emprunteur qui n'y a pas donné son acceptation ».

* Modification des risques. Apparaît critiquable au sens de l’ancien art. L. 312-9 [313-29] C. consom., la clause autorisant l’assureur et l’établissement de crédit à imposer à l’adhérent des modifications du contrat, en raison de l’évolution des textes législatifs, réglementaires et des conventions concernant la définition et l'indemnisation du chômage, dans la mesure où elle pourrait s’appliquer à des assurés ayant adhéré, certes après une modification législative ou réglementaire, mais au vu de formulaires d'adhésion et de notices d'information eux-mêmes non encore modifiés. TGI Paris (1re ch. 1re sect.), 1er mars 1995 : RG n° 11447/94 ; Cerclab n° 424 ; RJDA 6/95, n° 772 (assureur acceptant de modifier la clause).

* Modification du montant des primes. N’est pas abusive la clause d’une assurance de groupe contre le chômage, stipulant que l'assureur s'engage à ne pas modifier les conditions de souscription pendant les trois premières années de l'adhésion, mais qu’il se réserve la possibilité de revoir les conditions à partir de la quatrième selon l'évolution du risque chômage, dès lors qu’une telle clause n’apparaît pas contraire à la recommandation puisqu’il n’est pas soutenu que l’assureur pouvait peser d’une manière quelconque sur les éléments pris en considération pour la modification du taux de la cotisation relative à l'assurance chômage, que l'augmentation en cause a fait l'objet de discussions entre l'assureur et l'organisme souscripteur du contrat de Groupe, dont la forme mutualiste implique une représentation de l'intérêt collectif des adhérents et qu’enfin l’assureur, d’une part, établit qu’après révision son tarif n’excède pas les taux pratiqués par les organismes concurrents, d’autre part produit des documents comptables faisant ressortir une évolution extrêmement défavorable de la balance entre les primes encaissées et le montant des indemnités pour l'assurance chômage, qui est passé d'un solde légèrement positif en 1987 à un déficit de plus de 100 millions de francs en 1993. CA Colmar (2e ch. civ.), 16 juin 1995 : RG n° 4336/94 ; Cerclab n° 1416 (clause non illicite), infirmant sur ce point TGI Strasbourg (3e ch. civ.), 19 juillet 1994 : RG n° 94-3538 ; site CCA ; Cerclab n° 406 (jugement estimant que la clause est abusive en ce que la révision des cotisations est prévue dans l’art. relatif à la définition des risques garantis, alors que l’art. consacré aux cotisations fait l'impasse sur leur variabilité, l’avantage excessif découlant de la privation pour le consommateur de la faculté de comparer plusieurs offres de prêt, et ordonnant le déplacement de la clause ; clause en revanche non illicite, au regard de l’art. L. 140-4 C. assur., qui n’interdit que les modifications relatives à la définition des risques garantis et aux modalités de la mise en jeu de l'assurance, la loi étant muette sur toute autre modification, ce qui autorise le retour au droit commun, surtout s'agissant d'une structure mutualiste au sein de laquelle les sociétaires sont représentés).

Comp. : est abusive la clause qui ne subordonne les augmentations de primes à aucune condition édictée dans le contrat, qui ne fait référence à aucun critère, à aucun indice objectifs extérieurs à la compagnie, conférant à celle-ci une faculté annuelle de résiliation qu’elle peut utiliser en cas de refus du souscripteur. TGI Lyon (4e ch.), 23 mai 1996 : RG n° 94/18557 ; Cerclab n° 1088 (contrat conclu le 23 décembre 1992, révision portée à la connaissance de l’assuré le 14 septembre 1993 ; N.B. le jugement analyse le contrat comme offrant une faculté de résiliation annuelle mentionnée par la clause, alors que celle-ci évoque aussi un contrat annuel reconductible ; jugement visant la recommandation).

C. PRISE D’EFFET DE LA GARANTIE

Délai d’attente. * Juges du fond. Pour des décisions maintenant le contrôle après la loi du 1er février 1995 et excluant tout caractère abusif : CA Nancy (2e ch. civ.), 1er juin 2006 : RG n° 04/00184 ; arrêt n° 1618/06 ; Cerclab n° 1523 ; Juris-Data n° 330232 (contrat conclu en 2000 ; n’est pas abusive la clause d’un contrat garantissant l’incapacité de travail et la perte d’emploi, qui prévoit un délai de non prise en charge, qualifié par la cour de « carence », alors que la stipulation d’un tel délai est d’usage dans les contrats d’assurance, que sa durée de 120 jours pour un contrat de crédit de 24 mois n’est pas anormale et que la clause est libellée en caractères gras et apparents), sur appel de TI Nancy, 18 novembre 2003 : RG n° 909/2003 ; jugt n° 1515/03 ; Cerclab n° 1427 (problème non abordé).

* Modalités d’appréciation du délai d’attente : prise en compte de la seule durée initiale du contrat. Pour apprécier le caractère abusif d’un délai de « franchise » dans un contrat d’assurance garantissant une ouverture de crédit conclue pour une année renouvelable, la Cour de cassation a estimé que le juge devait se placer à la date de la conclusion du contrat, où la reconduction de l’ouverture de crédit était éventuelle, et non en tenant compte de la durée totale de celle-ci. Cass. civ. 1re, 26 février 2002 : pourvoi n° 99-13912 ; arrêt n° 365 ; Bull. civ. I, n° 72 ; Cerclab n° 2036, cassant CA Aix-en-Provence (11e ch.), 3 février 1999 : RG n° 94/2500 ; arrêt n° 212 ; Cerclab n° 753 (arrêt écartant l’argument tiré de la durée en comparant le délai de 12 mois à la durée d’exécution du contrat de près de quatre ans),

V. cependant, pour un délai d’attente, plutôt dans le sens de l’arrêt cassé : pour apprécier le caractère abusif d’un délai d’attente de neuf mois, il ne saurait être allégué d'une durée du prêt limitée à un an, s'agissant d'une ouverture de crédit dont le caractère renouvelable par tacite reconduction empêche de fixer une durée fixe et certaine, et le contrat en cause ayant lui-même atteint une durée effective de plus de quatre années à la date de l'ordonnance d'injonction de payer. CA Nîmes (2e ch. A), 19 mars 1998 : RG n° 96/3575 ; arrêt n° 204 ; Site CCA ; Cerclab n° 1075 ; Juris-Data n° 030537 (contrat conclu en 1990, licenciements en 1991 et 1994).

* Appréciation de la durée du délai. Pour des clauses jugées non abusives : n’est pas abusive la clause excluant la prise en charge des conséquences d’un licenciement de droit commun s’il survient durant les six premiers mois de la prise d’effet du contrat d’assurance et d’un licenciement économique, s'il intervient au cours de la première année d'adhésion, dès lors que ces délais ne sont en l’espèce nullement excessifs, compte tenu de la durée des procédures de licenciement économique, du fait que les salariés peuvent en déceler les prémices bien avant qu'elles ne débutent effectivement et de la durée des contrats de prêts immobiliers de 15 à 20 ans. TGI Paris (1re ch. 1re sect.), 1er mars 1995 : RG n° 11447/94 ; Cerclab n° 424 ; RJDA 6/95, n° 772 (N.B. le jugement et les parties qualifient le délai de carence, alors qu’en l’espèce c’est bien la couverture du risque qui était en elle-même exclue ; la combinaison des deux clauses peut repousser la prise en charge de 18 mois : douze au titre du licenciement économique plus six pour un second licenciement après une reprise d’emploi). § N’est pas abusive la clause d’un contrat d’assurance crédit, couvrant le risque de chômage, qui écarte toute garantie lorsque l'arrêt de travail survient dans les 9 mois qui suivent la date d'effet du contrat, dans la mesure où ce délai n'apparaît pas excessif au regard du risque de fraude et de la connaissance que peut avoir le souscripteur du risque de licenciement qui pourrait peser sur lui à la date de la souscription du contrat, et de ce fait n'est pas d'une durée telle qu'il dénature les garanties du contrat. CA Nîmes (2e ch. A), 19 mars 1998 : RG n° 96/3575 ; arrêt n° 204 ; Site CCA ; Cerclab n° 1075 ; Juris-Data n° 030537 (contrat conclu en 1990, licenciements en 1991 et 1994 ; durée ne dénaturant pas les garanties du contrat ; arrêt s’appuyant directement sur la recommandation), confirmant TI Carpentras, 25 avril 1996 : RG n° 11-94-00523 ; jugt n° 268 ; Cerclab n° 46 (mêmes arguments ; jugement appliquant à tort la loi du 1er février 1995). § V. aussi : CA Rouen (2e ch.), 13 mai 2004 : RG n° 03/01177 ; Cerclab n° 976 (contrat conclu en septembre 1999, la perte d’emploi étant survenue en janvier 2000 ; absence de caractère abusif de la clause prévoyant un délai d’attente de 12 mois, pour un crédit conclu pour 15 ans, alors qu’en outre le contrat prévoit une garantie décès, invalidité et incapacité temporaire ; clause, qualifiée par l’arrêt de délai de carence ou de délai d’attente mais pas de clause d’exclusion), confirmant TI Le Havre, 20 novembre 2002 : RG n° 11-02-000268 ; jugt n° 2002/1477 ; Cerclab n° 68 (absence de preuve que la clause dénature la garantie au regard du rapport de 1 à 15 existant entre le délai d'attente et la durée du prêt, cette période d’attente ayant été clairement stipulée, y compris dans sa présentation claire et aérée, qui respecte le corps 8, même si le contrat d’assurance n’est pas soumis à l’art. R. 311-6 C. consom.).

* Clauses abusives en raison de leur rédaction. V. estimant l’argument insuffisant : TGI Paris (1re ch. 1re sect.), 1er mars 1995 : RG n° 11447/94 ; Cerclab n° 424 ; RJDA 6/95, n° 772 (refus d’admettre l’existence d’un avantage excessif en raison de la simple imprécision de rédaction de la clause, évoquant d’abord le licenciement « collectif et/ou économique », puis « collectif ou économique », dès lors que les licenciements économiques sont à l'évidence les seuls visés).

Influence de la date de déclaration du sinistre. N’est pas abusive la clause reportant la prise d’effet de la garantie à la date de la déclaration du sinistre de chômage, lorsque celle-ci n’a pas été faite dans le délai tout à fait raisonnable de 180 jours, dès lors qu’une déclaration tardive ne permet pas à l'assureur de prendre le sinistre en compte dans sa gestion des risques assurés et que ce report constitue la réparation mesurée du préjudice subi par l'assureur du fait de cette impossibilité. CA Versailles (1re ch. B), 24 mars 2000 : RG n° 1998/4317 ; Cerclab n° 1740 ; Lamyline (clause ne constituant pas une clause de déchéance, dès lors que la garantie n’est pas exclue mais que ses effets sont reportés dans le temps, ce qui exclut l’application de l’art. L. 113-2 C. assur. ; clause conforme à la recommandation n° 90-01/B-9, qui estime que « la seule sanction admissible étant l'indemnité mesurée au dommage effectivement subi par l'assureur du fait de la négligence constatée »), infirmant TI Ecouen, 3 février 1998 : Dnd.

V. aussi : TGI Paris (5e ch. 2e sect.), 8 décembre 2005 : RG n° 04/17525 ; jugt n° 9 ; Cerclab n° 3837 (application stricte, sans examen de son éventuel caractère abusif, de la clause prévoyant, qu’à défaut de sollicitation d’une prise en charge dans les six mois de l’arrêt de travail, le début de la prise en charge ne pourra être antérieur à la date de réception du dossier), sur appel CA Paris (7e ch. A), 23 octobre 2007 : RG n° 06/03007 ; Cerclab n° 2978 ; Juris-Data n° 356820.

Délai de franchise. * Modalités d’appréciation du délai : prise en compte de la seule durée initiale du contrat. Pour apprécier le caractère abusif d’un délai de franchise dans un contrat d’assurance garantissant une ouverture de crédit conclue pour une année renouvelable, le juge doit se placer à la date de la conclusion du contrat, où la reconduction de l’ouverture de crédit était éventuelle, et non en tenant compte de la durée totale de celle-ci. Cass. civ. 1re, 26 février 2002 : pourvoi n° 99-13912 ; arrêt n° 365 ; Bull. civ. I, n° 72 ; Cerclab n° 2036 (contrat conclu en 1989, arrêt de travail en 1992 ; délai de franchise de douze mois pour l’arrêt total de travail et de dix-huit mois pour le chomage, alors que l’ouverture de crédit était conclue pour une durée d’un an renouvelable), cassant CA Aix-en-Provence (11e ch.), 3 février 1999 : RG n° 94/2500 ; arrêt n° 212 ; Cerclab n° 753 (aucun texte n'interdit à l'assureur de subordonner sa garantie « incapacité temporaire » à une période de franchise ; arrêt écartant l’argument tiré de la durée en comparant le délai de 12 mois à la durée d’exécution du contrat de près de quatre ans), infirmant TI Draguignan, 30 novembre 1993 : RG n° 465/93 ; jugt n° 897/93 ; Cerclab n° 58 (clause abusive).

* Appréciation de la durée du délai. Pour des clauses jugées abusives, V. par exemple : TI Draguignan, 30 novembre 1993 : RG n° 465/93 ; jugt n° 897/93 ; Cerclab n° 58 ; précité (contrat antérieur à la loi de 1995 ; le délai de franchise habituellement stipulé dans les contrats d'assurances complémentaires aux conventions de prêt à la consommation s'étend à une période de 30 à 90 jours : est abusive la clause d’un contrat d'ouverture de crédit d'une année, renouvelable par tacite reconduction, prévoyant une durée exceptionnelle de 12 mois) - CA Nîmes (2e ch. A), 19 mars 1998 : RG n° 96/3575 ; arrêt n° 204 ; Site CCA ; Cerclab n° 1075 ; Juris-Data n° 030537 (contrat conclu en 1990, licenciements en 1991 et 1994 ; est abusive, conformément à recommandation n° 90-1/B-6, la clause d’un contrat d’assurance crédit, couvrant le risque de chômage, qui prévoit un délai de « franchise absolue » de 18 mois ininterrompu en cas de chômage, dans la mesure où ce délai est exagéré notamment du fait que les indemnités Assedic en cas de chômage ne sont perçues généralement que pendant une durée maximum de 12 mois, ce qui diminue tellement l'intérêt du souscripteur qu'il dénature la garantie chômage du contrat ; argument de l’assureur rejeté : le fait que le but principal de la garantie soit de solder la totalité du crédit et non de régler les échéances de façon continue, le souscripteur étant en tout état de cause en droit d'attendre à l'issue d'un délai raisonnable de franchise, une prise en charge par l'assureur, en exécution du contrat souscrit, de tous ses engagements à l'égard du prêteur quelles qu'en soient les modalités de règlement), confirmant TI Carpentras, 25 avril 1996 : RG n° 11-94-00523 ; jugt n° 268 ; Cerclab n° 46 (« le montant de cette franchise est de nature abusive car elle ruine l'intérêt pour l'assuré de souscrire un contrat d'assurance » ; jugement appliquant à tort la loi du 1er février 1995).

V. inversement, pour des clauses jugées non abusives, compte tenu du caractère raisonnable du délai : CA Montpellier (1re ch. D), 14 octobre 2009 : RG n° 08/06897 ; Cerclab n° 2447 (délai de 90 jours et prise en charge limitée à 12 mais idée de contrepartie), sur appel de TI Ceret, 2 septembre 2008 : RG n° 11-08-0038 ; Dnd - CA Angers (ch. com.), 31 mai 2011 : RG n° 03/01503 ; Cerclab n° 3203 (assurance chômage facultative, limitée à 12 mois, après une période de franchise de 90 jours ; absence de preuve « in concreto » du caractère abusif de la clause, un visa général de la recommandation n° 97-01 étant insuffisant), à la suite de CA Angers (ch. com.), 5 octobre 2004 : RG n° 03/01503 ; Dnd, sur appel de TI Angers, 28 mars 2003 : RG n° 11-02-000705 ; jugt n° 716/03 ; Cerclab n° 3394 (problème non examiné).