CA LYON (1re ch. civ.), 3 février 2009
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1206
CA LYON (1re ch. civ.), 3 février 2009 : RG n° 08/00733
Publication : Juris-Data n° 2009-002192 ; JCP 6 juillet 2009, n° 28, Page région, n° 89
Extrait : « La société Notin réclame le versement de l'indemnité équivalente à 20 % du prix prévue par l'article 5 du bon de commande en cas de rupture du contrat par l'acquéreur pour un motif injustifié. Outre le fait que le motif injustifié n'est pas défini, est abusive la [minute page 4] clause du contrat de vente prévoyant que le client est tenu de prendre livraison du véhicule dans les sept jours suivant la mise à disposition, que passé ce délai, et une mise en demeure par le vendeur étant restée infructueuse, la vente sera résiliée de plein droit, l'acompte lui restant acquis à titre d'indemnité, dans la mesure où elle a pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de retenir de plein droit des sommes versées par le consommateur lorsque celui-ci renonce à exécuter le contrat, sans prévoir le même droit, pour ce consommateur, de percevoir une indemnité d'un montant équivalent de la part du professionnel lorsque c'est celui-ci qui y renonce. Une telle clause contraint ainsi le consommateur à rechercher une réparation judiciaire, ce qui crée un déséquilibre entre les droits et obligations des parties au détriment de celui-ci, comme l'a énoncé la commission des clauses abusives dans ses recommandations n° 91-02 et n° 04-02, en ce qu'elle sanctionne plus lourdement l'inexécution du consommateur que celle du professionnel. Cette clause doit donc être réputée non écrite en application de l'article L 132-1 du Code de la consommation et le point d) de l'annexe audit code (Cour de cassation, ch. civ.1, 14 novembre 2006). »
COUR D’APPEL DE LYON
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE B
ARRÊT DU 3 FÉVRIER 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G n° 08/00733. Décision du Tribunal de Grande Instance de MONTBRISON au fond du 23 novembre 2007 : RG N°2006/1068.
APPELANTS :
Monsieur X.
[adresse], représenté par Maître VERRIERE, avoué à la Cour, assisté de Maître DENIS-GUICHARD avocat au barreau de Lyon
Madame Y. épouse X.
[adresse], représentée par Maître VERRIERE, avoué à la Cour, assistée de Maître DENIS-GUICHARD avocat au barreau de Lyon
INTIMÉE :
SOCIÉTÉ NOTIN CAMPING-CARS
[adresse], représentée par la SCP LIGIER DE MAUROY- LIGIER, avoués à la Cour, assistée de Maître CORNILLON avocat au barreau de Saint-Étienne
[minute page 2]
L'instruction a été clôturée le 30 décembre 2008.
L'audience de plaidoiries a eu lieu le 5 janvier 2009.
L'affaire a été mise en délibéré au 3 février 2009.
COMPOSITION DE LA COUR, lors des débats et du délibéré :
Président : Monsieur BAIZET Conseiller : Monsieur ROUX Conseiller : Madame MORIN
Greffier : Madame WICKER pendant les débats uniquement
A l'audience Mme MORIN a fait son rapport conformément à l'article 785 du Code de procédure civile.
ARRÊT : contradictoire ; prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ; signé par Monsieur BAIZET, président et par Madame WICKER greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Les époux X. ont acheté à la société Notin le 27 octobre 2004 un camping-car (modèle Palma) pour le prix de 20.000 €. Le 15 septembre 2005, ils ont acheté un autre camping-car (modèle Sofia) pour le prix de 48.900 €, dont la livraison était prévue pour la fin de l'année 2005. Il était convenu que le vendeur reprendrait le premier camping-car pour le prix de 25.000 €.
Fin 2005, les époux X. n'ont pas pris possession de leur nouveau véhicule. Le 4 février 2006, ils ont sollicité l'annulation de la seconde vente pour raison de santé et réclamé le versement de la somme de 25.000 € correspondant à la vente de leur premier véhicule ainsi que la restitution du chèque de 5.000 € remis lors de la commande du second camping-car. Après avoir refusé d'annuler la vente, la société Notin a considéré dans sa lettre du 21 février 2006 que le contrat était résilié de plein droit et a précisé qu'elle conservait l'acompte versé à titre d'indemnité contractuelle, tout en invitant les époux X. à récupérer le premier véhicule dans les plus brefs délais.
Les époux X. ont saisi le 18 décembre 2006 le tribunal de grande instance de Montbrison, qui, dans son jugement rendu le 23 novembre 2007, a prononcé la résolution du contrat de vente conclu le 15 septembre 2005, leur a ordonné de reprendre possession de leur camping-car Palma sous astreinte, s'est déclaré incompétent pour statuer sur la validité de l'opposition formée par Madame X. au paiement du chèque d'acompte remis lors de la seconde vente et a débouté la société Notin de sa demande en paiement de la pénalité prévue par l'article 5 du contrat, au motif qu'il s'agissait d'une clause abusive. L'exécution provisoire a été ordonnée.
Les époux X. ont relevé appel. Dans leurs conclusions reçues par le greffe le 17 novembre 2008, ils demandent à la cour :
- de constater que la société Notin a acheté le 22 septembre 2005 leur camping-car Palma et de la condamner à leur en payer le prix convenu,
- subsidiairement, si la vente du 22 septembre 2005 est annulée, de condamner la société Notin à leur verser la somme de 15.000 € à titre de dommages-intérêts,
[minute page 3] Ils soutiennent en effet que la reprise de leur premier camping-car liée à la vente du second véhicule a été abandonnée par la société Notin qui a préféré l'acheter le 22 septembre 2005 pour le mettre en vente sans pour autant leur en payer le prix. Si cette vente devait être annulée, ils considèrent qu'ils ont été privés depuis le 22 septembre 2005 jusqu'au 9 février 2008 (date à laquelle la société Notin leur a fourni un certificat fictif de vente) de la jouissance de leur véhicule, qui a subi une décote importante.
Ils sollicitent la confirmation du jugement sur le rejet des demandes de la société Notin consécutives à l'annulation de la vente du second camping-car.
Ils réclament la somme de 1.500 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Dans ses écritures reçues le 26 novembre 2008, la société Notin soutient que les appelants, qui demandaient en première instance l'annulation de la vente sans pénalité et la restitution du camping-car Palma ne peuvent en appel soutenir que ce véhicule a été vendu et en réclamer le prix, s'agissant d'une demande nouvelle au sens de l'article 564 du Code de procédure civile. En tout état de cause la reprise du véhicule Palma ne constitue qu'une modalité du paiement du prix du nouveau modèle acquis par les époux X., qui ne pouvait devenir effective que si le contrat de vente principal avait été exécuté. La société Notin demande par conséquent à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a prononcé la résolution de la vente du 15 septembre 2005 et ordonné aux époux X. de reprendre possession du véhicule Palma. Elle maintient sa demande en paiement de l'indemnité contractuelle de 9.780 € justifiée par le comportement fautif des acquéreurs, qui ne peut être assimilée à une clause abusive. Elle réclame la somme de 3.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DISCUSSION :
Il résulte du bon de commande établi le 5 septembre 2005 que les appelants ont convenu d'acquérir auprès de la société Notin un nouveau camping-car pour le prix de 48.900 € moyennant la reprise de leur ancien-camping car pour le prix de 25.000 €. Il s'agit de deux ventes indivisibles, le paiement du véhicule repris se faisant par compensation avec le prix du nouveau véhicule vendu.
Les époux X., faute de l'avoir soutenu en première instance, sont irrecevables à contester en cause d'appel le caractère indivisible des deux ventes pour réclamer le paiement du prix de leur premier camping-car dont la vente serait intervenue le 22 septembre 2005.
Prévenus de la mise à leur disposition du camping-car commandé, les appelants n'ont pas pris livraison de celui-ci à l'expiration du délai de 7 jours mentionné dans la lettre recommandée avec accusé de réception, qui leur a été adressée le 11 février 2006. En application de l'article 5 du bon de commande, la vente du nouveau camping-car a été résolue de plein droit, ce qui a entraîné la résolution automatique de l'obligation de reprise du premier camping par la société Notin. Il suffit donc de constater la résolution des contrats et non pas de prononcer leur résolution judiciaire, comme l'a fait le premier juge.
Les époux X., qui ont été aussitôt invités à reprendre possession de leur véhicule, ne justifient pas avoir été dans l'impossibilité de le faire en raison du refus de la société Notin de leur délivrer les documents administratifs nécessaires. Leur demande en dommages-intérêts pour privation de jouissance ou en raison de la décote subie par leur véhicule a donc été rejetée à bon droit par le premier juge.
La société Notin réclame le versement de l'indemnité équivalente à 20 % du prix prévue par l'article 5 du bon de commande en cas de rupture du contrat par l'acquéreur pour un motif injustifié. Outre le fait que le motif injustifié n'est pas défini, est abusive la [minute page 4] clause du contrat de vente prévoyant que le client est tenu de prendre livraison du véhicule dans les sept jours suivant la mise à disposition, que passé ce délai, et une mise en demeure par le vendeur étant restée infructueuse, la vente sera résiliée de plein droit, l'acompte lui restant acquis à titre d'indemnité, dans la mesure où elle a pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de retenir de plein droit des sommes versées par le consommateur lorsque celui-ci renonce à exécuter le contrat, sans prévoir le même droit, pour ce consommateur, de percevoir une indemnité d'un montant équivalent de la part du professionnel lorsque c'est celui-ci qui y renonce. Une telle clause contraint ainsi le consommateur à rechercher une réparation judiciaire, ce qui crée un déséquilibre entre les droits et obligations des parties au détriment de celui-ci, comme l'a énoncé la commission des clauses abusives dans ses recommandations n° 91-02 et n° 04-02, en ce qu'elle sanctionne plus lourdement l'inexécution du consommateur que celle du professionnel. Cette clause doit donc être réputée non écrite en application de l'article L 132-1 du Code de la consommation et le point d) de l'annexe audit code (Cour de cassation, ch. civ.1, 14 novembre 2006).
La cour ne peut donc que confirmer le jugement sur ce point.
Chacune des parties succombant dans ses prétentions, les demandes en application de l'article 700 du Code de procédure civile seront rejetées.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Confirme le jugement critiqué, sauf en ce qu'il prononce la résolution judiciaire au lieu de constater la résolution de plein droit des contrats de vente,
Dit que chacune des parties garde la charge de ses dépens d'appel,
Rejette les demandes en application de l'article 700 du Code de procédure civile
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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