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TGI PERPIGNAN (2e ch. 1re sect.), 21 janvier 2008

Nature : Décision
Titre : TGI PERPIGNAN (2e ch. 1re sect.), 21 janvier 2008
Pays : France
Juridiction : Perpignan (TGI)
Demande : 05/05231
Date : 21/01/2008
Nature de la décision : Admission
Décision antérieure : CA MONTPELLIER (1re ch. sect. A 2), 26 mai 2009
Numéro de la décision : 39
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 1357

TGI PERPIGNAN (2e ch. 1re sect.), 21 janvier 2008 : RG n° 05/05231 ; jugement n° 39

(sur appel CA Montpellier (1re ch. sect. A 2), 26 mai 2009 : RG n° 08/1889 ; arrêt n° A09.1A2 2319)

 

Extraits : 1/ « Le bon de commande de l'abri de piscine, signé le 7 octobre 2003, mentionne au § 2 des conditions générales de vente que l'entreprise ne pourra être tenue pour responsable des incidents qui seraient consécutifs au fait de margelle non fixée ou plage posée sur sable. »

2/ « L'article L. 132-1 du Code de la consommation fait interdiction de prévoir des clauses qui ont pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations du professionnel et ceux du non professionnel. Sont considérées comme abusives les clauses qui excluent ou limitent de façon inappropriée les droits légaux du non professionnel en cas d'exécution défectueuse d'une obligation contractuelle et aux termes de l'article R. 132-1 du Code de la consommation celles qui limitent ou excluent le droit à réparation en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations.

En l'espèce, la clause contestée exclut la responsabilité de la société en cas d'incidents résultant du fait que les margelles ne sont pas fixées ou que les plages reposent sur du sable. La responsabilité de l'entreprise est donc exclue, non pas à raison d'un manquement de sa part, mais d'un fait objectif qui ne peut être ignoré de la personne qui fait installer un abri de piscine et est la mieux placée pour savoir comment sont fixées ou posées les plages et margelles de sa piscine. La clause d'exonération de garantie ne sera donc pas annulée. »

3/ « Cependant une des obligations élémentaires et par conséquent, essentielles, du contrat était que l'abri soit suffisamment bien fixé pour qu'il ne s'envole pas. En ne vérifiant pas que le support sur lequel elle allait monter l'abri serait suffisamment résistant, en l'encrant sur un support qui ne l'a pas retenu mais qui s'est envolé avec lui, la société ABRISUD a commis une faute lourde qui permet d'écarter la clause d'exclusion de responsabilité. »

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE PERPIGNAN

DEUXIÈME CHAMBRE SECTION 1

JUGEMENT DU 21 JANVIER 2008

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 05/05231. Jugement n° 39.

 

ENTRE :

Monsieur X.

le [date] à [ville], de nationalité Française, demeurant [adresse], représenté par Maître Philippe NESE, avocat au barreau de PERPIGNAN

 

ET :

SAS SCCOTM CHAPUS à l'enseigne « ABRISUD »

et pour elle son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [adresse], représentée par SCPA P. BECQUE/ S. MONESTIER/ P. DAHAN, avocats au barreau de PERPIGNAN, SELARL KRIEF & GORDON, avocats au barreau de [N.B. conforme à la minute]

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Magistrats ayant délibéré : Président : Sabine PEYROU - Assesseur : Nadia BERGOUNIOU-GOURNAY - Assesseur : Anne BERRUT

Greffier : Jeanne GARRIGUE

Magistrat rédacteur : Sabine PEYROU

DÉBATS : Vu l'ordonnance de clôture en date du 27 septembre 2007 ayant fixé l'audience de plaidoiries au 13 novembre 2007 où l'affaire a été plaidée et mise en délibéré au 21 janvier 2008. Mme PEYROU Juge de la mise en état a fait rapport oral de l'affaire avant les plaidoiries des avocats, conformément aux dispositions de l'article 785 du Code de Procédure Civile.

[minute page 2] JUGEMENT : Jugement rendu par mise à disposition au Greffe ; contradictoire ; en premier ressort.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS DES PARTIES :

Exposé du litige :

Monsieur X. a fait assigner la SARL SCCOTM CHAPUS, ABRISUD, au visa des articles 1792 et suivants du Code civil et subsidiairement 1147, en réparation des dommages causés lors d'un coup de vent à un abri de piscine posé par les soins de cette entreprise. Il demande également au tribunal de déclarer non écrites les clauses d'exonération de responsabilité du contrat en application des dispositions des articles 1792-5 du Code civil et L. 132-1 et R. 132-1 du Code de la consommation.

Il soutient que la réparation du dommage doit être effectuée sur le fondement de l'article 1792 puisque l'abri est ancré au sol par des pattes filetées fixées sur des dalles de béton en pierre reconstituée qui constituent un ouvrage relevant des technique du bâtiment. Il estime inapplicable la clause d'exonération de responsabilité puisque la société a manqué à ses obligations en ne contrôlant pas la qualité des supports sur lesquels elle ancrait les fixations de la couverture. Ces mêmes manquements justifient que sa responsabilité soit engagée sur le fondement des dispositions de l'article 1147. Il demande une indemnisation selon l'évaluation faite par l'expert de son assureur et subsidiairement une expertise, ainsi que des dommages et intérêts pour résistance abusive.

Il sollicite en outre 1.600 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice de jouissance et la résistance abusive et une indemnité de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

La société plaide l'absence de faute contractuelle et l'absence de responsabilité décennale. Ce ne sont pas les fixations qui ont lâché mais les dalles, simplement posées sur un lit de sable contrairement aux déclarations de Monsieur X., qui se sont soulevées. Elle plaide également que Monsieur X. a pu mal fermer la couverture permettant l'entrée de l'air. Elle fait valoir la clause d'exonération de responsabilité figurant au contrat dans le cas où les margelles seraient simplement posées sur du sable. Elle estime que ni l'abri, ni les pattes de fixation ne sont en cause, mais le support. Elle estime le montant du préjudice non justifié puisque Monsieur X. ne produit aucun devis mais uniquement l'évaluation de l'expert de son assureur. Elle sollicite en outre une indemnité de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 3] Motivation :

Le bon de commande de l'abri de piscine, signé le 7 octobre 2003, mentionne au § 2 des conditions générales de vente que l'entreprise ne pourra être tenue pour responsable des incidents qui seraient consécutifs au fait de margelle non fixée ou plage posée sur sable.

Le document de réception après l'installation, signé le 1er décembre 2003, comporte la même mention au § 5. Au § 2 il est également recommandé de ne pas laisser l'abri en position ouverte par grand vent, au § 4 de ne pas omettre de serrer toutes les pattes de fixation et la trappe coulissante, au § 11 de bien les serrer en cas de grand vent, les vibrations pouvant dévisser les molettes et de fermer la trappe à clef.

Il ressort du rapport d'expertise réalisé par l'expert de l'assureur de Monsieur X. que la fixation de l'abri est faite par des « tiges filetées dans des dalles béton, imitation pierre, posées sur un lit de gravier. Les deux modules coulissants et deux des quatre modules fixes de l'abri ont été soulevés, en même temps que les dalles en raison dit l'expert principalement d'un « défaut de fixation au sol des éléments de l'abri piscine (simple vissage dans les dalles posées sur un lit de gravier) » et secondairement à des « passages d'air importants entre (et sous) les deux modules amovibles en raison de bavettes d'étanchéité insuffisamment rigides ».

Il apparaît clairement sur les photographies jointes que les dalles du tour de la piscine sont uniquement posées, il n'y a pas de joint et l'herbe pousse dans les interstices, et que ce sont elles qui se sont soulevées et cassées.

 

Sur l'application de l'article 1792 du Code civil :

Une construction constituée de parties mobiles et de parties fixes la rattachant de manière définitive au sol constitue un ouvrage au sens de l'article 1792 du Code civil.

Un abri de piscine télescopique, de 11 m de long sur 6 de large, constitué de 4 élément fixes d'une longueur totale de 6 m 80, ancrés au sol, et de deux éléments coulissants de 4 m 10, pourrait répondre à ces caractéristiques.

Néanmoins en l'espèce, il ressort du catalogue de présentation de l'abri en cause que tous les éléments sont amovibles et qu'ils peuvent être déplacés avec aisance pour être remisés pendant la période d'utilisation de la piscine. Les pattes de fixation elles mêmes le sont.

L'abri lui-même ne constitue donc pas un ouvrage au sens de l'article 1792 du Code civil.

Par ailleurs, les plages, formées ici de dalles simplement posées sur un lit de gravier, ne font pas corps avec l'ouvrage que constitue la piscine et ne constituent pas en elle-même un ouvrage. Les trous percés dans ces éléments mobiles ne font donc pas appel à des techniques du bâtiment.

Il s'en déduit qu'en l'espèce les fixations ne répondent pas non plus aux critères d'application de l'article 1792 du Code civil.

[minute page 4]

Sur l'annulation de la clause d'exclusion de garantie :

L'article L. 132-1 du Code de la consommation fait interdiction de prévoir des clauses qui ont pour effet de créer un déséquilibre significatif entre les droits et obligations du professionnel et ceux du non professionnel.

Sont considérées comme abusives les clauses qui excluent ou limitent de façon inappropriée les droits légaux du non professionnel en cas d'exécution défectueuse d'une obligation contractuelle et aux termes de l'article R. 132-1 du Code de la consommation celles qui limitent ou excluent le droit à réparation en cas de manquement par le professionnel à l'une quelconque de ses obligations.

En l'espèce, la clause contestée exclut la responsabilité de la société en cas d'incidents résultant du fait que les margelles ne sont pas fixées ou que les plages reposent sur du sable.

La responsabilité de l'entreprise est donc exclue, non pas à raison d'un manquement de sa part, mais d'un fait objectif qui ne peut être ignoré de la personne qui fait installer un abri de piscine et est la mieux placée pour savoir comment sont fixées ou posées les plages et margelles de sa piscine.

La clause d'exonération de garantie ne sera donc pas annulée.

 

Sur l'application de la clause d'exonération de garantie :

La commande a été passée soit au cours d'une foire à Perpignan comme cela est mentionné sur la première page du bon de commande, soit à [ville S.] comme peut permettre de le penser la mention au dessus de la signature, sur les seules indications de Monsieur X. ou à l'occasion d'un déplacement du vendeur.

Il est mentionné sur un document technique que les plages étaient posées sur béton, mais ce document n'est ni daté ni signé. Le tribunal ignore par qui il a été établi et dans quelles circonstances.

Si l'entreprise ABRISUD, domiciliée dans le Gers, ne pouvait ignorer que le département des Pyrénées Orientales est un département très venté, Monsieur X., qui l'habite, ne le pouvait pas plus.

Il a reconnu avoir pris connaissance des conditions générales de vente, dont celle relative à l'exclusion de garantie des incidents occasionnés par les plages et margelles non fixées. Cette exclusion lui a été rappelée lors de la remise des directives d'utilisation. Il ne pouvait ignorer que les plages de sa piscine, sur lesquelles la fixation de l'abri était prévue, n'étaient pas scellées. Sa curiosité de lecteur de la clause d'exclusion de garantie, suffisamment attentif et normalement averti, aurait pu ou du être éveillée, d'autant plus que, s'il a bien été démarché à son domicile, il disposait d'un délai de sept jours pour prendre connaissance des clauses du contrat et y renoncer le cas échéant.

Cependant une des obligations élémentaires et par conséquent, essentielles, du contrat était que l'abri soit suffisamment bien fixé pour qu'il ne s'envole pas. En ne vérifiant pas que le support sur lequel elle allait monter l'abri serait suffisamment résistant, en l'encrant sur un support qui ne l'a pas retenu mais qui s'est envolé avec lui, la société ABRISUD a commis une faute lourde qui permet d'écarter la clause d'exclusion de responsabilité.

[minute page 5] Au surplus, la clause mentionne une exclusion de garantie à raison des « incidents » qui surviendraient du fait de plage ou margelle non fixée. Qu'est-ce qu'un incident, « un événement peu important mais souvent fâcheux » (dictionnaire Hachette) « un petit événement » (Petit Robert). Le terme, pas plus que la clause, ne s'applique donc à l'envol de l'abri.

 

Sur le montant du préjudice :

L'expert de l'assureur chiffre le montant du remplacement de l'abri et des dalles endommagées à la somme de 7.702 euros 24, somme demandée par Monsieur X.

La société ABRISUD n'apporte aucun élément qui permette de mettre en doute la justesse de cette évaluation. C'est donc cette somme qui sera accordée.

Cet équipement n'étant pas un ouvrage il n'y a pas lieu d'appliquer une indexation sur l'indice du coût de la construction.

 

Sur le préjudice de jouissance :

L'abri de la piscine s'est envolé au mois de novembre, l'expertise de l'assureur s'est déroulée en janvier. La piscine, bien que couverte, n'aurait pas été utilisée pendant ces périodes.

A partir de ce moment rien n'indique que les travaux de réparation n'aient pas été entrepris et que l'utilisation de la piscine en début et fin de saison estivale en ait été gênée.

En conséquence, le préjudice de jouissance n'est pas établi et la demande sera rejetée.

 

Sur la résistance abusive :

Il ne peut être reproché à la société ABRISUD d'avoir contesté sa responsabilité. Le préjudice qui en découlerait n'est pas plus démontré.

La demande de dommages et intérêts à ce titre sera donc rejetée.

 

Sur les autres demandes :

Il serait inéquitable de laisser à la charge de Monsieur X. la totalité des frais engagés pour la défense de ses intérêts.

La société ABRISUD sera condamnée à lui verser la somme de 1.500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il paraît opportun vu la nature et l'ancienneté du litige d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 6] PAR CES MOTIFS,

le Tribunal,

Statuant par jugement en collégialité mis à disposition au Greffe, contradictoirement et en premier ressort,

CONDAMNE la SAS SCCOTM CHAPUS à verser à Monsieur X. la somme de 7.702 euros 24 (sept mille sept cent deux euros vingt quatre).

REJETTE les autres demandes.

ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision.

CONDAMNE la SAS SCCOTM CHAPUS à verser à Monsieur X. une indemnité de 1.500 euros (mille cinq cents) au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

CONDAMNE la SAS SCCOTM CHAPUS aux dépens de l'action et autorise les avocats qui en ont fait la demande à percevoir directement ceux dont ils auraient fait l'avance sans en avoir reçu provision.

LE GREFFIER                     LA VICE PRÉSIDENTE

J. GARRIGUE                     S. PEYROU