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CA COLMAR (3e ch. civ. A), 12 août 2008

Nature : Décision
Titre : CA COLMAR (3e ch. civ. A), 12 août 2008
Pays : France
Juridiction : Colmar (CA), 3 ch. civ. sect. A
Demande : 04/04964
Décision : 08/0794
Date : 12/08/2008
Nature de la décision : Infirmation
Date de la demande : 22/10/2004
Décision antérieure : TI SÉLESTAT, 4 octobre 2004
Numéro de la décision : 794
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 1387

CA COLMAR (3e ch. civ. A), 12 août 2008 : RG n° 04/04964 ; arrêt n° 08/0794 

 

Extrait : « Attendu que l'offre préalable de crédit accessoire à une prestation de services PANORIMMO souscrite le même jour constitue un crédit affecté relevant des dispositions de l'article L. 311-20 et L. 311-21 du code de la consommation, et que l'obligation de l'emprunteur de rembourser le prêt ne commence qu'avec la livraison de la marchandise, ou, comme en l'espèce, l'exécution de la prestation ; Mais attendu que l'acquéreur n'ayant pas mis le vendeur en la cause, ne peut opposer l'absence de livraison du bien financé pour faire échec à la demande en paiement de l'emprunt (Cass. Civ. 1re, 10 mai 1995) ; Que les époux Y. n'ont pas assigné la société PANORIMMO, qui n'est pas à la cause ; Qu'ils ne sont donc pas fondés à opposer à la société CREATIS l'inexécution de ses obligations par la société PANORIMMO pour se soustraire au paiement du prêt ;

Attendu que c'est à tort que le premier juge a débouté la société CREATIS de sa demande en paiement du prêt au motif que les époux Y. bénéficiaient de la garantie « satisfait ou remboursé » prévue au contrat de prestation de services conclu avec la société PANORIMMO ; Qu'en effet cette garantie est offerte par la société PANORIMMO qui s'engage à rembourser le coût des prestations versées par le client si leur bien immobilier n'est pas vendu dans les 24 mois ; Que ce n'est pas la société CREATIS, établissement prêteur, qui a souscrit cette garantie ; […] Attendu que les époux Y. sont donc tenus d'honorer leurs engagements souscrits auprès de la société CREATIS selon l'offre préalable du 1er août 2001, qu'il convient donc d'infirmer le jugement entrepris ;

Que la discussion élevée sur le caractère abusif de la clause figurant au recto du contrat selon laquelle sauf décision judiciaire contraire, l'obligation de remboursement envers CREATIS perdure même en cas de contestation sur l'exécution du contrat de prestation de service est sans intérêt, qu'en tout état de cause elle se réfère à l'article 1-6.a du contrat qui ne fait que reprendre les dispositions de l'article L. 311-21 du code de la consommation ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE COLMAR

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE - SECTION A

ARRÊT DU 12 AOÛT 2008

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Numéro d'inscription au répertoire général : 3 A 04/04964. MINUTE N° 08/0794. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 4 octobre 2004 par le tribunal d'instance de SÉLESTAT.

 

APPELANTE :

SA CREATIS

ayant son siège social [adresse], Représentée par Maître Anne-Marie BOUCON (avocat à la cour), Plaidant : Maître ALIAS (avocat à AIX EN PROVENCE)

 

INTIMÉS :

Madame X. épouse Y.

Monsieur Y.

demeurant ensemble [adresse], Représentés par Maître Dominique HARNIST (avocat à la cour) (aide juridictionnelle totale numéro 2004/XX du [date] accordée par le bureau [minute page 2] d'aide juridictionnelle de COLMAR)

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 26 mai 2008, en audience publique, devant la cour composée de Mme RASTEGAR, président de chambre, Mme MAZARIN-GEORGIN, conseiller, M. JOBERT, conseiller, qui en ont délibéré.

Greffer, lors des débats : M. UTTARD

ARRÊT : Contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile. Signé par Mme F. RASTEGAR, président et Mme Dominique DONATH, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le rapport.

Le 1er août 2001 les époux Y. ont souscrit auprès de la SA CREATIS une offre préalable de crédit, de 5.469,87 € destinée à financer les prestations de service de la société PANORIMMO selon contrat du même jour intitulé « mission de communication pour la transmission d'un bien immobilier » consistant à mettre à la disposition de ses clients des outils de communication en vue de la vente de leur bien immobilier.

Le prêt a été consenti au taux de 0 %, les emprunteurs devant rembourser le seul capital en fin de contrat dont l'échéance était fixée à deux ans, soit lorsque le bien est vendu, soit encore lorsque les adhérents ont négligé d'expédier périodiquement des bordereaux de confirmation d'intervention de PANORIMMO.

Le 15 juin 2004, la société CREATIS a assigné les époux Y. devant le tribunal d'instance de SÉLESTAT en paiement de la somme de 5.469,87 € et 437,59 € au titre de l'indemnité contractuelle de 8 % aux motifs que le contrat principal est arrivé à terme, que l'emprunt souscrit auprès d'elle est exigible, qu'une garantie « satisfait ou remboursé » exonérait le client du paiement du prix à condition qu'il renouvelle périodiquement la confirmation d'intervention de PANORIMMO ; que l'interdépendance des deux contrats est avérée.

Par jugement réputé contradictoire du 4 octobre 2004 le tribunal d'instance de SÉLESTAT a débouté la SA CREATIS de ses demandes et l'a condamnée aux dépens, en considérant qu'il s'agissait d'un prêt affecté dans le cadre d'une opération « fortement imbriquée » ; que le contrat prévoit qu'a défaut de vente de son bien immobilier dans les 24 mois à compter de sa signature le client est remboursé de l'intégralité du prix versé que ce soit au comptant ou à crédit, par le jeu d'une garantie type assurance dénommée « satisfait ou remboursé » ou « vendu ou remboursé », sous réserve que les conditions de mise en œuvre soient réunies ; qu'il n'est [minute page 3] soutenu ni que le bien a été vendu ni que les époux Y. ont été défaillants dans leurs obligations ; que dès lors ils ne sauraient être tenus de régler un crédit dont ils ont été exonérés contractuellement ; qu'une analyse sérieuse des documents contractuels combat la thèse selon laquelle les deux contrats de prestation de services et de financement sont interdépendants alors que tout est fait pour convaincre le souscripteur qu'il s'engage dans le cadre d'un contrat unique.

Par déclaration enregistrée au greffe le 22 octobre 2004 la société CREATIS a interjeté appel de ce jugement.

Par dernières conclusions reçues le 13 août 2007 elle demande à la cour :

- de « réformer » le jugement entrepris,

- de constater que le contrat principal est arrivé à terme,

- de dire et juger qu'en pareille hypothèse et par accessoire, l'emprunt souscrit est devenu exigible,

- de condamner les époux Y. à lui payer la somme de 5.469,87 € outre intérêts au taux légal à compter de la demande ainsi que 15 € au titre des frais d'inscription au FICP et 437,59 € au titre de l'indemnité contractuelle de 8 % outre intérêts au taux légal à compter de la demande,

- de les condamner aux entiers dépens et au paiement de la somme de 1.500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que :

- les époux Y. ont signé le même jour le contrat de prestations de service dénommé « ordre de mission » avec la société PANORIMMO pour une durée de 24 mois pour un prix forfaitaire de 5.469,87 €, et l'offre préalable de prêt accessoire proposée par la société CREATIS à taux 0 remboursable en une seule échéance à 24 mois,

- le contrat des époux Y. est arrivé au terme des deux ans rendant exigible le montant de l'emprunt,

- le contrat arrive à terme dans trois hypothèses :

1) le bien immobilier du client a été vendu dans le délai maximal de deux ans de contrat principal,

2) le client ne renouvelle pas l'ordre de mission ainsi qu'il s'y est engagé aux termes du contrat,

3) à l'échéance des deux ans : en l'absence de vente de l'immeuble le client peut bénéficier du remboursement de son investissement par PANORIMMO dans les conditions de la garantie « satisfait ou remboursé » sous réserve que les conditions de la mise en jeu de la garantie soient réunies ; dans le cas contraire il appartient à l'emprunteur de rembourser le crédit consenti par CREATIS.

Les époux Y. doivent rembourser l'emprunt à CREATIS, la garantie souscrite leur permettant d'obtenir le remboursement du montant de la prestation,

[minute page 4] La société PANORIMMO a bien exécuté sa prestation consistant à diffuser l'annonce de vente du bien immobilier par différents supports : internet - minitel - magasines,

La clause du contrat de crédit selon laquelle l'obligation de remboursement des emprunteurs perdure même en cas de contestation de l'exécution de la prestation de service n'est pas une clause abusive puisque la rémunération contractuellement prévue est la contrepartie de la publicité donnée à l'offre de vente. Le fait que ce prix soit forfaitaire ne démontre aucun caractère abusif,

- De plus un avantage conséquent est contractuellement prévu sous la forme de la garantie « satisfait ou remboursé » dont le respect des conditions n'apparaît pas insupportable et déséquilibré ; la clause ne crée pas un déséquilibre significatif au détriment du client ;

- les époux Y. avaient la possibilité de solliciter auprès de la société PANORIMMO la garantie de type assurance dénommée « satisfait ou remboursé » ou « vendu ou remboursé » dans les conditions prévues au contrat.

Par dernières conclusions reçues le 12 novembre 2007 les époux Y. demandent à la cour :

- de confirmer le jugement,

- en cas d'infirmation, de condamner la société CREATIS à leur payer la somme de 8.000 € à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de son comportement abusif, de la condamner aux entiers dépens et au paiement de la somme de 1.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Ils font valoir que :

- leur bien immobilier n'a pas été vendu dans le délai de 24 mois, ils devaient donc bénéficier de la garantie dénommée « satisfait ou remboursé »,

- les prestations de la société PANORIMMO ont été particulièrement réduites. Ils n'ont été contactés que par deux acquéreurs éventuels qui ne se sont pas montrés intéressés,

- ils se sont scrupuleusement acquittés de leurs obligations en renvoyant régulièrement les bordereaux de situation afin de renouveler régulièrement leur mandat,

- le contrat conclu avec PANORIMMO n'a pas été exécuté dans des conditions satisfaisantes permettant le règlement de la prestation exorbitante,

- la clause du contrat de crédit prévoyant que l'obligation de remboursement perdure même en cas de contestation sur l'exécution du contrat de prestation de service est abusive,

- la signature de trois contrats distincts avait pour but de les convaincre de ce que s'ils exécutaient leurs obligations ils n'auraient aucun montant à payer,

- la société CREATIS a fait inscrire le prétendu incident de paiement au fichier de la banque de FRANCE ce qui leur a occasionné un préjudice tant matériel que moral.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR QUOI :

Attendu qu'en vertu de l'article L. 311-20 du code de la consommation, lorsque l'offre préalable mentionne le bien ou la prestation de services financé, les obligations de [minute page 5] l'emprunteur ne prennent effet qu'a compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation ; qu'en cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d'interruption de celle-ci ;

Attendu que l'offre préalable de crédit accessoire à une prestation de services PANORIMMO souscrite le même jour constitue un crédit affecté relevant des dispositions de l'article L. 311-20 et L. 311-21 du code de la consommation, et que l'obligation de l'emprunteur de rembourser le prêt ne commence qu'avec la livraison de la marchandise, ou, comme en l'espèce, l'exécution de la prestation ;

Mais attendu que l'acquéreur n'ayant pas mis le vendeur en la cause, ne peut opposer l'absence de livraison du bien financé pour faire échec à la demande en paiement de l'emprunt (Cass. Civ. 1re, 10 mai 1995) ;

Que les époux Y. n'ont pas assigné la société PANORIMMO, qui n'est pas à la cause ;

Qu'ils ne sont donc pas fondés à opposer à la société CREATIS l'inexécution de ses obligations par la société PANORIMMO pour se soustraire au paiement du prêt ;

Attendu que c'est à tort que le premier juge a débouté la société CREATIS de sa demande en paiement du prêt au motif que les époux Y. bénéficiaient de la garantie « satisfait ou remboursé » prévue au contrat de prestation de services conclu avec la société PANORIMMO ;

Qu'en effet cette garantie est offerte par la société PANORIMMO qui s'engage à rembourser le coût des prestations versées par le client si leur bien immobilier n'est pas vendu dans les 24 mois ;

Que ce n'est pas la société CREATIS, établissement prêteur, qui a souscrit cette garantie ;

Que les conditions de remboursement sont prévues dans le contrat conclu avec PANORIMMO et prévoient que la demande de remboursement est à adresser à PANORIMMO par lettre recommandée avec accusé de réception dans les 30 jours suivant le deuxième anniversaire de la date de souscription du contrat ;

Qu'il appartenait aux époux Y. au terme du délai de deux ans du contrat de prêt, de rembourser la société CREATIS et de formuler sa demande de remboursement auprès de la société PANORIMMO au titre de la garantie « satisfait ou remboursé » ;

Attendu que les époux Y. sont donc tenus d'honorer leurs engagements souscrits auprès de la société CREATIS selon l'offre préalable du 1er août 2001, qu'il convient donc d'infirmer le jugement entrepris ;

Que la discussion élevée sur le caractère abusif de la clause figurant au recto du contrat selon laquelle sauf décision judiciaire contraire, l'obligation de remboursement envers CREATIS perdure même en cas de contestation sur l'exécution du contrat de prestation de service est sans intérêt, qu'en tout état de cause elle se réfère à l'article 1-6.a du contrat qui ne fait que reprendre les dispositions de l'article L. 311-21 du code de la consommation ;

Attendu que selon l'article II-8 et I-5-b du contrat de prêt conforme aux dispositions de l'article L. 311-30 du code de la consommation les époux Y. sont tenus au remboursement du capital restant dû soit 5.469,87 € ainsi qu'au paiement de la somme de [minute page 6] 437,59 € au titre de l'indemnité de 8 % avec les intérêts au taux légal à compter de l'assignation ;

Attendu qu'aucune autre somme ne peut leur être réclamée à l'exception des frais taxables, en vertu de l'article L. 311-32 du code de la consommation, et I-5.d du contrat de prêt ;

Attendu qu'aucune faute n'est établie à l'encontre de la société CREATIS dans la mesure où la garantie « satisfait ou remboursé » ou « vendu ou remboursé » a été conclue avec la société PANORIMMO dans le cadre du contrat de prestation de services et non avec la société CREATIS qui n'est que l'organisme de financement ;

Que les époux Y. seront donc déboutés de leur demande de dommages-intérêts ;

Attendu que les époux Y. qui succombent seront condamnés aux dépens et au paiement de la somme de 800 à la société CREATIS au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Infirme le jugement entrepris,

Statuant à nouveau,

Condamne les époux Y. à payer à la société CREATIS les sommes de 5.469,87 € (cinq mille quatre cent soixante-neuf euros et quatre-vingt-sept centimes) et de 437,59 € (quatre cent trente-sept euros et cinquante-neuf centimes) avec les intérêts au taux légal à compter du 15 juin 2004,

Déboute la société CREATIS du surplus de sa demande,

Déboute les époux Y. de leurs prétentions,

Les condamne aux entiers dépens et au paiement de la somme de 800 € (huit cents euros) à la société CREATIS au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier      Le président