CA NANCY (1re ch. civ.), 26 mai 2009
CERCLAB - DOCUMENT N° 1470
CA NANCY (1re ch. civ.), 26 mai 2009 : RG n° 05/03288 ; arrêt n° 1590/2009
Extrait : « Attendu qu'il est constant que l'acte authentique de prêt en date du 26 août 1981 stipule expressément que « l'emprunteur déclare que les fonds à provenir du crédit de 400.000 Francs sont destinés exclusivement à un apport dans le compte courant de la SARL X. » : qu'il stipule également une affectation hypothécaire d'un immeuble sis à [adresse] ; Qu'à cet acte a été annexée une « offre de prêt immobilier » en date du 29 juillet 1991 relative à un « prêt relais » de 400.000 Francs ; qu'il apparaît au vu du relevé de compte chèque de Monsieur X. que la somme susindiquée a été créditée sur son compte le 28 août 1991 et virée sur celui de la SARL X. ayant son siège dans l'immeuble susindiqué ; […] ; Attendu que la BNP invoque à bon droit les dispositions de l'article L. 110-4 du Code de Commerce ; qu'en effet, elle possède la qualité de commerçante ; qu'en outre, et superfétatoirement, il n'est pas contestable que l'emprunt de « prêt immobilier » a été contracté par Monsieur X. pour les besoins de l'activité de la SARL X. ; que par ailleurs, la référence dénuée de fondement à la loi du 13 juillet 1979 n'est en elle-même pas suffisante pour faire obstacle à l'application de l'article L. 110-4 du Code de Commerce ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE NANCY
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 26 MAI 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Numéro d'inscription au répertoire général : 05/03288. ARRÊT N° 1590/2009. Décision déférée à la Cour : Déclaration d'appel du 12 décembre 2005 d'un jugement du Tribunal de Grande Instance d'ÉPINAL, R.G. n° 04/01566, en date du 18 novembre 2005,
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date] à [ville], demeurant [adresse], Comparant et procédant par le ministère de la SCP MERLINGE, BACH-WASSERMANN, FAUCHEUR-SCHIOCHET, avoués à la Cour,
INTIMÉE :
BNP PARIBAS,
SA à Conseil d'administration, dont le siège est [adresse], représentée par son Conseil d'administration pour ce domicilié audit siège, Comparant et procédant par le ministère de la SCP CHARDON & NAVREZ, avoués à la Cour, Plaidant par Maître SCHAMBER, avocat à la Cour,
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 28 Avril 2009, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Guy DORY, Président de Chambre, chargé du rapport, et Madame Joëlle ROUBERTOU, Conseiller,
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Guy DORY, Président de Chambre, Monsieur Gérard SCHAMBER, Conseiller, Madame Joëlle ROUBERTOU, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Madame DEANA ;
ARRÊT : contradictoire, prononcé à l'audience publique du 26 MAI 2009 date indiquée à l'issue des débats, par Monsieur DORY, Président, conformément à l'article 452 du Code de Procédure Civile ; signé par Monsieur Guy DORY, Président, et par Madame DEANA, greffier présent lors du prononcé ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] FAITS ET PROCÉDURE :
Le 29 juillet 1991, la BNP a fait une offre de prêt à Monsieur X. pour un montant de 400.000 Francs, acceptée le 10 août 1991 ;
Le contrat de prêt a été formalisé dans un acte authentique conclu le 26 août 1991 devant Maître T., notaire à DOUAI, précisant que le versement du capital avait pour objet d'effectuer un apport en compte courant dans la SARL X. ;
Accessoirement, la BNP a constitué une hypothèque conventionnelle sur la résidence principale de son débiteur ;
Par acte d'huissier en date du 27 juillet 2004, Monsieur X. a fait assigner la BNP devant le Tribunal de Grande Instance d'Épinal aux fins de voir ordonner la mainlevée de l'hypothèque conventionnelle et la voir condamnée au paiement de la somme de 100.901,34 € à titre de dommages et intérêts en raison des fautes par elle commises en lui faisant souscrire un crédit soumis aux dispositions de la loi de 1979 sur le crédit immobilier alors que les fonds étaient destinés à constituer un apport en compte courant de la SARL dont il était associé et en lui accordant ce crédit supplémentaire alors que sa situation financière était largement obérée, ce que la banque ne pouvait ignorer ;
Par jugement en date du 18 novembre 2005, le Tribunal de Grande Instance d'Épinal a :
- déclaré irrecevable l'action en responsabilité formée par Monsieur X. contre la SA BNP PARIBAS,
- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ni à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- laissé à Monsieur X. la charge des dépens avec autorisation de recouvrement direct par la SCP LANGUILLE KNITTEL WATBOT FOURAY ;
Pour statuer ainsi, le Tribunal a fait application de l'article L. 110-4 du Code de commerce prévoyant une prescription décennale pour les actes mixtes sans qu'il soit nécessaire de rechercher si le commerçant a la qualité de débiteur ou de créancier ;
Constatant que le prêt avait été consenti le 10 août 1991, le Tribunal en a déduit la prescription de l'action intentée en 2004 par Monsieur X., ce dernier ne rapportant comme acte interruptif de prescription qu'une lettre recommandée avec accusé de réception du 3 juillet 1997, émise par la banque, acte qui n'était pas de nature à interrompre la prescription
Monsieur X. a interjeté appel de cette décision par déclaration en date du 12 décembre 2005 ;
[minute page 3] A l'appui de son appel et dans ses dernières écritures en date du 5 mars 2009, il soutient que le prêt qui lui a été consenti était soumis aux dispositions du Code de la consommation relatives aux crédits immobiliers et donc soumise au délai de prescription trentenaire, quand bien même le prêt avait pour objet de financer son activité professionnelle, les parties ayant décidé volontairement de se soumettre aux dispositions protectrices du consommateur par insertion des dispositions des articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation dans l'acte authentique de prêt ;
Il soutient avoir déposé plusieurs plaintes pour faux en écriture, escroquerie ou encore abus de confiance à l'encontre de la BNP, reçu diverses lettres recommandées par la banque, avoir été assigné par la BNP devant le tribunal de commerce d'Épinal au titre de sa caution, ces différents actes constituant des actes interruptifs de prescription ;
Il argue de ce que la banque aurait commis des fautes en lui consentant ce crédit supplémentaire alors qu'il était largement endetté, et ce dans le seul but de tenter d'apurer sa situation financière ;
Il affirme que si les plaintes qu'il a déposées ont été classées sans suite pour prescription de l'action publique, cela ne signifie pas que les faits délictueux n'ont pas été commis ;
Il affirme encore que l'hypothèque conventionnelle a été consentie sans la signature de son épouse alors pourtant qu'ils sont mariés sous le régime de la séparation de biens et que par conséquent cette hypothèque est nulle et impose la mainlevée de celle-ci ;
Il soutient qu'il existe sur son compte un solde créditeur de 24.111 € après encaissement en 1996 de la vente de sa propriété, qui doit lui être restitué ;
Il estime avoir subi un préjudice conséquent résultant de la vente de sa maison et des frais qui en sont résultés, de la perte de son emploi et de la SARL X. et demande par conséquent à la Cour de :
- déclarer l'appel interjeté par Monsieur X. bien fondé,
- y faisant droit,
* réformer la décision entreprise,
* ordonner la mainlevée de l'hypothèque judiciaire,
- surseoir à statuer,
- condamner l'intimée à payer 100.000 € à titre de dommages et intérêts outre 24.111 €,
- condamner l'intimée à payer 3.500 € au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- la condamner également aux entiers dépens lesquels seront recouvrés par la SCP MERLINGE, BACH - WASSERMANN & FAUCHEUR - SCHIOCHET, avoués associés à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile ;
[minute page 4] Dans ses dernières conclusions en date 24 mars 2009, la BNP PARIBAS affirme que le contrat de prêt de 1991 ne contient aucune mention de la loi du 13 juillet 1979 et qu'en tout état de cause l'article L. 312-3 du code de la consommation exclut de son champ d'application les prêts destinés, sous quelque forme que ce soit, à financer une activité professionnelle ce qui était le cas en l'espèce puisqu'il s'agissait d'effectuer un apport dans le compte courant de la SARL X. ;
Elle soutient donc que la prescription est acquise au regard de l'article L. 110-4 du code de commerce et que les mises en demeure qu'elle a elle-même envoyées ne constituent pas des actes interruptifs de prescription ;
Subsidiairement, elle soutient que sa responsabilité ne saurait être engagée puisqu'elle n'a commis aucune faute en accordant ce crédit à Monsieur X. qui connaissait parfaitement sa situation financière de sorte qu'elle ne l'a pas abusivement soutenu ;
Enfin, elle rappelle que les plaintes déposées par Monsieur X. ont été classées sans suite et sollicite incidemment la condamnation de ce dernier pour manœuvres dilatoires et abusives ;
Par conséquent, la BNP demande à la Cour de :
- déclarer mal fondé l'appel interjeté par Monsieur X. et l'en débouter,
- vu la décision de classement sans suite de la plainte de Monsieur X. en raison de la prescription de tous les faits dénoncés,
- dire et juger n'y avoir lieu à sursis à statuer dans l'attente de cette plainte pénale,
- en revanche, dire et juger recevable et bien fondé l'appel incident de la SA BNP PARIBAS et y faire droit,
- en conséquence,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté la SA BNP PARIBAS de sa demande au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- et statuant à nouveau dans cette limite :
- condamner Monsieur X. à payer à la SA BNP PARIBAS la somme de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
- condamner Monsieur X. aux entiers dépens, tant de première instance que d'appel, en disant que ceux-ci pourront être directement recouvrés par la SCP CHARDON & NAVREZ, avoués associés à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile ;
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 5] SUR CE :
Attendu qu'il est constant que l'acte authentique de prêt en date du 26 août 1981 stipule expressément que « l'emprunteur déclare que les fonds à provenir du crédit de 400.000 Francs sont destinés exclusivement à un apport dans le compte courant de la SARL X. » : qu'il stipule également une affectation hypothécaire d'un immeuble sis à [adresse] ;
Qu'à cet acte a été annexée une « offre de prêt immobilier » en date du 29 juillet 1991 relative à un « prêt relais » de 400.000 Francs ; qu'il apparaît au vu du relevé de compte chèque de Monsieur X. que la somme susindiquée a été créditée sur son compte le 28 août 1991 et virée sur celui de la SARL X. ayant son siège dans l'immeuble susindiqué ;
Que l'existence de la SARL X. ne peut être contestée, alors qu'il est constant que Monsieur X. en était gérant salarié, ainsi qu'il résulte d'un bulletin de paie du 1er août 1991 au 31 août 1991 ;
Attendu que la BNP invoque à bon droit les dispositions de l'article L. 110-4 du Code de Commerce ; qu'en effet, elle possède la qualité de commerçante ; qu'en outre, et superfétatoirement, il n'est pas contestable que l'emprunt de « prêt immobilier » a été contracté par Monsieur X. pour les besoins de l'activité de la SARL X. ; que par ailleurs, la référence dénuée de fondement à la loi du 13 juillet 1979 n'est en elle-même pas suffisante pour faire obstacle à l'application de l'article L. 110-4 du Code de Commerce ;
Que force est encore de constater que Monsieur X. ne rapporte la preuve d'aucune des causes de nature à interrompre la prescription (citation en justice, commandement ou saisie à son initiative et non à celle de la banque créancière) ;
Que l'action en responsabilité entre dans le champ d'application de l'article précité (cf. Cass. Com. 16 novembre 2004 : n°01.15510) ;
Qu'en conséquence, il y a lieu de confirmer le jugement querellé que Monsieur X. sera condamné aux dépens d'appel outre le paiement à la banque de la somme de 1.200 € sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant en audience publique et contradictoirement,
Confirme le jugement querellé ;
[minute page 6] Condamne Monsieur X. à payer à la BNP la somme de MILLE DEUX CENTS EUROS (1.200 €) sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile ;
Condamne Monsieur X. aux dépens d'appel qui pourront être directement recouvrés par la SCP CHARDON & NAVREZ, avoués associés à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de Procédure Civile ;
L'arrêt a été prononcé à l'audience publique du vingt six Mai deux mille neuf par Monsieur DORY, Président de la première chambre civile de la Cour d'Appel de NANCY, conformément aux articles 452 du Code de Procédure Civile, assisté de Madame DEANA, Greffier.
Et Monsieur le Président a signé le présent arrêt ainsi que le Greffier.
Signé : C. DEANA.- Signé : G. DORY.-
Minute en six pages.
- 5922 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Immeubles - Contrats relatifs au local professionnel
- 5937 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Financement de l’activité - Prêts