CA NANCY (1re ch. civ.), 3 octobre 2006
CERCLAB - DOCUMENT N° 1514
CA NANCY (1re ch. civ.), 3 octobre 2006 : RG n° 01/01239 ; arrêt n° 2236/06
Extrait : « Dans la partie supérieure droite, un encadré de 6 centimètres sur 6 comporte à la fois, sous l'intitulé « adhésion aux prestations complémentaires facultatives » des informations sur la nature des garanties proposées et, non pas un questionnaire de santé, mais une déclaration de bonne santé préimprimée en caractères d'un millimètre. Aucune mention apparente n'est destinée à attirer l'attention du signataire sur l'importance du texte, pratiquement illisible, qu'il est invité à approuver en apposant sa signature dans la case correspondant aux garanties choisies. De plus, l'affirmation de bonne santé a été rédigée par le professionnel en une phrase unique visant à la fois des circonstances ne s'appliquant qu'au passé sur une période de 5 ans et d'autres circonstances ne concernant que l'état de l'emprunteur au moment de sa demande d'adhésion. Il ressort de toutes ces constatations que Monsieur X. n'a pas été mis en mesure de procéder de façon éclairée à l'affirmation de bon état de santé qui s'est avérée inexacte dès lors que l'intéressé était traité contre l'hypertension artérielle depuis de nombreuses années, ce dont il résulte que l'affection était chronique. Sa mauvaise foi n'est donc pas établie et c'est à tort que le premier juge a fait application de l'article L. 113-8 du Code des Assurances. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE NANCY
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 3 OCTOBRE 2006
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Numéro d'inscription au répertoire général : 01/01239. Arrêt n° 2236/06. Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal de Grande Instance de NANCY, R.G. n° 00/02468, en date du 16 février 2001.
APPELANTS :
- Madame X.
née le [date] à [ville], demeurant [adresse]
- Monsieur X.
né le [date] à [ville], demeurant [adresse]
représentés par la SCP CHARDON - NAVREZ, avoués à la Cour, assistés de Maître Pascal PHILIPPOT, avocat au barreau de NANCY
INTIMÉE :
Société FINANCIAL venant aux droits de VIE PLUS
dont le siège est [adresse], représentée par Maître GRÉTÉRÉ, avoué à la Cour, assistée de Maître Bernard THIBAUT, avocat au barreau de NANCY
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 05 septembre 2006, en audience publique devant la Cour composée de : Monsieur Guy DORY, Président de Chambre, Monsieur Gérard SCHAMBER, Conseiller, en son rapport, Madame Pascale TOMASINI, Conseiller, qui en ont délibéré ;
Greffier, lors des débats : Mademoiselle Laïla CHOUIEB ;
ARRÊT : contradictoire, prononcé à l'audience publique du 03 OCTOBRE 2006 date indiquée à l'issue des débats, par Monsieur DORY, Président, conformément à l'article 452 du Nouveau Code de Procédure Civile ; signé par Monsieur Guy DORY, Président, et par Mademoiselle Laïla CHOUIEB , greffier présent lors du prononcé ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] FAITS ET PROCÉDURE :
En contractant auprès du groupe CREDIPAR un prêt de 130.000 Francs stipulé remboursable en 36 mensualités à compter du 20 juin 1999, Monsieur X. a sollicité son adhésion à l'assurance groupe souscrite par le prêteur auprès de la SA VIE PLUS pour garantir le remboursement des sommes dues en cas de décès de l'emprunteur. A cet effet, Monsieur X. a apposé sa signature au bas d'une déclaration pré-imprimée rédigée dans les termes suivants :
« Je déclare ne pas être en arrêt de travail par maladie ou accident, ne pas avoir eu pendant les 5 dernières années d'intervention chirurgicale, d'arrêt de travail de plus de 30 jours, ni de traitement médical pour maladie grave ou accident, n'être atteint ni d'infirmité, ni de maladie chronique ou à caractère évolutif, ne pas devoir subir prochainement une intervention chirurgicale, ni devoir suivre un traitement médical. »
Monsieur X. est décédé le 22 octobre 1999 lors d'un déplacement professionnel. Pour refuser sa garantie à ses héritiers la SA VIE PLUS a invoqué la nullité de l'adhésion pour fausse déclaration intentionnelle, Monsieur X. ayant été traité contre l'hypertension artérielle depuis 1982.
C'est dans ces conditions que par acte du 12 avril 2000 Madame X. et Monsieur X., la veuve et le fils de Monsieur X., ont fait assigner la SA VIE PLUS devant le Tribunal de Grande Instance de NANCY en exécution forcée du contrat.
Ils ont été déboutés de leur demande par jugement du 16 février 2001 au motif essentiel que la réticence à déclarer le traitement pour hypertension, à l'évidence connu de l'assuré, était de nature à réduire l'appréciation des risques par l'assureur.
Les consorts X. ont interjeté appel par déclaration du 16 mai 2001.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Par leurs dernières conclusions, notifiées et déposées le 14 septembre 2005, les consorts X. demandent à la Cour, par voie [minute page 3] d'infirmation du jugement déféré, de condamner la SA VIE PLUS à leur payer les sommes suivantes :
- 19.818,37 € représentant les sommes dues au titre du prêt,
- 1.524,49 € à titre de dommages et intérêts,
- 1.524,49 € au titre des frais irrépétibles de procédure.
Les appelants font valoir que la fausse déclaration n'est pas caractérisée dès lors que Monsieur X. n'avait pas été invité à répondre à un véritable questionnaire de santé, la déclaration ayant au contraire l'apparence d'une clause de style qui n'évoque d'aucune manière l'hypertension, qui n'est ni une infirmité ni une maladie chronique. Ils soutiennent qu'en tout état de cause la mauvaise foi du déclarant n'est pas établie et font grief au premier juge d'avoir présumé l'incidence de la pathologie non déclarée sur l'appréciation par l'assureur du risque à garantir.
Par ses écritures dernières, notifiées et déposées le 6 avril 2006, la société FINANCIAL ASSURANCE COMPAGNY venant aux droits de la SA VIE PLUS, conclut à la confirmation du jugement et réclame une somme de 1.000 € en remboursement de ses frais irrépétibles de procédure d'appel.
L'intimée réplique qu'il est avéré que Monsieur X. était traité contre l'hypertension depuis 1982. Soutenant que la question relative à l'état de santé ne comportait aucune ambiguïté et que l'assuré n'a pas à se faire juge de la pertinence des critères énoncés par l'assureur, la société FINANCIAL soutient que Monsieur X. a bien fait sciemment une déclaration inexacte en affirmant ne suivre aucun traitement. Elle ajoute que si l'affection n'avait pas été dissimulée, son médecin conseil n'aurait pas manqué de solliciter des renseignements complémentaires sur l'état de santé de Monsieur X.
L'instruction a été déclarée close le 6 avril 2006.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Seuls les consorts X. versent au dossier l'acte comportant la demande d'adhésion de Monsieur X. à l'assurance de groupe devant garantir le risque décès. Intitulé « offre préalable de crédit », l'acte [minute page 4] comporte sur une seule page toutes les conditions du prêt soumis à l'acceptation de l'emprunteur.
Dans la partie supérieure droite, un encadré de 6 centimètres sur 6 comporte à la fois, sous l'intitulé « adhésion aux prestations complémentaires facultatives » des informations sur la nature des garanties proposées et, non pas un questionnaire de santé, mais une déclaration de bonne santé préimprimée en caractères d'un millimètre.
Aucune mention apparente n'est destinée à attirer l'attention du signataire sur l'importance du texte, pratiquement illisible, qu'il est invité à approuver en apposant sa signature dans la case correspondant aux garanties choisies. De plus, l'affirmation de bonne santé a été rédigée par le professionnel en une phrase unique visant à la fois des circonstances ne s'appliquant qu'au passé sur une période de 5 ans et d'autres circonstances ne concernant que l'état de l'emprunteur au moment de sa demande d'adhésion.
Il ressort de toutes ces constatations que Monsieur X. n'a pas été mis en mesure de procéder de façon éclairée à l'affirmation de bon état de santé qui s'est avérée inexacte dès lors que l'intéressé était traité contre l'hypertension artérielle depuis de nombreuses années, ce dont il résulte que l'affection était chronique. Sa mauvaise foi n'est donc pas établie et c'est à tort que le premier juge a fait application de l'article L. 113-8 du Code des Assurances.
Les consorts X. sont donc fondés à obtenir l'exécution forcée du contrat sans pour autant établir que l'assureur aurait commis des fautes dans l'exercice de son droit de se défendre en justice.
Tenue aux dépens, la société FINANCIAL ASSURANCE sera condamnée, par application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile à indemniser les appelants à hauteur de 1.500 E de leurs frais irrépétibles de procédure.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant en audience publique et contradictoirement,
Infirme le jugement déféré ;
[minute page 5] Et statuant à nouveau :
Condamne la société FINANCIAL ASSURANCE COMPAGNY à payer aux consorts X. la somme de DIX NEUF MILLE HUIT CENT DIX HUIT EUROS ET TRENTE SEPT CENTIMES (19.818,37 €) ainsi qu'une somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 €) au titre des frais irrépétibles de procédure ;
La condamne aux dépens de première instance et d'appel et accorde à la SCP CHARDON et NAVREZ, avoués associés à la Cour, un droit de recouvrement direct dans les conditions prévues par l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile ;
Signé : L. CHOUIEB. Signé : G. DORY
Minute en cinq pages.