CA VERSAILLES, 8 décembre 2000
CERCLAB - DOCUMENT N° 1734
CA VERSAILLES, 8 décembre 2000 : RG n° 97/6633
Publication : Jurinet
Extrait : « que le verso du contrat où figurent les mentions obligatoires précitées est imprimé en gris sur fond blanc et non en bistre comme le prétend l'appelant ; qu'il est tout à fait lisible ainsi que l'a relevé le premier juge ; que le contrat conclu le 20 mars 1996 est par ailleurs conforme aux exigences de l'article L. 121-23 précité »
COUR D’APPEL DE VERSAILLES
ARRÊT DU 8 DÉCEMBRE 2000
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 97/6633.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Suivant offre préalable de crédit acceptée le 20 mars 1996, la Société FRANFINANCE a consenti à Monsieur X. un prêt à Monsieur X. d'un montant de 14.300 francs, remboursable au taux effectif global de 17,16 % l'an, en 48 mensualités d'un montant unitaire de 434,90 francs échelonnées à compter du 30 avril 1996, destiné à financer l'achat d'un conditionneur d'air réalisé auprès de la Société AIR PRESTIGE, à la suite d'un démarchage à domicile.
Suite au non-paiement des échéances du prêt, la Société FRANFINANCE a effectué diverses démarches amiables qui sont restées infructueuses. Par acte d'huissier en date du 15 janvier 1997, Monsieur X. a fait assigner devant le tribunal d'instance de MANTES LA JOLIE la Société AIR PRESTIGE et FRANFINANCE afin d'obtenir l'annulation du contrat de vente et par voie de conséquence, celle du contrat de prêt, la restitution des sommes encaissées par la Société FRANFINANCE et la condamnation des deux sociétés au paiement de la somme de 8.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile. A l'appui de sa prétention, il a fait valoir que le contrat de vente ne répond pas aux exigences des articles L. 121-23 et suivant du Code de la Consommation et qu'il n'a pas été informé des dispositions lui permettant de se rétracter. En outre, il a soutenu qu'il a été victime de manoeuvres dolosives de la part du vendeur qui lui avait garanti que sa renonciation téléphonique était suffisante. La Société AIR PRESTIGE a répliqué que le contrat est conforme aux dispositions légales et que la rétractation est parvenue deux jours après l'expiration du délai de rétractation, tout en précisant que Monsieur X. a apposé sa signature sur le bon de livraison sans protestation. La Société FRANFINANCE a fait observer qu'elle a procédé au déblocage des fonds au vu de l'attestation de livraison signée par Monsieur X. et soutient que le contrat ne peut être annulé puisqu'il est déjà résilié par suite de la défaillance de l'emprunteur dans le remboursement des échéances.
Reconventionnellement, elle a sollicité la condamnation de Monsieur X. au paiement de la somme de 17.953,97 francs majorée des intérêts au taux de 17,16 % l'an à compter du 30 octobre 1996, outre celle de 1.500 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par jugement contradictoire en date du 6 juin 1997, le tribunal d'instance de MANTES LA JOLIE a rendu la décision suivante :
- déboute Monsieur X. de l'ensemble de ses demandes,
- reçoit la SA FRANFINANCE en sa demande reconventionnelle,
- condamne Monsieur X. à payer à la SA FRANFINANCE la somme de 17.953,97 francs avec intérêts au taux de 17,16 % l'an sur celle de 15.945,28 francs à compter du 30 octobre 1996, outre celle de 1.000 francs au titre de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,
- met les dépens à la charge de Monsieur X., lesquels seront recouvrés conformément aux textes régissant l'aide juridictionnelle.
Le 16 juillet 1997, Monsieur X. a relevé appel de cette décision.
Monsieur X. qui a fait l'objet d'une aide juridictionnelle partielle provisoire en vertu d'une décision en date du [date], reproche à la décision entreprise de l'avoir débouté de ses demandes et fait valoir les arguments développés en première instance. Néanmoins, il précise que l'irrégularité du contrat de vente résulte de la couleur de l'encre utilisée au verso du bon de commande en se prévalant d'une jurisprudence sanctionnant les textes imprimés à l'encre bistre, et que les manoeuvres dolosives proviennent de l'attitude déloyale ou tout du moins indélicate du vendeur. En outre, il soutient s'être valablement rétracté de son acceptation du bon de commande souscrit. En conséquence, il sollicite la résolution du contrat principal et du contrat accessoire de crédit ainsi que la garantie de la Société AIR PRESTIGE au cas où il serait condamné à l'égard de la Société FRANFINANCE. A titre subsidiaire, il requiert les plus larges délais de grâce avec fixation du taux d'intérêt au montant légal et point de départ dudit intérêt à compter de l'arrêt à intervenir par mesure de grâce en application de l'article 1153-1 du code civil.
Par conséquent, Monsieur X. demande à la Cour de :
- le recevoir en son appel et en ses écritures et, y faisant droit,
- infirmer la décision dont appel,
- dire nul et de nul effet le contrat principal de vente et corrélativement le contrat de crédit,
- condamner la Société FRANFINANCE à rembourser l'intégralité de toutes sommes reçues par elle au titre du contrat litigieux,
- donner acte à Monsieur X. de ce qu'il s'engage en tant que de besoin à restituer l'appareil de filtrage d'air,
A titre subsidiaire,
- condamner la Société AIR PRESTIGE à garantie pour toutes sommes dont le concluant serait dit redevable envers la Société FRANFINANCE,
- allouer les plus larges délais de grâce à Monsieur X. s'il était dit qu'il devait s'acquitter sans garantie, avec fixation du taux d'intérêts au montant légal et point de départ dudit intérêt à compter de l'arrêt à intervenir par mesures de grâce,
- condamner in solidum les Sociétés PRESTIGE et FRANFINANCE à 5.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, nonobstant l'aide juridictionnelle ne bénéficiant qu'aux conseils de Monsieur X.,
- débouter tout contestant aux présentes,
- condamner in solidum les Sociétés AIR PRESTIGE et FRANFINANCE aux entiers dépens, lesquels seront recouvrés par la SCP LAMBERT DEBRAY CHEMIN, avoué à VERSAILLES, conformément aux dispositions relatives à l'aide juridictionnelle.
La société FRANFINANCE, intimée, réplique que la loi exige que le texte imprimé soit lisible sans indiquer la couleur de l'encre devant être utilisée, par l'imprimeur ; que l'appelant ne peut se prévaloir de la jurisprudence sanctionnant les textes imprimés à l'encre bistre puisque l'encre utilisée, en l'espèce, est le gris clair. En outre, elle fait valoir que l'existence de prétendues manoeuvres dolosives imputables au représentant de la Société AIR PRESTIGE n'est pas établie, l'attestation de Madame Y. dont se prévaut l'appelant ne faisant qu'établir que ce dernier a été valablement livré ; que le bordereau de rétractation n'a pas été adressé au vendeur dans le délai légal, Monsieur X. étant incapable de faire la preuve de la date effective. Reconventionnellement, elle sollicite la condamnation de Monsieur X. au paiement des sommes dues au titre du prêt, soit la somme de 17.953,97 francs avec intérêts de retard au taux conventionnel de 17,16 % courus sur la somme de 15.945,28 francs à compter du 30 octobre 1996 jusqu'au parfait paiement. A titre infiniment subsidiaire, elle requiert la condamnation de Monsieur X. à lui restituer le montant du capital emprunté, soit la somme de 14.300 francs avec intérêts de retard au taux légal courus à compter du 2 avril 1996, date du financement jusqu'au jour du parfait paiement.
Par conséquent, la SA FRANFINANCE demande à la cour de
- s'entendre déclarer autant irrecevable que mal fondé Monsieur X. en son appel du jugement du tribunal d'instance de MANTES LA JOLIE en date du 6 juin 1997, ainsi qu'en toutes ses demandes, fins et conclusions, telles qu'elles résultent de ses écritures judiciaires au soutien de son appel en date des 16 mars 1998, à toutes fins qu'elles comportent ; l'en débouter purement et simplement, En conséquence, voir confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- s'entendre notamment déclarer autant recevable que bien fondée la SA FRANFINANCE en sa demande reconventionnelle,
En conséquence, s'entendre condamner Monsieur X. à payer à la SA FRANFINANCE la somme de 17.953,97 francs avec intérêts de retard au taux conventionnel de 17,16 % l'an courus sur la somme de 15.945,28 francs à compter du 30 octobre 1996 jusqu'au jour du parfait paiement,
- ordonner la capitalisation des intérêts à compter du 13 novembre 1997,
- s'entendre condamner Monsieur X. à payer à la SA FRANFINANCE la somme de 10.000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'aux entiers dépens,
- s'entendre enfin condamner Monsieur X. au paiement des entiers dépens, tant de premier instance que d'appel dont le recouvrement sera poursuivi par la SCP BOMMART-MINAULT, avoués, dans les conditions posées à l'article 699 du Nouveau Code de Procédure Civile.
Par arrêt en date du 3 décembre 1999, la cour de céans, au motif que la SARL AIR PRESTIGE, intimée et n'ayant pas constitué avoué, n'avait pas été assignée devant la cour conformément aux dispositions de l'article 908 du nouveau code de procédure civile, a ordonné la réouverture des débats, renvoyé l'affaire devant le conseiller de la mise en état et avant dire droit, a enjoint à Monsieur X. l'appelant d'assigner la SARL AIR PRESTIGE, intimée, sursis à statuer sur toutes les demandes et réservé les dépens.
Selon procès verbal de recherches infructueuses en date du 30 décembre 1999, la société FRANFINANCE a fait assigner la SARL AIR PRESTIGE, laquelle n'a pas constitué avoué.
L'ordonnance de clôture a été signée le 5 octobre 2000 et l'affaire appelée à l'audience du 3 novembre 2000.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE, LA COUR :
Considérant que certes, l'article L. 121-23 du code de la consommation dispose que tout contrat de vente conclu dans le cadre d'un démarchage à domicile doit comporter, à peine de nullité, certaines mentions et de façon apparente, le texte intégral des articles L. 121-23, L.121-24, L.121-25 et L.121-26 du même code ; Considérant que Monsieur X. verse aux débats l'original du contrat de vente litigieux signé par lui le 20 mars 1996 ; que le verso du contrat où figurent les mentions obligatoires précitées est imprimé en gris sur fond blanc et non en bistre comme le prétend l'appelant ; qu'il est tout à fait lisible ainsi que l'a relevé le premier juge ; que le contrat conclu le 20 mars 1996 est par ailleurs conforme aux exigences de l'article L.121-23 précité ;
Considérant que l'appelant allègue des manoeuvres dolosives, lesquelles cependant ne pourraient avoir déterminé son consentement puisqu'elles auraient trait à la rétractation, induisant chez Monsieur X., la croyance que sa commande avait bien été annulée ; que néanmoins, le seul témoignage de la personne vivant avec Monsieur X., Mademoiselle Y., qui déclare avoir téléphoné à AIR PRESTIGE « deux jours après avoir pris la décision de ne pas prendre l'appareil » et avoir appris, selon elle, que le dossier aurait été « mis à la poubelle » et encore qu'elle aurait refusé le colis lors de la livraison, lequel aurait alors été laissé devant sa porte, ne suffit pas à démontrer de quelconques manoeuvres qui auraient vicié le consentement de Monsieur X. ou qui auraient été de nature à faire échec à son droit de rétractation ;
Considérant que de plus, Monsieur X. qui déclare avoir usé de la faculté de rétractation, ne précise même pas la date à laquelle il l'aurait fait et ne justifie pas l'avoir fait, au surplus dans le délai légal ;
Considérant que le premier juge a constaté de surcroît que le bon de livraison, non produit devant la cour en raison du défaut de constitution d'avoué par la société AIR PRESTIGE, était revêtu de la mention « bon pour accord », ce qui autorisait le prêteur à débloquer les fonds au profit du vendeur;
Considérant que par conséquent, la cour confirme le jugement déféré en ce qu'il a débouté Monsieur X. de sa demande de nullité du contrat principal de vente et corrélativement du contrat de prêt ;
Considérant que la société FRANFINANCE verse aux débats, outre l'original du contrat de prêt en date du 20 mars 1996, le tableau d'amortissement et l'historique des mouvements ; qu'elle justifie ainsi de sa créance certaine et exigible envers Monsieur X. d'un montant de 17.953,97 francs ; que par conséquent, la cour confirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné Monsieur X. au paiement de cette somme avec intérêts au taux conventionnel ;
Considérant qu'il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts dus pour une année entière en vertu des dispositions de l'article 1154 du code civil et ce à compter de la demande formulée dans des conclusions signifiées le 13 novembre 1997 ; Considérant qu'eu égard à l'équité, Monsieur X. devra verser à la société FRANFINANCE la somme de 2.000 francs sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort:
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions ;
ET Y AJOUTANT :
ORDONNE la capitalisation des intérêts dus pour une année entière en vertu des dispositions de l'article 1154 du code civil et ce à compter du 13 novembre 1997 ;
DEBOUTE Monsieur X. des fins de toutes ses demandes ;
CONDAMNE Monsieur X. à payer à la société FRANFINANCE la somme de 2.000 francs (DEUX MILLE FRANCS) sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;
LE CONDAMNE à tous les dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés directement contre lui par la SCP BOMMART MINAULT, conformément aux dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile et de la loi sur l'aide juridictionnelle. ET ONT SIGNE LE PRESENT ARRET : Le Greffier qui a assisté au prononcé, C. DE GUINAUMONT et Le Président, Alban CHAIX.