CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CASS. CIV. 3e, 15 janvier 2003

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 3e, 15 janvier 2003
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 3
Demande : 01-03700
Date : 15/01/2003
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Bulletins officiels
Décision antérieure : CA ANGERS (1re ch. A), 30 janvier 2001, CASS. CIV. 3e, 17 juin 2003
Numéro de la décision : 2
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 1943

CASS. CIV. 3e, 15 janvier 2003 : pourvoi n° 01-03.700 ; arrêt n° 2

Publication : Bull. civ. III, n° 9 ; D. 2003. 1190, note Kenfack ; Defrénois 2003. p. 852, note Libchaber ; JCP 2003. II. 10129, obs. Fischer-Achoura

 

Extrait : « Attendu, d'une part, qu'ayant retenu que l'acte litigieux avait été signé au domicile des époux X., ces derniers entretenaient avec l’acheteur des relations régulières et bonnes, que l'opération portait sur une parcelle dont ils ne prétendaient pas qu'ils avaient une moindre connaissance que l'acheteur, que la promesse synallagmatique faisait suite à une promesse de vente non critiquée et concrétisait l'option d'acquérir de son bénéficiaire, la cour d'appel en a exactement déduit que les dispositions de l'article L. 121-21 du Code de la consommation étaient inapplicables ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

TROISIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 15 JANVIER 2003

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 01-03.700. Arrêt n° 2.

DEMANDEUR à la cassation : Monsieur et Madame X.

DÉFENDEUR à la cassation : Monsieur Y.

Président : M. Weber.  Rapporteur : Mme Gabet. Avocat général : M. Bruntz. Avocats : la SCP Piwnica et Molinié, la SCP Le Bret-Desaché.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :

 

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Angers, 30 janvier 2001), que les époux X. ont, par acte du 1er mars 1996, promis de vendre à M. Y., une parcelle de bois cadastrée section F numéro 576 au prix de 12.000 francs ; que, par acte sous seing privé du 15 janvier 1997, les parties ont signé une promesse synallagmatique de vente portant sur la même parcelle et contenant un droit de préférence au profit de M. Y. concernant une parcelle voisine cadastrée section F numéro 564 ; que les époux X. ont refusé de réitérer la vente par acte authentique ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que les époux X. font grief à la cour d'appel d'avoir déclaré la vente parfaite, alors, selon le moyen, que, dans leurs conclusions, les époux X. ont fait valoir que l'acte litigieux avait été rédigé et formalisé sans le concours d'un professionnel des transactions immobilières et qu'à défaut de toute compétence dans cette matière, ils n'avaient bénéficié d'aucune information sur la nature de l'acte qui leur était présenté par M. Y. ; que celui-ci avait utilisé des formules qui avaient pour but de leur cacher qu'ils s'engageaient définitivement à vendre leur parcelle, en dépit de leur refus catégorique antérieur ; qu'en outre, l'acte litigieux contient une seconde stipulation qui évoque la vente d'une autre parcelle comme une opération hypothétique ; que M. Y. a ainsi couché en un seul acte deux conventions portant sur des biens différents ayant des objets différents et requérant des formes également différentes et ce, afin d'abuser le consentement des époux X. ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen d'où il s'évinçait que les époux X. avaient été victimes des manoeuvres dolosives qui les avaient conduits à signer un acte dont ils n'avaient pas compris la portée, la cour d'appel, qui s'est bornée à affirmer qu'il n'était pas démontré que des manoeuvres étaient imputables à M. Y. a, en statuant ainsi, violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

 

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Mais attendu qu'ayant relevé que les termes « promesse » et « consentement à la vente » contenaient en eux-mêmes la souscription d'une obligation de vendre et non un engagement hypothétique, que s'ils visaient un événement futur, celui-ci était inéluctable et proche, et que l'acte litigieux faisait suite à une promesse de vente non discutée, sans que les époux X. n'aient démontré qu'ils avaient fait de la signature de l'acte authentique la condition même de leur engagement, la cour d'appel a pu déduire de ces seuls motifs que les époux X. ne démontraient pas l'existence d'un dol, sans être tenue de répondre à des conclusions faisant état de la présence dans la même promesse de stipulations relatives à la vente d'une autre parcelle ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé de ce chef ;

 

Sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deux autres branches, ci-après annexé :

RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN                                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, d'une part, qu'ayant retenu que l'acte litigieux avait été signé au domicile des époux X., ces derniers entretenaient avec l’acheteur [N.B. arrêt initial mentionnant par erreur « le vendeur » rectifié par Cass. Civ. 3e, 17 juin 2003 : pourvoi n° 01-03700 ; arrêt n° 725] des relations régulières et bonnes, que l'opération portait sur une parcelle dont ils ne prétendaient pas qu'ils avaient une moindre connaissance que l'acheteur, que la promesse synallagmatique faisait suite à une promesse de vente non critiquée et concrétisait l'option d'acquérir de son bénéficiaire, la cour d'appel en a exactement déduit que les dispositions de l'article L. 121-21 du Code de la consommation étaient inapplicables ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu que les deux attestations produites étaient circonstanciées, que la première était confortée par « l'indicateur du marché des forêts en France en 1999 » et retenait une valeur maximale de 10 000 francs l'hectare, que la seconde attestation visait une valeur de fonds de 9 801 francs et une valeur de superficie de 20 000 francs outre une valeur de chasse et émanait d'un expert impliqué dans un litige ayant mis en conflit les parties à la procédure et un tiers pour lequel il avait intercédé, sans allusion à une vileté de prix, la cour d'appel a caractérisé l'absence d'éléments vraisemblables et assez graves pour faire présumer la lésion et a ainsi légalement justifié sa décision de ce chef ;

 

Mais sur le moyen unique du pourvoi incident :

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'article 1174 du Code civil ;

 

CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause)                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que, pour déclarer sans valeur la clause insérée à l'acte du 15 janvier 1997 aux termes de laquelle M. et Mme X. accordaient, à M. Y. un « droit de préférence » non limité dans le temps, en cas de vente de la parcelle numéro 564, l'arrêt retient que l'obligation de proposer de vendre un immeuble à des bénéficiaires déterminés sans qu'aucun prix ne soit prévu est purement potestative et ne constitue pas un pacte de préférence ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original

Qu'en statuant ainsi, alors que la condition potestative doit émaner de celui qui s'oblige, et que la prédétermination du prix du contrat envisagé et la stipulation d'un délai ne sont pas des conditions de validité du pacte de préférence, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS : CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a déclaré le pacte de préférence sans valeur, l'arrêt rendu le 30 janvier 2001, entre les parties, par la cour d'appel d'Angers ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Rennes ;

Condamne les époux X. aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne les époux X. à payer à M. Y. la somme de 1.900 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze janvier deux mille trois.

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Piwnica et Motinié, avocat aux Conseils pour les époux X.

MOYEN UNIQUE DE CASSATION

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Le moyen fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir déclaré parfaite la vente formée par acte sous seing privé du 15 janvier 1997 entre les époux X. et M. Y. de la parcelle de terre dite […] d'une contenance de 2 ha 2 a moyennant le prix principal de 12.000 Francs ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QUE sur le consentement de la vente, il y a eu accord en la forme sur la chose et le prix, la seule discussion portant sur le caractère éclairé ou non du consentement des vendeurs ; que ceux-ci prétendent qu'ils n'ont pas compris la nature et la portée exacte de la convention telle que présentée et rédigée par Monsieur Y. qui a volontairement opté pour une rédaction trompeuse ; que dans leur esprit, l'opération était envisagée comme un événement futur, hypothétique, l'acte du notaire réalisant seul la vente ; que si le terme synallagmatique est plutôt connu des initiés, le contenu du texte est compréhensible au regard du sens commun ; que les termes « promesse » et (« non intention ») ou « consentement pour la vente » contiennent en eux-mêmes la souscription d'une obligation de vendre et non un engagement hypothétique ; que ces termes peuvent être appréhendés comme visant un événement futur mais celui-ci étant inéluctable et nécessairement proche, aucun vendeur de bon sens ne pouvant se lier à un prix pour une durée indéterminée ; que l'acte authentique fait suite à une promesse de vente en elle-même non discutée ; qu'il n'est pas démontré que les époux X. aient entendu faire de la signature de l'acte authentique la condition même de leur engagement ; qu'il n'est pas fait de démonstration des manoeuvres dolosives imputables à l'acquéreur, par acte positif ou par réticence ou omission ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

1°/ - ALORS QUE dans leurs conclusions, les époux X. ont fait valoir que l'acte litigieux avait été rédigé et formalisé sans le concours d'un professionnel des transactions immobilières et qu'à défaut de toute compétence dans cette matière, ils n'avaient bénéficié d'aucune information sur la nature de l'acte qui leur était présenté par M. Y. ; que celui-ci avait utilisé des formules qui avaient pour but de leur cacher qu'ils s'engageaient définitivement à vendre leur parcelle, en dépit de leur refus catégorique antérieur ; qu'en outre, l'acte litigieux contient une seconde stipulation qui évoque la vente d'une autre parcelle comme une opération hypothétique ; que M. Y. a ainsi couché en un seul acte deux conventions portant sur des biens différents ayant des objets différents et requérant des formes également différentes et ce, afin d'abuser le consentement des époux X. ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen d'où il s'évinçait que les époux X. avaient été victimes des manoeuvres dolosives qui les avaient conduits à signer un acte dont ils n'avaient pas compris la portée, la Cour d'appel qui s'est bornée à affirmer qu'il n'était pas démontré que des manoeuvres étaient imputables à M. Y. a, en statuant ainsi, violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ET AUX MOTIFS QUE sur l'application des dispositions sur le démarchage à domicile, que M. Y. qui insiste sur sa qualité d'expert en objets d'art s'est présenté dans ses rapports écrits avec les époux X. comme sylviculteur ; qu'il ne dément pas que cet acte a été signé au domicile des cocontractants ; qu'il ressort des pièces produites qu'il a procédé à diverses opérations du même type et selon des modalités analogues ; que ces éléments ne suffisent toutefois pas à caractériser un démarchage à domicile dès lors qu'il n'est pas démenti que les parties entretenaient des relations régulières et bonnes, que l'opération litigieuse porte sur une parcelle dont les vendeurs ne prétendent pas qu'ils avaient des connaissances moindres que celles de l'acheteur ; que faisant suite à une promesse de vente non critiquée en elle-même, elle concrétise l'option d'acquérir de son bénéficiaire ; que les allégations sur l'accroissement du patrimoine forestier de M. Y. et sur ses méthodes pour y parvenir sont inopérantes ; toute personne a la faculté d'investir ses économies dans le domaine de son choix et les doléances émises par d'autres vendeurs relèvent d'autant de cas particuliers dont il n'est pas possible d'appréhender la similitude avec celui de l'espèce ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

2°/ - ALORS QU'aux termes de l'article L. 121-21 du Code de la consommation, est soumis aux dispositions relatives au démarchage à domicile quiconque pratique le démarchage au domicile d'une personne physique même à sa demande afin de lui proposer l'achat, la vente, la location, la location-vente ou la location avec option d'achat de biens ou de services ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel qui a constaté la qualité de sylviculteur de M. Y. mais qui a refusé d'admettre que la succession d'acquisition de parcelles forestières aux fins d'exploitation, constituait une pratique relevant de la disposition précitée a, en statuant ainsi, violé cette dernière ;

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ET AUX MOTIFS, sur la lésion, QUE deux estimations d'experts forestiers s'affrontent ; que M. W. fait ressortir une valeur maximum à l'hectare de 10.000 Francs ; que M. Z. aboutit à une valeur de 16.314 Francs l'hectare ; que la première estimation est confortée par l'indicateur du marché des forêts en France en 1999 ; que la seconde vise une valeur de fonds et une valeur de superficie et ajoute une valeur de chasse du fait du passage de sangliers ; qu'elle émane d'un expert qui est impliqué dans un litige mettant en conflit Monsieur Y. et la famille V. qui a convoité la parcelle litigieuse et en faveur de laquelle il a intercédé ; que l'allusion à l'estimation de parcelles mitoyennes faite dans le cadre de la sortie d'une indivision de la famille V. n'est pas opérante ;

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

3°/ - ALORS QU'aux termes des articles 1677 et 1678 du Code civil, la preuve de la lésion ne peut être admise que par jugement et elle ne peut se faire que par un rapport de trois experts dans le cas où les faits articulés sont assez vraisemblables et assez graves pour faire présumer la lésion ; que la Cour d'appel a constaté que les estimations des deux experts forestiers produites par les parties étaient circonstanciées et qu'elles faisaient ressortir, pour l'une, une valeur maximum à l'hectare de 10.000 Francs et, pour l'autre, une valeur à l'hectare de 16.314 Francs, tandis que la vente s'était réalisée pour un prix de 12.000 Francs, soit 4.958 à l'hectare ; qu'en refusant d'autoriser l'établissement de la preuve par trois experts, en raison des liens existants entre l'un des experts forestiers et un tiers intéressé à la parcelle litigieuse, la Cour d'appel en statuant ainsi par des motifs inopérants, a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.