CASS. COM., 4 septembre 2024
- T. com. Nevers, 12 avril 2023 : RG n° 22/00436 ; Dnd
CERCLAB - DOCUMENT N° 23234
CASS. COM., 4 septembre 2024 : pourvoi n° 23-16886 ; arrêt n° 437
Publication : Legifrance
Extraits : 1/ « 7. Pour rejeter les demandes de la société Boole, le jugement retient que le contrat litigieux a été conclu hors établissement. Après avoir énoncé qu'en matière de contrats conclus hors établissement, l'article L. 221-5 du code de la consommation met à la charge du professionnel une obligation précontractuelle d'information à l'égard du consommateur, il ajoute que la preuve du respect de cette obligation n'est pas produite aux débats et en déduit que le contrat litigieux est nul. 8. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui incombait, si les parties avaient été physiquement et simultanément présentes, soit au moment de la sollicitation, soit au moment de la conclusion du contrat, dans un lieu qui n'est pas celui où la société Boole exerçait son activité en permanence ou de manière habituelle, ni s'être assuré, au cas où tel serait le cas, que l'objet du contrat n'entrait pas dans le champ de l'activité principale de la société Ateliers de Saint Louis et que celle-ci n'employait pas plus de cinq salariés, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision. »
2/ « 11. Pour rejeter les demandes de la société Boole, le jugement, après avoir relevé que le contrat litigieux avait été conclu à distance et énoncé qu'en matière de contrats conclus à distance, l'article L. 221-5 du code de la consommation met à la charge du professionnel une obligation précontractuelle d'information à l'égard du consommateur, retient que la preuve du respect de cette obligation n'est pas produite aux débats et en déduit que le contrat litigieux est nul. 12. En statuant ainsi, alors que le contrat litigieux ayant été conclu entre deux professionnels, la société Boole ne pouvait bénéficier des dispositions particulières applicables aux contrats à distance, le tribunal a violé, par fausse application les textes susvisés. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE
ARRÊT DU 4 SEPTEMBRE 2024
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : E 23-16.886. Arrêt n° 437 F-D.
DEMANDEUR à la cassation : Société Boole
DÉFENDEUR à la cassation : Société Ateliers de Saint Louis
M. VIGNEAU, président.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La société Boole, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° E 23-16.886 contre le jugement rendu le 12 avril 2023 par le tribunal de commerce de Nevers, dans le litige l'opposant à la société Ateliers de Saint Louis, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation. Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Sabotier, conseiller, les observations de la SCP Boutet et Hourdeaux, avocat de la société Boole, de la SAS Buk Lament-Robillot, avocat de la société Ateliers de Saint Louis, après débats en l'audience publique du 4 juin 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Sabotier, conseiller rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Faits et procédure :
1. Selon le jugement attaqué (tribunal de commerce de Nevers, 12 avril 2023) rendu en dernier ressort et les productions, la société Boole, éditrice de logiciels dédiés aux métiers de la construction et de l'industrie, a, « par voie dématérialisée à distance hors établissement », conclu avec la société Ateliers de Saint Louis un contrat de vente de son logiciel « Opticoupe 6-200 ».
2. Le 28 décembre 2021, n'ayant reçu aucun règlement de la facture correspondant à cette vente, la société Boole a obtenu une ordonnance portant injonction de payer à l'encontre de la société Ateliers de Saint Louis, laquelle a formé opposition.
Sur le moyen, pris en ses première et deuxième branches :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Enoncé du moyen :
3. La société Boole fait grief au jugement de dire recevable l'opposition, de la débouter de ses demandes et de déclarer le contrat nul, alors :
« 1°/ que les dispositions des sections 2, 3 et 6 du chapitre Ier du titre II du livre II du code de la consommation applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq ; qu'en retenant que le contrat conclu est un contrat hors établissement nul d'effet, le professionnel ne démontrant pas avoir satisfait à son obligation précontractuelle d'information imposée à l'article L. 221-5 du code de la consommation, sans avoir recherché, comme il lui était demandé, si la société Ateliers de Saint Louis avait conclu un contrat n'entrant pas dans le champ de son activité principale et n'employait pas plus de cinq salariés, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 221-3 du code de la consommation ;
2°/ que le contrat hors établissement désigne tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur a) Dans un lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d'une sollicitation ou d'une offre faite par le consommateur b) ou dans le lieu où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle ou au moyen d'une technique de communication à distance, immédiatement après que le consommateur a été sollicité personnellement et individuellement dans un lieu différent de celui où le professionnel exerce en permanence ou de manière habituelle son activité et où les parties étaient, physiquement et simultanément, présentes ; qu'en retenant que le contrat conclu est un contrat hors établissement nul d'effet, le professionnel ne démontrant pas avoir satisfait à son obligation précontractuelle d'information imposée à l'article L. 221-5 du code de la consommation, sans avoir recherché, comme il lui était demandé, si les parties avaient été physiquement et simultanément présentes, soit au moment de la sollicitation du consommateur, soit au moment de la conclusion du contrat dans un lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, le tribunal a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 221-1, I, du code la consommation. »
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Réponse de la Cour :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu les articles L. 221-1, I, 2°, L. 221-3 et L. 221-5 du code de la consommation :
CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
4. Il résulte du dernier de ces textes, qui figure dans la section 2 « Obligation d'information précontractuelle » du chapitre Ier « Contrats conclus à distance et hors établissement » du titre II du livre II du code de la consommation, que, préalablement à la conclusion d'un contrat de vente de biens ou de fourniture de services, de contenu numérique ou de services numériques, le professionnel doit fournir au consommateur, de manière lisible et compréhensible, diverses informations.
5. Aux termes du premier, pour l'application du titre II du livre II du code de la consommation, est considéré comme contrat hors établissement, tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur soit dans un lieu qui n'est pas celui où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle, en la présence physique simultanée des parties, y compris à la suite d'une sollicitation ou d'une offre faite par le consommateur, soit dans le lieu où le professionnel exerce son activité en permanence ou de manière habituelle ou au moyen d'une technique de communication à distance, immédiatement après que le consommateur a été sollicité personnellement et individuellement dans un lieu différent de celui où le professionnel exerce en permanence ou de manière habituelle son activité et où les parties étaient, physiquement et simultanément, présentes, soit pendant une excursion organisée par le professionnel ayant pour but ou pour effet de promouvoir et de vendre des biens ou des services au consommateur.
6. Selon le deuxième, les dispositions des sections 2, 3, 6 du chapitre Ier du titre II du livre II du code de la consommation applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
7. Pour rejeter les demandes de la société Boole, le jugement retient que le contrat litigieux a été conclu hors établissement. Après avoir énoncé qu'en matière de contrats conclus hors établissement, l'article L. 221-5 du code de la consommation met à la charge du professionnel une obligation précontractuelle d'information à l'égard du consommateur, il ajoute que la preuve du respect de cette obligation n'est pas produite aux débats et en déduit que le contrat litigieux est nul.
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
8. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui incombait, si les parties avaient été physiquement et simultanément présentes, soit au moment de la sollicitation, soit au moment de la conclusion du contrat, dans un lieu qui n'est pas celui où la société Boole exerçait son activité en permanence ou de manière habituelle, ni s'être assuré, au cas où tel serait le cas, que l'objet du contrat n'entrait pas dans le champ de l'activité principale de la société Ateliers de Saint Louis et que celle-ci n'employait pas plus de cinq salariés, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision.
Sur le moyen, pris en sa troisième branche :
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Enoncé du moyen :
9. La société Boole fait le même grief au jugement, alors « que le contrat de vente à distance désigne tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu'à la conclusion du contrat ; qu'en retenant que le contrat conclu est un contrat à distance nul d'effet, le professionnel ne démontrant pas avoir satisfait à son obligation précontractuelle d'information imposée à l'article L. 221-5 du code de la consommation, quand le contrat a été conclu entre deux professionnels, le tribunal a violé l'article L. 221-1 du code de la consommation par fausse application. »
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Réponse de la Cour :
VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Vu les articles L. 221-1, I, 1°, et L. 221-5 du code de la consommation :
CHAPEAU (énoncé du principe juridique en cause) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
10. Aux termes du premier de ces textes, pour l'application du titre II du livre II du code de la consommation, est considéré comme contrat à distance, tout contrat conclu entre un professionnel et un consommateur, dans le cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de services à distance, sans la présence physique simultanée du professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou plusieurs techniques de communication à distance jusqu'à la conclusion du contrat.
RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
11. Pour rejeter les demandes de la société Boole, le jugement, après avoir relevé que le contrat litigieux avait été conclu à distance et énoncé qu'en matière de contrats conclus à distance, l'article L. 221-5 du code de la consommation met à la charge du professionnel une obligation précontractuelle d'information à l'égard du consommateur, retient que la preuve du respect de cette obligation n'est pas produite aux débats et en déduit que le contrat litigieux est nul.
CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
12. En statuant ainsi, alors que le contrat litigieux ayant été conclu entre deux professionnels, la société Boole ne pouvait bénéficier des dispositions particulières applicables aux contrats à distance, le tribunal a violé, par fausse application les textes susvisés.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS, la Cour : CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 12 avril 2023, entre les parties, par le tribunal de commerce de Nevers ;
Remet l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal de commerce de Bourges ;
Condamne la société Ateliers de Saint Louis aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Ateliers de Saint Louis et la condamne à payer à la société Boole la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre septembre deux mille vingt-quatre.