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CA RENNES (1re ch. B), 17 mars 2011

Nature : Décision
Titre : CA RENNES (1re ch. B), 17 mars 2011
Pays : France
Juridiction : Rennes (CA), 1re ch. sect. B
Demande : 09/06455
Décision : 184
Date : 17/03/2011
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 16/09/2009
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2358

CA RENNES (1re ch. B), 17 mars 2011 : RG n° 09/06455 ; arrêt n° 184

Publication : Jurica

 

Extrait : « La société SMAG prétend à l'indemnisation du préjudice causé par la rupture brutale d'un usage commercial instauré entre les parties. Mais elle n'apporte aucune preuve ni de cet usage ni des exigences nouvelles qui auraient été posées par son partenaire commercial, de nature à créer un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, selon les termes de l’article L. 442-6 du code de commerce. Il y a lieu de rejeter cette demande. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE RENNES

PREMIÈRE CHAMBRE B

ARRÊT DU 17 MARS 2011

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 09/06455. Arrêt n° 184.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Madame Catherine LE BAIL, Président, Madame Françoise LE BRUN, Conseiller, Monsieur Jean-Pierre GIMONET, Conseiller,

GREFFIER : Madame Marie-Noëlle KARAMOUR, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS : A l'audience publique du 1er février 2011, devant Madame Françoise LE BRUN, magistrat rapporteur, tenant seul l'audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT : Contradictoire, prononcé publiquement le 17 mars 2011 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l'issue des débats

 

APPELANTE :

Société DES MAROQUINERIES GASNIER SMAG SARL

[adresse], représentée par la SCP SCP BAZILLE Jean-Jacques, avoués, assistée de la SELARL ADALA (Me Stéphane LALLEMENT)

 

INTIMÉE :

Société FORTEAM FORMATION SAS anciennement dénommée CEFIC COMMUNICATION

[adresse], représentée par la SCP Jean-Loup BOURGES - Luc BOURGES, avoués, assistée de Maître David GUINET, avocat

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

I - EXPOSÉ DU LITIGE :

La société Forteam Formation, anciennement CEFIC Communication, exerce une activité de formation continue, notamment dans le domaine du commerce, pour laquelle elle est enregistrée à la Préfecture de la Région Pays de la Loire sous le N° XX. Elle conclut des actions de formation dont le financement peut être pris en charge, totalement ou partiellement, par un OCPA (Organisme Collecteur Paritaire Agréé) dont dépend l'entreprise concernée. Et selon les conventions de formation, le paiement des prestations de formation peut être assuré directement par l'entreprise titulaire de la convention, en se faisant rembourser par l'OCPA, à moins de subroger l'organisme de formation qui peut dès lors obtenir directement le paiement de l'OCPA.

La Société de Maroquinerie Gasnier (SMAG) exerce une activité de commerce d'articles de maroquinerie, parapluies et articles de voyage, dans plusieurs points de vente à Nantes et à La Baule. L'OCPA dont elle dépend est le FORCO lequel a pour mission de collecter les contributions des entreprises et de prendre en charge les actions de formation mises en place dans le cadre du plan de formation et de professionnalisation.

La société SMAG a passé plusieurs conventions de formation avec la société CEFIC Communication, pour plusieurs salariés, en contrats de professionnalisation. Mais depuis le mois de novembre 2007 elle a cessé de payer les factures qui lui ont été adressées mensuellement.

Après de vaines relances, la société CEFIC Communication a adressé une mise en demeure le 18 juin 2008, en réclamant le paiement d'une somme de 21.517,13 euros. Saisi sur requête le tribunal de commerce de Nantes a rendu une injonction de payer la somme en principal de 25.229,61 euros, outre 511,73 euros au titre des intérêts, 4,35 euros au titre des accessoires et 38,87 euros au titre des dépens.

Sur opposition de la société SMAG, par jugement du 23 juillet 2009, le tribunal de commerce de Nantes a :

- Rejeté l'opposition à l'injonction de payer de la société SMAG ;

- Condamné la société SMAG à payer à la société Forteam Formation la somme de 32.362,76 euros ;

- Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2006 pour les factures émises jusqu'au 30 mai 2008 et de la date de l'échéance pour les factures émises depuis le 1er juin 2008 ;

- Dit que les intérêts seront capitalisés ;

- Rejeté la demande de dommages-intérêts de la société Forteam Formation tant au titre de l'image et la crédibilité que des frais irrépétibles engagés devant le tribunal de grande instance ;

- Condamné la société SMAG à verser la somme de 3.500 euros à la société Forteam Formation au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

- Ordonné l'exécution provisoire de la présente décision ;

- Condamné la société SMAG aux entiers dépens qui comprendront les frais d'ordonnance d'injonction de payer et d'actes d'huissier ;

- Condamné la société SMAG aux frais du présent jugement, soit 114,46 euros TTC ;

- Dit que le présent jugement se substitue à l'ordonnance d'injonction de payer rendue le 2 septembre 2008.

 

La SARL Société des Maroquineries Gasnier (SMAG) a régulièrement déclaré faire appel de cette décision, le 16 septembre 2009, à l'encontre de la SAS Forteam Formation (anciennement dénommée CEFIC Communication).

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la Cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée et aux dernières conclusions signifiées par les parties.

La SARL Société des Maroquineries Gasnier (SMAG) a conclu le 18 janvier 2009 et demande à la cour de :

- Vu les dispositions de l’article L. 442-9 du code de commerce,

- Réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré ;

- Condamner la société Forteam Formation à payer à la société SMAG la somme de 20.000 euros à titre de dommages-intérêts ;

- Condamner la société Forteam Formation à payer à la société SMAG la somme de 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner la société Forteam Formation aux entiers dépens qui seront recouvrés par la SCP Bazille Jean-Jacques, avoué, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

La SAS Forteam Formation (anciennement dénommée CEFIC Communication) a conclu le 9 avril 2010, au visa des articles 1134, 1147, 1153, 1154 et 1315 du code civil, des articles 70, 559, 560, 561, 564 et 567 du code de procédure civile, et demande à la cour de :

- A titre principal

- Déclarer irrecevable la nouvelle demande en dommages-intérêts de la société SMAG ;

- A titre subsidiaire

- Débouter la société SMAG de sa demande nouvelle en dommages- intérêts ;

- En tout état de cause

- Confirmer le jugement déféré en ses dispositions rejetant l'opposition à l'injonction de payer et condamnant la société SMAG à payer la somme de 32.362,6 euros avec intérêts capitalisés ;

- Infirmer le jugement déféré quant au rejet de la demande de dommages-intérêts de la société Forteam Formation ;

- Condamner la société SMAG à payer à la société Forteam Formation la somme de 20.000 euros en réparation du préjudice subi ;

- Condamner la société SMAG à payer à la société Forteam Formation la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour appel abusif ;

- Débouter la société SMAG de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

- Condamner la société SMAG à payer à la société Forteam Formation la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en sus de l'indemnité déjà accordée par le tribunal de commerce de Nantes ;

- Condamner la société SMAG aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction au profit de la SCP Jean-Loup Bourges - Luc Bourges, avoué, qui sera autorisée à les recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 janvier 2011.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

II - MOTIFS :

La société SMAG ne conteste pas les prestations de formation assurées par la société Forteam Formation et ne discute pas le montant des sommes réclamées à ce titre.

Mais elle explique que le mode de financement de ces formations impliquait un décalage de plusieurs mois entre leur facturation et le versement des fonds correspondants. Et elle prétend qu'une pratique s'était instaurée entre les parties, s'accordant sur un paiement annuel des prestations par la société SMAG après réception des fonds du FORCO.

Elle soutient devant la cour une rupture abusive de cet usage commercial imputable à la société Forteam Formation et réclame à ce titre des dommages-intérêts chiffrés à 20.000 euros, sur le fondement de l’article L 442-6 du code de commerce.

La société Forteam Formation soulève l'irrecevabilité de cette demande comme étant nouvelle en cause d'appel et elle en demande à défaut le rejet. Elle conclut à confirmation du jugement déféré en ce qu'il a rejeté l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer, en actualisant sa créance. Mais elle réclame de plus fort des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par les agissements de la société SMAG, nuisant à son image et lui imposant des frais et tracas liés à la procédure. Elle réclame en outre des dommages-intérêts pour appel abusif dans un seul but dilatoire.

 

Sur les prestations de formation :

La société Forteam Formation fournit tous les justificatifs des actions de formation dont le paiement a été accordé dans le jugement déféré, se substituant à l'ordonnance d'injonction de payer pour actualiser le montant de la créance, en l'augmentant du coût des formations qui se sont poursuivies dans l'intérêt des salariés concernés.

Le jugement déféré sera confirmé en ces dispositions.

 

Sur la demande de la société SMAG :

La société SMAG a saisi le tribunal de commerce pour s'opposer au paiement réclamé par la société Forteam Formation au titre des prestations de formation. Elle n'a pas développé de moyens en première instance et n'en développe pas plus sur ce point en cause d'appel.

La société SMAG fait valoir devant la cour une demande de dommages-intérêts, en invoquant des agissements fautifs imputables à la société Forteam Formation dans le cadre de leurs relations commerciales.

Sans préjuger du bien fondé de cette demande, elle s'analyse en une demande reconventionnelle qui se rattache par un lien suffisant aux prétentions originaires, pour s'opposer aux demandes indemnitaires formées par la société Forteam Formation. Elle est retenue comme recevable en vertu des articles 70 et 567 du code de procédure civile.

La société SMAG prétend à l'indemnisation du préjudice causé par la rupture brutale d'un usage commercial instauré entre les parties. Mais elle n'apporte aucune preuve ni de cet usage ni des exigences nouvelles qui auraient été posées par son partenaire commercial, de nature à créer un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties, selon les termes de l’article L 442-6 du code de commerce. Il y a lieu de rejeter cette demande.

 

Sur les dommages-intérêts réclamés par la SA Forteam Formation :

Les contestations et demandes successives de la société SMAG ont contraint la société Forteam Formation à supporter des coûts induits de fonctionnement pour la constitution des dossiers au soutien de ses demandes et de ses prétentions en défense, ainsi que pour gérer la mise en œuvre des procédures conservatoires rendues nécessaires par la résistance de la société SMAG qui a multiplié les recours mais sans les fonder sur des éléments précis et sans produire aucun élément de preuve au soutien de ses demandes, en agissant dans un but manifestement dilatoire.

L'atteinte à l'image et à la santé financière de la société Forteam Formation n'est pas établie, mais les procédures intentées de manière abusive par la société SMAG ont occasionné des frais et des tracas générant un préjudice qui sera réparé par une indemnité de 5.000 euros, toutes causes confondues.

 

Sur les frais et dépens :

Le jugement déféré sera confirmé en ses dispositions sur les frais et dépens.

La société SMAG qui succombe sera condamnée aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à la société Forteam Formation la somme 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR :

Infirme le jugement déféré en ses dispositions sur les dommages intérêts ;

Et statuant de nouveau,

Condamne la société SMAG à payer à la société Forteam Formation la somme de 5.000 euros à titre de dommages intérêts ;

Confirme pour le surplus les dispositions du jugement déféré ;

Y ajoutant,

Condamne la société SMAG à payer à la société Forteam Formation la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société SMAG aux dépens d'appel, recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile

 Le Greffier,              Le Président.