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CA VERSAILLES (12e ch., section 1), 10 septembre 2009

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (12e ch., section 1), 10 septembre 2009
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 12e ch.
Demande : 08/03163
Date : 10/09/2009
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2371

CA VERSAILLES (12e ch., section 1), 10 septembre 2009 : RG n° 08/03163

Publication : Jurica

 

Extrait : « Considérant que la société ATLANTEM qui a livré au delà du délai, oppose la présence d'une clause exonératoire de responsabilité dans les conditions générales de vente de son compte client, auquel a souscrit la société LE DECOR DU MARBRE ; que selon cette clause « Sauf convention expresse, le retard dans nos délais ne peut donner lieu à aucune indemnité, ni annulation. Ils ne constituent pas un engagement contractuel. Tout retard quelqu’en soit la cause ne peut entraîner ni annulation, ni pénalité de retard, ni dommages-intérêts » ;

Considérant que cette clause a été approuvée par la société LE DECOR DU MARBRE qui a signé en bas de la page où elle est imprimée sur l'imprimé de compte client qu'elle a ouvert auprès de la société ATLANTEM ; que la signature suit la mention indiquant qu'elle avait lu le texte et l'approuvait ; Considérant que la clause est placée dans un paragraphe distinct intitulé « délai » ; qu'elle est parfaitement claire et visible et est en conséquence opposable à la société LE DECOR DU MARBRE ;

Considérant qu'insérée dans un contrat entre professionnels, pour des activités les concernant, la clause ne relève pas de l’article 132-1 du Code de la consommation, aucune disparité, ni déséquilibre n'existant entre les deux parties ;

Que l’article L. 442-6, 2° du Code de commerce en ses dispositions modifiées par la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008 n'est pas applicable en l'espèce pour être entré en vigueur postérieurement à la création de la situation contractuelle entre les parties ;

Considérant que la clause porte sur l'obligation essentielle du contrat puisque la livraison dans un délai particulier avait été précisé par la société LE DECOR DU MARBRE ; que son absence de remarque lors de la livraison quant au non respect du délai ne lui ôte pas ce caractère ; Considérant que le manquement à l'obligation essentielle du contrat équivaut à une faute lourde qui ne permet plus à la société ATLANTEM de se prévaloir de la clause exonératoire ; Considérant toutefois que la responsabilité de cette société suppose le constat d'un préjudice résultant directement du manquement ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

DOUZIÈME CHAMBRE SECTION 1

ARRÊT DU 10 SEPTEMBRE 2009

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 08/03163. Code nac : 56B. ARRÊT CONTRADICTOIRE. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 mars 2008 par le Tribunal de Commerce de PONTOISE : RG n° 2007F00445

LE DIX SEPTEMBRE DEUX MILLE NEUF, La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANTE :

SARL LE DECOR DU MARBRE « LDDM »

ayant son siège [adresse], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Concluant par la SCP FIEVET-LAFON, avoués - N° du dossier 280386, Plaidant par Maître Laurent BARDET, avocat au barreau de VERSAILLES

 

INTIMÉE :

SAS ATLANTEM INDUSTRIES

ayant son siège [adresse], agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, Concluant par la SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER, avoués - N° du dossier 20080563, Plaidant par Maître Arnaud LEROY membre de la SCP PETIT RONZEAU ET ASSOCIES, société d'avocats au barreau de PONTOISE

 

Composition de la cour : L'affaire a été débattue à l'audience publique du 26 mai 2009, Madame Marie-José VALANTIN, conseiller, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de : Madame Sylvie MANDEL, président, Madame Marie-José VALANTIN, conseiller, Madame Dominique LONNE, conseiller, qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Sabine MAREVILLE

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

La société LE DECOR DU MARBRE qui exerce une activité dans le bâtiment est entrée en contact avec la société ATLANTEM INDUSTRIES (ATLANTEM) fabricant de fenêtres, volants roulants.

Le 15 février 2006, la société ATLANTEM a adressé une offre à la société LE DECOR DU MARBRE. Le 6 mars 2006, la société LE DECOR DU MARBRE a ouvert un compte client dans les livres de la société ATLANTEM et le 2 mai suivant, elle lui a passé commande de châssis et de fenêtres pour le chantier de Monsieur X. en demandant une livraison huit semaines plus tard. Les pièces ont été livrées le 2 août 2006 par la société ATLANTEM qui a expédié sa facture d'un montant de 6.595,75 euros.

La somme restant impayée, la société ATLANTEM a mis en demeure la société LE DECOR DU MARBRE, le 7 novembre 2006, de lui payer la somme. Elle est restée sans effet de même que plusieurs relances, de sorte la société ATLANTEM a présenté une requête en injonction de payer à laquelle il a été fait droit. La société LE DECOR DU MARBRE a fait opposition.

Devant le tribunal, la société LE DECOR DU MARBRE a expliqué son refus de payer par le retard de livraison par rapport au délai impératif de 8 semaines prévu.

Par jugement rendu le 11 mars 2008, le tribunal a retenu l'efficacité de la clause d'exonération pour retard de livraison dont excipait la société ATLANTEM et a condamné la société LE DECOR DU MARBRE à payer la somme de 6.595,75 euros avec intérêts à compter du 4 janvier 2007 ainsi que la somme de 800 euros et les dépens.

La société LE DECOR DU MARBRE a formé appel et poursuit l'infirmation du jugement.

Elle demande de dire que la livraison étant intervenue avec retard, la société ATLANTEM a engagé sa responsabilité que n'efface pas la clause exonératoire. Elle demande de déclarer la clause non écrite et sollicite que la société ATLANTEM soit condamnée à lui verser la somme de 6.595,75 euros à titre de dommages-intérêts ou tout autre somme. Elle demande de condamner également cette société au paiement de la somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile .

La société LE DECOR DU MARBRE fait essentiellement valoir que le manquement à une obligation essentielle du contrat est constitutive d'une faute lourde et écarte les clauses exonératoires de responsabilité, que le manquement peut ne représenter qu'une simple négligence ; que la loi de modernisation de l'économie modifiant l’article L 442-6 2° du Code de commerce prévoit la responsabilité de celui qui soumet un partenaire commercial à des obligations créant un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties. Elle soutient que la clause qui réduit la valeur d'un délai de livraison crée un déséquilibre entre professionnels qui peut donner lieu à des dommages-intérêts.

Elle souligne avoir mentionné un délai auquel la société ATLANTEM ne s'est pas opposée. Elle estime qu'en livrant au delà du délai, la société ATLANTEM a manqué à son obligation de résultat et doit des dommages-intérêts, qu'elle-même devait terminer le chantier à une date précise.

La société ATLANTEM conclut à la confirmation du jugement et demande d'ajouter la capitalisation des intérêts et en outre la condamnation de la société LE DECOR DU MARBRE au paiement de la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile .

Elle explique que la société LE DECOR DU MARBRE lui a passé commande le 2 mai 2006 des trois produits et souhaitait un délai maximum de huit semaines, que le 10 mai la société LE DECOR DU MARBRE a confirmé la commande sans préciser de délai et que le matériel a été livré sans réserve, ni protestations.

Elle ajoute que ses conditions générales expressément acceptées par la société LE DECOR DU MARBRE lors de l'ouverture de son compte chez elle, contenaient une clause exonératoire de responsabilité en cas de non respect des délais. Elle conteste l'application de l’article L. 442-6 du Code de commerce qui ne s'applique qu'aux contrats conclus après le 1er janvier 2009 et de l’article 132-1 du Code de la consommation s'agissant de relations entre professionnels.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Considérant que la SARL LE DECOR DU MARBRE a passé commande à la société ATLANTEM de différentes pièces ; qu'il était précisé dans cette commande « Cependant le délai serait pour maxi semaine 25 soit 8 semaines » ;

Considérant que le 10 mai, il a été demandé à la société ATLANTEM de modifier certains éléments de la commande ; que ces modifications portaient seulement sur des données techniques ; qu'en conséquence, tous les autres éléments de la commande se trouvaient maintenus et en particulier le délai précédemment fixé de livraison semaine 25 ;

Considérant que la société ATLANTEM a livré la commande prévue ; qu'elle est fondée à obtenir le paiement de sa prestation d'un montant de 6.595,75 euros ; que la société LE DECOR DU MARBRE peut seulement prétendre à un dédommagement pour l'inexécution imparfaite de l'obligation ;

Considérant que la société ATLANTEM qui a livré au delà du délai, oppose la présence d'une clause exonératoire de responsabilité dans les conditions générales de vente de son compte client, auquel a souscrit la société LE DECOR DU MARBRE ; que selon cette clause « Sauf convention expresse, le retard dans nos délais ne peut donner lieu à aucune indemnité, ni annulation. Ils ne constituent pas un engagement contractuel. Tout retard quelqu’en soit la cause ne peut entraîner ni annulation, ni pénalité de retard, ni dommages-intérêts » ;

Considérant que cette clause a été approuvée par la société LE DECOR DU MARBRE qui a signé en bas de la page où elle est imprimée sur l'imprimé de compte client qu'elle a ouvert auprès de la société ATLANTEM ; que la signature suit la mention indiquant qu'elle avait lu le texte et l'approuvait ;

Considérant que la clause est placée dans un paragraphe distinct intitulé « délai » ; qu'elle est parfaitement claire et visible et est en conséquence opposable à la société LE DECOR DU MARBRE ;

Considérant qu'insérée dans un contrat entre professionnels, pour des activités les concernant, la clause ne relève pas de l’article 132-1 du Code de la consommation, aucune disparité, ni déséquilibre n'existant entre les deux parties ;

Que l’article L. 442-6, 2° du Code de commerce en ses dispositions modifiées par la loi de modernisation de l'économie du 4 août 2008 n'est pas applicable en l'espèce pour être entré en vigueur postérieurement à la création de la situation contractuelle entre les parties ;

Considérant que la clause porte sur l'obligation essentielle du contrat puisque la livraison dans un délai particulier avait été précisé par la société LE DECOR DU MARBRE ; que son absence de remarque lors de la livraison quant au non respect du délai ne lui ôte pas ce caractère ;

Considérant que le manquement à l'obligation essentielle du contrat équivaut à une faute lourde qui ne permet plus à la société ATLANTEM de se prévaloir de la clause exonératoire ;

Considérant toutefois que la responsabilité de cette société suppose le constat d'un préjudice résultant directement du manquement ;

Or considérant que si la date de fin de chantier devait être le 23 juin puis le 27 août et a été ultérieurement reportée, la SARL LE DECOR DU MARBRE n'apporte pas la preuve que le retard de livraison de la société ATLANTEM en est la cause ; qu'en effet, le maître de l'ouvrage n'a exigé de pénalités qu'à compter du mois d'octobre ; que la société ATLANTEM avait livré les châssis depuis le 2 août ce qui permettait à la société LE DECOR DU MARBRE de les poser avant le mois d'octobre ;

Considérant que la société LE DECOR DU MARBRE ne démontre pas que le retard et les pénalités subséquentes qui lui ont été infligées sont directement dues à la livraison par la société ATLANTEM à une date postérieure à la date prévue ;

Que dans ces conditions, elle n'est pas fondée à demander des réparations ; que son refus de payer la facture de la société ATLANTEM n'est pas fondée ; qu'il convient de confirmer le jugement entrepris ;

Qu'il sera fait droit à la demande de capitalisation formulée par la société ATLANTEM et ce à compter de sa demande par conclusions du 17 novembre 2008 ;

Considérant que la société LE DECOR DU MARBRE devra également régler à la société ATLANTEM la somme de 1.500 euros au titre des frais non compris dans les dépens que cette société a dû engager pour se défendre du recours engagé par la société LE DECOR DU MARBRE ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour statuant publiquement et contradictoirement,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

AJOUTANT,

ORDONNE la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du Code civil à compter du 17 novembre 2008,

CONDAMNE la société LE DECOR DU MARBRE à régler à la société ATLANTEM INDUSTRIES la somme de 1.500 euros (mille cinq cents euros) en application de l’article 700 du Code de procédure civile,

CONDAMNE la société LE DECOR DU MARBRE aux dépens d'appel avec droit pour la SCP JULLIEN LECHARNY ROL ET FERTIER, avoués, de recouvrer directement les dépens dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision.

- prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

 - signé par Marie-José VALANTIN, conseiller en raison de l'empêchement de Madame MANDEL, président, et par Sabine MAREVILLE, greffier, auquel le magistrat signataire a rendu la minute.

Le GREFFIER,         P/Le PRÉSIDENT,