CA DOUAI (ch. 2 sect. 2), 3 juillet 2025
- T. com. Lille Métropole, 19 décembre 2023 : RG n° 2022017461
CERCLAB - DOCUMENT N° 24195
CA DOUAI (ch. 2 sect. 2), 3 juillet 2025 : RG n° 24/00041
Publication : Judilibre
Extraits : 1/ « L'article 1186, alinéas 2 et 3, du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016, dispose que : […]. La caducité n'intervient toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l'existence de l'opération d'ensemble lorsqu'il a donné son consentement.
En application de ces dispositions, les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière étant interdépendants, il en résulte que l'exécution de chacun de ces contrats est une condition déterminante du consentement des parties, de sorte que, lorsque l'un d'eux disparaît, les autres contrats sont caducs si le contractant contre lequel cette caducité est invoquée connaissait l'existence de l'opération d'ensemble lorsqu'il a donné son consentement (Com. 10 janv. 2024, n° 22-20466, publié). De plus, dans les contrats formant une opération incluant une location financière, sont réputées non écrites les clauses inconciliables avec cette interdépendance (même arrêt). […]
Les contrats en cause sont donc interdépendants au sens de l'article 1186 précité, ce qu'il y a lieu de constater. Par conséquent, si l'un quelconque d'entre eux disparaît, quelle qu'en soit la cause (annulation, résolution ou résiliation), cela entraîne automatiquement, par voie de conséquence, la caducité de l'autre contrat. »
2/ « S'agissant de cette troisième condition, elle s'est substituée à l'ancien critère de contrat ayant « un rapport direct avec l'activité » du professionnel en cause. Peu importait alors que le professionnel ait agi en dehors de son champ habituel de compétence, seule comptant la finalité, professionnelle ou non, de l'opération effectuée.
Si, en application l'article L. 221-3 précité, les juges du fond apprécient souverainement si un contrat n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel concerné (V. Civ. 1re, 27 nov. 2019, n° 18-22525, publié), ils doivent cependant retenir une motivation appropriée et la Cour de cassation exerce son contrôle sur ce point.
Ainsi, sont censurées les décisions se fondant sur des motifs impropres à établir que le contrat entrait dans le champ d'application de l'activité principale du professionnel, tels les motifs suivants : - le fait que le professionnel disposait de toutes les compétences pour apprécier les conditions financières d'un contrat de location portant sur du matériel indispensable à son activité (Civ. 1re, 31 août 2022, n° 21-11455, publié) ; - le fait que le contrat de location a été conclu entre deux professionnels, qu'il porte sur du matériel de reproduction nécessaire à l'activité administrative et commerciale du locataire et que celui-ci a certifié, dans le contrat, que le bien loué était destiné exclusivement à des fins professionnelles (Civ. 1re, 20 déc. 2023, n° 22-18025) ; - le fait que le contrat a été passé entre deux sociétés commerciales pour les besoins de l'activité professionnelle d'une pharmacie, ce que celle-ci a attesté dans le contrat (Civ. 1re, 13 avr. 2023, n° 21-23312). La Cour de cassation a notamment censuré une décision qui, pour en déduire que devait être écartée l'application du code de la consommation, avait retenu que « la création et la maintenance de ce site Internet était en rapport direct avec l'activité professionnelle du cocontractant et avait été conclu à la faveur exclusive de son activité » (Civ. 1re, 17 mai 2023, n° 21-24086). A l'inverse, la Cour de cassation a approuvé une cour d'appel ayant jugé que la communication commerciale et la publicité via un site Internet n'entraient pas dans le champ de l'activité principale d'un architecte (Civ. 1re, 12 sept. 2018, n° 17-17319).
En l'espèce, il importe, au préalable, de relever que le jugement entrepris écarte l'application du code de la consommation, aux motifs que Mme X. ne remplit pas la troisième condition édictée à l'article L. 221-3 de ce code, c'est-à-dire prévoyant que le contrat n'entre pas dans le champ de son activité principale (v. p. 9-10 de ce jugement), ce dont il déduit que les demandes de Mme X. fondées sur la violation de l'obligation sur le droit de rétractation devaient être rejetées (p. 11, in fine, du jugement). La société NW est réputée s'approprier ces motifs.
D'abord, Mme X. indique (p. 7) que le contrat de fourniture de site internet a été conclu à la suite d'un démarchage physique de la part d'un commercial de la société NW. La société Locam ne conteste pas ce fait et le jugement entrepris considère que cette condition est vérifiée (p. 9). Il s'agit donc d'un contrat conclu « hors établissement ».
Ensuite, Mme X. justifie être auto-entrepreneuse et n'employer aucun salarié, ce qui n'est d'ailleurs pas non plus contesté par la société Locam et ce que reconnaît le jugement entrepris (p. 9). La condition tenant au fait que le professionnel doit employer au plus cinq salariés est donc elle aussi remplie.
Enfin, il est constant que Mme X. exerce l'activité d'hypnothérapeute et naturopathe. L'objet du contrat conclu avec la société NW porte sur la création et l'installation d'un site internet. Un tel objet, totalement étranger à l'activité professionnelle exercée par Mme X., n'entre pas dans le champ de cette activité, ce site fût-il destiné à promouvoir celle-ci.
C'est donc à tort que, pour écarter l'application du code de la consommation au bénéfice de Mme X., les premiers juges se sont fondés sur des motifs impropres, tirés de ce que ce contrat portait sur un élément déterminant de son activité professionnelle, servant directement au développement de celle-ci. En conclusion, il y a lieu de constater que le code de la consommation est applicable au contrat conclu entre Mme X. et la société NW. »
3/ « Le jugement entrepris a validé cette analyse, en retenant, dans sa motivation, que « le site internet est un bien nettement personnalisé puisqu'il est créé spécifiquement pour chaque client. »
Néanmoins, la cour d'appel estime qu'aucune des pièces versées aux débats ne permet de démontrer que le site créé et installé en l'espèce par la société NW, au profit de Mme X., fût « nettement » personnalisé, ainsi que l'exigent les termes mêmes de l'article L. 221-28 précité. Au contraire, il résulte de la lecture du contrat conclu entre la société NW et Mme X., produit par cette dernière, que les prestations que devait fournir la première (article 1) étaient mentionnées sous la forme d'une simple liste de prestations pré-imprimée, sans aucun élément de personnalisation, le seul ajout manuscrit (et donc propre au contrat en cause) consistant en un chiffre apposé en regard de la prestation concernée, afin d'en fixer la quantité - et non la nature ou les spécificités. Ainsi, l'article 1, intitulé « prestations », est rédigé en ces termes : - création de site internet Responsive Design : 1 - ligne dédiée au site internet : 1 - agenda de prise de RDV : [aucun ajout manuscrit] - référencement naturel + référencement payant : 1 - accès à l'interface de gestion du site et aux statistiques du site internet : 1 - options complémentaires : [mentions illisibles]
Il n'est donc nullement établi que le contrat conclu entre la société NW et Mme X. eût porté sur la fourniture d'un bien « nettement personnalisé » au sens de l'article L. 221-28. »
4/ « Tel qu'énoncé précédemment, il résulte de l'article 1186 du code civil que lorsque des contrats sont interdépendants et que l'un quelconque d'eux disparaît, l'autre devient caduc si la partie qui subit cette caducité connaissait l'opération d'ensemble. La caducité par voie de conséquence intervient automatiquement à la même date que celle de l'anéantissement de l'autre contrat (Com. 11 sept. 2019, n° 18-11401). »
5/ « Dans ces conditions, il convient d'accueillir les demandes en paiement formées par Mme X. au titre des restitutions, étant précisé que la somme mise à la charge de la société Locam porte exclusivement sur les loyers payés par la locataire jusqu'en mai 2022.
Par ailleurs, Mme X. demande, dans le dispositif comme dans les motifs de ses conclusions (p. 34), que les condamnations prononcées à ce titre soient assorties « des intérêts au taux légal majoré de 10 points et capitalisation », sans autre précision, notamment quant au point de départ desdits intérêts. Dans les paragraphes précédents, consacrés aux rappels juridiques (pp. 33-34), elle invoque à la fois l'article 1352-7 du code civil et l'article L. 441-10, II, du code de commerce, sans qu'il soit possible de déterminer sur lequel de ces textes Mme X. serait susceptible de fonder sa demande d'intérêts majorés.A supposer qu'il faille considérer que Mme X. entende implicitement voir appliquer l'un ou l'autre de ces textes - ce qu'elle aurait dû spécifier -, la cour d'appel est tenue de vérifier, d'office, que les conditions d'application de ces textes sont remplies.
D'abord, l'article L. 441-10 (anciennement L. 441-6, I) du code de commerce dispose que : […] ». D'une part, le II de ce texte prévoit des « pénalités de retard » de plein droit calculées sur le taux appliqué par la Banque centrale européenne majoré de 10 points, et non des intérêts « au taux légal majoré » comme l'évoque Mme X. D'autre part et en tout état de cause, le II de l'article L. 441-10 ayant été conçu pour inciter les débiteurs à respecter les échéances de paiement contractuellement prévues, ses dispositions ne sont pas applicables aux condamnations prononcées au titre de restitutions consécutives à l'annulation ou à la caducité d'un contrat, comme c'est le cas en l'espèce. Les intérêts au taux légal majoré de 10 % ne peuvent donc se fonder sur ce premier texte.
Ensuite, l'article 1352-7 du code civil, applicable aux restitutions dues à la suite de l'annulation ou de la caducité d'un contrat, dispose que : Celui qui a reçu de mauvaise foi doit les intérêts, les fruits qu'il a perçus ou la valeur de jouissance à compter du paiement. Celui qui a reçu de bonne foi ne les doit qu'à compter du jour de la demande. Aux termes de l'article 2274 du code civil - texte également cité par Mme X. (p. 33 de ses conclusions) : La bonne foi est toujours présumée, et c'est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver. Mme X. ne prétendant pas que les sociétés intimées seraient de mauvaise foi, il résulte de l'article 1352-7 précité que ces dernières, présumées de bonne foi, doivent restituer les sommes reçues en exécution des contrats respectivement nul et caduc avec les intérêts au taux légal non majoré à compter de la demande qui leur en a été faite par Mme X. - soit à compter du 30 septembre 2022, date de l'assignation introductive d'instance.
Enfin, la demande de capitalisation des intérêts formée par Mme X. n'étant pas contestée par la société Locam ou la société NW, elle sera accueillie, conformément à l'article 1343-2 du code civil. »
6/ « En droit, sous l'empire du droit antérieur à l'ordonnance du 10 février 2016, la jurisprudence a exclu l'application de la clause du contrat caduc stipulant une indemnité de résiliation (Com. 12 juill. 2017, n° 15-27703 ; Com. 6 déc. 2017, n° 16-22809 ; Ch. mixte, 13 avr. 2018, n° 16-21.345, publié), mais n'a jamais écarté, par principe, la mise en œuvre d'une clause réglementant les conséquences de la caducité du contrat. Cette solution s'explique, d'une part, par la différence entre la résiliation et la caducité, l'une sanctionnant la faute d'un cocontractant, l'autre frappant un contrat valide à l'origine mais qui perd l'un de ses éléments essentiels en cours d'exécution, d'autre part, par le principe d'interprétation stricte de telles clauses, qui ne peuvent s'appliquer au-delà des hypothèses qu'elles prévoient.
En l'espèce, la somme de 12.236,40 euros obtenue en première instance par la société Locam inclut, selon les motifs du jugement (p. 15), le montant de 30 loyers mensuels impayés et d'une clause pénale de 10 % prévue par l'article 18.3 du contrat. Or, d'abord, la caducité du contrat de location financière, pour les motifs précédemment exposés, justifie le rejet de la demande en paiement des loyers impayés stipulés par ce contrat caduc depuis la date de sa conclusion. Ensuite, il résulte des termes mêmes de l'article 18.3 de ce contrat que la clause pénale de 10 % n'est due qu'en cas de résiliation du contrat. Or, la résiliation n'étant pas assimilable à la caducité, cette clause ne peut trouver à s'appliquer en l'espèce où le contrat a pris fin via une caducité.
En revanche, à titre subsidiaire, la société Locam réclame, en application de l'article 10 bis contrat de location financière, la condamnation de Mme X. à lui payer la somme totale de 11.124 euros, laquelle inclut quatre loyers impayés entre les mois de mai et août 2022, ainsi que les vingt-six loyers à échoir entre septembre 2022 et octobre 2024 - terme normal du contrat.
L'article 10 bis du contrat de location financière, intitulé « caducité du contrat », stipule notamment que : « [...] [S]i le contrat de location devait être rendu caduc dans les conditions de l'article 1186 du code civil ou pour toute autre raison, les parties conviennent de tirer les conséquences juridiques suivantes : la caducité trouvant sa source dans la nullité, la résolution ou la résiliation d'un contrat avec lequel il est lié par un lien d'interdépendance, aucune faute n'est opposée au loueur dans le cadre de l'exécution du contrat de location. Les parties décident que dans ces conditions, il convient d'indemniser le loueur du préjudice que constitue la fin du contrat avant son terme alors que ce dernier a payé le prix de cession entre les mains du fournisseur. Le locataire devra donc régler au loueur, outre le montant des échéances impayées au jour de la caducité, une indemnité égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'au terme du contrat prévu à l'origine. [...] »
En matière de droit des contrats, s'applique un principe de liberté contractuelle, sous certaines limites. La clause ci-dessus reproduite, claire, précise, a été acceptée par Mme X. lors de la conclusion du contrat, et elle est expressément destinée à régler les conséquences de la fin du contrat survenant par voie de caducité - sanction qui se distingue de la nullité, laquelle emporte toujours un effet rétroactif. En outre, Mme X. ne soutient pas, via une argumentation juridique construite et précise, que cette clause serait invalide ou inapplicable en l'espèce pour une raison particulière. La cour d'appel n'est donc saisie par l'appelante d'aucun moyen tenant à l'inapplicabilité ou à l'invalidité de cette clause, auquel elle serait tenue de répondre. Il y a donc lieu de faire application de cette clause, sous peine de méconnaître les stipulations du contrat, qui tient lieu de loi aux parties.
Par ailleurs, Mme X. n'émettant aucune critique sur le calcul de la somme réclamée en application de cette clause, elle sera donc condamnée à la payer.
Enfin, concernant les intérêts accessoires à cette condamnation, la société Locam demande qu'ils soient fixés à un taux majoré en application de l'article L. 441-10 du code de commerce, à compter de sa mise en demeure délivrée le 15 août 2022.
Néanmoins, pour les motifs déjà explicités ci-dessus, ce texte n'a pas vocation à s'appliquer à l'indemnité stipulée en cas de caducité d'un contrat.
Pour autant, en application de l'article 1231-6 du code civil, cette indemnité contractuelle doit produire intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 15 août 2022. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE DOUAI
CHAMBRE 2 SECTION 2
ARRÊT DU 3 JUILLET 2025
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 24/00041. N° Portalis DBVT-V-B7I-VIW3. Jugement (RG n° 2022017461) rendu le 19 décembre 2023 par le tribunal de commerce de Lille Métropole.
APPELANTE :
Madame X.
née le [date] à [Localité 8], de nationalité française, [Adresse 1], [Localité 6], représentée par Maître Virginie Levasseur, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Maître Bassirou Kebe, avocat au barreau de Lille, avocat plaidant
INTIMÉES :
SAS LOCAM - Location Automobiles Matériels
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège ayant son siège [Adresse 5], [Localité 2], représentée Maître Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai, avocat constitué, assistée de Maître Guillaume Migaud, avocat au barreau du Val-de-Marne, avocat plaidant
SASU NW Conseil (Enseigne Geoboost)
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège, ayant son siège [Adresse 4], [Localité 3], représentée par Maître Guillaume Boureux, avocat au barreau de Lille, avocat constitué, assistée de Maître Michel Apelbaum, avocat au barreau de Paris, avocat plaidant
DÉBATS à l'audience publique du 29 avril 2025 tenue par Stéphanie Barbot magistrate chargée d'instruire le dossier qui, a entendu seule les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 805 du code de procédure civile). Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe
GREFFIER LORS DES DÉBATS : Marlène Tocco
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Stéphanie Barbot, présidente de chambre, Nadia Cordier, conseiller, Anne Soreau, conseiller
ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 03 juillet 2025 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Stéphanie Barbot, présidente et Marlène Tocco, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
ORDONNANCE DE CLÔTURE DU : 25 mars 2025
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS ET PROCÉDURE :
Le 8 septembre 2020, Mme X., qui exerce la profession d'hypnothérapeute et naturopathe, a souscrit auprès de la société NW Conseil (la société NW), qui exerce sous l'enseigne Geoboost, un contrat ayant pour objet la création d'un site internet, d'une durée de 48 mois.
Le même jour, Mme X. a souscrit auprès de la société Locam un contrat de location financière de même durée, ayant pour objet le financement de la licence d'utilisation du site internet fourni par la société NW, moyennant des loyers mensuels de 370,80 euros TTC.
Le 14 octobre 2020, Mme X. a signé le procès-verbal de réception et de conformité du site internet créé par la société NW, conduisant la société Locam à payer la facture émise par ce fournisseur.
A compter du mois de mai 2022, Mme X. a cessé de payer les loyers dus au titre du contrat de location financière.
Par des lettres du 10 juillet 2022, Mme X. a demandé à chacune des sociétés NW et Locam la rupture des contrats.
Le 15 août 2022, la société Locam a mis en demeure Mme X. de régulariser les impayés de loyers, sous peine résiliation de plein droit du contrat.
Le 30 septembre 2022, Mme X. a assigné les sociétés NW et Locam essentiellement aux fins d'annulation des contrats, subsidiairement, en résolution de ces contrats et, plus subsidiairement, en caducité 'des autres contrats interdépendants en conséquence de l'anéantissement de l'un quelconque des contrats.'
Par un jugement du 19 décembre 2023, le tribunal de commerce de Lille métropole a :
- débouté Mme X. de sa demande principale et de ses demandes subsidiaires ;
- jugé que Mme X. avait failli à ses obligations contractuelles et résilié de façon fautive et anticipée le contrat ;
- condamné Mme X. à payer à la société Locam la somme de 12 236,40 euros, avec intérêts au taux appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage à compter du 15 août 2022 et avec capitalisation des intérêts ;
- débouté la société NW de sa demande de dommages et intérêts ;
- débouté la société Locam de sa demande de restitution du site internet ;
- ordonné à la société NW de désactiver le site internet, sans assortir cette mesure d'une astreinte ;
- condamné Mme X. à payer aux sociétés NW et Locam la somme de 1.000 euros chacune, en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné Mme X. aux dépens.
Le 4 janvier 2024, Mme X. a relevé appel de ce jugement.
Par une ordonnance du 26 septembre 2024, le président de chambre a déclaré irrecevable les conclusions notifiées par la société NW, en application des articles 909, 910 et 911-1 du code de procédure civile.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
« Par ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 24 mars 2025, Mme X. demande à la cour d'appel de :
Vu les articles L. 221-1 et suivants du code de la consommation,
Vu l'article L. 242-1 du code de la consommation,
Vu les articles 1130 et suivants du code civil,
Vu les articles 1194 et suivants du code civil,
Vu les articles 1178, 1128, 1163, 1216, 1225 et 1353 du code civil,
Vu le Règlement général sur la protection des données personnelles,
Vu les articles 226-16 et suivants du code pénal,
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau,
A titre principal :
- annuler toute l'opération contractuelle litigieuse notamment pour les motifs suivants :
- violation de l'obligation d'information sur le droit de rétractation ;
- violation de l'obligation d'information sur le délai de livraison d'exécution ;
- violation de l'obligation d'indiquer le total des coûts mensuels ;
- violation de l'obligation d'information sur les caractéristiques essentielles du site Internet ;
- stipulation d'obligations sans contrepartie ;
- contenu indéterminé ;
- erreur sur les qualités essentielles des sites Internet ;
En conséquence :
- débouter les sociétés NW et Locam de toutes leurs demandes ;
- condamner ces sociétés à lui restituer les sommes de 7 045,20 euros et 300 euros,
avec intérêts au taux légal majoré de 10 points et capitalisation ;
- A titre subsidiaire :
- prononcer la résolution rétroactive des contrats litigieux et ce, avec effet rétroactif à la date de leurs conclusions ;
En conséquence :
- débouter les sociétés NW et Locam de toutes leurs demandes ;
- condamner ces sociétés à lui restituer les sommes de 7 045,20 euros et 300 euros,
avec intérêts au taux légal majoré de 10 points et capitalisation ;
En tout état de cause :
- prononcer la caducité de « tous les autres contrats interdépendants » en conséquence de l'anéantissement de l'un quelconque des contrats ;
En conséquence :
- débouter les sociétés NW et Locam de toutes leurs demandes ;
- condamner ces sociétés à lui restituer les sommes de 7 045,20 euros et 300 euros,
avec intérêts au taux légal majoré de 10 points et capitalisation ;
- ordonner aux sociétés NW et Locam de désactiver le site internet www.[07].fr et ce, sous astreinte de 200 euros par jour de retard, à compter du 15e jour suivant la signification du « jugement » à intervenir ;
- condamner in solidum les sociétés NW et Locam à lui payer une indemnité de procédure de 8.000 euros, ainsi que les dépens de première instance d'appel.
[*]
Par ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 21 mars 2025, la société Locam demande à la cour d'appel de :
Vu les dispositions des articles 1103 et suivants du code civil,
Vu les dispositions du code monétaire et financier,
- la juger recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes ;
- au contraire, juger Mme X. irrecevable et mal fondée en toutes ses demandes, et l'en débouter ;
En conséquence,
A titre principal :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré ;
- rejeter l'ensemble des demandes de Mme X. ;
A titre subsidiaire, en cas de caducité du contrat de location :
- condamner Mme X. au paiement de la somme de 11'124 euros, avec intérêts au taux appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majorée de 10 points de pourcentage (article L. 441-10 du code de commerce) à compter de la mise en demeure, soit le 15 août 2022 ;
En tout état de cause :
- condamner Mme X. au paiement d'une indemnité de procédure de 2.000 euros ;
- condamner Mme X. aux dépens de l'instance.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIVATION :
A titre liminaire, il convient d'indiquer que, les conclusions de la société NW ayant été déclarées irrecevables pour non-respect du délai pour conclure, cette société se trouve assimilée à une partie qui ne conclut pas au sens de l'article 954 du code de procédure civile (Civ. 2e, 10 janv. 2019, n° 17-20018, publié). Elle est donc réputée s'être appropriée les motifs du jugement entrepris, dès lors que ce jugement contient des motifs qui lui sont favorables sur un point litigieux.
Par ailleurs, dans sa déclaration d'appel, Mme X. n'a pas visé le chef de dispositif du jugement rejetant la demande de dommages et intérêts formée par la société NW. Cette disposition ne peut donc qu'être confirmée.
A - Sur l'interdépendance des contrats en cause :
Mme X. se prévaut de l'interdépendance des contrats conclus avec, respectivement, les sociétés NW et Locam, nonobstant toute clause contraire, de sorte que l'anéantissement de l'un quelconque d'entre eux entraîne, par voie de conséquence, l'anéantissement de l'autre (pp. 5-6 et p. 9).
La société Locam ne développe aucune argumentation sur ce point.
Réponse de la cour
L'article 1186, alinéas 2 et 3, du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 10 février 2016, dispose que :
Lorsque l'exécution de plusieurs contrats est nécessaire à la réalisation d'une même opération et que l'un d'eux disparaît, sont caducs les contrats dont l'exécution est rendue impossible par cette disparition et ceux pour lesquels l'exécution du contrat disparu était une condition déterminante du consentement d'une partie.
La caducité n'intervient toutefois que si le contractant contre lequel elle est invoquée connaissait l'existence de l'opération d'ensemble lorsqu'il a donné son consentement.
En application de ces dispositions, les contrats concomitants ou successifs qui s'inscrivent dans une opération incluant une location financière étant interdépendants, il en résulte que l'exécution de chacun de ces contrats est une condition déterminante du consentement des parties, de sorte que, lorsque l'un d'eux disparaît, les autres contrats sont caducs si le contractant contre lequel cette caducité est invoquée connaissait l'existence de l'opération d'ensemble lorsqu'il a donné son consentement (Com. 10 janv. 2024, n° 22-20466, publié).
De plus, dans les contrats formant une opération incluant une location financière, sont réputées non écrites les clauses inconciliables avec cette interdépendance (même arrêt).
En l'espèce, il y a lieu, au préalable, de relever que la motivation du jugement entrepris n'écarte ni ne consacre l'interdépendance des contrats. Cette décision ne contient donc aucun motif que la société NW pourrait être réputée s'approprier.
Les contrats conclus par Mme X. avec, respectivement, les sociétés NW et Locam ont été régularisés le même jour, ils ont pour objet le même site internet et ils s'inscrivent dans une opération incluant une location financière. En outre, il résulte du contrat de location financière (pièce n° 1 de Locam), qui mentionne le nom de la société fournisseur du site internet, que la société Locam connaissait l'opération contractuelle d'ensemble - ce que cette dernière ne dément d'ailleurs pas.
Les contrats en cause sont donc interdépendants au sens de l'article 1186 précité, ce qu'il y a lieu de constater. Par conséquent, si l'un quelconque d'entre eux disparaît, quelle qu'en soit la cause (annulation, résolution ou résiliation), cela entraîne automatiquement, par voie de conséquence, la caducité de l'autre contrat.
Dès lors, l'enjeu du présent litige consiste à déterminer si l'un des contrats, spécialement le contrat afférent au site internet, encourt la nullité ou la résolution telles que demandées par Mme X., ce qu'il convient, à présent, d'examiner.
B - Sur le sort du contrat conclu avec la société NW :
A titre principal, Mme X. demande l'annulation de ce contrat en se prévalant de divers moyens de nullité tirés, notamment, du code de la consommation, dont elle soutient qu'il lui est applicable dès lors que les conditions cumulatives fixées à l'article L. 221-3 du code de la consommation sont remplies (pp. 6 à 9). Elle reproche aux premiers juges d'avoir retenu le contraire. Et parmi les moyens de nullité qu'elle invoque, figure celui tenant à la violation de l'obligation relative au droit de rétractation consacré par le code de la consommation (pp. 10 à 13).
La société Locam fait valoir que :
- relativement au contrat de fourniture de site internet (pp. 6-7), la société « Geoboost » (soit la société NW) a respecté la réglementation qui s'imposait à elle, telles qu'elles résultent des articles L. 221-9 et L. 221-5 du code de la consommation. En effet, il est incontestable que les informations relatives au droit de rétractation ont été communiquées à Mme X. ;
- en tout état de cause (p. 11), les dispositions du code de la consommation relatives au droit de rétractation ne sont pas applicables aux biens nettement personnalisés, en application de l'article L. 221-28 de ce code.
1°- Sur l'applicabilité du code de la consommation au contrat conclu avec la société NW (article L. 221-3 du code de la consommation) :
L'article L. 221-3 (anciennement L. 121-16, III) du code de la consommation, issu de la loi Hamon du 17 mars 2014, dispose que :
Les dispositions des sections 2, 3, 6 du présent chapitre applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre deux professionnels dès lors que l'objet de ces contrats n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à cinq.
Il résulte de ce texte que, pour qu'un professionnel puisse bénéficier des dispositions protectrices du code de la consommation, trois conditions cumulatives sont requises :
- le contrat doit avoir été conclu hors établissement, au sens de l'article L. 221-2, 2°, du code de la consommation ;
- le professionnel doit employer 5 salariés tout au plus ;
- et l'objet du contrat ne doit pas entrer « dans le champ de l'activité principale » de ce professionnel.
S'agissant de cette troisième condition, elle s'est substituée à l'ancien critère de contrat ayant « un rapport direct avec l'activité » du professionnel en cause. Peu importait alors que le professionnel ait agi en dehors de son champ habituel de compétence, seule comptant la finalité, professionnelle ou non, de l'opération effectuée.
Si, en application l'article L. 221-3 précité, les juges du fond apprécient souverainement si un contrat n'entre pas dans le champ de l'activité principale du professionnel concerné (V. Civ. 1re, 27 nov. 2019, n° 18-22525, publié), ils doivent cependant retenir une motivation appropriée et la Cour de cassation exerce son contrôle sur ce point.
Ainsi, sont censurées les décisions se fondant sur des motifs impropres à établir que le contrat entrait dans le champ d'application de l'activité principale du professionnel, tels les motifs suivants :
- le fait que le professionnel disposait de toutes les compétences pour apprécier les conditions financières d'un contrat de location portant sur du matériel indispensable à son activité (Civ. 1re, 31 août 2022, n° 21-11455, publié) ;
- le fait que le contrat de location a été conclu entre deux professionnels, qu'il porte sur du matériel de reproduction nécessaire à l'activité administrative et commerciale du locataire et que celui-ci a certifié, dans le contrat, que le bien loué était destiné exclusivement à des fins professionnelles (Civ. 1re, 20 déc. 2023, n° 22-18025) ;
- le fait que le contrat a été passé entre deux sociétés commerciales pour les besoins de l'activité professionnelle d'une pharmacie, ce que celle-ci a attesté dans le contrat (Civ. 1re, 13 avr. 2023, n° 21-23312).
La Cour de cassation a notamment censuré une décision qui, pour en déduire que devait être écartée l'application du code de la consommation, avait retenu que « la création et la maintenance de ce site Internet était en rapport direct avec l'activité professionnelle du cocontractant et avait été conclu à la faveur exclusive de son activité » (Civ. 1re, 17 mai 2023, n° 21-24086).
A l'inverse, la Cour de cassation a approuvé une cour d'appel ayant jugé que la communication commerciale et la publicité via un site Internet n'entraient pas dans le champ de l'activité principale d'un architecte (Civ. 1re, 12 sept. 2018, n° 17-17319).
En l'espèce, il importe, au préalable, de relever que le jugement entrepris écarte l'application du code de la consommation, aux motifs que Mme X. ne remplit pas la troisième condition édictée à l'article L. 221-3 de ce code, c'est-à-dire prévoyant que le contrat n'entre pas dans le champ de son activité principale (v. p. 9-10 de ce jugement), ce dont il déduit que les demandes de Mme X. fondées sur la violation de l'obligation sur le droit de rétractation devaient être rejetées (p. 11, in fine, du jugement). La société NW est réputée s'approprier ces motifs.
D'abord, Mme X. indique (p. 7) que le contrat de fourniture de site internet a été conclu à la suite d'un démarchage physique de la part d'un commercial de la société NW. La société Locam ne conteste pas ce fait et le jugement entrepris considère que cette condition est vérifiée (p. 9). Il s'agit donc d'un contrat conclu « hors établissement ».
Ensuite, Mme X. justifie être auto-entrepreneuse et n'employer aucun salarié, ce qui n'est d'ailleurs pas non plus contesté par la société Locam et ce que reconnaît le jugement entrepris (p. 9). La condition tenant au fait que le professionnel doit employer au plus cinq salariés est donc elle aussi remplie.
Enfin, il est constant que Mme X. exerce l'activité d'hypnothérapeute et naturopathe.
L'objet du contrat conclu avec la société NW porte sur la création et l'installation d'un site internet. Un tel objet, totalement étranger à l'activité professionnelle exercée par Mme X., n'entre pas dans le champ de cette activité, ce site fût-il destiné à promouvoir celle-ci.
C'est donc à tort que, pour écarter l'application du code de la consommation au bénéfice de Mme X., les premiers juges se sont fondés sur des motifs impropres, tirés de ce que ce contrat portait sur un élément déterminant de son activité professionnelle, servant directement au développement de celle-ci.
En conclusion, il y a lieu de constater que le code de la consommation est applicable au contrat conclu entre Mme X. et la société NW.
2°- Sur l'exclusion alléguée du droit de rétractation en raison de la nature du bien fourni (article L. 221-28 du code de la consommation) :
L'article L. 221-28 du code de la consommation exclut l'exercice du droit de rétractation dans certains contrats. Aux termes de ce texte, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 (en vigueur du 1er juillet 2016 au 28 mai 2022), applicable en la cause :
Le droit de rétractation ne peut être exercé pour les contrats : [...]
3° De fourniture de biens confectionnés selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisés. »
En l'espèce, pour revendiquer l'application de cette exclusion, la société Locam se borne à affirmer que le contrat a pour objet un site internet destiné à promouvoir l'activité et les compétences professionnelles de Mme X., qu'il « comporte nécessairement un ensemble d'éléments de personnalisation et d'identification (tels qu'identité, adresse, profession, domaine d'activité, compétences »), et qu'il a été créé pour répondre spécifiquement aux besoins de Mme X.
Le jugement entrepris a validé cette analyse, en retenant, dans sa motivation, que « le site internet est un bien nettement personnalisé puisqu'il est créé spécifiquement pour chaque client. »
Néanmoins, la cour d'appel estime qu'aucune des pièces versées aux débats ne permet de démontrer que le site créé et installé en l'espèce par la société NW, au profit de Mme X., fût « nettement » personnalisé, ainsi que l'exigent les termes mêmes de l'article L. 221-28 précité. Au contraire, il résulte de la lecture du contrat conclu entre la société NW et Mme X., produit par cette dernière, que les prestations que devait fournir la première (article 1) étaient mentionnées sous la forme d'une simple liste de prestations pré-imprimée, sans aucun élément de personnalisation, le seul ajout manuscrit (et donc propre au contrat en cause) consistant en un chiffre apposé en regard de la prestation concernée, afin d'en fixer la quantité - et non la nature ou les spécificités. Ainsi, l'article 1, intitulé « prestations », est rédigé en ces termes :
- création de site internet Responsive Design : 1
- ligne dédiée au site internet : 1
- agenda de prise de RDV : [aucun ajout manuscrit]
- référencement naturel + référencement payant : 1
- accès à l'interface de gestion du site et aux statistiques du site internet : 1
- options complémentaires : [mentions illisibles]
Il n'est donc nullement établi que le contrat conclu entre la société NW et Mme X. eût porté sur la fourniture d'un bien « nettement personnalisé » au sens de l'article L. 221-28.
Ce moyen, soulevé par la société Locam, doit donc être écarté.
3°- Sur l'information relative au droit de rétractation au titre du contrat conclu avec la société NW :
Aux termes de l'article L. 221-1, II, du code de la consommation, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 14 mars 2016 :
Les dispositions relevant du titre II de ce code [intitulé « Règles de formation et d'exécution de certains contrats » et incluant les articles L. 221-1 à L. 224-108] s'appliquent aux contrats portant sur la vente d'un ou plusieurs biens, au sens de l'article 528 du code civil, et au contrat en vertu duquel le professionnel fournit ou s'engage à fournir un service au consommateur en contrepartie duquel le consommateur en paie ou s'engage à en payer le prix. Le contrat ayant pour objet à la fois la fourniture de prestation de services et la livraison de biens est assimilé à un contrat de vente.
Sur le fondement de ce texte, la Cour de cassation juge que le contrat portant sur la livraison de biens ainsi que sur une prestation de service d'installation et de mise en service est un « contrat mixte » devant être qualifié de contrat de vente (Civ. 1re, 17 mai 2023, n° 21-25670, publié ; Civ. 1re, 12 juill. 2023, n° 21-25671).
Relèvent en particulier du titre II visé par l'article L. 221-1 les dispositions réglementant le droit de rétractation applicable aux contrats conclus à distance et hors établissement (correspondant au chapitre 1 du titre II).
Le texte consacrant ce droit de rétractation est l'article L. 221-18 du code de la consommation qui, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 14 mars 2016, applicable en la cause, dispose que :
Le consommateur dispose d'un délai de quatorze jours pour exercer son droit de rétractation d'un contrat conclu à distance, à la suite d'un démarchage téléphonique ou hors établissement, sans avoir à motiver sa décision ni à supporter d'autres coûts que ceux prévus aux articles L. 221-23 à L. 221-25.
Le délai mentionné au premier alinéa court à compter du jour :
1° De la conclusion du contrat, pour les contrats de prestation de services et ceux mentionnés à l'article L. 221-4 ;
2° De la réception du bien par le consommateur ou un tiers, autre que le transporteur, désigné par lui, pour les contrats de vente de biens. Pour les contrats conclus hors établissement, le consommateur peut exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.
[...]
Les modalités d'exercice de ce droit de rétractation sont fixées à l'article L. 221-21, alinéa 1, du même code.
L'existence du droit de rétraction doit être portée à la connaissance du cocontractant auquel il bénéficie avant la conclusion du contrat, conformément à l'article L. 221-5, 2°, du même code qui, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 14 mars 2016, dispose que :
Préalablement à la conclusion d'un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
1° Les informations prévues aux articles L. 111-1 et L. 111-2 ;
2° Lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d'exercice de ce droit ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu'il contient sont fixées par décret en Conseil d'Etat ;
3° Le cas échéant, le fait que le consommateur supporte les frais de renvoi du bien en cas de rétractation et, pour les contrats à distance, le coût de renvoi du bien lorsque celui-ci, en raison de sa nature, ne peut normalement être renvoyé par la poste ;
4° L'information sur l'obligation du consommateur de payer des frais lorsque celui-ci exerce son droit de rétractation d'un contrat de prestation de services, de distribution d'eau, de fourniture de gaz ou d'électricité et d'abonnement à un réseau de chauffage urbain dont il a demandé expressément l'exécution avant la fin du délai de rétractation ; ces frais sont calculés selon les modalités fixées à l'article L. 221-25 ;
5° Lorsque le droit de rétractation ne peut être exercé en application de l'article L. 221-28, l'information selon laquelle le consommateur ne bénéficie pas de ce droit ou, le cas échéant, les circonstances dans lesquelles le consommateur perd son droit de rétractation ;
6° Les informations relatives aux coordonnées du professionnel, le cas échéant aux coûts de l'utilisation de la technique de communication à distance, à l'existence de codes de bonne conduite, le cas échéant aux cautions et garanties, aux modalités de résiliation, aux modes de règlement des litiges et aux autres conditions contractuelles, dont la liste et le contenu sont fixés par décret en Conseil d'Etat.
[...]
Que les informations sur le droit de rétractation soient absentes du contrat conclu hors établissement ou erronées, les sanctions sont légalement prévues en cas de non-respect de cette obligation d'information :
- d'abord, le délai de rétractation est prorogé de 12 mois, en application de l'article L. 221-20 du code de la consommation (v. par ex. Civ. 1re, 17 mai 2023, n° 21-25670, publié) ;
- ensuite, la nullité du contrat est encourue, conformément aux articles L. 221-9 et L. 242-1 du même code (v. par ex. Civ. 1re, 12 juill. 2023, n° 22-14020, publié).
Ces deux sanctions peuvent être mises en œuvre (Civ. 1re, 31 août 2022, n° 21-10075, publié).
En l'espèce, Mme X. demande l'annulation des contrats, donc notamment de celui qu'elle a conclu avec la société NW, en estimant que celle-ci a violé son obligation d'information en l'induisant en erreur sur le point de départ du délai de rétractation, le contrat étant mixte (v. ses conclusions, p. 4).
La société Locam ne répond pas à ce moyen et le jugement entrepris ne contient, sur ce point, aucune motivation que la société NW serait susceptible de s'approprier, puisque, ayant écarté l'application du code de la consommation, il a considéré que le bénéfice du droit de rétractation était exclu au profit de Mme X.
Mme X. soutient, sans être contredite, que le contrat de création de site internet litigieux est un contrat de prestation de service incluant la livraison d'un bien. La société Locam précise, d'ailleurs, que Mme X. a « réceptionné le matériel » le 14 octobre 2020 (p. 2 de ses conclusions).
Il s'ensuit que le contrat conclu avec la société NW est un contrat mixte, au sens de la jurisprudence précitée, de sorte que, conformément à L. 221-18, 2°, précité, le point de départ du délai de rétractation devait courir à compter de la réception du bien accompagnant la fourniture du site internet.
Or, l'article 4 des conditions générales de ce contrat s'achève en ces termes :
« Le client déclare savoir disposer d'un droit légal de rétractation de 14 (quatorze) jours à compter de la signature du présent contrat [...]. »
La fourniture de cette information erronée suffit à justifier l'annulation du contrat conclu avec la société NW.
Pour ces seuls motifs, la demande principale d'annulation du contrat afférent au site internet doit donc être accueillie.
C- Sur les conséquences de l'annulation du contrat afférent au site internet sur le contrat de location financière :
Tel qu'énoncé précédemment, il résulte de l'article 1186 du code civil que lorsque des contrats sont interdépendants et que l'un quelconque d'eux disparaît, l'autre devient caduc si la partie qui subit cette caducité connaissait l'opération d'ensemble.
La caducité par voie de conséquence intervient automatiquement à la même date que celle de l'anéantissement de l'autre contrat (Com. 11 sept. 2019, n° 18-11401).
En l'espèce, pour les motifs ci-dessus explicités, le contrat afférent au site internet étant interdépendant du contrat de location financière conclu le même jour avec la société Locam, qui connaissait l'opération contractuelle d'ensemble, l'annulation du premier contrat, qui anéantit rétroactivement cet acte à la date de sa conclusion, entraîne, par voie de conséquence, la caducité automatique du second, à la même date.
Il convient donc de constater la caducité du contrat conclu avec la société Locam, ainsi que le demande, en tout état de cause, Mme X., sans qu'il y ait lieu, dès lors, d'examiner les moyens de nullité soulevés par l'appelante à l'égard de ce contrat.
1°- Sur les demandes de restitution formées par Mme X. :
Mme X. fait valoir (pp. 33-34) que :
- en application des articles 1178, 1352-3 et 1352-7 du code civil, en cas d'anéantissement rétroactif d'un contrat, chaque partie doit restituer ce qu'elle a reçu ;
- en l'espèce, doivent donc lui être restituées les sommes suivantes : 7 045,20 euros par la société Locam, au titre des sommes déjà prélevées sur son compte, et 300 euros par la société NW, au titre des frais stipulés dans le contrat.
La société Locam s'oppose à toute restitution, en faisant valoir (p. 15 de ses conclusions, § intitulé « les restitutions ») que :
« [...] Mme X. sollicite la restitution des sommes versées à la société Locam au titre du contrat de location.
Mais attendu qu'il a été démontré que le contrat ne pouvait encourir ni la nullité ni la résolution.
[...] [D]ans ces conditions, il n'y a pas lieu à restitutions. »
Réponse de la cour
Au préalable, il y a lieu de préciser que le jugement entrepris ne contient sur cette question aucun motif que la société NW serait réputée s'être appropriée - et ce, fort logiquement, dans la mesure où ce jugement rejette les demandes d'annulation ou de caducité des contrats formées par Mme X.
Le contrat conclu avec la société NW a été annulé et celui conclu avec la société Locam est caduc, sans que les contradicteurs de Mme X. soulèvent aucun moyen pour s'opposer aux demandes de restitution formées par celle-ci.
Dans ces conditions, il convient d'accueillir les demandes en paiement formées par Mme X. au titre des restitutions, étant précisé que la somme mise à la charge de la société Locam porte exclusivement sur les loyers payés par la locataire jusqu'en mai 2022.
Par ailleurs, Mme X. demande, dans le dispositif comme dans les motifs de ses conclusions (p. 34), que les condamnations prononcées à ce titre soient assorties « des intérêts au taux légal majoré de 10 points et capitalisation », sans autre précision, notamment quant au point de départ desdits intérêts.
Dans les paragraphes précédents, consacrés aux rappels juridiques (pp. 33-34), elle invoque à la fois l'article 1352-7 du code civil et l'article L. 441-10, II, du code de commerce, sans qu'il soit possible de déterminer sur lequel de ces textes Mme X. serait susceptible de fonder sa demande d'intérêts majorés.
A supposer qu'il faille considérer que Mme X. entende implicitement voir appliquer l'un ou l'autre de ces textes - ce qu'elle aurait dû spécifier -, la cour d'appel est tenue de vérifier, d'office, que les conditions d'application de ces textes sont remplies.
D'abord, l'article L. 441-10 (anciennement L. 441-6, I) du code de commerce dispose que :
I- Sauf dispositions contraires figurant aux conditions de vente ou convenues entre les parties, le délai de règlement des sommes dues ne peut dépasser trente jours après la date de réception des marchandises ou d'exécution de la prestation demandée.
Le délai convenu entre les parties pour régler les sommes dues ne peut dépasser soixante jours après la date d'émission de la facture.
Par dérogation, un délai maximal de quarante-cinq jours fin de mois après la date d'émission de la facture peut être convenu entre les parties, sous réserve que ce délai soit expressément stipulé par contrat et qu'il ne constitue pas un abus manifeste à l'égard du créancier.
En cas de facture périodique au sens du 3 du I de l'article 289 du code général des impôts, le délai convenu entre les parties ne peut dépasser quarante-cinq jours après la date d'émission de la facture.
II. Les conditions de règlement mentionnées au I de l'article L. 441-1 précisent les conditions d'application et le taux d'intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d'intérêt légal, ce taux est égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. [...] »
D'une part, le II de ce texte prévoit des « pénalités de retard » de plein droit calculées sur le taux appliqué par la Banque centrale européenne majoré de 10 points, et non des intérêts « au taux légal majoré » comme l'évoque Mme X.
D'autre part et en tout état de cause, le II de l'article L. 441-10 ayant été conçu pour inciter les débiteurs à respecter les échéances de paiement contractuellement prévues, ses dispositions ne sont pas applicables aux condamnations prononcées au titre de restitutions consécutives à l'annulation ou à la caducité d'un contrat, comme c'est le cas en l'espèce.
Les intérêts au taux légal majoré de 10 % ne peuvent donc se fonder sur ce premier texte.
Ensuite, l'article 1352-7 du code civil, applicable aux restitutions dues à la suite de l'annulation ou de la caducité d'un contrat, dispose que :
Celui qui a reçu de mauvaise foi doit les intérêts, les fruits qu'il a perçus ou la valeur de jouissance à compter du paiement. Celui qui a reçu de bonne foi ne les doit qu'à compter du jour de la demande.
Aux termes de l'article 2274 du code civil - texte également cité par Mme X. (p. 33 de ses conclusions) :
La bonne foi est toujours présumée, et c'est à celui qui allègue la mauvaise foi à la prouver.
Mme X. ne prétendant pas que les sociétés intimées seraient de mauvaise foi, il résulte de l'article 1352-7 précité que ces dernières, présumées de bonne foi, doivent restituer les sommes reçues en exécution des contrats respectivement nul et caduc avec les intérêts au taux légal non majoré à compter de la demande qui leur en a été faite par Mme X. - soit à compter du 30 septembre 2022, date de l'assignation introductive d'instance.
Enfin, la demande de capitalisation des intérêts formée par Mme X. n'étant pas contestée par la société Locam ou la société NW, elle sera accueillie, conformément à l'article 1343-2 du code civil.
2°- Sur les conséquences de la caducité du contrat de location financière sur les demandes formées par la société Locam :
La société Locam demande, à titre principal, la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il condamne Mme X. à lui payer la somme de 12.236,40 euros.
Subsidiairement, en cas de caducité du contrat, elle requiert la condamnation de Mme X. à lui payer la somme de 11.124 euros, en application de l'article 10-bis du contrat de location financière (v. p. 17 de ses conclusions).
Mme X. s'oppose au paiement de toute somme, en particulier sur le fondement de l'article 10 du contrat, arguant de ce que la Cour de cassation juge depuis 2013 que « la caducité emporte tout sur son passage et qu'aucune clause contractuelle ne peut s'y opposer » (p. 34 de ses conclusions).
Réponse de la cour
En droit, sous l'empire du droit antérieur à l'ordonnance du 10 février 2016, la jurisprudence a exclu l'application de la clause du contrat caduc stipulant une indemnité de résiliation (Com. 12 juill. 2017, n° 15-27703 ; Com. 6 déc. 2017, n° 16-22809 ; Ch. mixte, 13 avr. 2018, n° 16-21.345, publié), mais n'a jamais écarté, par principe, la mise en œuvre d'une clause réglementant les conséquences de la caducité du contrat.
Cette solution s'explique, d'une part, par la différence entre la résiliation et la caducité, l'une sanctionnant la faute d'un cocontractant, l'autre frappant un contrat valide à l'origine mais qui perd l'un de ses éléments essentiels en cours d'exécution, d'autre part, par le principe d'interprétation stricte de telles clauses, qui ne peuvent s'appliquer au-delà des hypothèses qu'elles prévoient.
En l'espèce, la somme de 12.236,40 euros obtenue en première instance par la société Locam inclut, selon les motifs du jugement (p. 15), le montant de 30 loyers mensuels impayés et d'une clause pénale de 10 % prévue par l'article 18.3 du contrat.
Or, d'abord, la caducité du contrat de location financière, pour les motifs précédemment exposés, justifie le rejet de la demande en paiement des loyers impayés stipulés par ce contrat caduc depuis la date de sa conclusion.
Ensuite, il résulte des termes mêmes de l'article 18.3 de ce contrat que la clause pénale de 10 % n'est due qu'en cas de résiliation du contrat. Or, la résiliation n'étant pas assimilable à la caducité, cette clause ne peut trouver à s'appliquer en l'espèce où le contrat a pris fin via une caducité.
En revanche, à titre subsidiaire, la société Locam réclame, en application de l'article 10 bis contrat de location financière, la condamnation de Mme X. à lui payer la somme totale de 11 124 euros, laquelle inclut quatre loyers impayés entre les mois de mai et août 2022, ainsi que les vingt-six loyers à échoir entre septembre 2022 et octobre 2024 - terme normal du contrat.
L'article 10 bis du contrat de location financière, intitulé « caducité du contrat », stipule notamment que :
« [...] [S]i le contrat de location devait être rendu caduc dans les conditions de l'article 1186 du code civil ou pour toute autre raison, les parties conviennent de tirer les conséquences juridiques suivantes : la caducité trouvant sa source dans la nullité, la résolution ou la résiliation d'un contrat avec lequel il est lié par un lien d'interdépendance, aucune faute n'est opposée au loueur dans le cadre de l'exécution du contrat de location. Les parties décident que dans ces conditions, il convient d'indemniser le loueur du préjudice que constitue la fin du contrat avant son terme alors que ce dernier a payé le prix de cession entre les mains du fournisseur. Le locataire devra donc régler au loueur, outre le montant des échéances impayées au jour de la caducité, une indemnité égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu'au terme du contrat prévu à l'origine. [...] »
En matière de droit des contrats, s'applique un principe de liberté contractuelle, sous certaines limites. La clause ci-dessus reproduite, claire, précise, a été acceptée par Mme X. lors de la conclusion du contrat, et elle est expressément destinée à régler les conséquences de la fin du contrat survenant par voie de caducité - sanction qui se distingue de la nullité, laquelle emporte toujours un effet rétroactif. En outre, Mme X. ne soutient pas, via une argumentation juridique construite et précise, que cette clause serait invalide ou inapplicable en l'espèce pour une raison particulière. La cour d'appel n'est donc saisie par l'appelante d'aucun moyen tenant à l'inapplicabilité ou à l'invalidité de cette clause, auquel elle serait tenue de répondre.
Il y a donc lieu de faire application de cette clause, sous peine de méconnaître les stipulations du contrat, qui tient lieu de loi aux parties.
Par ailleurs, Mme X. n'émettant aucune critique sur le calcul de la somme réclamée en application de cette clause, elle sera donc condamnée à la payer.
Enfin, concernant les intérêts accessoires à cette condamnation, la société Locam demande qu'ils soient fixés à un taux majoré en application de l'article L. 441-10 du code de commerce, à compter de sa mise en demeure délivrée le 15 août 2022.
Néanmoins, pour les motifs déjà explicités ci-dessus, ce texte n'a pas vocation à s'appliquer à l'indemnité stipulée en cas de caducité d'un contrat.
Pour autant, en application de l'article 1231-6 du code civil, cette indemnité contractuelle doit produire intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 15 août 2022.
D - Sur la demande de désactivation du site internet formée par Mme X. :
En premier lieu, il convient de rappeler que, dans son dispositif, le jugement entrepris rejette la demande de la société Locam tendant à la restitution du site internet par Mme X.
Dans sa déclaration d'appel, Mme X. n'a pas visé ce chef de dispositif et, dans le dispositif de ses conclusions d'appel, la société Locam demande la confirmation du jugement en toutes ses dispositions.
Le jugement dont appel ne peut donc qu'être confirmé à cet égard.
En second lieu, le dispositif du jugement entrepris ordonne à la société NW de désactiver le site internet, sans assortir cette mesure d'une astreinte.
Dans le dispositif de ses conclusions d'appel, Mme X. demande l'infirmation du jugement en toutes ses dispositions « sans aucune exception » et, en tout état de cause, qu'il soit ordonné aux sociétés NW et Locam de désactiver le site internet sous astreinte de 200 euros par jour.
D'une part, la cour d'appel n'étant saisie d'aucune demande d'infirmation sur ce point de la part de la société NW, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a ordonné à cette société la désactivation du site internet.
Et afin d'assurer l'effectivité de cette mesure, il convient de l'assortir d'une astreinte, dans les conditions précisées au dispositif du présent arrêt. Le jugement dont appel sera donc infirmé en ce qu'il a exclu le prononcé d'une astreinte à ce titre.
D'autre part, s'agissant du point de savoir si cette désactivation peut également être ordonnée à la charge de la société Locam, Mme X. indique elle-même, dans ses conclusions (p. 19), que l'article 19.1 des conditions générales du contrat de location financière stipule que :
A l'expiration du contrat pour quelques causes que ce soit, le locataire doit restituer immédiatement et à ses frais en tout lieu indiqué par le loueur le site Web ainsi que sa documentation.
La généralité de ses termes rend cette clause applicable en cas de caducité du contrat de location financière, comme c'est le cas en l'espèce. Il s'ensuit que, sauf à dénaturer cette clause claire et précise, il n'appartient pas à la société Locam de désactiver le site internet. Au surplus, la cour d'appel relève que Mme X. affirme sans preuve que cette société disposerait des identifiant et mot de passe permettant d'accéder aux « fichiers sources » du site.
La demande Mme X. tendant à ce que la désactivation du site internet soit également mise à la charge de la société Locam ne peut donc qu'être rejetée.
E - Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
Succombant principalement, les sociétés Locam et NW seront condamnées in solidum aux dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'au paiement d'une indemnité de procédure.
Le jugement entrepris sera donc infirmé des chefs des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
- DIT que le contrat afférent à la création et à l'installation d'un site internet conclu avec la société NW conseils et le contrat de location financière conclu avec la société Locam sont interdépendants ;
- DIT que, concernant le contrat afférent au site internet, le code de la consommation est applicable à Mme X., conformément aux dispositions de l'article L. 221-3 du code de la consommation ;
- REJETTE le moyen de la société Locam tendant à voir juger que le contrat afférent au site internet portait sur la fourniture d'un bien « nettement personnalisé » au sens de l'article L. 221-28 du code de la consommation ;
- DIT que la société NW conseil a fourni une information erronée sur le point de départ du délai de rétractation dont bénéficiait Mme X. au titre du contrat afférent au site internet ;
En conséquence,
- INFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu'il :
* déboute la société NW conseil de sa demande de dommages et intérêts ;
* déboute la société Locam de sa demande de restitution du site internet ;
* ordonne à la société NW conseil de désactiver le site internet ;
Statuant de nouveau de chefs infirmés, et y ajoutant,
- DIT qu'est nul le contrat afférent au site internet, conclu avec la société NW conseil ;
- En conséquence, CONSTATE la caducité du contrat de location financière conclu avec la société Locam, et ce depuis la date de sa conclusion, le 8 septembre 2020 ;
- REJETTE la demande principale de la société Locam tendant à la condamnation de Mme X. au paiement de la somme de 12 236,40 euros au titre des loyers impayés à compter du mois de mai 2022 et de l'indemnité de 10 % à titre de clause pénale ;
- CONDAMNE la société NW conseil à payer à Mme X. la somme de 300 euros, avec intérêts au taux légal à compter de 30 septembre
2022 ;
- CONDAMNE la société Locam à payer à Mme X. la somme de 7.075,20 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2022, au titre des loyers payés jusqu'en mai 2022 ;
- ORDONNE, sur les deux condamnations prononcées ci-dessus au profit de Mme X., la capitalisation des intérêts dus pour une année entière ;
- CONDAMNE Mme X. à payer à la société Locam la somme de 11.124 euros, au titre de l'indemnité stipulée à l'article 10 bis du contrat de location financière, cette somme produisant intérêt au taux légal à compter du 15 août 2022 ;
- REJETTE la demande de Mme X. tendant à ce que la société Locam soit condamnée, sous astreinte, à désactiver le site internet installé par la société NW conseil ;
- DIT que le chef du jugement ordonnant à la société NW conseil de désactiver le site www.[07].fr devra être exécuté au plus tard dans un délai de quinze jours (15 jours) à compter de la signification du présent arrêt, sous peine d'une astreinte de CENT CINQUANTE EUROS (150 euros) par jour de retard pendant une durée de trois mois (3 mois) ;
- CONDAMNE in solidum les sociétés Locam et NW conseils aux dépens de première instance et d'appel ;
- Vu l'article 700 du code de procédure civile, REJETTE la demande formée par la société Locam et CONDAMNE in solidum les sociétés Locam et NW conseil à payer à Mme X. la somme de 6.000 euros.
Le greffier La présidente
Marlène Tocco Stéphanie Barbot