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TJ VALENCE, 17 juillet 2025

Nature : Décision
Titre : TJ VALENCE, 17 juillet 2025
Pays : France
Juridiction : Valence (T. jud.)
Demande : 25/00010
Date : 17/07/2025
Nature de la décision : Admission
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 10/02/2025
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CERCLAB - DOCUMENT N° 24262

TJ VALENCE, 17 juillet 2025 : RG n° 25/00010

Publication : Judilibre

 

Extrait : « S’agissant d’un prêt professionnel, la SCI X. est fondée à invoquer au soutien de ses prétentions les dispositions de l’article 1171 du code civil et non les celles du code de la consommation, ainsi que lui en fait à tort grief le créancier poursuivant.

L’article 1110 du code civil définit le contrat d’adhésion comme celui qui comporte un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l'avance par l'une des parties. L’article 1171 du même code prévoit que, dans ce type de contrat, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties est réputée non écrite. Pour voir qualifier une clause d’abusive, il appartient donc au débiteur de rapporter la preuve que le contrat signé est un contrat d’adhésion, que la clause crée un déséquilibre significatif entre les parties et que ladite clause n’était pas négociable.

En l’espèce, la SCI X. procède par simple allégation pour qualifier de contrat d’adhésion le prêt professionnel consenti par la CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE.

De plus, si la SCI X. motive le déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties par le trop court délai (15 jours) imparti à l’emprunteur par ladite clause pour régulariser les impayés, elle ne conclut pas sur le caractère non négociable de ladite clause. Or, une clause permettant au prêteur de prononcer la déchéance du terme pour cause d’impayés à la suite d’une mise en demeure restée infructueuse, ne peut être considérée à elle seule comme créant un déséquilibre significatif entre les parties, le défaut de paiement constituant une violation par l’emprunteur de sa principale obligation contractuelle. Seul le délai trop court imparti à l’emprunteur pour régulariser la situation crée en l’espèce le déséquilibre. Or, la SCI X. ne rapporte pas la preuve, ni même ne soutient, que la durée de ce délai lui ait été imposée sans négociation possible par la CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE. Il résulte même des pièces versées au débat par le prêteur que celui-ci a amiablement accepté de renoncer à la déchéance du terme en 2022/2023 ce qui établit qu’une marge de négociation était possible après défaillance de l’emprunteur et donc a fortiori au moment de la formation du contrat.

Dans ces conditions, la SCI X., sur qui pèse la charge de la preuve, ne justifie pas du caractère abusif de la clause de déchéance du terme figurant au contrat de prêt du 16 juillet 2019.

Par ailleurs, la CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE rapporte la preuve, copies des mises en demeure et lettres de notification de la déchéance du terme à l’appui (pièce n°5), qu’après avoir prononcé la déchéance du terme par lettre recommandée avec accusé de réception du 07 décembre 2022, celle-ci a renoncé à s’en prévaloir ce dont elle a informé la SCI X. par lettre recommandée avec accusé de réception du 31 janvier 2023 avant d’entamer une nouvelle procédure la conduisant à prononcer la déchéance du terme par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 avril 2024 (AR retourné avec la mention “pli avisé et non réclamé”) après quatre mises en demeure de régulariser la situation sous 30 jours restées infructueuses en date des 26 septembre 2023 (AR signé), 28 décembre 2023 (AR retourné avec la mention “pli avisé et non réclamé”), 15 février 2024 (AR signé) et 19 mars 2024 (AR signé). La SCI X. ne peut, sans invoquer sa propre turpitude et en contradiction avec une jurisprudence constante (Cass., 1ère civ., 20 janvier 2021, pourvoi n°19-20.680, publié au Bulletin), valablement soutenir que le fait qu’elle n’ait pas retiré la lettre recommandée qui lui a été adressée par le prêteur prive cette dernière de tout effet. Par ailleurs, si un seul des multiples courriers adressés à la SCI X., et par ailleurs non réceptionné, soit celui en date du 22 mai 2024 comporte effectivement des mentions contradictoires que le montant des sommes réclamées suffit cependant à dissiper aisément (337.994,45€), les courriers des 24 avril 2024 et 22 mai 2025 sont en revanche parfaitement clairs (pièce en demande n°5) : “La déchéance du terme étant acquise, nous vous rappelons que vous restez nous devoir la somme de 337.994,45€ en principal, outre intérêts”.

Dans ces conditions, la déchéance du terme rendant le solde du prêt intégralement exigible sera considérée comme régulièrement prononcée par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 avril 2024. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCE (DROME)

JUGEMENT D'ORIENTATION DU 17 JUILLET 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 25/00010. N° Portalis DBXS-W-B7J-IOGJ. Code NAC : 78A.

 

CRÉANCIER POURSUIVANT :

SA CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE

[Adresse 3], [Adresse 14], [Localité 8], représentée par Maître Séverine JOUANNEAU de la S.C.P. JOUANNEAU-PALACCI, avocats au barreau de la DROME

 

DÉBITEUR SAISI :

SCI X.

[Adresse 21], [Adresse 4], [Localité 6], représentée par Maître Hadrien PRALY de la S.E.L.A.R.L. CABINET HADRIEN PRALY, avocats au barreau de la DROME

 

CRÉANCIER INSCRIT :

TRÉSOR PUBLIC ADM SIP [Localité 17]

[Adresse 16], [Adresse 13], [Localité 5], non comparant non représenté

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré : Anne-Sophie FORCHERON, vice-présidente, déléguée dans les fonctions de juge de l’exécution, assistée de Samia LANTRI, greffière lors des débats et d’Olga KUZAN, greffière lors du prononcé

DÉBATS : à l’audience publique du 19 juin 2025

Jugement : - contradictoire - en premier ressort - prononcé publiquement par mise à disposition au greffe et signé par la juge de l’exécution et la greffière.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Par acte reçu le 16 juillet 2019 par Maître Y., notaire associé à [Localité 19] (DRÔME), en l’étude de Maître Z., notaire à [Localité 12] (DRÔME), la S.A. CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE a consenti à la SCI X. un prêt professionnel référencé n°5752698 d’un montant de 400.000,00 €, remboursable sur une durée de 180 mois, moyennant un taux d’intérêt de 1,53 % l’an.

Par acte du 18 novembre 2024, la S.A. CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE a fait délivrer à la SCI X., en vertu de l’acte notarié susvisé et pour obtenir paiement de la somme de 340.450,82€, un commandement aux fins de saisie d’un ensemble immobilier comprenant un bâtiment et une bande de terrain, situé sur la commune de [Localité 12] [Adresse 2] [Localité 7][Adresse 1] [Adresse 4], soit les parcelles cadastrées section ZB, lieudit “[Adresse 11]”, n°[Cadastre 9] et section ZB, lieudit “[Adresse 15]”, n°[Cadastre 10].

Le procès-verbal de description de l’immeuble saisi a été dressé par la S.E.L.A.R.L. MOURET-AYACHE & ASSOCIES le 28 novembre 2024.

Par acte du 10 février 2025, la S.A. CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE a fait citer la SCI X. à comparaître devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire de VALENCE à l’audience du 20 mars 2025, auquel elle demande de :

- constater la validité de la présente procédure de saisie immobilière ;

- statuer ce que de droit sur les contestations et demandes incidentes qui pourraient être formées ;

- ordonner la vente forcée des biens saisis ;

- fixer dès à présent la date de visite des biens et droits immobiliers saisis avec le concours de la S.E.L.A.R.L. MOURET-AYACHE, commissaires de justice à [Localité 20] (26), ou de tel autre commissaire de Justice qu’il plaira au juge de l’exécution de désigner, lequel pourra se faire assister si besoin est de deux témoins, d’un serrurier et de la force publique ;

- condamner la partie saisie à lui payer la somme de 800,00€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

- dire que les dépens seraient pris en frais privilégiés de vente.

Appelée pour la première fois à l’audience du 20 mars 2025, l’affaire a été contradictoirement renvoyée à plusieurs reprises pour être retenue à l’audience du 19 juin 2025.

[*]

A l’audience du 19 juin 2025, la S.A. CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE, représentée par son conseil qui s’en rapporte à ses conclusions notifiées par RPVA le 13 mai 2025 auxquelles il conviendra de se référer pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens, réitère les demandes formées dans son acte introductif d’instance et, y ajoutant, conclut à l’entier débouté de la SCI X.

[*]

La SCI X., représentée par son conseil qui s’en rapporte à ses conclusions en défense n°2 notifiées par RPVA le 18 juin 2025 auxquelles il conviendra de se référer pour plus ample exposé des faits, de la procédure, des prétentions et moyens, demande au juge de l’exécution au visa des articles R.311-11 et R.322-10 du code des procédures civiles d’exécution, 1104 et suivants, 1171, 1231-5 et 1343-5 du code civil, de :

à titre principal,

- dire et juger nul le commandement de payer valant saisie immobilière signifié le 18 novembre 2024 ;

- constater que la société CAISSE EPARGNE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE ne justifie pas de la régularité du cahier des conditions de la vente et de son dépôt dans les cinq jours de la signification de l’assignation à l’audience d’orientation ;

- constater que la société CAISSE EPARGNE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE ne justifie pas de la dénonce du commandement et de l’assignation aux créanciers inscrits dans les cinq jours de l’assignation au débiteur ;

- constater que la société CAISSE EPARGNE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE ne justifie pas avoir annexé au cahier des conditions de la vente l’état hypothécaire certifié à la date de publication du commandement de payer valant saisie ;

- prononcer, de plus fort, la nullité et subsidiairement la caducité du commandement-ordonner la radiation, aux frais de la société CAISSE EPARGNE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE, de l’ensemble des inscriptions au service de la publicité foncière opérées de son chef dans le cadre de la procédure de saisie immobilière ;

- juger que la société CAISSE EPARGNE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE est, en l’absence de déchéance du terme valablement prononcée, recevable et fondée à poursuivre le recouvrement des seules échéances impayées, lesquelles s’élèvent à la somme de 43.648, 37 € ;

- juger que le capital restant dû au 24 avril 2024 était de 306.334, 32 € et non de 308.429,45€ ;

- juger que la clause de l’acte de prêt prévoyant l’indemnité conventionnelle dont la société CAISSE EPARGNE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE réclame le paiement à hauteur de15.421, 47 € s’analyse en une clause pénale ;

- ramener à 0,00€ l’indemnité susceptible d’être allouée à la société CAISSE EPARGNE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE en application de cette clause ;

- lui accorder le bénéfice des plus larges délais de paiement ;

à titre infiniment subsidiaire,

- l’autoriser à vendre le bien à l’amiable au prix minimum de 420.000,00€ ;

en tout état de cause,

- condamner la société CAISSE EPARGNE PRÉVOYANCE LOIRE DROME ARDÈCHE à lui payer à la SCI X. la somme de 3.000,00€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance;

- rejeter toutes demandes plus amples ou contraires.

[*]

A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 17 juillet 2025.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

L’article R. 322-15 du code des procédures civiles d’exécution prévoit qu’à l’audience d’orientation, le juge de l’exécution, après avoir entendu les parties présentes ou représentées, vérifie que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 du code des procédures civiles d’exécution sont réunies, statue sur les éventuelles contestations et demandes incidentes et détermine les modalités de la poursuite de la procédure, en autorisant la vente amiable à la demande du débiteur ou en ordonnant la vente forcée.

Lorsqu’il autorise la vente amiable, le juge s’assure qu’elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur.

 

Sur la régularité et le bien-fondé de la procédure de saisie immobilière :

Sur la nullité du commandement de payer valant saisie :

Les 1°, 2° et 5°de l’article R.321-3, et non R. 321-2, du code des procédures civiles d’exécution prévoient à peine de nullité que le commandement de payer valant saisie comporte, outre les mentions prescrites pour les actes d’huissier de Justice :

- La constitution d'avocat du créancier poursuivant, laquelle emporte élection de domicile ;

- L'indication de la date et de la nature du titre exécutoire en vertu duquel le commandement est délivré ;

- La désignation de chacun des biens ou droits sur lesquels porte la saisie immobilière, telle qu'exigée par les règles de la publicité foncière.

L’article R. 311-10 du même code précise que la nullité des actes de la procédure de saisie immobilière est régie par les articles 112 à 116 du code de procédure civile, ce qui implique notamment qu’une irrégularité formelle doit être expressément prévue par un texte et ne peut entraîner la nullité de l’acte que sur preuve d’un grief. Enfin, quelle que soit la gravité de l’irrégularité alléguée, celle-ci est susceptible de régularisation par conclusions ultérieures si aucun grief ne subsiste.

En l’espèce, le commandement de payer valant saisie a été délivré à la SCI X. à la requête de la CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE « ayant pour avocat La S.C.P. JOUANNEAU-PALACCI, membre de la AARPI COFLUENCES, Avocat au Barreau de Valence ».

Selon une jurisprudence constante (Cass., 1ère chambre civile, 11 décembre 2013 - 12-29.923, publié au bulletin), la régularité de la constitution comme avocat d'une S.C.P. d'avocats n'est pas subordonnée à l'identification de l'avocat appartenant à cette S.C.P. appelée à représenter la partie au nom de laquelle la constitution est effectuée. La S.C.P. JOUANNEAU-PALACCI est en outre inscrite au barreau de la vente. Dès lors, ce moyen de nullité sera rejeté.

Par ailleurs, si le commandement de payer valant saisie du 18 novembre 2024 est effectivement entaché d’une erreur en ce que le notaire instrumentaire est Maître Y. et non Maître Z., en l’étude de laquelle le contrat de prêt a été signé, celle-ci ne sera pas retenue comme cause de nullité de l’acte en ce que :

- aucun grief n’est justifié, ni même invoqué ;

- les conclusions du créancier poursuivant notifiées par RPVA le 13 mai 2025 régularisent l’erreur commise.

La mention d’une inscription d’hypothèque n’est pas prévue à peine de nullité du commandement de payer valant saisie par l’article R.321-3 précité. Par ailleurs, le bordereau d’inscription en date du 22 juillet 2019 versé au débat atteste de cette inscription, Maître Y. y certifiant la conformité des données figurant dans ce document au bordereau d’inscription transmis au service de publicité foncière sur support électronique (pièce n°2). Cette inscription est par ailleurs confirmée par le relevé des formalités publiées au 29 septembre 2024 figurant au cahier des conditions de vente.

Enfin, la SCI X. soutient, sans plus ample motivation, que la désignation des biens saisis n’est pas conforme aux règles de la publicité foncière, alors que le commandement a été publié par le service de publicité foncière de [Localité 20] et que la désignation de l’immeuble saisi dans le commandement de payer du 18 novembre 2024 est bien identique (commune et références cadastrales) à celui figurant dans le relevé des formalités publiées.

Aucun des moyens soulevés par la SCI X. à l’appui de cette exception de procédure n’apparaissant fondé, l’exception de nullité du commandement de payer valant saisie du 18 novembre 2024 sera rejetée.

 

Sur la caducité du commandement de payer valant saisie :

Pièces à l’appui, le créancier poursuivant justifie qu’aucun des moyens soulevés par la SCI X. au soutien de sa demande tendant à voir constater la caducité du commandement de payer valant saisie n’est fondé.

Ainsi, le commandement de payer valant saisie du 18 novembre 2024 a :

- été publié au service de publicité foncière de [Localité 20] le 27 décembre 2024 sous les références volume 2024 S n°70, soit dans le délai de deux mois imparti par l’article R.321-6 du code des procédures civiles d’exécution (pièce n°6) ;

- été dénoncé à l’unique créancier inscrit, à savoir le TRÉSOR PUBLIC - ADM SIP DE [Localité 18], par acte du 11 février 2025 et ce dans le délai de cinq jours suivant l’assignation du 10 février 2025 imparti par l’article R.322-6 du même code (pièce n°8).

Par ailleurs, conformément aux dispositions de l’article R.322-10 du code des procédures civiles d’exécution, le cahier des conditions de vente a bien été déposé au greffe du juge de l’exécution au plus tard le 5ème jour ouvrable suivant la délivrance de l’assignation du 11 février 2025, ainsi qu’en atteste le cachet apposé par le greffe le 11 février 2025 (pièce n°7).

Enfin, mention de l’assignation et de la dénonciation au créancier inscrit a bien été portée le 17 février 2025 en marge du commandement de payer valant saisie du 18 novembre 2024, soit dans le délai de 8 jours à compter du dernier de ces actes délivré le 11 février 2025, ainsi qu’en atteste le papillon délivré par le service de publicité foncière de la DRÔME et apposé sur l’un et l’autre acte (pièces n°11 et 12).

 

Sur le cahier des conditions de vente :

La SCI X., sans motiver davantage en fait et en droit sa contestation, ni en tirer de conséquence juridique, remet en cause la régularité du cahier des conditions de vente et de ses annexes obligatoires et fait grief au créancier poursuivant de ne pas en justifier.

Or, il n’appartient ni au juge, ni au créancier poursuivant, de rechercher pour le compte de la partie saisie une cause de nullité de la procédure.

 

Sur l’immeuble saisi

L’article L. 311-6 du même code énonce que, sauf dispositions législatives particulières, la saisie immobilière peut porter sur tous les droits réels afférents aux immeubles, y compris leurs accessoires réputés immeubles, susceptibles de faire l’objet d’une cession.

En l’espèce, la saisie porte sur des droits saisissables au sens des dispositions de l'article L. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution.

 

Sur l’existence d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible :

L’article L. 311-2 du code des procédures civiles d’exécution dispose que tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à la saisie immobilière dans les conditions fixées par le présent chapitre et par les dispositions qui ne lui sont pas contraires de la loi du livre 1er.

Si la SCI X. conteste le montant de la créance de la S.A. CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE, contestation examinée dans la suite de la décision, elle se reconnaît néanmoins redevable d’une somme minimale de 43.648,37€ correspondant aux échéances impayées d’un prêt consenti par le créancier poursuivant et reçu par Maître Y. le 16 juillet 2019, dont la copie exécutoire et versée au débat.

Dès lors, il est établi que la S.A. CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE agit à l’encontre de la SCI X. en vertu d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible au sens de l’article L. 311-2 précité.

 

Sur le montant de la créance :

L’article R.322-18 du code des procédures civiles d'exécution prévoit que le jugement d'orientation mentionne le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires.

 

Sur la déchéance du terme :

S’agissant d’un prêt professionnel, la SCI X. est fondée à invoquer au soutien de ses prétentions les dispositions de l’article 1171 du code civil et non les celles du code de la consommation, ainsi que lui en fait à tort grief le créancier poursuivant.

L’article 1110 du code civil définit le contrat d’adhésion comme celui qui comporte un ensemble de clauses non négociables, déterminées à l'avance par l'une des parties.

L’article 1171 du même code prévoit que, dans ce type de contrat, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui créé un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties est réputée non écrite.

Pour voir qualifier une clause d’abusive, il appartient donc au débiteur de rapporter la preuve que le contrat signé est un contrat d’adhésion, que la clause crée un déséquilibre significatif entre les parties et que ladite clause n’était pas négociable.

En l’espèce, la SCI X. procède par simple allégation pour qualifier de contrat d’adhésion le prêt professionnel consenti par la CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE.

De plus, si la SCI X. motive le déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties par le trop court délai (15 jours) imparti à l’emprunteur par ladite clause pour régulariser les impayés, elle ne conclut pas sur le caractère non négociable de ladite clause.

Or, une clause permettant au prêteur de prononcer la déchéance du terme pour cause d’impayés à la suite d’une mise en demeure restée infructueuse, ne peut être considérée à elle seule comme créant un déséquilibre significatif entre les parties, le défaut de paiement constituant une violation par l’emprunteur de sa principale obligation contractuelle. Seul le délai trop court imparti à l’emprunteur pour régulariser la situation crée en l’espèce le déséquilibre.

Or, la SCI X. ne rapporte pas la preuve, ni même ne soutient, que la durée de ce délai lui ait été imposée sans négociation possible par la CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE. Il résulte même des pièces versées au débat par le prêteur que celui-ci a amiablement accepté de renoncer à la déchéance du terme en 2022/2023 ce qui établit qu’une marge de négociation était possible après défaillance de l’emprunteur et donc a fortiori au moment de la formation du contrat.

Dans ces conditions, la SCI X., sur qui pèse la charge de la preuve, ne justifie pas du caractère abusif de la clause de déchéance du terme figurant au contrat de prêt du 16 juillet 2019.

Par ailleurs, la CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE rapporte la preuve, copies des mises en demeure et lettres de notification de la déchéance du terme à l’appui (pièce n°5), qu’après avoir prononcé la déchéance du terme par lettre recommandée avec accusé de réception du 07 décembre 2022, celle-ci a renoncé à s’en prévaloir ce dont elle a informé la SCI X. par lettre recommandée avec accusé de réception du 31 janvier 2023 avant d’entamer une nouvelle procédure la conduisant à prononcer la déchéance du terme par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 avril 2024 (AR retourné avec la mention “pli avisé et non réclamé”) après quatre mises en demeure de régulariser la situation sous 30 jours restées infructueuses en date des 26 septembre 2023 (AR signé), 28 décembre 2023 (AR retourné avec la mention “pli avisé et non réclamé”), 15 février 2024 (AR signé) et 19 mars 2024 (AR signé). La SCI X. ne peut, sans invoquer sa propre turpitude et en contradiction avec une jurisprudence constante (Cass., 1ère civ., 20 janvier 2021, pourvoi n°19-20.680, publié au Bulletin), valablement soutenir que le fait qu’elle n’ait pas retiré la lettre recommandée qui lui a été adressée par le prêteur prive cette dernière de tout effet. Par ailleurs, si un seul des multiples courriers adressés à la SCI X., et par ailleurs non réceptionné, soit celui en date du 22 mai 2024 comporte effectivement des mentions contradictoires que le montant des sommes réclamées suffit cependant à dissiper aisément (337.994,45€), les courriers des 24 avril 2024 et 22 mai 2025 sont en revanche parfaitement clairs (pièce en demande n°5) : « La déchéance du terme étant acquise, nous vous rappelons que vous restez nous devoir la somme de 337.994,45€ en principal, outre intérêts ».

Dans ces conditions, la déchéance du terme rendant le solde du prêt intégralement exigible sera considérée comme régulièrement prononcée par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 avril 2024.

 

Sur le capital restant dû :

La déchéance du terme a été définitivement prononcée par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 avril 2024.

Du tableau d’amortissement versé au débat par la SCI X. (pièce n°7), il résulte que la somme de 308.429,45€ correspond au capital restant dû après paiement de l’échéance exigible au 04 avril 2024. Or, la SCI X., sur qui pèse la charge de la preuve, ne justifie pas du paiement de ladite échéance laquelle a donc été intégrée par le prêteur dans les échéances impayées pour un total de 13.787,81€. La somme de 306.334,32€ correspond au capital restant dû après paiement de l’échéance exigible au 05 mai 2024, que la SCI X. ne justifie pas davantage avoir réglé postérieurement à la déchéance du terme.

Le montant de 308.429,45€ correspond donc bien au montant du capital restant dû à la date de déchéance du terme.

 

Sur la clause pénale :

En application des dispositions de l’article 1231-5 du code civil, le juge peut, même d’office, modérer ou augmenter la pénalité contractuellement convenue si elle est manifestement excessive ou dérisoire.

En l’espèce, la clause “Exigibilité anticipée - Déchéance du terme” prévue au contrat de prêt prévoit une indemnité égale à 5% de l’ensemble des sommes dues au jour de la déchéance du terme, ce qui constitue une clause usuelle en matière de prêt professionnel.

La SCI X. ne conclut pas en quoi ce taux est manifestement excessif soutenant que la CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE ne subit aucun préjudice alors les premiers impayés remontent à l’année 2022 et que le taux des intérêts contractuels (1,53%) est nettement inférieur à l’inflation depuis 2022 (5,2% en 2022, 4,9% en 2023 et 2,00% en 2024) et au taux légal professionnel depuis le 1er semestre 2023 (2,06%, 4,22%, 5,07%, 4,92% et 3,71% entre le 1er semestre 2023 et le 1er semestre 2025). Dès lors, il n’y a pas lieu de modérer la clause pénale.

Compte tenu de ce qui précède, il y a lieu de mentionner la créance du poursuivant à hauteur de la somme de 340.450,82€ à la date du 15 octobre 2024, outre intérêts postérieurs au taux contractuel de 1,53 % l’an selon le décompte suivant :

- échéances impayées : 13.787,81€

- intérêts échus et de retard : 2.812,09€

- capital restant dû : 308.429,45€

- indemnité : 15.421,47€.

 

Sur la demande de délais de paiement :

L’article 1343-5 du code civil permet au juge, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

L’article R.121-1 code des procédures civiles d’exécution prévoit par ailleurs que le juge de l'exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l'exécution. Toutefois, après signification d’un commandement de payer, il a compétence pour accorder un délai de grâce.

En l’espèce, la SCI X., qui fait état de ses difficultés financières essentiellement dues à la liquidation judiciaire de sa locataire, ne justifie d’aucun autre moyen pour régler sa dette que la vente de l’immeuble saisi laquelle est justement l’objectif poursuivi par la présente procédure. Elle sera en conséquence déboutée de sa demande de délais de grâce.

 

Sur l’orientation de la procédure :

En application des dispositions combinées des articles R.322-15 et R.332-20 du code des procédures civiles d’exécution, la vente amiable doit prévaloir.

Lorsqu’il autorise la vente amiable, le juge s’assure qu’elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur.

Pièces à l’appui, la SCI X. justifie de ses diligences pour parvenir à la vente de l’immeuble saisi produisant notamment un mandat de vente, une offre d’achat en date du 18 juin 2015 au prix de 466.000,00€ permettant de solder l’intégralité de la dette et des échanges attestant de discussions avec la commune de [Localité 12] pour que Monsieur [Y] X. et la S.A.R.L. G&S acquièrent des parcelles voisines, le tout valorisant les parcelles saisies. Dès lors, il sera fait droit à sa demande tendant à être autorisée à vendre amiablement l’immeuble saisi.

L’article R.322-21 du code des procédures civiles d’exécution énonce que le juge de l’exécution qui autorise la vente amiable fixe le montant du prix en deçà duquel l’immeuble ne peut être vendu eu égard aux conditions économiques du marché ainsi que, le cas échéant, les conditions particulières de la vente. Il taxe les frais de poursuite à la demande du créancier poursuivant. Il fixe la date de l’audience à laquelle l’affaire sera rappelée dans un délai qui ne peut excéder quatre mois.

Au regard du procès-verbal descriptif et de l’offre d’achat versée au débat, le montant du prix en deçà duquel celui-ci ne peut être vendu sera fixé à 420.000,00€ (net vendeur). Les frais de procédure resteront à la charge de l’acquéreur.

L’affaire sera rappelée à l’audience du 06 novembre 2025 à 09 heures 00.

Les frais de poursuite exposés par le créancier poursuivant et dont il est demandé la taxation s’élève à la somme de 9.079,65€, ce compris les émoluments de l’avocat du poursuivant calculé sur un prix plancher de 420.000,00€ conformément à l’article A444-191 du code de commerce à parfaire selon le prix de vente effectif.

 

Sur les demandes d’indemnité au titre des frais irrépétibles :

Ni l’équité, ni la situation économique des parties ne commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au profit de l’une ou l’autre d’entre elles. Créancier poursuivant et partie saisie seront déboutés de leur demande sur ce fondement.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

La juge de l'exécution statuant publiquement, par mise à disposition au greffe de la décision, par jugement contradictoire et en premier ressort,

REJETTE les exceptions de nullité et de caducité du commandement de payer valant saisie délivré à la SCI X. par acte du 18 novembre 2024, publié au service de publicité foncière de [Localité 20] le 27 décembre 2024, sous les références volume 2024 S n°70 ;

CONSTATE que la S.A. CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE est titulaire d'une créance liquide et exigible à l’encontre de la SCI X. et agit en vertu d’un titre exécutoire au sens des articles L. 311-2 et L. 311-4 du code des procédures civiles d'exécution ;

CONSTATE que la saisie porte sur des droits saisissables au sens de l'article L. 311-6 du code des procédures civiles d'exécution ;

DÉCLARE régulière la déchéance du terme prononcée par la CAISSE D’ÉPARGNE LOIRE DROME ARDÈCHE par lettre recommandée avec accusé de réception du 24 avril 2024 ;

DÉBOUTE la SCI X. de sa demande tendant à la réduction de la clause pénale prévue au contrat de prêt ;

MENTIONNE que la créance, dont se prévaut le créancier poursuivant au titre du prêt notarié en date du 16 juillet 2019, référencé n°5752698, s’élève à la somme de 340.450,82€ à la date du 10 octobre 2024, outre intérêts postérieurs au taux contractuel de 1,53 % l’an;

AUTORISE la vente amiable de l’immeuble saisi à un prix qui ne pourra être inférieur à 420.000,00€ (net vendeur) ;

DIT que la partie saisie devra accomplir les diligences nécessaires à la conclusion de la vente amiable et devra rendre compte au créancier poursuivant sur sa demande des démarches accomplies à cette fin ;

DIT que l’affaire sera rappelée à l’audience du 06 novembre 2025 à 09 heures 00;

DIT que la signification de la présente décision à l’initiative de la partie la plus diligente vaut convocation à l’audience de rappel ;

RAPPELLE qu’en vertu des dispositions de l’article R. 322-23 du code des procédures civiles d’exécution, le prix de vente de l’immeuble ainsi que toute somme acquittée par l’acquéreur à quelque titre que ce soit sont consignés auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations et acquis aux créanciers participant à la distribution ainsi que, le cas échéant, au débiteur, pour leur être distribués ;

DIT que les frais de procédure sont taxés à la somme de 9.079,65€, ce compris les émoluments de l’avocat du poursuivant calculé sur un prix plancher de 420.000,00€ conformément à l’article A444-191 du code de commerce à parfaire selon le prix de vente effectif ;

RAPPELLE que les frais de procédure resteront à la charge de l’acquéreur ;

RÉSERVE les dépens ;

DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

RAPPELLE que la présente décision est assortie de droit de l’exécution provisoire.

LA GREFFIÈRE,                            LA JUGE DE L’EXÉCUTION,


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