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TJ DRAGUIGNAN (Jex), 16 mai 2025

Nature : Décision
Titre : TJ DRAGUIGNAN (Jex), 16 mai 2025
Pays : France
Juridiction : Draguignan (T. jud. )
Demande : 23/02232
Date : 16/05/2025
Nature de la décision : Admission
Mode de publication : Judilibre
Date de la demande : 28/02/2023
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CERCLAB - DOCUMENT N° 24389

TJ DRAGUIGNAN (Jex), 16 mai 2025 : RG n° 23/02232 

Publication : Judilibre

 

Extrait : « Ensuite, la société MG PROPERTY remet en cause la déchéance anticipée du terme du prêt prononcée par la banque en application des clauses contractuelles, considérant qu’il s’agit d’une clause pouvant être considérée comme abusive en application de l’article 1171 du Code civil, lequel dispose que dans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite », ainsi qu’en application du « droit européen ».

Pour autant, d’une part, ainsi que le souligne la société poursuivante, les dispositions susvisées de l’article 1171 du Code civil résultent de l’ordonnance du 10 février 2016 et de la loi du 20 avril 2018 et ne trouvent donc pas à s’appliquer au cas d’espèce, s’agissant d’un contrat conclu avant les dates d’entrée en vigueur de celles-ci, respectivement les 1er octobres 2016 et 1er octobre 2018.

D’autre part, il sera rappelé qu’une société civile immobilière agit en qualité de professionnel lorsqu'elle souscrit des prêts immobiliers pour financer l'acquisition d'immeubles conformément à son objet, de sorte qu'elle ne peut invoquer à son bénéfice le caractère abusif de certaines clauses des contrats de prêt (Cass. 1re civ., 28 juin 2023, n° 22-13.969). Or c'est le cas en l’espèce de la SCI MG PROPERTY, dont l'objet social est la « gestion de patrimoine immobilier ».

Elle ne peut donc invoquer la réglementation des clauses abusives entre consommateur et professionnel. »

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE DRAGUIGNAN

JUGE DE L’EXÉCUTION

JUGEMENT DU 16 MAI 2025

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 23/02232. N° Portalis DB3D-W-B7H-JZJ2.

Le présent jugement a été signé par Madame Agnès MOUCHEL, Juge de l’Exécution, et par Monsieur Farid DRIDI, Greffier présent lors du prononcé

FORMATION :

PRÉSIDENT : Madame Agnès MOUCHEL, Juge de l’Exécution

GREFFIER : Monsieur Farid DRIDI,

DÉBATS : A l’audience du 21 mars 2025, l’affaire a été mise en délibéré au 16 mai 2025.

Jugement prononcé après débats publics, par mise à disposition au Greffe, par décision contradictoire et en premier ressort par Madame Agnès MOUCHEL.

 

 

DEMANDERESSE :

SA LE CRÉDIT FONCIER DE FRANCE

dont le siège social est [Adresse 3], immatriculée au RCS de [Localité 14] sous le n° XXX, représentée par son président en exercice domicilié en cette qualité audit siège, domicile élu : chez Maître Colette VANDERSTICHEL Avocat, dont le siège social est sis [Adresse 19], CREANCIER POURSUIVANT LA VENTE représenté par Maître Frédéric PUGET, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, Maître Colette VANDERSTICHEL, avocat au barreau de DRAGUIGNAN, avocat postulant,

 

DÉFENDERESSE :

SCI MG PROPERTY

immatriculée au RCS de [Localité 9] sous le n° YYY, représentée par son gérant Monsieur Z. domicilié à [Adresse 13], dont le siège social est sis [Adresse 2], DEBITEUR SAISI représentée par Maître Serge DREVET, avocat au barreau de DRAGUIGNAN substitué par Maître Marjorie PASCAL, Avocat au barreau de DRAGUIGNAN, Maître Monica GIORGI, avocat au barreau de ROME,

 

EN PRÉSENCE DE :

LE TRÉSOR PUBLIC DE [Localité 11]

représenté par le comptable du SIP, venant aux droits du comptable des finances publiques de [Localité 10], domicilié [Adresse 4], agissant en qualité de comptable chargé du recouvrement des impôts, domicile élu : chez SCP LOUSTAUNAU FORNO Avocat, dont le siège social est sis [Adresse 1]

Inscriptions d’hypothèques légales prises à son profit les :

- 17 avril 2018, volume 2018 V n°XXX,

- 16 mai 2022, volume 2022 V n°YYY,*

CREANCIER INSCRIT représenté par Maître Jean-luc FORNO de la SCP LOUSTAUNAU FORNO, avocats au barreau de DRAGUIGNAN, substitué par Me Frédérique GARNIER, avocat au barreau de DRAGUIGNAN,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

La société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE poursuit la vente, sur saisie immobilière, au préjudice de la S.C.I. MG PROPERTY, des biens et droits immobiliers lui appartenant, situés sur la commune de [Localité 18], cadastrés cession AF NUMÉRO [Cadastre 5].

Ainsi, le créancier poursuivant lui a fait délivrer un commandement aux fins de saisie immobilière le 10 novembre 2022, publié au Service de la Publicité Foncière et de l’Enregistrement de [Localité 8] le 29 décembre 2022, volume 2022 S numéro 169.

Suivant exploit du commissaire de justice en date du 28 février 2023, le créancier poursuivant a fait assigner la SCI MG PROPERTY à l’audience d’orientation du juge de l'exécution immobilier du tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN du 14 avril 2023.

Après plusieurs renvois à la demande des parties, l’examen de l’affaire a été retenu à l’audience du 8 novembre 2024, en la présence des conseils de chacune d’elles.

[*]

Conformément à ses conclusions notifiées par RPVA le 11 janvier 2024, la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE a demandé au juge de :

- rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires,

- déclarer la société MG PROPERTY irrecevable et mal fondée en toutes ses demandes et l’en débouter,

- dire que le créancier poursuivant, titulaire d’une créance liquide et exigible, agit en vertu d’un titre exécutoire, comme il est dit aux articles L. 311-2 et L. 311-4 du code des procédures civiles d’exécution,

- dire que la saisie pratiquée porte sur des droits saisissables conformément à l’article L. 311-6 du code des procédures civiles d’exécution,

- déterminer les modalités de poursuite de la procédure et orienter en vente forcée les poursuites portant sur le bien saisi sur la mise à prix de 990.000 €

- mentionner le montant de la créance du créancier poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires, au jour du jugement à intervenir pour la somme de 1 028 954,36 € au 31 mai 2022, se décomposant ainsi :

* principal au 05/09/2020, date d’exigibilité anticipée majoré du solde débiteur de 32.179,87 € : 932.176,87 €

* indemnité d’exigibilité 7 % : 65 252,38 €

* solde d’intérêts contractuels au taux de 1,70 % l’an échus aux 31/05/2022 et primes d’assurance : 31 525,11 €

outre intérêts conventionnels de retard au taux de 1,70 % à compter du 01/06/2022 ainsi que les frais y compris ceux exposés pour le présent acte,

- en cas de conversion en vente amiable dire que celle-ci interviendra dans les conditions de l’article R. 322-15 du code des procédures civiles d’exécution et que le prix de vente amiable sera compris entre 2.700.000 € et 3 millions d’euros correspondant aux conditions économiques du marché,

- en cas de vente forcée fixer la date d’audience d’adjudication de telle sorte que puisse être respecté l’article R. 322-26 du code des procédures civiles d’exécution,

- déterminer les modalités de visite de l’immeuble,

- voir taxer les frais et droits en frais privilégiés de vente.

[*]

Conformément à ses conclusions notifiées par RPVA le 19 septembre 2024, la société MG PROPERTY a sollicité du juge qu’il :

Avec jugement avant dire droit

[*]

- Autoriser la communication des pièces qui démontrent l’accord entre Maître Y. et Maître X. sur la reprise du prêt

- Opérer un contrôle de conventionnalité sur la clause déchéance du terme qui est abusive donc contraire soit au droit de l’union européenne auquel répugne le déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat d’adhésion

soit à l’article premier du premier protocole additionnel à la CEDH

Vu les articles L. 322-2 et L. 142-1 du code des procédures civiles d’exécution

- Mettre à néant le commandement de saisie et par conséquent tous les actes postérieurs

Subsidiairement

- Mettre à néant le procès-verbal descriptif et par conséquence tous les actes subséquents.

- Déclarer que le contrat n’a pas été exécuté de bonne foi

- En tout état de cause autoriser la vente amiable du bien pour un prix ne pouvant être inférieur à 5 millions d’euros au visa de l’article 322-15 du code des procédures civiles d’exécution

- En tout état de cause surseoir à statuer dans l’attente de la QPC et de l’action publique et autoriser le défendeur à communiquer les échanges de correspondance entre Maître X. et Maître Y.

- Condamner le Crédit Foncier de France à indemniser Mme Z. du préjudice à sa vie privée et au droit de se sentir en sécurité vu la prise de connaissance de sa condition de femme seule domiciliée dans un lieu exposé aux envies prédatrices qui a été violé et scruté par six hommes et placé, dans sa description détaillée, à disposition de tout amateur.

Préjudice estimé en 300.000 €.

- Condamner le Crédit Foncier de France à lui payer la somme de 3600 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers frais et dépens.

[*]

Le trésor public de [Localité 10] n’a pas conclu.

À l’issue de l’audience, par jugement en date du 10 janvier 2025, le juge de l’exécution du tribunal de céans a :

- ORDONNE la réouverture des débats afin de permettre à la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE de verser aux débats la copie exécutoire sur laquelle il se fonde pour diligenter les poursuites ;

- ORDONNE le renvoi de l’affaire à l’audience 21 mars 2025 à 9h00 qui se tiendra devant le juge de l’exécution de Draguignan, au palais de justice de la même ville et dit que le présent jugement vaut convocation pour les parties ;

- SURSIS à statuer sur l’ensemble des demandes ;

- RESERVE le sort des dépens.

[*]

À l’audience prévue, le 21 mars 2025, l’examen de l’affaire a été retenu, en la présence du conseil du créancier poursuivant, lequel s’en est rapporté à ses écritures susvisées et de celui de la société MG PROPERTY, lequel a été entendu en sa plaidoirie.

À l’issue de l’audience, l’affaire a été mise en délibéré à ce jour, les parties ayant été simplement autorisées à transmettre leurs dossiers en cours de délibéré, une semaine avant la date de délibéré annoncée.

En application de l’article 455 du code de procédure civile, il sera renvoyé aux écritures respectives de chacune des parties pour un plus ample exposé des prétentions et moyens soutenus.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

En application de l’article R. 322-15 du code des procédures civiles d’exécution :

« A l'audience d'orientation, le juge de l'exécution, après avoir entendu les parties présentes ou représentées, vérifie que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 sont réunies, statue sur les éventuelles contestations et demandes incidentes et détermine les modalités de poursuite de la procédure, en autorisant la vente amiable à la demande du débiteur ou en ordonnant la vente forcée.

Lorsqu'il autorise la vente amiable, le juge s'assure qu'elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur ».

Les articles L. 311-2, L311-4 et L311-6 du même code disposent :

« Tout créancier muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut procéder à une saisie immobilière dans les conditions fixées par le présent livre et par les dispositions qui ne lui sont pas contraires du livre Ier ».

« Lorsque la poursuite est engagée en vertu d'une décision de justice exécutoire par provision, la vente forcée ne peut intervenir qu'après une décision définitive passée en force de chose jugée.

Toutefois, pendant le délai de l'opposition, aucune poursuite ne peut être engagée en vertu d'une décision rendue par défaut ».

« Sauf dispositions législatives particulières, la saisie immobilière peut porter sur tous les droits réels afférents aux immeubles, y compris leurs accessoires réputés immeubles, susceptibles de faire l'objet d'une cession ».

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A titre liminaire, la société MG PROPERTY demande au juge d’« autoriser la communication des pièces qui démontrent l’accord entre Maître Y. et Maître X. sur la reprise du prêt ».

En application de l’article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès sa prétention.

Il n’appartient donc pas au juge d’autoriser une partie à produire les éléments de preuve qu’elle estime nécessaire au succès sa prétention.

Il lui appartient simplement d’en apprécier la portée et, le cas échéant, la légalité de leur production.

Par ailleurs, il n’entre pas dans les pouvoirs du présent juge de l’exécution de lever la confidentialité qui peut couvrir les échanges épistolaires entre avocats.

Il n’y a donc pas lieu de répondre favorablement à cette demande formulée à titre liminaire.

---

À titre principal ensuite, la société MG PROPERTY demande de « mettre à néant le commandement de saisie et par voie de conséquence tous les actes postérieurs » pour différents motifs, tenant à l’absence de titre exécutoire permettant la mise en œuvre d’une mesure d’exécution, à l’absence de respect de la clause de conciliation préalable et au caractère abusif de la clause de déchéance du terme contractuellement prévue.

S’agissant du fondement de la saisie, après réouverture des débats, au soutien de la procédure de saisie immobilière qu’il a diligentée, le créancier poursuivant produit l’acte dressé le 3 mars 2011 par Maître A., notaire à [Localité 6], revêtu de la formule exécutoire, contenant prêt par la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE à la société MG PROPERTY d’un montant de 900.000 euros, d’une durée initiale de 216 mois au taux fixe de 3,65 % l’an pendant une durée de 48 mois et à taux variable révisable tous les 12 mois pendant 168 mois.

Par conséquent, l’acte désormais soumis à l’appréciation du juge constituant un titre exécutoire conforme aux dispositions de l’article L. 111-3 4° du code des procédures civiles d’exécution, le commandement n’encourt aucune nullité pour défaut de titre exécutoire.

Par ailleurs, si le commandement indique, en sa première page, qu’il a été délivré « en vertu d’un acte notarié dûment en forme exécutoire reçu le 03/03/2011 par Maître B., notaire à [Localité 16] contenant prêt par le CRÉDIT FONCIER d’un montant de 900.000 € à la société MG PROPERTY », l’erreur affectant ainsi le nom et le lieu d’exercice du notaire constitue un vice de forme, lequel ne peut justifier la nullité de l’acte qu’elle affecte, que s’il est démontré, par celui qui l’invoque, l’existence d’un grief en résultant, conformément aux dispositions de l’article 114 du code de procédure civile.

Or, en l’espèce, la société MG PROPERTY mentionne simplement qu’« il n’existe pas de Maître B., notaire à [Localité 16] » mais ne démontre, ni même allègue, l’existence d’un quelconque préjudice résultant de l’erreur susvisée, étant précisé qu’elle a manifestement été en mesure de la rectifier en élevant, dès ses premières écritures, des contestations à l’encontre de l’acte exécutoire désormais versé aux débats et qu’il n’est pas démontrée qu’elle est par ailleurs débitrice de la société poursuivante en exécution d’un autre prêt que celui constaté par l’acte notarié susvisé.

La nullité du commandement n’a donc pas à être prononcée sur ce fondement.

S’agissant de la contestation relative à la nécessité de procéder à une phase de tentative de conciliation, l’acte contient effectivement une clause, en page 14, selon laquelle « en cas de litige, les parties conviennent, préalablement à toute instance judiciaire, de soumettre leur différend à un conciliateur désigné qui sera missionné par le président de la chambre des notaires. Le président de la chambre pourra être saisi sans forme ni frais ».

Cependant, ainsi que le souligne la société poursuivante, en l’état de la jurisprudence de la Cour de cassation, constante depuis 2017 (Civ. 2e, 22 juin 2017, n° 16-11.975), non remise en cause à ce jour et applicable sans distinction temporelle, il est acquis qu’une clause imposant ou permettant une médiation préalablement à la présentation d'une demande en justice relative aux droits et obligations contractuels des parties ne peut, en l'absence de stipulation expresse en ce sens, faire obstacle à l'accomplissement d'une mesure d'exécution forcée.

Par conséquent, en l’espèce, dès lors qu’aucune stipulation expresse figurant à l’acte n’impose le recours à une conciliation avant la mise en œuvre d’une mesure d’exécution, le moyen développé à ce titre par la société MG PROPERTY ne peut entraîner la remise en cause de la présente procédure de saisie immobilière.

Ensuite, la société MG PROPERTY remet en cause la déchéance anticipée du terme du prêt prononcée par la banque en application des clauses contractuelles, considérant qu’il s’agit d’une clause pouvant être considérée comme abusive en application de l’article 1171 du Code civil, lequel dispose que dans un contrat d’adhésion, toute clause non négociable, déterminée à l’avance par l’une des parties, qui crée un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat est réputée non écrite », ainsi qu’en application du « droit européen ».

Pour autant, d’une part, ainsi que le souligne la société poursuivante, les dispositions susvisées de l’article 1171 du Code civil résultent de l’ordonnance du 10 février 2016 et de la loi du 20 avril 2018 et ne trouvent donc pas à s’appliquer au cas d’espèce, s’agissant d’un contrat conclu avant les dates d’entrée en vigueur de celles-ci, respectivement les 1er octobres 2016 et 1er octobre 2018.

D’autre part, il sera rappelé qu’une société civile immobilière agit en qualité de professionnel lorsqu'elle souscrit des prêts immobiliers pour financer l'acquisition d'immeubles conformément à son objet, de sorte qu'elle ne peut invoquer à son bénéfice le caractère abusif de certaines clauses des contrats de prêt (Cass. 1re civ., 28 juin 2023, n° 22-13.969). Or c'est le cas en l’espèce de la SCI MG PROPERTY, dont l'objet social est la « gestion de patrimoine immobilier ».

Elle ne peut donc invoquer la réglementation des clauses abusives entre consommateur et professionnel.

Enfin, la société MG PROPERTY remet également en cause la régularité de la déchéance du terme du prêt au regard de l’absence de bonne foi qu’elle reproche à la banque.

Il est cependant justifié que la banque a mis la société en demeure de régulariser sa situation d’impayés sous un mois, selon lettre en date du 22 juillet 2020, réceptionnée le 28 juillet 2020 et qu’elle a prononcé la déchéance anticipée du terme du prêt le 5 septembre 2020, en informant la société de sa décision par courrier du 28 septembre 2020, réceptionné le 1er octobre 2020.

La société MG PROPERTY ne conteste pas sa situation d’impayé à cette date, étant précisé que les causes de celle-ci qu’elle invoque (malfaçons produites pendant la restauration du bien empêchant la location de celui-ci, saisie pénale du bien dans le cadre d’une procédure pénale ouverte contre son gérant en Italie) ne peuvent être imputées à la banque.

Pour le reste, la société MG PROPERTY ne peut faire état du comportement adopté par la banque postérieurement à la déchéance du terme, un tel comportement étant impropre à remettre en cause l’exigibilité anticipée déjà prononcée dès 2020.

Enfin, il n’est pas justifié que la société débitrice a tenté de payer les sommes indiquées dans le commandement dans les huit jours de la délivrance de celui-ci, ni même au-delà de cette date, ou que ses tentatives n’ont échoué que par un comportement fautif de la banque poursuivante.

Il s’ensuit qu’aucun motif ne justifie que le commandement soit annulé, tandis qu’en l’absence de paiement des sommes réclamées, le maintien de la saisie se justifie.

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Subsidiairement, la société MG PROPERTY demande au juge de l’exécution de « mettre à néant le procès-verbal descriptif et par conséquence tous les actes subséquents », considérant que l’huissier de justice l’ayant réalisé n’a pas respecté les prescriptions des articles L. 322-2 et L. 142-1 du code des procédures civiles d’exécution en ne sollicitant pas l’autorisation du juge pour pénétrer dans les lieux, alors même qu’ils étaient occupés par Madame Z.

Selon l’article L.322-2 du code des procédures civiles d’exécution :

« L'huissier de justice instrumentaire peut pénétrer dans les lieux et, le cas échéant, faire procéder à l'ouverture des portes et des meubles, afin de décrire l'immeuble saisi.

En l'absence de l'occupant du local ou si ce dernier en refuse l'accès, l'huissier de justice procède comme il est dit aux articles L. 142-1 et L. 142-2. Lorsque les lieux sont occupés par un tiers en vertu d'un droit opposable au débiteur, l'huissier de justice ne peut y pénétrer que sur autorisation préalable du juge de l'exécution, à défaut d'accord de l'occupant. »

Selon l’article L.142-1 du code des procédures civiles d’exécution :

« En l'absence de l'occupant du local ou si ce dernier en refuse l'accès, l'huissier de justice chargé de l'exécution ne peut y pénétrer qu'en présence du maire de la commune, d'un conseiller municipal ou d'un fonctionnaire municipal délégué par le maire à cette fin, d'une autorité de police ou de gendarmerie, requis pour assister au déroulement des opérations ou, à défaut, de deux témoins majeurs qui ne sont au service ni du créancier ni de l'huissier de justice chargé de l'exécution.

Dans les mêmes conditions, il peut être procédé à l'ouverture des meubles. »

En l’espèce, il résulte des mentions figurant au commandement délivré par Maître D., huissier de justice à [Localité 17], le 10 novembre 2022, que l’acte a été remis à Madame Z.., « mandataire général de la société requise et directrice des affaires juridiques » et que celle-ci a déclaré « j’occupe la villa en résidence principale à titre gratuit mise à disposition par mon frère Monsieur Z. ».

Il résulte cependant du procès-verbal descriptif dressé le 18 janvier 2023 par Maître C., huissier de justice à [Localité 8] que « le bien immobilier est actuellement occupé et meublé, mais semble être destiné à une occupation secondaire. Il n’existe pas de contrat de location connu pour ce bien à la date de mes opérations ».

Il sera tout d’abord rappelé que, conformément à l’article 1371 du code civil, « l’acte authentique fait foi jusqu’à inscription de faux de ce que l’officier public dit avoir personnellement accompli ou constaté.

En cas d’inscription de faux, le juge peut suspendre l’exécution de l’acte ».

Il n’entre pas dans les pouvoirs du présent juge de l’exécution de remettre en cause les constatations d’un huissier de justice.

La SCI MG PROPERTY ne justifie par ailleurs pas qu’elle a engagé une procédure d’inscription de faux conformément aux dispositions des articles 303 et suivants du code de procédure civiles.

Par ailleurs, dans la mesure où il est mentionné au procès-verbal que personne n’occupait les lieux au moment de l’établissement du procès-verbal descriptif, tandis qu’aucun droit opposable à la société n’était justifié à l’huissier de justice et qu’il n’y a pas lieu de considérer Madame Z. comme un tiers à la société débitrice, au regard de ce qui précède, il n’y a pas lieu de prononcer la nullité dudit procès-verbal, dès lors que l’huissier atteste bien qu’il est entré dans les lieux en présence, notamment, de « Monsieur [Z] [B] et Monsieur [P] [U], en qualité de témoins majeurs », dont il n’est pas justifié qu’ils étaient au service du créancier ou de l’huissier de justice.

Il n’y a donc pas lieu de répondre favorablement aux contestations élevées à ce titre par la société défenderesse

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Les contestations soulevées par la société défenderesse ayant été rejetées et la société poursuivante justifiant effectivement qu’elle dispose à son encontre d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible à hauteur de la somme totale de 1 028 954,36 € selon décompte qu’elle produit, provisoirement arrêté au 31 mai 2022, lequel ne fait l’objet d’aucune contestation particulière en défense, il convient de considérer que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 du code des procédures civiles d’exécution sont donc réunies.

Ainsi, et conformément à l’article R. 322-18 du code des procédures civiles d’exécution qui dispose que le jugement d’orientation mentionne le montant retenu pour la créance du poursuivant en principal, frais, intérêts et autres accessoires, il convient de retenir en l’espèce la créance de la société poursuivante à la somme susvisée qui sera reprise dans le dispositif du présent jugement.

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La société MG PROPERTY sollicite, en tout état de cause, l’autorisation de procéder à la vente amiable du bien saisi et qu’il soit sursis à statuer « dans l’attente de la QPC et de l’action publique et autoriser le défendeur à communiquer les échanges de correspondances entre Maître X. et Maître Y. ».

Il n’y a pas lieu de surseoir à statuer puisque, d’une part, il a déjà été statué sur les questions prioritaires de constitutionnalité soulevées par la défenderesse, par jugements distincts et, d’autre part, la demande d’autorisation de production de pièces a été précédemment rejetée.

Au soutien de sa demande tendant à être autorisée à vendre le bien à l’amiable, la société MG PROPERTY produit un mandat exclusif de vente pour un prix de 6 900.000 €, rémunération du mandataire comprise, qu’elle a signé le 8 novembre 2023.

Au vu des diligences ainsi effectuées et de l’absence d’opposition manifestée par le créancier poursuivant a une telle orientation de la procédure, il sera fait droit à la demande et la société débitrice sera autorisée à vendre le bien à l’amiable.

Selon les articles R. 322-15 et R. 322-21 du code des procédures civiles d’exécution, le juge de l'exécution qui autorise la vente amiable fixe le montant du prix en deçà duquel l'immeuble ne peut être vendu eu égard aux conditions économiques du marché ainsi que, le cas échéant, les conditions particulières de la vente, taxe les frais de poursuite à la demande du créancier poursuivant et fixe la date de l'audience à laquelle l'affaire sera rappelée dans un délai qui ne peut excéder quatre mois.

Malgré le mandat de vente pour un prix de 6.900.000 €, dans la mesure où, d’une part, le bien a été acquis en 2011 pour un prix de 1.450.000 €, où il résulte des propres écritures de la société saisie que « plusieurs malfaçons produites pendant la restauration empêchent l’utilisation du bien », à l’origine d’une procédure à ce titre en cours auprès du tribunal judiciaire et où la société poursuivante produit des estimations de valeur de biens immobiliers géographiquement comparables inférieures à 3 millions d’euros, il apparaît légitime, au regard des critères légaux ci-dessus rappelés, de fixer le prix en deçà duquel l’immeuble ne pourra être vendu à la somme de 2.700.000 €.

Au vu de l’état de frais et des justificatifs produits, il convient de taxer provisoirement les frais de poursuite à la somme de 5668,24 €

et de rappeler que ces frais devront être versés par l’acquéreur, en sus du prix de vente.

Également, les émoluments de l’avocat poursuivant, calculés conformément au tarif en vigueur, seront payables par l’acquéreur, en sus du prix de vente, comme les frais de poursuite.

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La société MG PROPERTY sollicite également du juge que la société poursuivante soit condamnée « à indemniser Mme Z. du préjudice à sa vie privée et au droit de se sentir en sécurité vu la prise de connaissance de sa condition de femme seule domiciliée dans un lieu exposé aux envies prédatrices qui a été violé et scruté par 6 hommes et placé, dans sa description détaillée, à disposition de tout amateur » à hauteur de 300.000 €.

La société MG PROPERTY ne justifie toutefois d’aucun intérêt à agir pour le compte de [H] X., nul ne plaidant par procureur.

Par conséquent, une telle demande indemnitaire formulée pour le compte de [H] X. sera déclarée irrecevable.

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Ayant succombé en ses prétentions, la société MG PROPERTY sera déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles.

Les dépens de la présente instance seront employés en frais privilégiés de vente.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le juge de l'exécution immobilier du tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN statuant en audience publique, en matière de saisie immobilière, par décision contradictoire et en premier ressort;

Déclare la société S.C.I. MG PROPERTY irrecevable en sa demande tendant à voir condamner la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE à indemniser Mme Z. à hauteur de 300.000 € ;

Déboute la société S.C.I. MG PROPERTY de toutes ses autres demandes ;

Dit que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 du code des procédures civiles d’exécution sont réunies ;

Dit que la société CRÉDIT FONCIER DE FRANCE poursuit la saisie immobilière au préjudice de la S.C.I. MG PROPERTY pour une créance liquide et exigible, d’un montant de 1 028 954,36 euros, selon décompte provisoirement arrêté au 31 mai 2022 et sans préjudice des intérêts postérieurs jusqu’à parfait paiement ;

Autorise la vente amiable sur autorisation de justice des biens et droits immobiliers sur la commune de [Localité 18] (VAR), [Adresse 15], sur la parcelle cadastrée section AF n°[Cadastre 5] pour une contenance de 18a 45ca, le lot n°12 du [Adresse 7][Adresse 12]” consistant une villa élevée d’un étage sur rez-de-chaussée avec garage et jardin comprenant :

- au rez-de-chaussée, une cuisine ouverte sur séjour/salle à manger, WC, 4 chambres dont 3 avec salles d’eau, une salle de bain, un dressing et WC attenant, terrasse extérieure,

- au rez-de-jardin, une première partie avec piscine, hammam, WC, douche, terrasse, cuisine d’été, salle de sport et buanderie, et une deuxième partie avec un appartement indépendant ;

Rappelle que le débiteur saisi doit accomplir les diligences nécessaires à la conclusion de la vente amiable et qu’il doit rendre compte, au créancier poursuivant sur sa demande, des démarches accomplies à cette fin ;

Fixe à la somme de 2.700.000 € le prix en deçà duquel l’immeuble ne peut être vendu eu égard aux conditions économiques du marché ;

Rappelle qu’en application de l’article R.322-24 du code des procédures civiles d’exécution, le notaire chargé d'établir l'acte de vente pourra obtenir, contre récépissé, la remise par le créancier poursuivant des documents recueillis pour l'élaboration du cahier des conditions de vente ;

Rappelle que la vente devra avoir lieu aux conditions fixées par le présent jugement et par celles non contraires fixées par le cahier des conditions de vente et que le prix devra être distribué à l’initiative du créancier le plus diligent ;

Invite le notaire qui recevra l’acte de vente à adresser au juge de l'exécution immobilier la copie de l’acte de vente reçu ;

Taxe les frais préalables à la somme de 5668,24 € T.T.C et dit que ces frais seront versés directement par l’acquéreur en sus du prix de vente ;

Dit que les émoluments de l’avocat poursuivant, calculés conformément au tarif en vigueur, seront également payables par l’acquéreur, en sus du prix de vente, comme les frais de poursuite ;

Dit que le dossier sera rappelé à l’audience du vendredi 5 septembre 2025 à 09 heures 00, et qu’à cette audience, le juge ne pourra accorder un délai supplémentaire de 3 mois que si le demandeur justifie d’un engagement écrit d’acquisition et ce, afin de permettre la conclusion et la rédaction d’un acte authentique de vente ;

Ordonne la mention du présent jugement en marge de la publication du commandement valant saisie immobilière du 10 novembre 2022, publié au Service de la Publicité Foncière et de l’Enregistrement de [Localité 8] le 29 décembre 2022, volume 2022 S numéro 16 ;

Dit qu’il y sera procédé par les soins de Madame ou Monsieur le Directeur du Service de la Publicité Foncière et de l’Enregistrement au vu d’une expédition du présent jugement ;

Ordonne la mention du présent jugement en marge du cahier des conditions de vente déposé au tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN le 1er mars 2023 ;

Ordonne l’emploi des dépens en frais privilégiés de vente, dont distraction au profit de Maître Colette VANDERSTICHEL sur ses offres et affirmations de droit.

Ainsi jugé et prononcé au tribunal judiciaire de DRAGUIGNAN le 16 mai 2025.

LE GREFFIER                                            LE PRÉSIDENT