CA PARIS (pôle 5 ch. 2), 23 octobre 2009
CERCLAB - DOCUMENT N° 2474
CA PARIS (pôle 5 ch. 2), 23 octobre 2009 : RG n° 08/08956 ; arrêt n° 265
Publication : Jurica
Extrait : « Considérant s'agissant de la société Y., qu'il est difficilement contestable que c'est elle qui contractant avec la société Webstore, a remis à celle-ci les documents litigieux dès lors que le contrat fait expressément mention des documents remis par les hôteliers dans les termes suivants : « les données fournies par l'Hôtel restent la propriété de l'Hôtel. Celui-ci s'engage, d'une part à respecter les éventuels droits de propriété intellectuelle relatifs aux données fournies à WEBSTORE pour la réalisation des prestations et d'autre part, avoir obtenu des titulaires de droits, les autorisation, concession ou cessions nécessaires ».
Considérant que cette clause est dénuée d'ambiguïté et correspond à l'implication de l'appelante dans le choix des informations écrites et photographiques mises en ligne. Que la précision de ses termes exclut que la responsabilité de la société Webstore puisse être recherchée sur le fondement d'un manquement à son obligation de conseil ; que le contrat définit en effet clairement les obligations des parties et les précautions qu'elles s'engageaient à prendre. Considérant enfin que si au regard des titulaires de droits, il appartenait à l'éditrice du site de s'assurer par elle même du caractère non contrefaisant des documents qu'elle mettait en ligne, il demeure que dans ses rapports avec son contractant, il lui était loisible de mettre à la charge de ce dernier par une clause précise l'obligation de vérifier que les documents remis étaient libres de droits, sans que cette clause puisse revêtir un caractère abusif. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 CHAMBRE 2
ARRÊT DU 23 OCTOBRE 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 08/08956. Arrêt N) 265. Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 avril 2008 -Tribunal de Commerce de PARIS - RG n° 2007024874.
APPELANTE :
SARL Y.
agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant, ayant son siège [adresse], représentée par la SCP BOLLING - DURAND - LALLEMENT, avoués à la Cour ayant pour avocat Maître Carine GODET, avocat au barreau de MILLAU
INTIMÉS :
Monsieur X.
demeurant [adresse], représenté par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la Cour, assisté de Maître Matthieu BOISSAVY, avocat au barreau de PARIS, toque : R005, plaidant pour la société d'avocats LARTIGUE TOURNOIS
SARL PARIS-BISTRO ÉDITIONS
prise en la personne de son gérant, ayant son siège [adresse], représentée par la SCP FISSELIER - CHILOUX - BOULAY, avoués à la Cour, assisté de Maître Matthieu BOISSAVY, avocat au barreau de PARIS, toque : R005, plaidant pour la société d'avocats LARTIGUE TOURNOIS [minute Jurica page 2]
SARLWEBSTORE prise en la personne de son gérant
ayant son siège [adresse], représentée par la SCP MENARD - SCELLE-MILLET, avoués à la Cour, assistée de Maître Thierry STUCKER, avocat au barreau de PARIS, toque P353, substituant Maître Pierre FRANCK, avocat au barreau de NICE
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 18 septembre 2009, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Alain GIRARDET, président, Madame Sophie DARBOIS, conseillère, Madame Dominique SAINT-SCHROEDER, conseillère, qui en ont délibéré
GREFFIER : Lors des débats : Mademoiselle Christelle BLAQUIERES
ARRÊT : - Contradictoire, rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, signé par Nous, Sophie DARBOIS, Conseiller le plus ancien ayant délibéré, en l'empêchement de Monsieur Alain GIRARDET, président et par Nous Christelle BLAQUIÈRES, greffier à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
La société à responsabilité limitée Y. a pour activité la tenue d'un hôtel dénommé [Y.].
Elle a fait paraître un publi-reportage sur le site Internet www.aveyron.com, édité par la société PARIS-BISTRO ÉDITIONS. Le reportage a été réalisé par Monsieur X.
Ayant constaté que le reportage, photographies incluses, apparaissait sur le site www.federal-hotel.com créé et exploité par la société à responsabilité limitée WEBSTORE, la société PARIS-BISTRO ÉDITIONS et Monsieur X. l'ont assignée en contrefaçon.
La société WEBSTORE a alors assigné la société Y. en garantie.
Par jugement contradictoire rendu le 10 avril 2008, la quinzième chambre du tribunal de commerce [minute Jurica page 3] de Paris a :
- dit que la société WEBSTORE s'est rendue coupable de contrefaçon du publi-reportage sur l'hôtel Y., dont l'auteur est Monsieur X. et sur lequel la société PARIS-BISTRO ÉDITIONS détient les droits patrimoniaux d'auteur,
- ordonné à la société WEBSTORE de supprimer ce publi-reportage du site www.federal-hotel.com qu'elle exploite, et ce sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de 15 jours après la signification du jugement,
- condamné la société WEBSTORE à payer à Monsieur X. la somme de 2 000 euros pour atteinte à son droit moral,
- condamné la société WEBSTORE à payer à la société PARIS-BISTRO ÉDITIONS la somme de 1 600 euros pour contrefaçon,
- condamné la société Y. à garantir la société WEBSTORE de toutes les condamnations prononcées à son encontre,
- ordonné l'exécution provisoire,
- condamné la société WEBSTORE aux dépens,
- condamné la société Y. à payer à la société PARIS-BISTRO ÉDITIONS, à Monsieur X. et à la société WEBSTORE la somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions signifiées le 24 mars 2009, la société Y., appelante, prie la cour, pour l'essentiel, de :
- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- déclarer la société PARIS-BISTRO ÉDITIONS et Monsieur X. irrecevables,
- dire sans objet l'action en garantie de la société WEBSTORE et l'en débouter,
- condamner toute partie succombante aux entiers dépens ainsi qu'à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société WEBSTORE, intimée, demande essentiellement à la cour, dans ses dernières conclusions signifiées le 28 avril 2009, de :
- lui donner acte de ce qu'elle a supprimé toutes données concernant l'hôtel Y. de son site Internet depuis le 24 janvier 2008,
- déclarer la société PARIS-BISTRO ÉDITIONS et Monsieur X. irrecevables,
- condamner, subsidiairement, la société Y. à la garantir de toutes condamnations à son encontre,
- [minute Jurica page 4] condamner tout succombant en tous les dépens ainsi qu'à lui verser la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du Code de procédure civile.
Dans leurs dernières conclusions signifiées le 10 juin 2009, la société PARIS-BISTRO ÉDITIONS et
Monsieur X., intimés, sollicitent la cour, pour l'essentiel, de :
- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,
- condamner solidairement la société WEBSTORE et la société Y. à verser à la société PARIS-BISTRO ÉDITIONS la somme de 10.000 euros au titre de la contrefaçon,
- condamner solidairement les sociétés WEBSTORE et Y. à verser à Monsieur X. la somme de 7 500 euros au titre de l'atteinte à son droit moral,
- constater que les sociétés WEBSTORE et Y. ont continué la diffusion de quatre photographies de Monsieur X.,
- condamner la société WEBSTORE et la société Y. à verser à la société PARIS-BISTRO ÉDITIONS la somme de 20 000 euros au titre de la contrefaçon,
- condamner la société WEBSTORE et la société Y. à verser à Monsieur X. la somme de 15.000 euros au titre de la contrefaçon,
- prononcer des mesures de publication,
- condamner les sociétés WEBSTORE et Y. aux entiers dépens et, solidairement, à leur verser à chacun la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
SUR CE,
Considérant qu'au soutien de son appel, la société Y. fait valoir en substance que tant la société Paris-Bistro Éditions que Monsieur X. sont irrecevables à agir pour défaut d'intérêt concernant la première et défaut de qualité concernant le second, et subsidiairement que la preuve n'est nullement rapportée qu'elle aurait remis à la société Webstore les photos et le texte repris sur le site Internet « Federal Hotel » mis en ligne par la société Webstore ; qu'elle ajoute que la société Webstore a manqué à son obligation de conseil en n'appelant pas son attention sur la nécessité de vérifier que ces photographies étaient libres de droits et que la clause contractuelle d'exonération de la responsabilité de la société Webstore, figurant à l'article 11, est une clause abusive qui ne saurait recevoir application en raison de la violation de l'obligation de conseils.
Sur les fins de non-recevoir :
Considérant que l'appelante expose que le bon de commande dont se prévaut la société Paris-Bistro Éditions pour soutenir qu'elle serait titulaire des droits patrimoniaux a été signé non pas par celle-ci mais par une société Pragmatix éditrice du site Aveyron.com aux droits de laquelle il n'est nullement justifié que la société Paris-Bistro Éditions puisse venir.
Mais considérant qu'il convient de rappeler que par bon de commande du 31 octobre 2003, l'Hôtel Restaurant Y. a passé un ordre pour une insertion publicitaire sur le site Aveyron.com ; que si ce contrat de commande a été conclu avec une société Pragmatix, les conditions générales de vente annexées au contrat précisent en bas de page, qu' Aveyron.com est une publication de Paris-Bistro [minute Jurica page 5] Éditions ;
Qu'en outre, il est constant que la société Paris-Bistro Éditions exploite depuis de nombreuses années ce publi-reportage sur son site de façon non équivoque ; qu'en l'absence de toute revendication de la part de la personne physique ayant réalisé les clichés et textes, cette possession paisible confortée par les conditions générales énoncées au bon de commande, fait présumer à l'égard de la société Webstore, notamment, poursuivie en contrefaçon, que la société Paris-Bistro Éditions est titulaire des droit patrimoniaux qu'elle invoque à l'appui de son action.
Qu'elle a donc qualité et au surplus intérêt à agir en défense de ses droits.
Considérant que Monsieur X. qui agit à ses côtés, affirme être l'auteur du publi -reportage consacré à l'hôtel Y. et avoir cédé ses droits patrimoniaux à la société Paris-Bistro Éditions.
Considérant que la société Y. n'est pas fondée à lui dénier cette qualité dès lors que la société Paris -Bistro Éditions ne la lui conteste pas et qu'il agit aux côtés de cette dernière.
Sur les actes de contrefaçon :
Considérant qu'il n'est pas contesté que les photographies et textes figurant sur le site litigieux reproduisent les photos et textes originaux édités par le site Aveyron.com et en constituent dès lors la contrefaçon.
Sur l'appel en garantie de la société Webstore à l'encontre de la société Y. :
Considérant que la société Webstore précise qu'elle n'a fait qu'utiliser les documents que lui avait remis la société Y., et qu'elle avait rappelé à cette dernière qu'elle devait respecter les éventuels droits de propriété intellectuelle qui pouvaient protéger les documents remis ; qu'elle estime avoir rempli ses obligations, pris toutes les précautions nécessaires et ne pas avoir dès lors engagé sa responsabilité.
Mais considérant que la société Webstore qui a créé le site permanent de réservation hôtelière en ligne sur lequel sont présentés un grand nombre d'hôtels, est une professionnelle des services d'édition numérique et devait s'assurer personnellement, nonobstant les obligations propres des hôteliers avec lesquels elle contractait et qui lui remettaient les documents utiles, que ceux-ci étaient libres de droits avant de les diffuser sur son site.
Que sa responsabilité est dès lors pleinement engagée.
Qu'elle l'est encore pour ne pas s'être assurée que postérieurement au jugement l'ensemble des documents litigieux avaient été retirés du site ; que la société Paris-Bistro Éditions a continué en effet à exploiter 4 photographies sur deux sites : www.federal-hotel.com et www.cuisine-française.com.
Considérant s'agissant de la société Y., qu'il est difficilement contestable que c'est elle qui contractant avec la société Webstore, a remis à celle-ci les documents litigieux dès lors que le contrat fait expressément mention des documents remis par les hôteliers dans les termes suivants :
« les données fournies par l'Hôtel restent la propriété de l'Hôtel. Celui-ci s'engage, d'une part à respecter les éventuels droits de propriété intellectuelle relatifs aux données fournies à WEBSTORE pour la réalisation des prestations et d'autre part, avoir obtenu des titulaires de droits, les autorisation, concession ou cessions nécessaires ».
[minute Jurica page 6] Considérant que cette clause est dénuée d'ambiguïté et correspond à l'implication de l'appelante dans le choix des informations écrites et photographiques mises en ligne.
Que la précision de ses termes exclut que la responsabilité de la société Webstore puisse être recherchée sur le fondement d'un manquement à son obligation de conseil ; que le contrat définit en effet clairement les obligations des parties et les précautions qu'elles s'engageaient à prendre.
Considérant enfin que si au regard des titulaires de droits, il appartenait à l'éditrice du site de s'assurer par elle même du caractère non contrefaisant des documents qu'elle mettait en ligne, il demeure que dans ses rapports avec son contractant, il lui était loisible de mettre à la charge de ce dernier par une clause précise l'obligation de vérifier que les documents remis étaient libres de droits, sans que cette clause puisse revêtir un caractère abusif.
Considérant qu'il suit que la décision sera confirmée, sous la réserve ci-après, en ce qu'elle a condamné la société Y. à garantir la société Webstore par application de l'article 11 précité du contrat.
Sur les mesure réparatrices :
Considérant qu'eu égard au nombre limité des photographies et des textes reproduits, les somme allouées par les premiers juges pour réparer le préjudice des intimés seront confirmées pour les actes commis au moment où ils ont statué.
Considérant que postérieurement à la décision entreprise, le maintien en ligne sur le site de Webstore de 4 des photographies litigieuses engage pleinement la seule responsabilité de cette société.
Que la société Paris-Bistro Éditions et Monsieur X. qui n'ont pas sollicité la liquidation de l'astreinte sont bien fondés à solliciter la réparation du préjudice que leur cause la poursuite des actes contrefaisants, lequel sera réparé par la condamnation de la société Webstore à verser à la société Paris-Bistro Éditions la somme de 1.000 euros au titre de l'atteinte à ses droits patrimoniaux et à Monsieur X. celle de 500 euros en réparation de l'atteinte à son droit moral.
Sur l'article 700 du Code de procédure civile
Considérant qu'il n'est pas inéquitable de condamner la société Y. à verser à la société Paris-Bistro Éditions et X. la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Déclare la société Paris-Bistro Éditions et X. recevables à agir en contrefaçon des droits d'auteurs,
Confirme la décision entreprise en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la société Webstore, au titre des actes de contrefaçon commis postérieurement à la décision déférée, à verser à la société Paris-Bistro Éditions la somme de 1.000 euros et à X. celle de 500 euros.
Condamne la société Y. à verser à la société Paris-Bistro Éditions et X. ensemble la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens qui seront recouvrés par la SCP Fisselier Chiloux Boulay, avoués, dans les [minute Jurica page 7] formes de l'article 699 du même Code.
LA GREFFIÈRE / LE PRÉSIDENT EMPÊCHÉ
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