CA PAPEETE (ch. civ.), 18 décembre 2008
CERCLAB - DOCUMENT N° 2681
CA PAPEETE (ch. civ.), 18 décembre 2008 : RG n° 347/OR/08 ; arrêt n° 699
Publication : Jurica ; Juris-Data n° 2008-374352
Extrait : « Attendu qu'en l'espèce le montant du crédit bail est supérieur à 140.000 Francs Français soit 2.545.455 FCFP ; qu'il y a donc lieu de constater que ledit contrat est exclu de la loi du 10 janvier 1978 et n'était par conséquent pas soumis à offre préalable comme l'a à juste titre relevé le premier juge ; […]
Attendu que les appelants soutiennent par ailleurs que la clause les obligeant à verser une indemnité égale au montant total hors taxes de tous les termes du loyer non encore venus à échéance à la date de la résiliation, majoré du montant de l'option d'achat finale déterminée aux conditions particulières et des taxes exigibles, est abusive pour être supérieure à la valeur d'achat du véhicule neuf ;
Mais attendu que ladite clause précise également que le locataire dispose d'un délai de quinze jours à compter de la résiliation du contrat pour présenter un acquéreur faisant une offre écrite d'achat et que le bailleur a l'obligation de rembourser le locataire du produit de la revente hors taxe du bien ; qu'ainsi cette clause, qui n'apparaît pas contraire à la réglementation en matière de protection des consommateurs, ne peut être considérée comme abusive ;
Attendu qu'il convient en conséquence de faire application de la convention liant les parties et qu'il n'y a pas lieu à réduction de l'indemnité prévue contractuellement ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
COUR D’APPEL DE PAPEETE
CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 18 DÉCEMBRE 2008
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 347/0R/08. Arrêt n° 699.
Madame Isabelle PINET-URIOT, conseillère, à la Cour d'Appel de Papeete, assistée de Mme Maeva SUHAS-TEVERO, greffier
En audience publique tenue au Palais de Justice ;
A prononcé l'arrêt dont la teneur suit :
Entre :
- Monsieur X.
né le [date] à [ville], de nationalité française, demeurant […]
- Madame Y. épouse X.
née le [date] à [ville], de nationalité française, demeurant […]
Appelants par requête en date du 15 juillet 2008, déposée et enregistrée au greffe de la Cour d'Appel le 17 du même mois, sous le numéro de rôle 347/OR/08, ensuite d'une ordonnance de référé n° 08/00194 du tribunal civil de première instance de Papeete rendue le 30 juin 2008 ; Représentés par Maître Thierry JACQUET, avocat au barreau de Papeete ; d'une part ;
Et :
La Société OCEOR LEASE TAHITI (OLT)
société anonyme dont le siège social est situé [adresse] ; Intimée ; Représentée par Maître Yves PIRIOU, avocat au barreau de Papeete ; d'autre part ;
[minute page 2] Après que la cause ait été débattue et plaidée en audience publique du 6 novembre 2008, devant M. THIBAULT-LAURENT, Président de chambre, Mmes LASSUS-IGNACIO, et PINET-URIOT, conseillères assistés de Mme UHAS-TEVERO, greffier, le prononcé de l'arrêt ayant été renvoyé à la date de ce jour ; Après en avoir délibéré conformément à la loi ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
ARRÊT :
LES FAITS ET LA PROCÉDURE :
Par acte sous seing privé du 26 juillet 2005 les époux X. ont conclu avec la Société CREDIPAC un contrat de location avec option d'achat portant sur un véhicule MITSUBISHI L200 immatriculé XX d'une valeur de 4.900.010 FCFP.
Les époux X. devaient s'acquitter d'un loyer de base mensuel TTC de 80.868 FCFP du 15 novembre 2005 au 15 octobre 2012.
La résiliation du contrat a été notifiée le 26 mars 2007 du chef de l'interruption du paiement des loyers en janvier 2007.
Par requête enregistrée le 11 avril 2008 la Société OCEOR LEASE TAHITI a fait assigner les époux X. devant le Juge des référés aux fins de voir ordonner à ces derniers de lui restituer le véhicule immatriculé XX sous astreinte de 10.000 FCFP par jour de retard à compter de la signification à intervenir et avec au besoin le concours de la force publique et d'autre part d'obtenir leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 5.177.932 FCFP à titre de provision (et sauf à déduire le montant de l'éventuelle vente du véhicule) et à celle de 150.000 FCFP au titre des frais irrépétibles.
Le juge des référés du Tribunal de Première Instance de Papeete a notamment :
- rejeté la fin de non recevoir présentée par les époux X.,
- leur a enjoint de restituer à la Société OCEOR LEASE TAHITI le véhicule immatriculé XX sous astreinte de 10.000 FCFP par jour de retard à compter de la signification à intervenir et avec au besoin le concours de la force publique,
- les a condamnés solidairement à payer à la Société OCEOR LEASE TAHITI la somme de 5.177.932 FCFP à titre de provision et sauf à déduire le montant de l'éventuelle vente du véhicule ainsi que celle de 110.000 FCFP sur le fondement de l'article 407 du Code de Procédure Civile de la Polynésie Française.
Selon requête enregistrée au greffe de la Cour le 11 juillet 2008 M. X. et Mme Y. épouse X. ont relevé appel de cette décision aux fins de la voir infirmer en toutes ses dispositions.
[minute page 3] Ils demandent à la Cour :
- à titre principal de constater que la Société OCEOR LEASE TAHITI ne justifie d'aucune qualité à agir et en conséquence de déclarer sa demande irrecevable ;
- à titre subsidiaire et au fond de constater que la clause obligeant le locataire à verser une indemnité égale au montant total hors taxes de tous les termes du loyer non encore venus à échéance à la date de la résiliation, majoré du montant de l'option d'achat finale déterminée aux conditions particulières et des taxes exigibles, est abusive et doit être réputée non écrite et en conséquence de débouter l'intimé de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions relatives au versement de cette indemnité,
- à titre infiniment subsidiaire, de réduire le montant de l'indemnité en raison de son caractère manifestement excessif et de leur accorder des délais de paiement en application de l'article 1244-1 du code civil.
Ils font valoir qu'ils ont conclu un contrat avec CREDIPAC et que la Société OCEOR LEASE TAHITI ne justifie pas de sa qualité à agir ;que le coût total du véhicule proposé à la location s'élève à 6.971.463 FCFP soit un prix final supérieur de 42,27 % par rapport à la valeur d'achat proposé par le fournisseur ; que la responsabilité de l'établissement de crédit doit être engagée en raison du choix d'un montage ruineux qui leur a été proposé ; qu'il n'ont pas été informés sur le contenu précis des engagements qu'ils ont souscrits ; que la clause leur imposant de verser les loyers non encore venus à échéance est abusive, le montant de l'indemnité retenue étant « disproportionnellement élevé » ;
En réplique ils ajoutent qu'ils n'ont par ailleurs pas été informés du changement de dénomination sociale ; que le bailleur n'a pas respecté les dispositions de la loi du 10 janvier 1978 notamment en ne leur soumettant pas une offre préalable ; qu'en conséquence il existe une contestation sérieuse quant à la validité du contrat et qu'en tout état de cause le bailleur est déchu de ses droits aux intérêts.
La Société OCEOR LEASE TAHITI demande à la cour de :
- Dire que les Sociétés CREDIPAC POLYNÉSIE et OCEOR LEASE TAHITI sont les mêmes personnes morales,
- Dire que la Société OCEOR LEASE TAHITI a par conséquent qualité à agir contre les époux X.,
- Débouter les époux X. de l'ensemble de leurs fins, moyens et conclusions,
- Confirmer dans toutes ses dispositions la décision déférée,
- Condamner solidairement les époux X. au paiement de la somme de 300.000 FCFP à titre de dommages intérêts pour procédure abusive,
- [minute page 4] Condamner solidairement les époux X. au paiement de la somme de 250.000 FCFP sur le fondement de l'article 407 du Code de Procédure de la Polynésie Française.
Elle expose que la Société CREDIPAC POLYNÉSIE a modifié sa dénomination sociale pour devenir OCEOR LEASE TAHITI, modification ayant fait l'objet d'une inscription au registre du commerce et des sociétés le 3 avril 2006, et qu'en conséquence cette dernière a qualité pour agir.
Elle soutient que les époux X. ont parfaitement été informés des conditions financières inhérentes au contrat passé avec elle ; que la clause prévoyant une indemnité est l'application directe de l'article 21 de la Loi du 10 janvier 1978 et est donc conforme aux dispositions légales et réglementaires en matière d'information et de protection des consommateurs. Elle précise que les époux détiennent toujours un bien leur appartenant alors qu'ils ont suspendu tout paiement depuis janvier 2007 et que le contrat a été résilié depuis mars 2007.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE L'ARRÊT :
Sur la fin de non recevoir :
Attendu qu'il résulte des pièces versées aux débats et notamment de l'extrait du registre du commerce et des sociétés qu'OCEAR LEASE TAHITI est la nouvelle dénomination sociale de la Société CREDIPAC POLYNÉSIE ; qu'en conséquence c'est à juste titre que le premier juge a rejeté la fin de non recevoir présentée par les appelants.
Sur le fond :
Attendu qu'il est constant que les époux X. ont conclu un contrat de location avec option d'achat portant sur un véhicule MITSUBISHI L200 immatriculé XX d'une valeur de 4.900.000 FCFP ; qu'ils devaient s'acquitter d'un loyer de base mensuel TTC de 80.868 FCFP du 15 novembre 2005 au 15 octobre 2012 ; que la résiliation du contrat leur a été notifiée le 26 mars 2007 du chef de l'interruption du paiement des loyers en janvier 2007 avec injonction de restituer le véhicule ;
Attendu que l'article 3 de la loi du 10 janvier 1978 dispose que « sont exclus du champ d'application de la présente loi :
- les prêts, contrats et opérations de crédit passés en la forme authentique ;
- ceux qui sont consentis pour une durée totale inférieure ou égale à trois mois, ainsi que ceux dont le montant est supérieur à une somme qui sera fixée par décret ;
- [minute page 5] ceux qui sont destinés à financer les besoins d'une activité professionnelle, ainsi que les prêts aux personnes morales de droit public » ;
Que l'article 1er du décret n° 88-293 du 25 mars 1988 pris pour l'application dudit article 3 dispose que « les prêts dont le montant est supérieur à 140.000 Francs sont exclus du champ d'application de la loi n° 78-22 du 10 janvier 1978 » ;
Attendu qu'en l'espèce le montant du crédit bail est supérieur à 140.000 Francs Français soit 2.545.455 FCFP ; qu'il y a donc lieu de constater que ledit contrat est exclu de la loi du 10 janvier 1978 et n'était par conséquent pas soumis à offre préalable comme l'a à juste titre relevé le premier juge ;
Attendu que les époux X. soutiennent que l'établissement de crédit a commis une faute en leur proposant un montage ruineux source de leurs difficultés à honorer les versements convenus et qu'il a manqué à son obligation de conseil et d'information notamment quant au contenu précis de leurs engagements ;
Attendu cependant que les consorts X. n'apportent aucune pièce ou justificatif à l'appui de leurs allégations notamment quant à leur situation financière au jour de la conclusion du contrat ; qu'ils ne démontrent pas qu'au moment de la signature dudit contrat leur patrimoine et ressources étaient incompatibles avec l'octroi d'un crédit-bail ; que par ailleurs le contrat de location avec option d'achat daté du 26 juillet 2005, et signé par les deux époux, comporte les conditions de la location et fait clairement apparaître le coût final du véhicule ; qu'il en résulte que les appelants ont été informés du coût de l'opération et de ses conditions financières ;
Attendu que les appelants soutiennent par ailleurs que la clause les obligeant à verser une indemnité égale au montant total hors taxes de tous les termes du loyer non encore venus à échéance à la date de la résiliation, majoré du montant de l'option d'achat finale déterminée aux conditions particulières et des taxes exigibles, est abusive pour être supérieure à la valeur d'achat du véhicule neuf ;
Mais attendu que ladite clause précise également que le locataire dispose d'un délai de quinze jours à compter de la résiliation du contrat pour présenter un acquéreur faisant une offre écrite d'achat et que le bailleur a l'obligation de rembourser le locataire du produit de la revente hors taxe du bien ; qu'ainsi cette clause, qui n'apparaît pas contraire à la réglementation en matière de protection des consommateurs, ne peut être considérée comme abusive ;
Attendu qu'il convient en conséquence de faire application de la convention liant les parties et qu'il n'y a pas lieu à réduction de l'indemnité prévue contractuellement ;
[minute page 6] Attendu que la restitution du véhicule est contractuellement due et n'est par ailleurs pas formellement contestée ; que la Société OCEOR LEASE TAHITI justifie de sa créance qui n'apparaît pas sérieusement contestable ;
Attendu qu'il y a lieu en conséquence de confirmer la décision déférée en ce qu'elle a ordonné la restitution du véhicule et a condamné les appelants à payer à la Société OCEOR LEASE TAHITI la somme de 5.177.932 FCFP sauf à déduire le prix de vente du véhicule ;
Sur les délais de paiement :
Attendu que les époux X. sollicitent l'octroi de délais de paiement ;
Attendu cependant qu'ils ne s'expliquent pas sur leur situation financière actuelle ; qu'ils n'ont proposé aucun échéancier depuis l'engagement des poursuites et ont conservé le véhicule malgré mise en demeure de le restituer ; qu'ils ont bénéficié dans les faits de délais de paiement ; que leur demande sera en conséquence rejetée
Sur la demande de dommage et intérêts pour procédure abusive :
Attendu qu'en l'absence de démonstration de l'abus du droit de faire appel, il convient de rejeter la demande de dommages intérêt pour procédure abusive ;
Sur les frais irrépétibles :
Attendu que l'équité ne commande pas de faire droit à la demande de la Société OCEOR LEASE TAHITI sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile local ;
Qu'en conséquence la décision déférée sera réformée de ce chef.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement, en matière de référé et en dernier ressort ;
Confirme l'ordonnance déférée sauf en ce qu'elle a condamné les époux X. à payer à la Société OCEOR LEASE TAHITI la somme de CENT DIX MILLE (110.000) FRANCS PACIFIQUE sur le fondement de l'article 407 du code de procédure civile de la Polynésie Française :
Y ajoutant ;
[minute page 7] Déboute la Société OCEOR LEASE TAHITI de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ainsi que de celle faite au titre des frais irrépétibles d'appel ;
Et statuant à nouveau sur le seul chef infirmé ;
Dit n'y avoir lieu à application de l'article 407 du Code de Procédure de la Polynésie Française ;
Condamne solidairement M. X. et Mme Y. épouse X. aux dépens, dont distraction au profit de la SELARL JURISPOL ;
Rejette toute autre demande.
Prononcé à Papeete, le 18 décembre 2008
Le Greffier, Le Président,
Signé : M. SUHAS-TEVERO Signé : G. THIBAULT-LAURENT
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