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CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 28 octobre 2010

Nature : Décision
Titre : CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 28 octobre 2010
Pays : France
Juridiction : Douai (CA), 8e ch. sect. 1
Demande : 09/02709
Date : 28/10/2010
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 15/04/2009
Décision antérieure : TI DUNKERQUE, 4 mars 2009
Décision antérieure :
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2922

CA DOUAI (8e ch. sect. 1), 28 octobre 2010 : RG n° 09/02709

Publication : Jurica

 

Extrait : « Par ailleurs, en matière de crédits utilisables par fractions, l’article L. 311- 9 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au contrat, dispense le prêteur lors d'un renouvellement du contrat initial de soumettre à l'acceptation de l'emprunteur une nouvelle offre préalable, cette dispense ne s'étend toutefois pas aux nouvelles ouvertures de crédit auxquelles doivent être assimilées toutes modifications du montant du crédit ou du taux du crédit précédemment consenti, lesquelles constituent un nouveau contrat qui doit donc être conclu dans les termes d'une offre préalable répondant aux exigences des dispositions des articles L. 311- 9 -1 et L. 311-10 du même Code ; l'acceptation ne peut être tacite mais doit résulter d'un acte univoque de l'emprunteur.

2.2. Enfin, il convient de rappeler qu'aux termes des dispositions de l’article L. 132 -1 du Code de la consommation, est réputée non écrite comme étant abusive une clause qui a pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et des obligations des parties au contrat. À cet égard une clause contractuelle qui dispense le prêteur d'une nouvelle offre préalable lors d'augmentations du crédit initial, qui interviendraient donc sans acceptation préalable de l'emprunteur mais également sans possibilité pour celui-ci de se rétracter, crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat et doivent être réputées non écrites. »

 

COUR D’APPEL DE DOUAI

HUITIÈME CHAMBRE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 28 OCTOBRE 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 09/02709. Jugement (n° 08/1292) rendu le 4 mars 2009 par le Tribunal d'Instance de DUNKERQUE.

 

APPELANTE :

Madame Y. épouse X.,

née le [date] à [ville], demeurant : [adresse], représentée par la SCP CARLIER-REGNIER, avoués à la Cour, assistée de Maître Marie-Agnès LESTOILLE, avocat au barreau de DUNKERQUE

 

INTIMÉE :

SA BANQUE ACCORD,

prise en la personne de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège, ayant son siège social : [adresse], représentée par la SCP THERY-LAURENT, avoués à la Cour, assistée de Maître PLANCKEEL, avocat au barreau de DUNKERQUE

 

DÉBATS : A l'audience publique du 8 septembre 2010 tenue par Catherine PAOLI magistrat chargé d'instruire l'affaire qui a entendu seul les plaidoiries, les conseils des parties ne s'y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré (article 786 du Code de Procédure Civile).

Les parties ont été avisées à l'issue des débats que l'arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Annie DESBUISSONS

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : Pierre CHARBONNIER, Président de chambre, Catherine PAOLI, Conseiller, Sophie VEJUX, Conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE, prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 28 octobre 2010 (date indiquée à l'issue des débats) et signé par Pierre CHARBONNIER, Président et Annie DESBUISSONS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement contradictoire du Tribunal d'instance de DUNKERQUE en date du 4 mars 2009 ;

Vu l'appel formalisé le 15 avril 2009 par Madame Y. épouse X. ;

Vu les conclusions signifiées le 13 janvier 2010 par Madame Y. épouse X. ;

Vu les conclusions signifiées le 20 janvier 2010 par la SA BANQUE ACCORD ;

Vu l'arrêt avant dire droit en date du 29 avril 2010 de la Cour d'Appel de Douai 8ème chambre 1re section ;

Vu les conclusions signifiées le 15 juin 2010 par Madame Y. épouse X. ;

Vu les conclusions signifiées le 25 mai 2010 par la SA BANQUE ACCORD ;

Statuant sur l'opposition formalisée par Madame Y. épouse X. le 12 novembre 2008 à la suite de la signification qui leur a été faite le 5 novembre 2008 d'une ordonnance d'injonction de payer en date du 23 octobre 2008, sollicitée et obtenu par la SA BANQUE ACCORD en exécution d'une offre préalable d'ouverture de crédit consentie le 31 octobre 1997, le tribunal d'instance de DUNKERQUE, par jugement dont appel, après avoir rejeté les moyens tirés de la forclusion de l'action et de la faute de la société de crédit a, avec exécution provisoire, condamné Madame Y. épouse X. à payer à la SA BANQUE ACCORD la somme de 13.964,87 euros avec intérêts au taux de 12,60 % sur la somme de 13.141,57 euros et celle de 823,30 euros avec intérêts au taux légal à compter du 23 juillet 2008, outre les dépens.

Par arrêt avant dire droit en date du 29 avril 2010 cette Cour, au visa des dispositions des articles L. 141-4 et L. 311-37 du Code de la consommation et sans que l'ordonnance de clôture intervenue le 14 janvier 2010 ne soit révoquée, a invité les parties à conclure sur le moyen d'irrecevabilité tiré de la forclusion de l'action de la société de crédit qu'elle a soulevé d'office en raison du dépassement du montant de découvert initialement autorisé.

Madame Y. épouse X., dans ses conclusions avant la réouverture des débats, soulève tout d'abord la nullité de l'ordonnance d'injonction de payer qui ne comporte pas la signature du magistrat. Elle conclut, après réouverture des débats, à l'irrecevabilité de l'action de la société indiquant que le découvert initialement autorisé était bien de 2.000 Francs. Elle excipe ensuite des manquements du prêteur à ses obligations d'information et de conseil pour lesquels elle demande 10.000 euros de dommages-intérêts. Enfin à titre subsidiaire elle sollicite des délais de paiement.

Elle conclut donc à l'infirmation du jugement et au rejet des demandes de la société de crédit à son encontre.

La SA BANQUE ACCORD qui réfutait dans ses conclusions d'avant la réouverture des débats chacun des moyens de l'appelante et stigmatisait également la mauvaise foi de celle-ci soutient, dans ses conclusions après réouverture des débats, que le découvert autorisé était de 20.000 F et qu'aucune forclusion n'est donc encourue et ce dans la mesure ou en tout état de cause, eu égard au texte applicable au contrat, la sanction de cette irrégularité serait au mieux la déchéance du droit du préteur aux intérêts conventionnels. Elle s'oppose également à tout délai de paiement.

Elle conclut donc à la confirmation du jugement, au rejet des prétentions de Madame X. et à l'allocation de la somme de 1.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 janvier 2010 ; l'affaire après réouverture des débats est venue à l'audience de plaidoirie du 7 septembre 2010 à l'issue de laquelle elle a été mise en délibéré au 28 octobre 2010.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                 (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE,

1. Sur le moyen de nullité de l'ordonnance d'injonction de payer soulevé par Madame Y. épouse X., il sera observé que la copie qui lui a été signifiée est revêtue de la signature du greffier qui la certifiée conforme à la minute détenue par le greffe du tribunal d'instance. Par ailleurs, la copie de la dite ordonnance figurant au dossier de première instance versé au dossier de la cour, comporte la signature du juge et du greffier. Aussi, par application des dispositions des articles 1410, 1411, 458, 459 et 726 et suivants du Code de procédure civile, l'ordonnance entreprise sera-t-elle déclarée régulière et le moyen rejeté.

2.1. Aux termes de l’article L. 311-37 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable lors de la conclusion du contrat, les actions nées d'un contrat de crédit à la consommation doivent être engagées, à peine de forclusion, dans les deux années de l'événement qui leur a donné naissance. Le point de départ du délai biennal, à l'expiration duquel il ne peut plus s'exercer d'action, se situe à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donnée naissance. Plus précisément, dans le cas d'une ouverture de crédit, d'un montant déterminé et reconstituable, assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, le point de départ de ce délai se situe au moment où le montant du dépassement maximum initialement convenu n'est pas régularisé, cette situation constituant un incident caractérisant la défaillance de l'emprunteur.

Par ailleurs, en matière de crédits utilisables par fractions, l’article L. 311-9 du Code de la consommation, dans sa rédaction applicable au contrat, dispense le prêteur lors d'un renouvellement du contrat initial de soumettre à l'acceptation de l'emprunteur une nouvelle offre préalable, cette dispense ne s'étend toutefois pas aux nouvelles ouvertures de crédit auxquelles doivent être assimilées toutes modifications du montant du crédit ou du taux du crédit précédemment consenti, lesquelles constituent un nouveau contrat qui doit donc être conclu dans les termes d'une offre préalable répondant aux exigences des dispositions des articles L. 311- 9 -1 et L. 311-10 du même Code ; l'acceptation ne peut être tacite mais doit résulter d'un acte univoque de l'emprunteur.

2.2. Enfin, il convient de rappeler qu'aux termes des dispositions de l’article L. 132 -1 du Code de la consommation, est réputée non écrite comme étant abusive une clause qui a pour objet ou pour effet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et des obligations des parties au contrat. À cet égard une clause contractuelle qui dispense le prêteur d'une nouvelle offre préalable lors d'augmentations du crédit initial, qui interviendraient donc sans acceptation préalable de l'emprunteur mais également sans possibilité pour celui-ci de se rétracter, crée un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat et doivent être réputées non écrites.

2.3. Elle produit notamment au soutien de ses demandes l'offre préalable du 31 octobre 1997 en original, l'historique du compte entre le 30 décembre 1997 et le 25 décembre 2007 et la lettre de déchéance du terme.

Il est indiqué au recto de l'offre : « Modalités de fonctionnement de l'ouverture de crédit » qu'elle « ouvre droit à un crédit qui ne peut être supérieur à une fraction des achats effectués à l'aide de la carte accord. Cette fraction est celle dont le financement à crédit est autorisé, le versement légal ....» ; il est également stipulé aux conditions générales du crédit, au verso de l'offre, que le montant initialement convenu pourra ultérieurement varier dans les conditions suivantes et dans la limite maximum de 140.000 Francs sans que cela constitue une nouvelle offre... sur demande écrite de l'emprunteur acceptée par la Société BANQUE ACCORD.

Outre que la clause sus-rappelée s'analyse en une clause abusive au sens des dispositions précitées de l’article L. 132-1 du Code de la consommation (Cf. § 2-2), la Cour a vainement cherché dans les pièces les demandes express d'augmentation du montant du crédit initialement convenu faites par Madame X. et accepté par la société de crédit.

Au cas d'espèce l'offre a été expressément conclue pour « un montant actuellement autorisé du découvert de 2.000 Francs ». Ce montant initial de 2.000 Francs soit 304,90 euros a été dépassé à compter du 6 janvier 1999. L'examen de l'historique du compte montre par ailleurs qu'il n'a cessé de s'aggraver depuis et n'est jamais plus par la repassé en deçà du seuil initialement convenu par l'effet de versements du débiteurs ou d'un offre régulière dans les termes des textes précités voir d'une demande express de Madame X. ; à titre indicatif il était de 35.321 Francs au 25 janvier 2001.

Ce dépassement du plafond autorisé constitue, au sens des textes précités et de la jurisprudence subséquente, un incident de paiement manifestant la défaillance de l'emprunteur, point de départ du délai de forclusion. Or, la signification de l'ordonnance d'injonction de payer est intervenue le 5 novembre 2008, soit plus de deux ans après l'incident de paiement caractérisant la défaillance de l'emprunteur. Il convient donc de constater que la société est forclose en ses demandes.

Le jugement sera infirmé et la SA BANQUE ACCORD déclarée irrecevable

3. La SA BANQUE ACCORD succombe dans ses prétentions, elle supportera la charge des dépens d'appel et de première instance.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                          (N.B. : Mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et contradictoirement ;

Infirme le jugement ;

Déclare la SA BANQUE ACCORD irrecevable en ses demandes ;

Condamne la SA BANQUE ACCORD aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de la loi sur l'aide juridictionnelle.

LE GREFFIER,           LE PRÉSIDENT,

A. DESBUISSONS     P. CHARBONNIER