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CA NANCY (2e ch. civ.), 28 janvier 2010

Nature : Décision
Titre : CA NANCY (2e ch. civ.), 28 janvier 2010
Pays : France
Juridiction : Nancy (CA), 2e ch. civ.
Demande : 07/01971
Date : 28/01/2010
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 7/08/2007
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2948

CA NANCY (2e ch. civ.), 28 janvier 2010 : RG n° 07/01971 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Attendu aux termes de l'article L. 132-1 du code de la consommation dans sa rédaction résultant de l'ordonnance 2001-741 du 23 août 2001 applicable au présent contrat, que « dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat » ;

Attendu que l'offre préalable de crédit souscrite le 9 février 2002 par Monsieur et Madame X. auprès de la société Cofinoga stipule qu'elle est faite aux conditions suivantes : « le montant maximum du découvert autorisé par le prêteur est de 15.000 euros, le montant que vous choisissez dans cette limite constitue la fraction disponible du découvert ; cette fraction disponible est de 6.000 euros » ; […] ; Attendu que Monsieur et Madame X. qui prétendent que cette clause est abusive et doit être déclarée non avenue se prévalent de l'avis de la cour de cassation en date du 10 juillet 2006 suivant lequel « l’article L 132-1 du code de la consommation répute non écrite comme abusive la clause prévoyant l'augmentation du montant du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit », s'agissant en l'espèce d'une clause par laquelle l'organisme de crédit se réservait la possibilité d'accroître le capital initialement prêté dans la limite du montant réglementaire des crédits à la consommation sans avoir recours à une offre nouvelle ;

Mais attendu que la présente clause qui donne à l'emprunteur la possibilité de disposer de son crédit en compte, de manière fractionnée, dans la limite d'un montant maximum fixé dès l'origine, aux dates de son choix, mais ne réserve pas à l'organisme prêteur le droit de modifier à la hausse le montant du crédit, ne confère pas à celui-ci un avantage excessif ; Que cette clause est par ailleurs parfaitement conforme au modèle type des offres préalables de crédit en application des articles L. 311-13 et suivants du code de la consommation tel qu'il résulte de l’arrêté du 14 mai 2007 ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 28 JANVIER 2010

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

RG n° 07/01971.

 

APPELANTE :

SA LASER COFINOGA,

agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux pour ce, domiciliés audit siège, sis [adresse], représentée par Maître GRÉTÉRÉ, avoué à la Cour, assistée de Maître Olivier COUSIN, avocat au barreau d'EPINAL

 

INTIMÉ :

Monsieur X.,

né le [date] à [ville], demeurant [adresse], représenté par la SCP LEINSTER, WISNIEWSKI & MOUTON, avoués à la Cour, assisté de Maître Isabelle DUBIEF-DUROYON, avocat au barreau d'EPINAL

Madame Y., épouse X.,

née le [date] à [ville], demeurant [adresse], représentée par la SCP LEINSTER, WISNIEWSKI & MOUTON, avoués à la Cour, assistée de Maître Isabelle DUBIEF-DUROYON, avocat au barreau d'EPINAL

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 23 novembre 2009, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Présidente de Chambre.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Présidente de la deuxième chambre civile, Monsieur Christian MAGNIN, Conseiller, Monsieur Francis MARTIN, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Agnès STUTZMANN ;

A l'issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 11 janvier 2010, en application du deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile. Puis, à cette date, le délibéré a été prorogé au 28 janvier 2010.

ARRÊT : Contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 28 janvier 2010, par Madame Céline BARBIER, Greffier, conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; signé par Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Présidente de la Deuxième Chambre civile, et par Madame Céline BARBIER, greffier ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par acte du 28 juin 2006, la SA Cofinoga a assigné devant le tribunal d'instance d'Epinal Monsieur et Madame X. aux fins de les entendre condamner à lui payer, outre une indemnité de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, la somme de 17.335,55 euros majorée des intérêts au taux de 15,5 % l'an sur la somme de 16.107,80 euros à compter du 6 décembre 2005, due au titre de l'ouverture de crédit qu'elle lui a consentie le 9 février 2002, utilisable par fractions .

Monsieur et Madame X. ont soulevé la forclusion de la demande par application de l’article L 311-37 du Code de la consommation et, titre subsidiaire, conclu au rejet de la clause pénale insérée au contrat de prêt en raison de son caractère excessif ainsi que du chef de demande du chef des frais irrépétibles.

 Par jugement en date du 28 juin 2007, le tribunal, relevant que dès le mois d'avril 2002, le découvert autorisé de 6.000 euros a été dépassé sans que ce dépassement ait fait l'objet d'une régularisation, a déclaré la SA Cofinoga forclose en son action et l'a condamnée aux dépens.

 Suivant déclaration reçue le 7 août 2007, la SA Laser Cofinoga a régulièrement relevé appel de ce jugement dont elle a sollicité l'infirmation, concluant comme suit :

 - vu les dispositions des articles L. 311-1 et suivants du Code la consommation et notamment l'article L. 311-37, condamner Monsieur et Madame X. à lui payer la somme de 17.335,55 euros majorée des intérêts au taux de 15,5 % l'an sur la somme de 16.107,80 euros à compter du 6 décembre 2005 et au taux légal sur le surplus

- à titre infiniment subsidiaire, condamner Monsieur et Madame X. à lui payer la somme de 9.911,71 euros avec intérêts au taux légal à compter du jour de la demande

- les condamner au paiement d'une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'appel.

L'appelante a exposé qu'en l'espèce, les conditions générales de l'offre permettaient l'octroi aux emprunteurs d'un montant maximal de 15.000 euros, qui n'a jamais été dépassé ainsi qu'il résulte de l'historique du compte versé aux débats ; que contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, l'événement qui marque le point de départ du délai de forclusion est non le dépassement du découvert initialement autorisé mais la première échéance de remboursement non honorée et non régularisée au sens de l’article L. 311-37 du Code de la consommation, soit en l'espèce l'échéance de mai 2005, de sorte que la demande formée le 28 juin 2006 est parfaitement recevable.

Elle a ajouté, sur le moyen soulevé à hauteur d'appel par les intimés, tiré de la déchéance du droit aux intérêts, que le dépassement du découvert utile ne peut être traité comme un incident de paiement au sens de l’article L. 311-37 alinéa 2 du Code de la consommation.

Monsieur et madame X. ont conclu à la confirmation du jugement entrepris, demandant à la Cour subsidiairement, vu les articles L. 311-9 et L. 311-33 du Code de la consommation,

- de dire et juger la SA Cofinoga déchue du droit aux intérêts et l'inviter à revoir son décompte

- vu l’article 1152 du Code civil, réduire à zéro la demande du chef de la clause pénale

- débouter la SA Cofinoga de ses demandes fins et conclusions contraires

- la condamner aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité de 700 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile

Les intimés ont soulevé en premier lieu le caractère abusif de la clause du contrat relative à la fixation du montant et de la variation du découvert, en se prévalant de l'avis émis par la commission des clauses abusives dans sa séance plénière du 27 mai 2004 ainsi que l'avis de la cour de cassation de cassation en date du 10 juillet 2006.

Ils ont prétendu par ailleurs qu'il y a lieu à forclusion dès lors que l'organisme de crédit n'a pas engagé son action dans le délai de deux ans à compter du dépassement du découvert initial en juillet 2002.

A titre subsidiaire, Monsieur et Madame X. ont fait valoir que la SA Cofinoga ne justifie pas avoir satisfait aux obligations résultant pour elle de l’article L. 311-9 du Code de la consommation de sorte qu'elle encourt la déchéance du droit aux intérêts ; que la clause pénale appliquée est manifestement excessive au regard du préjudice subi par l'organisme prêteur qui applique un taux d'intérêts de 15,5 %.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Vu les dernières écritures déposées le 29 septembre 2009 par la SA Laser Cofinoga et le 21 janvier 2009 par Monsieur et Madame X., auxquelles la Cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens ;

 

Sur le moyen tiré du caractère abusif de la clause du contrat concernant le montant maximum du découvert autorisé :

Attendu aux termes de l’article L. 132-1 du Code de la consommation dans sa rédaction résultant de l'ordonnance 2001-741 du 23 août 2001 applicable au présent contrat, que « dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet de créer au détriment du non professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat » ;

Attendu que l'offre préalable de crédit souscrite le 9 février 2002 par Monsieur et Madame X. auprès de la société Cofinoga stipule qu'elle est faite aux conditions suivantes : « le montant maximum du découvert autorisé par le prêteur est de 15.000 euros, le montant que vous choisissez dans cette limite constitue la fraction disponible du découvert ; cette fraction disponible est de 6.000 euros » ;

Attendu que Monsieur et Madame X. qui prétendent que cette clause est abusive et doit être déclarée non avenue se prévalent de l'avis de la cour de cassation en date du 10 juillet 2006 suivant lequel « l’article L. 132-1 du Code de la consommation répute non écrite comme abusive la clause prévoyant l'augmentation du montant du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit », s'agissant en l'espèce d'une clause par laquelle l'organisme de crédit se réservait la possibilité d'accroître le capital initialement prêté dans la limite du montant réglementaire des crédits à la consommation sans avoir recours à une offre nouvelle ;

Mais attendu que la présente clause qui donne à l'emprunteur la possibilité de disposer de son crédit en compte, de manière fractionnée, dans la limite d'un montant maximum fixé dès l'origine, aux dates de son choix, mais ne réserve pas à l'organisme prêteur le droit de modifier à la hausse le montant du crédit, ne confère pas à celui-ci un avantage excessif ;

Que cette clause est par ailleurs parfaitement conforme au modèle type des offres préalables de crédit en application des articles L. 311-13 et suivants du Code de la consommation tel qu'il résulte de l’arrêté du 14 mai 2007 ;

Qu'il échet de rejeter les prétentions des appelants sur ce point ;

 

Sur le moyen tiré de la forclusion :

Attendu, aux termes de l’article L. 311-27 du Code de la consommation que les actions doivent être engagées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance, à peine de forclusion ;

Qu'il résulte de la jurisprudence constante, que conformément à la règle selon laquelle le point de départ d'un délai à l'expiration duquel une action ne peut plus s'exercer se situe à la date d'exigibilité de l'obligation qui lui a donné naissance, le délai biennal de l'article L. 311-27 court, dans le cas d'une ouverture de crédit reconstituable et assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, à partie de la première échéance non régularisée ;

Attendu que le seul dépassement du montant initial du découvert, dès lors que n'est pas atteint le montant maximum du découvert autorisé, ne peut constituer le point de départ du délai biennal de forclusion

Or attendu que l'examen des pièces produites au dossier et notamment l'historique du compte fait apparaître que si le montant du découvert disponible initial de 6.000 euros a été dépassé, en revanche le montant maximal du découvert autorisé, soit 15.000 euros n'a pas été atteint avant la première échéance impayée non régularisée en date du 7 mai 2005 ;

Que la demande formée le 28 juin 2006 est dès lors recevable ;

 

Sur le manquement à l'obligation d'information :

Attendu sur le manquement par l'organisme de crédit à son obligation d'information concernant les conditions de reconduction du contrat, qu'il résulte des dispositions de l’article L. 311-9 alinéa 2 du Code de la consommation, dans sa rédaction résultant de la loi du 11 décembre 2001 en vigueur au jour de la souscription du contrat, que « l'offre de crédit doit préciser que la durée du contrat est limitée à un an renouvelable et que le prêteur devra indiquer trois mois avant l'échéance les conditions de reconduction du contrat » ;

Que cette disposition est expressément reprise à l'offre de crédit acceptée le 9 février 2002 ;

Or attendu que la SA Cofinoga ne justifie pas avoir satisfait à cette formalité pour les échéances de février 2003 et février 2004 ;

Attendu que la méconnaissance des dispositions de l’article L. 311-9 alinéa 2 du Code de la consommation est sanctionnée, aux termes de l'article L. 311-33, par la déchéance du droit aux intérêts du prêteur, l'emprunteur n'étant tenu qu'au seul remboursement du capital et les sommes perçues au titre des intérêts étant restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû ;

Attendu qu'il échet, en conséquence de ces éléments, de prononcer la déchéance du droit aux intérêts perçus après le 9 février 2003 et de fixer la créance de la SA Cofinoga comme suit, conformément au décompte qu'elle produit à l'appui de sa demande subsidiaire limitée à la somme de 9.911,71 euros :

-                                                                                                           total des achats :                                                                15.598,35 euros

-                                                                                                           cotisations d'assurance :                                               1.621,36 euros

-                                                                                                           à déduire des versements opérés :      7.308,00 euros

Que cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la demande conformément aux dispositions de l’article 1153 alinéa 3 du Code civil ;

Attendu que l'équité ne commande pas qu'il soit fait application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile au profit de l'une ou l'autre des parties ;

Que compte tenu du caractère exagéré des prétentions de l'appelante, les dépens seront partagés par moitié entre les parties ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l’article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,

Reçoit la SA Laser Cofinoga en son appel contre le jugement rendu le 28 juin 2007 par le tribunal d'instance d'Epinal ;

Infirme ce jugement et statuant à nouveau,

Déclare recevable l'action en paiement de la SA Laser Cofinoga ;

Condamne Monsieur et Madame X. solidairement à payer à la SA Laser Cofinoga la somme de NEUF MILLE NEUF CENT ONZE EUROS ET SOIXANTE-ET-ONZE CENTIMES (9911,71 euros) majorée des intérêts au taux légal à compter du jour de la demande ;

Déboute la SA Laser Cofinoga et Monsieur et Madame X. du surplus de leurs prétentions ;

Partage les dépens par moitié entre les parties.

Le présent arrêt a été signé par Madame CLAUDE-MIZRAHI, Présidente de la deuxième chambre civile à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame BARBIER, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,           LE PRÉSIDENT,