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CA NANCY (2e ch. civ.), 17 janvier 2011

Nature : Décision
Titre : CA NANCY (2e ch. civ.), 17 janvier 2011
Pays : France
Juridiction : Nancy (CA), 2e ch. civ.
Demande : 08/02381
Date : 17/01/2011
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 11/09/2008
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CERCLAB - DOCUMENT N° 2957

CA NANCY (2e ch. civ.), 17 janvier 2011 : RG n° 08/02381

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Attendu étant rappelé en premier lieu les dispositions de l’article L. 141-1 du Code de la consommation issu de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008, d'application immédiate, selon lequel « le juge peut soulever d'office toutes les dispositions du présent Code dans les litiges nés de son application », qu'il ne peut être fait grief au premier juge d'avoir relevé d'office le moyen tiré de l'application de l'article L. 311-37 du même Code ; qu'en tout état de cause, ce débat, entretenu par l'appelante, ne présente plus aucun intérêt à hauteur d'appel, l'intimé faisant sienne la fin de non-recevoir tirée de la forclusion ».

2/ « Attendu qu'il est constant en l'espèce qu'il est stipulé au contrat de crédit conclu entre les parties, que le découvert utile à l'ouverture du compte est de 800 euros et le montant du découvert maximum autorisé de 7.500 euros, l'emprunteur pouvant, aux termes de l'article II-3 des conditions générales, « faire évoluer le découvert utile jusqu'au montant du découvert maximum autorisé à condition que depuis l'ouverture du crédit ou de la précédente augmentation du découvert utile aucun des événements suivants ne soit survenu : survenance d'un cas de suspension du droit à découvert, évolution de la situation financière de l'emprunteur ou usage des moyens d'utilisation en comte en violation des conditions du contrat » ;

Attendu que cette clause qui prévoit l'augmentation du montant du crédit sans émission d'une nouvelle offre, constitue, en application de l’article L. 132-1 du Code de la consommation, une clause abusive qui doit être tenue pour non écrite ; que l'absence d'information, notamment quant aux nouvelles charges de remboursement résultant du dépassement du crédit initialement choisi et l'absence de toute faculté de rétractation sont de nature à créer un déséquilibre économique significatif au détriment de l'emprunteur non professionnel, ainsi que l'a justement relevé le premier juge ».

 

COUR D’APPEL DE NANCY

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 17 JANVIER 2011

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 08/02381. Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal d'Instance de REMIREMONT, R.G. n° 11-07-000242, en date du 26 mai 2008.

 

APPELANTE :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE suite à la fusion entre UCB et CETELEM,

intervenue le 30 juin 2008, prise en la personne de ses représentants légaux pour se domicilier audit siège sise [adresse], représentée par la SCP Barbara VASSEUR, avoués à la Cour, assistée de Maître Danielle CHAUDEUR, avocat au barreau de NANCY, substituée à l'audience par Maître Béatrice DUGRAVOT, avocat au barreau de NANCY

 

INTIMÉ :

Monsieur X.,

né le [date] à [ville], demeurant [adresse], représenté par la SCP MILLOT LOGIER ET FONTAINE, avoués à la Cour

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 910 ancien du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 15 novembre 2010, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de Chambre, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre, Monsieur Christian MAGNIN, Conseiller, Monsieur Francis MARTIN, Conseiller,

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Madame Caroline HUSSON ;

A l'issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 13 décembre 2010, en application du deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile. A cette date, le délibéré a été prorogé au 17 janvier 2011.

ARRÊT : Contradictoire, rendu par mise à disposition publique au greffe le 17 janvier 2011, par Madame Caroline HUSSON, Greffier, conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; signé par Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre, et par Madame Caroline HUSSON, greffier ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Suivant offre préalable acceptée par M. X. le 24 septembre 2004, la Sa Union Crédit Pour le Bâtiment a consenti à M. X. un crédit utilisable par fractions, dans la limite d'un découvert utile de 800 euros et d'un découvert maximum autorisé de 7.500 euros.

Par acte du 23 octobre 2007, la Sa Union Crédit pour le Bâtiment a assigné devant le tribunal d'instance de Remiremont M. X. aux fins de l'entendre condamner à lui payer la somme de 6.551,912 euros avec intérêts au taux contractuel à compter de la première mise en demeure, restant due au titre dudit crédit, outre une indemnité sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Invitée à faire valoir ses observations sur la forclusion de son action à raison du dépassement du découvert initial à compter du mois de novembre 2004, subsidiairement sur la déchéance de son droit à intérêts à raison des irrégularités entachant l'offre préalable de crédit : absence de remise d'un bordereau détachage régulier, non-respect du corps 8, présence de clauses aggravantes (articles II 9 et II 11), absence de preuve de la réception des offres de renouvellement annuelles, dépassement du montant du découvert autorisé, la Sa Union Crédit pour le Bâtiment, qui a maintenu ses prétentions, a fait valoir à l'audience du 14 avril 2008, qu'une nouvelle offre n'était obligatoire qu'en cas de dépassement du découvert maximum autorisé et que le dépassement de la fraction disponible ne caractérise pas un incident de paiement. ; qu'en tout état de cause, la seule sanction possible est la déchéance du droit aux intérêts.

Par jugement en date du 26 mai 2008, le tribunal a déclaré forclose l'action en paiement formée par l’Union Crédit pour le Bâtiment contre M X.

Pour statuer ainsi, le premier juge a énoncé que la clause contractuelle qui prévoit l'augmentation du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre constitue une clause abusive, réputée non écrite par application de l’article L. 132-1 du Code de la consommation dans la mesure où elle crée un déséquilibre économique significatif au détriment de l'emprunteur non professionnel ; que par ailleurs, s'agissant d'une offre de crédit reconstituable par fractions, la défaillance de l'emprunteur est caractérisée à compter du dépassement du découvert utile non régularisé ; qu'or, en l'espèce, il résulte de l'historique du compte que le découvert utilisable à l'ouverture fixé à 800 euros a été dépassé sans régularisation à compter du mois d'octobre 2004 de sorte que la demande est forclose.

Suivant déclaration reçue le 11 septembre 2008, la SA BNP Paribas Personal finance, venant aux droits de la Sa Union Crédit pour le Bâtiment suite à la fusion intervenue le 30 juin 2008, a régulièrement relevé appel de ce jugement dont elle a sollicité l'infirmation.

Elle a demandé à la cour :

- de dire et juger son action non forclose et bien fondée,

- condamner M. X. à lui payer au titre du contrat conclu le 28 septembre 2004 lui accordant un prêt de 7.500 euros utilisable par fractions de prêt, subsidiairement en application de l’article 220 du Code civil et plus subsidiairement en restitution de l'indu, la somme de 6.551,92 euros avec intérêts au taux de 7,46 % à compter du 27 juillet 2007, date de la déchéance du terme,

- le condamner au paiement d'une indemnité de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

La Sa BNP Paribas Personal Finance a notamment fait valoir :

- que le premier juge ne pouvait soulever d'office la forclusion tirée de l'application de l’article L. 311-37 du Code de la consommation, dès lors qu'elle ne résultait pas des faits soumis à son examen et allégués par le défendeur,

- qu'en tout état de cause, le découvert maximum autorisé à hauteur de 7.500 euros n'a jamais été dépassé de sorte que la forclusion n'a pas couru,

- que la clause d'augmentation du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre de crédit ne constitue pas une clause abusive au regard de l’article L. 132-1 du Code de la consommation,

- que les conventions qui tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, doivent être exécutées de bonne foi au sens de l’article 1134 du Code civil ; qu'or, en disposant davantage que la fraction de 800 euros initialement utilisée, M. X. et la banque ont strictement exécuté le contrat de crédit qui prévoyait un prêt de 7.500 euros,

- que le dépassement de ce montant de 800 euros, qui ne correspond pas au crédit consenti mais n'est que la première fraction utilisée, ne caractérise pas un incident de paiement faisant courir le délai de forclusion, lequel suppose la défaillance de l'emprunteur qui ne peut être que l'absence de paiement d'une mensualité,

- que la loi du 1er juillet 2010 dont se prévaut M. X. qui tend à renforcer les obligations du prêteur n'est pas entrée en application et est sans incidence.

L'appelante qui a contesté par ailleurs avoir failli à son devoir de conseil a fait observer enfin que M. X. qui conteste, pour la première fois à hauteur d'appel, avoir signé le contrat litigieux, ne peut sérieusement soutenir qu'il ignorait l'existence du prêt alors que les chèques émis pour régler les échéances proviennent d'un compte joint ; qu'en toute hypothèse, il a bénéficié des sommes empruntées qui ont servi aux besoins de la vie courante.

M. X. a conclu à titre principal, à la confirmation du jugement entrepris, demandant à la cour à titre subsidiaire :

- de dire que la Sa Union Crédit pour le Bâtiment a engagé sa responsabilité et de la condamner au paiement de dommages-intérêts équivalents aux sommes réclamées avec compensation entre les créances réciproques,

- dire que la Sa Union Crédit pour le Bâtiment sera déchue du droit aux intérêts sur les sommes réclamées,

- lui accorder les plus larges délais de paiement.

- en tout état de cause, condamner la BNP Paribas aux dépens et au paiement d'une indemnité de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Il a soutenu que le premier juge tenait de l’article L. 141-4 du Code de la consommation le pouvoir de soulever d'office la forclusion, moyen qu'il a, en, tout état de cause, repris à hauteur d'appel, de même qu'il a repris la motivation du tribunal tant sur la forclusion que sur le caractère abusif de la clause contractuelle qui prévoit l'augmentation du crédit initial sans acceptation par l'emprunteur d'une nouvelle offre, ajoutant à cet égard, que la loi du 1er juillet 2010 , modifiant les dispositions du Code de la consommation a renforcé les obligations du prêteur concernant l'augmentation du capital initialement autorisé.

A titre subsidiaire, M. X. a exposé que la société UCB a manqué à son devoir de conseil et de mise en garde en lui accordant plusieurs découverts venant s'ajouter aux différents emprunts déjà contractés, sans s'assurer de ses capacités financières et qu'elle a ainsi contribué à l'aggravation de sa situation d'endettement.

Il a ajouté qu'il a toujours contesté avoir signé l'offre préalable du 24 septembre 2004 et que ce n'est que postérieurement au décès de son épouse survenu en novembre 2006, qu'il a découvert l'existence du crédit qu'elle avait contracté à son insu.

Enfin, et à titre infiniment subsidiaire, M. X. a sollicité des délais de paiement.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Vu les dernières écritures déposées le 15 octobre 2010 par la Sa BNP Paribas Personal Finance et le 13 octobre 2010 par M. X. auxquelles la Cour se réfère expressément pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens ;

Attendu étant rappelé en premier lieu les dispositions de l’article L. 141-1 du Code de la consommation issu de la loi n° 2008-3 du 3 janvier 2008, d'application immédiate, selon lequel 'le juge peut soulever d'office toutes les dispositions du présent Code dans les litiges nés de son application', qu'il ne peut être fait grief au premier juge d'avoir relevé d'office le moyen tiré de l'application de l'article L. 311-37 du même Code ; qu'en tout état de cause, ce débat, entretenu par l'appelante, ne présente plus aucun intérêt à hauteur d'appel, l'intimé faisant sienne la fin de non-recevoir tirée de la forclusion ;

Attendu que l’article L. 311-37 du Code de la consommation dispose que « les actions en paiement engagées devant le tribunal d'instance à l'occasion de la défaillance de l'emprunteur doivent être formées dans les deux ans de l'évènement qui leur a donné naissance à peine de forclusion » ;

Attendu que dans le cas d'une ouverture de crédit utilisable sous forme de découvert en compte, le dépassement du découvert autorisé, dès lors qu'il n'a été ultérieurement restauré, manifeste la défaillance de l'emprunteur et constitue le point de départ du délai biennal de forclusion ;

Attendu qu'il est constant en l'espèce qu'il est stipulé au contrat de crédit conclu entre les parties, que le découvert utile à l'ouverture du compte est de 800 euros et le montant du découvert maximum autorisé de 7.500 euros, l'emprunteur pouvant, aux termes de l'article II-3 des conditions générales, « faire évoluer le découvert utile jusqu'au montant du découvert maximum autorisé à condition que depuis l'ouverture du crédit ou de la précédente augmentation du découvert utile aucun des événements suivants ne soit survenu : survenance d'un cas de suspension du droit à découvert, évolution de la situation financière de l'emprunteur ou usage des moyens d'utilisation en comte en violation des conditions du contrat » ;

Attendu que cette clause qui prévoit l'augmentation du montant du crédit sans émission d'une nouvelle offre, constitue, en application de l’article L. 132-1 du Code de la consommation, une clause abusive qui doit être tenue pour non écrite ; que l'absence d'information, notamment quant aux nouvelles charges de remboursement résultant du dépassement du crédit initialement choisi et l'absence de toute faculté de rétractation sont de nature à créer un déséquilibre économique significatif au détriment de l'emprunteur non professionnel, ainsi que l'a justement relevé le premier juge ;

Attendu que le point de départ du délai de forclusion s'établit à la date du dépassement, non ultérieurement restauré, du découvert initial non précédé d'un avenant augmentant dans des conditions régulières le montant initialement autorisé, cette situation constituant un incident qui caractérise la défaillance de l'emprunteur ;

Attendu qu'il ressort en l'espèce de l'historique du compte de M. X. que le découvert a dépassé, dès le mois d'octobre 2004, le montant de 800 euros initialement accordé lors de l'ouverture du compte, et que ce dépassement n'a pas été ultérieurement restauré ;

Que l'action de la Sa BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de l'UCB, introduite par assignation du 23 octobre 2007 est donc forclose et qu'il échet de confirmer le jugement déféré ;

Attendu que l'équité ne commande pas, compte tenu des circonstances de la cause, qu'il soit fait application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Attendu que la Sa BNP Paribas Personal Finance qui succombe en son appel, sera condamnée aux dépens ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire, prononcé publiquement par mise à disposition au Greffe conformément à l’article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile

Reçoit la SA BNP Paribas Personal Finance, venant aux droits de la Sa Union Crédit pour le Bâtiment en son appel contre le jugement rendu le 26 mai 2008 par le tribunal d'instance de Remiremont ;

Confirme ce jugement en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne la Sa BNP Paribas Personal Finance aux dépens et autorise la Scp Millot-Logier et Fontaine, avoués associés, à faire application des dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Madame CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame Caroline HUSSON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,