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TI QUIMPER, 6 mai 1997

Nature : Décision
Titre : TI QUIMPER, 6 mai 1997
Pays : France
Juridiction : Quimper (TI)
Demande : 95/00515
Date : 6/05/1997
Nature de la décision : Admission
Numéro de la décision : 349
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3095

TI QUIMPER, 6 mai 1997 : RG n° 95/00515 ; jugement n° 349

 

Extrait : « Il résulte des éléments du débat que jusqu'à la lettre circulaire émise par la banque au mois de juin 1990, la gestion des comptes titres se réalisait sans frais pour le titulaire. Il résulte clairement des correspondances échangées que la CRCAM du Finistère a décidé, de manière tout à fait unilatérale, d'une part d'imposer un nouveau service à ses clients et d'autre part de facturer des frais à hauteur de 12,50 Francs par mois.

Il apparaît pour le moins curieux, voire choquant, qu'une banque impose à ses clients un nouveau service, quand bien même celui-ci constituerait une amélioration appréciable. Au surcroît, il s'agit là d'une modification unilatérale des conditions contractuelles initiales, contraire aux dispositions de l'article 1134 du Code Civil ci-dessus rappelées. Le Tribunal ne saurait suivre le raisonnement de la banque quant au délai de dix jours, lequel est applicable aux opérations faites par la Banque dans le cadre de la convention de gestion Association. Cette disposition permet au titulaire du compte de contester, le cas échéant, les opérations intervenues. Ce délai ne saurait en revanche s’appliquer s'agissant de modifications contractuelles du fonctionnement de la gestion elle-même.

Le Tribunal constate donc la nullité de la clause imposant une tarification au titre des droits de garde des titres. »

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE QUIMPER

JUGEMENT DU 6 MAI 1997

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION          (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 95/00515. Jugement n° 349.

 

DEMANDEUR(S) :

- L'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS DE CORNOUAILLE UFC QUE CHOISIR QUIMPER

dont le siège social est situé [adresse], prise en la personne de son Président, Monsieur X. domicilié en cette qualité audit siège

- L'UNION FÉDÉRALE DES CONSOMMATEURS UFC QUE CHOISIR BREST

dont le siège social est situé [adresse], prise en la personne de son Président, Monsieur Y. domicilié en cette qualité audit siège,

Représentées par Maître FEVRIER, Avocat au Barreau de QUIMPER,

 

DÉFENDEUR(S) :

La CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL DU FINISTÈRE

dont le siège social est situé [adresse], Représentée par Maître LE CLEACH, Avocat au Barreau de QUIMPER,

 

PRÉSIDENT : Sandra FOUCAUD

GREFFIER : Nicole URCUN

PLAIDOIRIES : 5 mars 1996

Affaire mise en délibéré au 23 mai 1996 puis prorogée au 6 mai 1997.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :

L'UFC QUE CHOISIR QUIMPER est titulaire d'un compte numéro 0329XX auprès du Crédit Agricole de PLOGASTEL SAINT GERMAIN.

Le 24 février 1987, elle souscrivait un bulletin de souscription de SICAV UNIASSOCIATION.

Une pré-information avait été faite auprès de l'Association par l'Agence bancaire spécifiant que cette souscription était faite « sans frais ».

Le 11 mars 1988, l'Union Locale UFC QUE CHOISIR brestoise souscrivait le même type de SICAV auprès de son Agence bancaire située à BREST.

En juin 1990, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel adressait à ses clients, dont les deux requérantes, une lettre circulaire, par laquelle elle les avisait qu'elle mettait en place un service nouveau, dont le coût était de 12,50 Francs par mois, coût qui serait prélevé annuellement sur leur compte, le 31 juillet.

Dès le 20 juin 1990, l'Union locale brestoise protestait contre cette pratique autoritaire de la banque imposant des services qu'elle n'avait jamais sollicités et refusait de régler les frais de garde de titres.

Un courrier du même type lui était adressé par l'Union Fédérale de Cornouaille, le 30 juillet 1990.

Les 19 juillet et 7 août 1990, la banque répondait à chacune des associations, qu'elle avait vu là « le moyen de (se) doter des moyens indispensables pour optimiser les placements de (sa) clientèle ».

Les 20 juin et 5 novembre 1990, les deux requérantes protestaient à nouveau, auprès du Crédit Agricole, contre sa façon de procéder et lui demandaient de rembourser, sans retard, les sommes perçues indûment le 1er août 1990 sur leur compte, sans autorisation préalable.

Elles confirmaient qu'elles souhaitaient pouvoir continuer à « bénéficier de l'ancienne formule de dépôt de titres ».

Leurs démarches restant vaines, les deux associations de BREST et QUIMPER saisissaient le Tribunal d'Instance de QUIMPER par acte du 19 avril 1995 aux fins suivantes :

Vu l'article 1134 du Code Civil,

- [minute page 3] Dire nulle la clause imposée par le Crédit Agricole par lettre circulaire de juin 1990, imposant une tarification au titre des droits de garde de titres,

- Condamner le Crédit Agricole à rembourser les sommes suivantes :

* à l'Union Locale de Consommateurs de QUIMPER :

1er août 1990                                        150,00 Francs

2 août 1991                                           150,00 Francs

5 août 1992                                           165,00 Francs

7 août 1993                                           175,00 Francs

1er août 1994                                        185,00 Francs

825,00 Francs

* à l'Union Locale de Consommateurs de BREST :

1er août 1990                                        150,00 Francs

2 août 1991                                           150,00 Francs

5 août 1992                                           165,00 Francs

7 août 1993                                           175,00 Francs

1er août 1994                                        185,00 Francs

825,00 Francs

- Dire que ces sommes produiront intérêts au taux légal à compter de leur perception,

À l'exception des sommes de 150 Francs prélevées le 1er août 1990 qui produiront intérêts au taux légal majoré de moitié à compter pour l'Union Locale de QUIMPER, du 20 août 1990, pour l'Union Locale de BREST, du 5 novembre 1990,

- Condamner le Crédit Agricole à une somme de 5.000 Francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- Le condamner aux entiers dépens.

Au soutien de leurs demandes, les requérantes exposent qu'à l'origine, aucun frais n'était facturé dans le cadre de la convention « compte géré Association ».

Elles s'opposent donc à cette pratique de la Banque consistant à imposer arbitrairement à ses clients un nouveau service payant, ce qui est contraire aux dispositions de l'article 1134 du Code Civil et de l'article L. 122-3 du Code de la Consommation aux termes duquel « tout professionnel ... prestataires de services, qui aura indûment perçu d'un consommateur un paiement sans engagement exprès et préalable de ce dernier, est tenu de restituer les sommes ainsi prélevées. »

[minute page 4] En réponse, la CRCAM du Finistère présente les demandes reconventionnelles suivantes :

- Dire et juger irrecevables et mal fondées les demandes de l’UFC QUE CHOISIR - QUIMPER et de l'UFC QUE CHOISIR - BREST,

- Les en débouter,

- Les condamner au paiement de la somme de 5.060 Francs par application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile,

- Condamner l'UFC QUE CHOISIR - QUIMPER et l'UFC QUE CHOISIR BREST, aux entiers dépens.

Pour s'opposer à ces demandes, la Banque fait valoir qu'elle a mis en place un nouveau service, à compter du mois de juillet 1990, qui va bien au-delà de la simple conservation des titres puisque désormais le client reçoit :

- un relevé faisant apparaître les mouvements intervenus sur le compte titres,

- une information périodique sur la Conjoncture,

- et comme par le passé, un relevé annuel valorisé en francs et l'imprimé fiscal annuel permettant au client de remplir sa déclaration de revenus.

Elle souligne que le coût de ce service nouveau, qui constitue une amélioration incontestable, est fixé à 12,50 Francs par mois, prélevés annuellement sur le compte du client le 31 juillet, le montant du prélèvement étant entièrement déductible de ses revenus.

Elle fait par ailleurs observer que les requérants ne contestent nullement l'intérêt de ce nouveau service, se contentant d'en contester le coût.

Au surplus, elle relève que les demandeurs n'ont pas contesté dans les dix jours du prélèvement sur le compte courant, de sorte que leur demande est tout à fait irrecevable et, en outre, mal fondée.

 

MOTIFS (justification de la décision)  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS ET DÉCISION :

- SUR LA DEMANDE PRINCIPALE :

Aux termes des dispositions de l'article 1134 du Code Civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

[minute page 5] Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Il résulte des éléments du débat que jusqu'à la lettre circulaire émise par la banque au mois de juin 1990, la gestion des comptes titres se réalisait sans frais pour le titulaire.

Il résulte clairement des correspondances échangées que la CRCAM du Finistère a décidé, de manière tout à fait unilatérale, d'une part d'imposer un nouveau service à ses clients et d'autre part de facturer des frais à hauteur de 12,50 Francs par mois.

Il apparaît pour le moins curieux, voire choquant, qu'une banque impose à ses clients un nouveau service, quand bien même celui-ci constituerait une amélioration appréciable.

Au surcroît, il s'agit là d'une modification unilatérale des conditions contractuelles initiales, contraire aux dispositions de l'article 1134 du Code Civil ci-dessus rappelées.

Le Tribunal ne saurait suivre le raisonnement de la banque quant au délai de dix jours, lequel est applicable aux opérations faites par la Banque dans le cadre de la convention de gestion Association.

Cette disposition permet au titulaire du compte de contester, le cas échéant, les opérations intervenues.

Ce délai ne saurait en revanche s’appliquer s'agissant de modifications contractuelles du fonctionnement de la gestion elle-même.

Le Tribunal constate donc la nullité de la clause imposant une tarification au titre des droits de garde des titres.

En conséquence, il y a lieu de faire droit aux demandes de remboursement dans les termes mêmes de l'assignation.

 

- SUR LES DÉPENS ET L'ARTICLE 700 DU NOUVEAU CODE DE PROCÉDURE CIVILE :

La CRCAM du Sud-Finistère doit être condamnée aux dépens et à payer aux demandeurs une indemnité de 3.000 Francs sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                    (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 6]

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant publiquement, en dernier ressort, par jugement CONTRADICTOIRE,

DÉCLARE nulle la clause visant à imposer une tarification au titre des droits de garde de titres ;

En conséquence, CONDAMNE la CRCAM du Sud-Finistère à rembourser les sommes suivantes :

- à L'Union Locale de Consommateurs de QUIMPER :

1er août 1990                                        150,00 Francs

2 août 1991                                           150,00 Francs

5août 1992                                            165,00 Francs

7 août 1993                                           175,00 Francs

1er août 1994                                        185,00 Francs

825,00 Francs

(HUIT CENT VINGT CINQ FRANCS)

- à L'Union Locale de Consommateurs de BREST :

1er août 1990                                        150,00 Francs

2 août 1991                                           150,00 Francs

5 août 1992                                           165,00 Francs

7août 1993                                            175,00 Francs

1er août 1994                                        185,00 Francs

825,00 Francs

(HUIT CENT VINGT CINQ FRANCS)

avec intérêts au taux légal à compter de leur perception, à l'exception des sommes de CENT CINQUANTE FRANCS (150 Francs) prélevées le PREMIER AOÛT MIL NEUF CENT QUATRE VINGT DIX qui produiront intérêts au taux légal majoré de moitié à compter pour l'UNION LOCALE DE QUIMPER du 20 août 1990, pour l'UNION LOCALE DE BREST du 5 novembre 1990 ;

DÉBOUTE les parties de toute demande plus ample ou contraire ;

CONDAMNE la CRCAM du Sud-Finistère aux dépens et à payer aux demandeurs une indemnité de TROIS MILLE FRANCS (3.000 Francs) sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Ainsi jugé et prononcé à l’audience publique du Tribunal d'Instance de QUIMPER.

LE GREFFIER,               LE PRÉSIDENT,