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6108 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Caractéristiques du bien ou du service - Principe

Nature : Synthèse
Titre : 6108 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Modification du contenu du contrat - Modification unilatérale - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Caractéristiques du bien ou du service - Principe
Pays : France
Rédacteurs : Xavier HENRY
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CERCLAB - SYNTHÈSE DE JURISPRUDENCE - DOCUMENT N° 6108 (10 juillet 2020)

PROTECTION CONTRE LES CLAUSES ABUSIVES DANS LE CODE DE LA CONSOMMATION - PRÉSENTATION PAR CLAUSE

MODIFICATION DU CONTENU DU CONTRAT - CLAUSE DE MODIFICATION UNILATÉRALE

 DROIT ANTÉRIEUR AU DÉCRET DU 18 MARS 2009 - MODIFICATION DES CARACTÉRISTIQUES DU BIEN OU DU SERVICE (DÉCRET DU 24 MARS 1978 - R. 132-2 C. CONSOM.) - PRINCIPE : CLAUSES ABUSIVES

Auteur : Xavier HENRY (tous droits réservés © 2020)

 

Présentation : décret du 24 mars 1978 - ancien art. R. 132-1 C. consom. (droit antérieur au décret du 18 mars 2009). Selon l’alinéa premier de l’art. 3 du décret n° 78-464 du 24 mars 1978, codifié à l’ancien art. R. 132-2 C. consom. (décret n° 97-298 du 27 mars 1997 créant la partie réglementaire du Code de la consommation), applicable jusqu’à son abrogation par le décret du 18 mars 2009, « dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, est interdite la clause ayant pour objet ou pour effet de réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les caractéristiques du bien à livrer ou du service à rendre ». L’unique exception prévue par l’alinéa 2 concerne les modifications liées à l’évolution technique et est soumise à différentes conditions (V. Cerclab n° 6109).

Annexe 1.k) à l’ancien art. L. 132-1 C. consom. (directive et droit antérieur). Le point 1.k) de l’annexe à la directive du 5 avril 1993, reprise sous l’ancien art. L. 132-1 C. consom., dans sa version résultant de la loi du 1er février 1995 et jusqu’à son abrogation à compter du 1er janvier 2009, a abordé ces stipulations dans des termes similaires mais pas identiques au décret. Selon cette disposition, pouvaient être regardées comme abusives, si elles satisfont aux conditions posées au premier alinéa de l’ancien art. L. 132-1 C. consom. et à condition, en cas de litige, que le demandeur apporte la preuve de ce caractère abusif, les clauses ayant pour objet ou pour effet d’autoriser les professionnels à modifier unilatéralement sans raison valable des caractéristiques du produit à livrer ou du service à fournir.

Articulation des deux textes. La prohibition posée par le décret ne concernait que les clauses portant sur la modification unilatérale des caractéristiques du bien à livrer ou du service à rendre. Pour les autres, notamment celles relatives au prix, la clause pouvait être déclarée abusive par référence à l’ancien art. L. 132-1 C. consom., le cas échéant en s’inspirant d’autres points de l’annexe (j et l).

Quant aux clauses relevant du décret, si la prohibition de principe était la même, l’exception était formulée dans des termes différents : elle était plus large dans la directive (« raison valable ») que dans le décret (« évolution technique »). Toutefois, la liste figurant à l’annexe est indicative et, par ailleurs, la directive n’interdit pas aux États d’accroître la protection, ce que réalisait justement le décret en présumant abusives certaines stipulations.

Méconnaissance du texte. Il convient de remarquer que les décisions recensées ont fréquemment examiné le caractère abusif des clauses de modification unilatérale, mais qu’elles l’ont souvent fait sans se référer explicitement à l’ancien art. R. 132-2 C. consom.

A. DOMAINE DE LA PROHIBITION

Débiteur concerné. Dans la plupart des cas, la livraison du bien ou la fourniture du service incombent au professionnel. Cependant, la protection contre les clauses abusives est également applicable dans les contrats synallagmatiques inversés, où le consommateur est créancier du prix et débiteur d’un bien à livrer ou d’un service à rendre (pour les hypothèses V. Cerclab n° 5838). Une clause permettant au professionnel de modifier unilatéralement les obligations du consommateur pouvait également tomber sous le coup de l’ancien art. R. 132-2 C. consom. La solution est d’autant plus justifiée qu’une telle stipulation pourrait aboutir à un accroissement des obligations du consommateur et, corrélativement, à une diminution du prix payé par le professionnel. § Rappr. d’ailleurs la condamnation des clauses directes autorisant le professionnel à diminuer le prix quand c’est lui qui en est le débiteur : Recomm. n° 80-01/5° (location d’emplacement publicitaire ; recommandation de l’élimination des clauses visant à autoriser unilatéralement le preneur à diminuer le prix, à suspendre ou à résilier le contrat).

Contrats visés. Contrairement à l’art. 2 du décret du 24 mars 1978, codifié à l’ancien art. R. 132-1 C. consom. (Cerclab n° 5841), qui ne visait que les contrats de vente, l’art. 3 concernait tous les contrats, quelle que soit leur nature, sauf à jouer sur la formule « du bien à livrer ou du service à rendre ». Il convient de remarquer que contrairement à l’opposition classique vente/prestation de services, l’expression « bien à livrer » peut parfaitement s’appliquer à une location.

Clauses visées. Contrairement au décret du 18 mars 2009, l’art. 3 du décret du 24 mars 1978 ne concernait pas toutes les clauses de modification, mais uniquement celles portant sur les caractéristiques du bien à livrer ou du service à rendre. La solution emportait plusieurs conséquences.

* Formation du contrat. L’art. 3 du décret du 24 mars 1978 ne s’appliquait pas aux clauses concernant la formation du contrat. § Pour une illustration : n’est pas abusive au sens de l’ancien art. L. 132-1 C. consom., 2e alinéa, la clause selon laquelle « l’assureur se réserve le droit de solliciter des examens ou renseignements complémentaires, de refuser ou d’accepter à des conditions spéciales les personnes dont l’état de santé présente un caractère d’aggravation » et ainsi « peut soit accepter le risque soumis, soit limiter les garanties, soit proposer une tarification spéciale soit refuser le risque soumis », dès lors qu’étant relative à la formation du contrat d’assurance, l’assureur pouvant ou non accepter le risque ou limiter les garanties ou proposer une tarification spéciale en considération des renseignements médicaux portés à sa connaissance et l’emprunteur pouvant notifier son désaccord, elle n’entre pas dans le champ d’application de l’ancien art. R. 132-2 C. consom. interdisant les clauses ayant pour objet ou pour effet de réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les caractéristiques du bien à livrer ou du service à rendre. CA Amiens (1re ch. 2e sect.), 18 mai 2006 : RG n° 04/01560 ; Cerclab n° 2388, sur appel de TGI Laon, 24 février 2004 : Dnd.

* Détermination des obligations. L’ancien art. R. 132-2 C. consom. ne visait, comme le décret du 18 mars 2009, que les clauses de modification unilatérale du contrat par le professionnel, ce qui présuppose que les caractéristiques du bien à livrer ou du service à fournir aient été définitivement fixées. Or, dans certains contrats, notamment les contrats d’entreprise, certaines prestations peuvent ne pas être connues au moment de la conclusion du contrat (V. le nouvel art. 1165 C. civ. qui autorise le prestataire à fixer unilatéralement le prix, à charge pour lui de le motiver en cas de contestation et sauf action en dommage et intérêts en cas d’abus dans la fixation du prix). Même dans ce cas, cependant, la prohibition reste applicable aux éléments qui auraient été définitivement figés (ex. impossibilité de modifier le coût horaire de la main d’œuvre applicable au moment de la conclusion).

Rappr., sans référence à ce texte, pour la détermination du contenu du contrat servant de référence : apparaît critiquable au sens de l’ancien art. L. 312-9 C. consom., la clause autorisant l’assureur et l’établissement de crédit à imposer à l’adhérent des modifications du contrat, en raison de l’évolution des textes législatifs, réglementaires et des conventions concernant la définition et l’indemnisation du chômage, dans la mesure où elle pourrait s’appliquer à des assurés ayant adhéré, certes après une modification législative ou réglementaire, mais au vu de formulaires d’adhésion et de notices d’information eux-mêmes non encore modifiés. TGI Paris (1re ch. 1re sect.), 1er mars 1995 : RG n° 11447/94 ; Cerclab n° 424 ; RJDA 6/95, n° 772 (donné acte à un assureur de son offre de procéder à la modification de la clause).

Est abusive la clause qui autorise le prestataire à modifier le contenu des prestations, dans des cas insuffisamment précis, laissant place à l'arbitraire, et sans permettre au consommateur de s'y opposer ou d'obtenir une quelconque contrepartieTGI Paris 9 octobre 2006 : RG n° 03/17492 ; Cerclab n° 3608 (assurance prévoyance obsèques) - TGI Paris (1re ch. 3e sect.), 9 octobre 2006 : RG n° 03/17490 ; jugt n° 8 ; Cerclab n° 4258 (assurance prévoyance obsèques ; solution identique pour une clause voisine). § Comp. pour le choix du prestataire : TGI Paris 9 octobre 2006 : RG n° 03/17492 ; Cerclab n° 3608 (absence de caractère abusif de la clause réservant au groupement lié à l’assureur le droit de choisir, le moment venu, l'entrepreneur de pompes funèbres qui exécutera le contrat, parmi les prestataires de services de son réseau, le souscripteur conservant sa liberté de choix sa vie durant, puisqu’il peut à tout moment et avec effet immédiat faire usage de la faculté de résiliation unilatérale qui lui est reconnue ; N.B. cette solution a été posée avant la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 qui permet le changement d’opérateur) - TGI Paris (1re ch. 3e sect.), 9 octobre 2006 : RG n° 03/17490 ; jugt n° 8 ; Cerclab n° 4258 (idem).

* Durée du contrat. Contrairement au décret du 18 mars 2009 qui vise explicitement la modification de la durée du contrat, l’ancien art. R. 132-2 C. consom. n’évoquait pas cette modification. Néanmoins, il était possible de soutenir que la durée du contrat pouvait se rattacher indirectement aux caractéristiques dans le temps du bien à livrer (ex. réduction ou allongement de la durée d’un abonnement ou d’une location) ou du service à rendre (ex. modification de la durée d’un contrat de téléphonie ou d’assurance).

La Commission des clauses abusives a admis cette extension : caractère abusif des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel, pendant le cours de l’exécution du contrat, d’en modifier unilatéralement la durée convenue. Recomm. n° 01-02/2° : Cerclab n° 2196 (recommandation générale sur la durée du contrat). § Dans le même sens : Recomm. 87-01/3° : Cerclab n° 2179 (location de coffre-fort ; recommandation de l’élimination des clauses qui ont pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier unilatéralement, en cours de contrat, la durée de la location, sans faire dépendre ces modifications d’une clause contractuelle prenant en considération des événements ne dépendant pas exclusivement de la volonté du professionnel). § Rappr., pour des clauses réduisant la durée des prestations (mais pas celle du contrat) : Recomm. n° 08-02/5° : Cerclab n° 2206 (hébergement de personnes âgées ; considérant n° 5 ; recommandation de la suppression des clauses ayant pour objet de permettre à l’établissement de modifier unilatéralement la durée ou la nature des prestations complémentaires initialement convenues, telles que le ménage ou le nombre de repas).

* Rectification d’une erreur matérielle. Sous réserve de la vérification de sa réalité, la rectification d’une erreur matérielle ne peut être considérée comme une modification du contrat, mais au contraire le retour à son contenu initial et il n’est d’ailleurs pas nécessaire de prévoir une clause particulière à cet effet (au demeurant, la rectification peut profiter indifféremment à l’une ou l’autre des parties).

V. implicitement en ce sens : CA Paris (pôle 4 ch. 8), 22 septembre 2011 : RG n° 09/25055 ; Cerclab n° 3344 (téléphonie mobile ; arrêt admettant que la nouvelle rédaction de la clause est satisfaisante dès lors que la modification du numéro de l’abonné, par l’opérateur, est limitée à certains cas exceptionnels liés à des erreurs matérielles dans l’attribution de numéros). § Comp. pour la Commission sous l’angle de l’éventuelle ambiguïté de la clause : Recomm. n° 04-01/2° : Cerclab n° 2167 (traitement contre les insectes xylophages ; recommandation de l’élimination des clauses ayant pour effet ou pour objet de laisser croire au consommateur que le professionnel a la possibilité de modifier les conditions du contrat en raison d’une erreur fût-elle matérielle).

* Modifications d’importance secondaire. La lettre de l’ancien art. R. 132-2 C. consom. ne faisait aucune distinction en fonction du caractère principal ou secondaire des modifications imposées par le professionnel. Néanmoins, il pouvait sembler nécessaire d’introduire une certaine souplesse dans l’interprétation de ce texte en comprenant les « caractéristiques » du bien ou du service comme ne visant que les caractéristiques principales qui ont réellement déterminé le consentement du consommateur (rappr. l’art. L. 111-1 C. consom. qui a toujours visé les « caractéristiques essentielles du bien ou du service »).

Rappr. pour une décision n’écartant pas le principe de l’admission d’une certaine tolérance dans la livraison du bien (qu’on peut rencontrer aussi en droit commun pour l’appréciation des non conformités et que le jugement avait admise), mais l’écartant en l’espèce compte tenu de l’imprécision de la clause : est abusive la clause prévoyant pour l’exécution de mobiliers spéciaux, une tolérance répondant aux usages de la profession, tant dans les dimensions que dans les éléments constitutifs ne modifiant en rien les caractéristiques du produit, dès lors que la notion de mobiliers spéciaux est indéterminée, que les usages de la profession ne sont pas précisés et qu’aucun droit de demander la résolution de la vente n’est réservé en contrepartie à l’acheteur. CA Grenoble (1re ch. civ.), 14 septembre 1999 : RG n° 97/01463 ; arrêt n° 510 ; Cerclab n° 3110 (meubles de cuisine), infirmant TGI Grenoble (4e ch.), 3 février 1997 : RG n° 95/04708 ; jugt n° 42 ; Cerclab n° 3153 (absence de déséquilibre s’agissant manifestement d’écarts mineurs s’inscrivant dans une tolérance admise par la profession du fabricant et ne modifiant pas les caractéristiques du produit). § V. aussi pour une décision n’écartant apparemment pas une tolérance de 5 % dans une vente d’immeuble à construire, dans son principe même, mais en raison de la façon dont elle pouvait couvrir une modification de l’agencement des pièces. CA Nancy (1re ch. civ.), 12 avril 2011 : RG n° 10/517 et 09/01330 ; arrêt n° 11/01176 ; Cerclab n° 2961 (violation des anciens art. R. 132-2 et R. 132-1 C. consom. ; pour le résumé, V. infra), confirmant sur ce point TGI Nancy, 22 février 2010 et TGI Nancy, 14 mai 2009 : RG n° 08/02733 ; Dnd.

* Modifications favorables au consommateur. La lettre de l’ancien art. R. 132-2 C. consom. ne tenait pas compte non plus du caractère éventuellement purement favorable pour le consommateur de la modification (ex. augmentation du débit d’un fournisseur d’accès). La solution semble assez mal venue. Pour admettre la possibilité d’une telle modification, deux explications peuvent être avancées : 1. l’amélioration du bien ou du service résulte, le cas échéant, d’une évolution technique ; 2. une offre de modification purement favorable au consommateur peut relever des exceptions où le silence vaut consentement lorsque l’offre est dans l’intérêt exclusif de son destinataire.

V. pour l’admission d’une interprétation souple par la Commission des clauses abusives : la Commission recommande d’éliminer des contrats de séjours linguistiques les clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier sur des points importants le programme et les prestations convenus et d’exclure en ce cas tout droit à réparation des consommateurs. Recomm. n° 94-03/3° : Cerclab n° 2161 (clause abusive et illégale en vertu de l’art. 20 de la loi du 13 juillet 1992, mais de légères modifications de programme ou d’horaires sont inhérentes à ce type de séjours). § V. aussi : Recomm. n° 84-02/B, 3° : Cerclab n° 2175 (contrats de transport terrestres de voyageurs ; caractère abusif des clauses permettant au transporteur, hormis les cas de force majeure, de modifier unilatéralement l’itinéraire du transport ; considérant n° 4 évoquant une modification « importante » de l’itinéraire).

* Modifications imposées au professionnel. Certaines modifications peuvent être rendues nécessaires par de véritables cas de force majeure ou par des contraintes impératives de gestion. L’ancien art. R. 132-2 C. consom., tout comme le décret du 18 mars 2009, ne prévoit aucune possibilité explicite de dérogation dans cette hypothèse. Les recommandations et décisions recensées font montre pourtant d’un certain réalisme, en ne contestant pas forcément le principe de la modification, mais en l’encadrant (droit de résilier sans sanction notamment). V. ci-dessous pour les clauses de modifications des horaires et pour le droit de résilier.

* Modifications d’un contrat à durée indéterminée. L’ancien art. R. 132-2 C. consom. ne prévoyait pas de dérogation particulière lorsque le contrat est à durée indéterminée (le décret du 18 mars 2009 n’a évoqué cette question que pour le prix). Or, sauf si le contrat a prévu une durée minimale avec des prestations garanties ayant déterminé le consentement du consommateur, il semble impossible d’interdire au professionnel de faire évoluer son offre de services. La modification doit s’accompagner d’un droit pour le consommateur de résilier le contrat sans pénalité.

Peu de décisions recensées évoquent cette difficulté. V. cependant : l’interdiction de principe de tout pouvoir unilatéral dans une relation contractuelle destinée à une certaine durée est synonyme de rigidité au point de pouvoir apparaître contre nature dans un environnement évolutif. TGI Nanterre (6e ch.), 3 mars 2006 : RG n° 04/03016 ; site CCA ; Cerclab n° 3181 ; Juris-Data n° 2006-308052 (clause abusive en raison de ses modalités, non conforme à l’alinéa 2 de l’ancien art. R. 132-2 C. consom.). § N’est pas abusive la clause autorisant le fournisseur à modifier à tout moment tout ou partie du service, en cas de nécessité ou lorsqu’il l’estime raisonnable, avec information préalable de l’utilisateur et possibilité pour celui-ci de mettre fin au contrat à tout moment, dès lors que cette faculté de modification unilatérale, soumise à l’acceptation du cocontractant, est la contrepartie de la durée illimitée du contrat. TI Sélestat, 18 juin 2001 : RG n° 11-01-000070 ; Cerclab n° 4188 ; Lexbase (accès internet).

B. ILLUSTRATIONS DE CLAUSES PROHIBÉES

Nécessité d’une clause de modification. Un fournisseur d’accès internet n’est pas fondé, après l’échec d’un changement de formule, à substituer au forfait 100 heures un forfait 60 heures, qui a nécessairement pour effet de majorer de façon significative le coût global de sa consommation, dès lors qu’aucune clause du contrat ne permet à l’opérateur d’imposer à l’abonné une diminution ultérieure du nombre d’heures comprises dans le forfait. TI Vanves, 13 janvier 2004 : RG n° 11-03-000758 ; jugt n° 30/2004 ; Cerclab n° 4205 (jugement évoquant au surplus la recommandation de la Commission condamnant les clauses de modification).

Nécessité d’une modification : contrôle des clauses fixant les caractéristiques du bien ou du service. En évitant qu’une caractéristique ne fasse l’objet d’un accord des parties, le professionnel peut échapper aux conséquences d’une éventuelle modification. Il est donc important de contrôler les éléments définissant le bien ou le service. Pour une illustration : est abusive la clause qui ne définit le véhicule que par ses seules caractéristiques techniques, alors que l'objet de la commande ne concerne pas que les données techniques du véhicule mais aussi sa couleur, le nombre de portes, ses garnitures, ses accessoires etc., en rendant ainsi possible la modification par le professionnel des autres caractéristiques du véhicule prétendument acceptées comme étant non substantielles par le consommateur, ce qui emporte déséquilibre à son détriment. CA Grenoble (1re ch. civ.), 16 mars 2004 : RG n° 01/03912 ; Cerclab n° 3125 (« les parties sont convenues que le véhicule commandé est défini par ses seules caractéristiques techniques, telles que mentionnées au présent bon de commande à l'exclusion de toutes autres considérations »), infirmant TGI Grenoble (6e ch.), 6 septembre 2001 : RG n° 2000/552 ; jugt n° 239 ; Cerclab n° 3165 (l'encadré « bon de commande » ne comporte pas de cadre spécifique pour préciser ce que seraient des « caractéristiques techniques », cet adjectif pouvant être source d'interprétation susceptible d'avantager le professionnel ; N.B. : le jugement est infirmé sur la sanction, le tribunal ayant supprimé uniquement un membre de phrase ce qui s’apparente à une réécriture interdite), sur pourvoi Cass. civ. 1re, 14 novembre 2006 : pourvoi n° 04-15645 ; arrêt n° 1432 ; Bull. civ. I, n° 489 (arrêt n° 1) ; Cerclab n° 2800 ; précité (clause non discutée).

Différence entre la modification des caractéristiques et l’évolution technique. Est abusive la clause qui, insérée dans un article plus vaste consacré aux conséquences de l’arrêt d’une formule d’abonnement proposée par le fournisseur, laisse un délai de trente jours au consommateur pour résilier, choisir une nouvelle formule ou se voir imposer une formule par défaut, dès lors que la clause ne précise pas les raisons de cette modification unilatérale qui pour être valable doit être faite pour répondre à une évolution technique du service et proposée au même prix. TGI Nanterre (1re ch. sect. A), 2 juin 2004 : RG n° 02/03156 ; site CCA ; Cerclab n° 3993 (fourniture d’accès internet ; clause abusive en raison d’une rédaction imprécise, au regard de l’ancien art. R. 132-2 C. consom.), confirmé par adoption de motifs par CA Versailles (1re ch. 1re sect.), 15 septembre 2005 : RG n° 04/05564 ; Cerclab n° 3146 ; Juris-Data n° 2005-283144 ; Lamyline

V. par exemple, les hésitations provoquées par les clauses autorisant le remplacement d’une carte SIM : ne sont pas abusives les clauses prévoyant que l’opérateur peut remplacer la carte SIM à tout moment, « pour quelque cause que ce soit » dans une version du contrat, ou « en cas de défaillance constatée de celle-ci ou dans le cadre d’évolutions techniques ou commerciales » dans une autre version, dès lors que la carte SIM ne peut être assimilée au service lui-même qui est contractuel, et consiste en la mise à disposition d’une ligne, et que les modifications qui pourraient être apportées sur cette carte sont donc sans incidence sur le service offert au consommateur. TGI Paris (1re ch. 1re sect.), 20 octobre 1998 : RG n° 1819/97 ; jugt n° 3 ; Site CCA ; Cerclab n° 4027 ; D. Affaires 1999. 860, obs. V.A.-R. ; RJDA 1999/6, n° 729. § Comp. pour une analyse différente, pour un autre contrat : si la restitution de la carte à son propriétaire n’est pas critiquable en cas de résiliation de l’abonnement, est abusive la clause de remplacement de la carte SIM sur simple demande de l’opérateur, qui laisse toute latitude à ce dernier pour modifier les conditions d’accès de l’abonné au service, à sa seule discrétion, sans même avoir à justifier du moindre motif. TGI Paris (1re ch. 1re sect.), 16 mars 1999 : RG n° inconnu ; Site CCA ; Cerclab n° 4023 ; D. Affaires 1999. 860, obs. V.A.-R. ; RJDA 1999/6, n° 729. § Comp. : absence de preuve par l’association de consommateurs que la possibilité de retrait de la carte SIM permet à l’opérateur de modifier unilatéralement le service proposé au détriment du consommateur. TGI Nanterre (1re ch. A), 17 mars 1999 : RG n° 12004/98 ; Site CCA ; Cerclab n° 4013 ; D. Affaires 1999. 860, obs. V.A.-R. ; RJDA 1999/6, n° 729.

Prohibition générale des clauses autorisant une modification unilatérale : Commission des clauses abusives. La Commission des clauses abusives a rappelé à de multiples reprises le caractère abusif des clauses autorisant le professionnel à modifier unilatéralement le contrat, sans nécessairement viser explicitement le décret du 24 mars 1978 et en utilisant parfois des formules plus larges que la seule modification des caractéristiques du bien à livrer ou du service à rendre (N.B. il convient de remarquer que la recommandation de synthèse n° 91-02 n’a pas évoqué les clauses de modification unilatérale).

V. par exemple : la Commission rappelle que sont interdites par le décret du 24 mars 1978 et ont déjà été visées par de précédentes recommandations en vue de leur élimination les clauses ayant pour objet ou pour effet de réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les caractéristiques du bien à livrer. Recomm. n° 82-03 : Cerclab n° 2152 (installation de cuisine ; considérant n° 10). § La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses qui ont pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier unilatéralement le contenu du contrat et l’étendue des obligations des parties. Recomm. n° 91-01/B-3° : Cerclab n° 2159 (établissements d’enseignement). § Dans le même sens : Recomm. n° 84-02/B, 3° : Cerclab n° 2175 (contrats de transport terrestres de voyageurs ; caractère abusif des clauses permettant au transporteur, hormis les cas de force majeure, de modifier unilatéralement l’itinéraire du transport ; considérant n° 4 évoquant une modification « importante » de l’itinéraire) - Recomm. n° 85-03 : Cerclab n° 2155 (hébergement de personnes âgées ; B-1° : recommandation de l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier unilatéralement le contenu du contrat ; B-22° : même recommandation pour les clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier unilatéralement l’objet du contrat par la suppression de certains services ou la modification de leur organisation ou en imposant au consommateur de changer de logement ou de chambre, et notamment de passer d’une chambre privative à une chambre partagée avec d’autres consommateurs ; A-4° - commission recommandant la conclusion d’un avenant) - Recomm. 87-01/3° : Cerclab n° 2179 (location de coffre-fort ; recommandation de l’élimination des clauses qui ont pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier unilatéralement, en cours de contrat, les caractéristiques de l’emplacement loué, sans faire dépendre ces modifications d’une clause contractuelle prenant en considération des événements ne dépendant pas exclusivement de la volonté du professionnel) - Recomm. n° 94-03/3° : Cerclab n° 2161 (séjours linguistiques ; recommandation de l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier sur des points importants le programme et les prestations convenus et d’exclure en ce cas tout droit à réparation des consommateurs ; clause abusive et illégale en vertu de l’art. 20 de la loi du 13 juillet 1992, mais de légères modifications de programme ou d’horaires sont inhérentes à ce type de séjours) - Recomm. n° 98-01/1° : Cerclab n° 2191 (télévision par câble et à péage ; recommandation de l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier la liste des chaînes annoncées sans information préalable et sans offrir au consommateur la faculté de résilier son contrat pour ce motif ; considérant n° 4 : opérateur n’entendant pas s’engager sur la liste des chaînes et programmes disponibles en ne les mentionnant pas dans le contrat mais uniquement dans les documents publicitaires ; considérant n° 5 : clause de modification unilatérale des programmes sans notification) - Recomm. n° 99-02 : Cerclab n° 2193 (téléphones portables ; n° 14 : restitution de la carte SIM sur simple demande du professionnel pour quelque cause que ce soit, sans que cette prérogative soit justifiée uniquement par des exigences de sécurité ou l’amélioration du service, puisqu’elle vise des conditions imprécises telles que l’évolution commerciale ; n° 22 : modification unilatérale, sans indemnité, des données pratiques de l’abonnement, clause contraire à l’ancien art. R 132-2 C. consom.) - Recomm. n° 05-01/3° : Cerclab n° 2170 (camping ; recommandation de l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de délivrer au consommateur pour effectuer des travaux ou emménagements un emplacement de camping autre que celui qui était prévu au contrat, sans réserver cette possibilité aux travaux nécessités par l’urgence manifeste ; considérant n° 3 : sauf urgence, les travaux peuvent être effectués pendant les périodes de fermeture des campings) - Recomm. n° 08-01 : Cerclab n° 2205 (voyages par internet ; 9 : changement d’aéroport aux frais du consommateur ; 17 : changement de ville de départ aux frais du consommateur ; 10 : changement de mode de transport sans indemnisation et sans cause exonératoire conforme aux art. L. 211-17 C. tourisme et L. 121-20-3 C. consom. ancien) - Recomm. n° 08-02/5° : Cerclab n° 2206 (hébergement de personnes âgées ; considérant n° 5 ; recommandation de la suppression des clauses ayant pour objet de permettre à l’établissement de modifier unilatéralement la durée ou la nature des prestations complémentaires initialement convenues, telles que le ménage ou le nombre de repas ; clauses ne prévoyant aucune justification) - Recomm. n° 08-03/D-22 : Cerclab n° 2207 (transport international régulier par autocar ; recommandation de l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au transporteur de modifier unilatéralement les caractéristiques du service à rendre, voire même d’en supprimer l’exécution ; clause évoquée prévoyant qu’en cas de suppression ou de défaillance du service, seul le montant du billet est remboursé).

Sont abusives les clauses de variation du taux de l’intérêt qui ne soumettent pas cette variation à des critères objectifs préalablement convenus, en laissant à la discrétion du prêteur le choix des modalités de variation du taux du crédit, assorties au surplus de modalités restreignant l’intérêt, pour l’emprunteur, d’opter pour le maintien des conditions initiales du crédit. CCA (avis), 27 mai 2004 : avis n° 04-02 ; Boccrf ; Cerclab n° 3609 (crédit renouvelable avec mise à disposition d’une carte de paiement), sur demande de TI Bourganeuf, 21 avril 2004 : Dnd, et après avis TI Bourganeuf, 8 décembre 2004 : Dnd - CCA (avis), 27 mai 2004 : avis n° 04-03 ; Boccrf ; Cerclab n° 3610 (crédit renouvelable avec mise à disposition d’une carte de paiement ; même analyse), sur demande de TI Bourganeuf, 21 avril 2004 : Dnd, et après avis TI Bourganeuf, 8 décembre 2004 : Dnd.

Prohibition générale des clauses autorisant une modification unilatérale : juges du fond. Est abusive, au regard de l’ancien art. R. 132-2 C. consom., la clause qui permet d’office et sans préavis au fournisseur de modifier unilatéralement les caractéristiques du service à rendre en supprimant le contenu des boîtes aux lettres si celles-ci n’ont pas été consultées pendant plus de 90 jours. TGI Paris (1re ch. soc.), 5 avril 2005 : RG n° 04/02911 ; Cerclab n° 3182 ; Juris-Data n° 2005-266903 (accès internet). § Même solution pour la suppression de la boite aux lettres et de son contenu « en cas d’inactivité prolongée de l’abonnement ». TGI Paris (1re ch. soc.), 5 avril 2005 : précité. § Est abusive, comme contraire à l’ancien art. R. 132-2 C. consom. (rédaction antérieure au décret de 2009), la clause permettant au professionnel de communiquer des offres de location pour lesquels les loyers sont supérieurs de 20 % au prix souhaité par le client et/ou qui portent sur des logements situés dans une commune dont la plus proche limite est distante d’au plus 10 kms des limites des communes choisies par l’adhérent. TGI Grenoble (4e ch. civ.), 30 juin 2003 : RG n° 2001/01435 ; jugt n° 162 ; Cerclab n° 3172 (vente de listes d’appartements en location). § Est abusive la clause d’un contrat de vente en l’état futur d’achèvement prévoyant qu’une tolérance de 5 %, en plus ou en moins, sera admise dans l’exécution des travaux par rapport aux cotes des plans, et que dans cette limite aucune réclamation ne sera prise en considération, étant entendu que ces surfaces seront appréciées globalement et non pièce par pièce, dès lors qu’elle permet d’une part au vendeur de modifier unilatéralement les caractéristiques du bien à livrer, une modification des cotes des plans pouvant entraîner non seulement une diminution de surface, mais pouvant avoir aussi une incidence sur la distribution des pièces, leur configuration, leur destination et leur usage, sans que ces modifications soient justifiées par les caractéristiques techniques du bâtiment et qu’elle autorise d’autre part le vendeur-constructeur à livrer un bien d’une surface inférieure sans indemnisation. CA Nancy (1re ch. civ.), 12 avril 2011 : RG n° 10/517 et 09/01330 ; arrêt n° 11/01176 ; Cerclab n° 2961 (violation des art. R. 132-2 et R. 132-1 C. consom.), confirmant sur ce point TGI Nancy, 22 février 2010 et TGI Nancy, 14 mai 2009 : RG n° 08/02733 ; Dnd. § V. dans le même sens : TGI Paris (1re ch. 1), 30 octobre 1996 : jugt n° 4786/96 ; Cerclab n° 3663 ; Juris-Data n° 1996-046989 (caractère abusif des clauses exonérant ou limitant la responsabilité du prestataire hors le cas de force majeure en cas de modification des transports, horaires, itinéraires et dates, dès lors que par leur généralité, elles confèrent au prestataire un avantage manifestement excessif alors que le préjudice subi peut être important), confirmé par CA Paris (1re ch. B), 2 octobre 1998 : RG n° 1997/01533 ; Cerclab n° 1099 ; D. affaires 1998, p. 1851, obs. V.A.-R. ; RJDA 1998/12, n° 1424 (caractère abusif notamment de la clause autorisant le changement de résidence) - TGI Paris (1re ch. 1), 19 novembre 1996 : RG n° 20365/95 ; Cerclab n° 3679 ; Juris-Data n° 1996-046988 (caractère abusif de la clause autorisant le changement de résidence ; jugement ajoutant que si le mode de transport ou l’horaire de voyage peuvent être susceptibles de modification sans causer de grave préjudice au consommateur, il n’en va pas de même des dates prévues, qui ont été choisies par la famille en toute connaissance de cause, qui s’est organisée en fonction de ces données, et qui peut rencontrer d’importantes difficultés, s’agissant pour nombre de participants, de mineurs, lorsque les dates de départ ou de retour sont décalées) - TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 4 février 2003 : RG n° 02/11174 ; jugt n° 2 ; Cerclab n° 3862 ; D. 2003. 762, note Manara ; JCP 2003. II. 10079, note Stoffel-Munck ; Juris-Data n° 218093 et n° 204208 (vente sur internet ; est abusive la clause qui autorise le professionnel à modifier à tout moment les termes du contrat, sans raison valable spécifiée, contraire au point j) de l'annexe à l’ancien art. L. 132-1 C. consom.).

Rappr. abordant le caractère abusif sous l’angle d’une clause exonérant le vendeur de son obligation de délivrance conforme : est abusive la clause d’un contrat de vente d’un escalier intérieur stipulant que « l’entrepreneur se réserve la faculté d’apporter au produit commandé toutes modifications suppressions ou améliorations jugées nécessaires », dès lors que cette clause a pour effet de soustraire le vendeur à toute obligation de délivrance d’une chose conforme à la commande et, par voie de conséquence, à toute responsabilité en cas d’inexécution d’une telle obligation. CA Metz (ch. civ.), 18 février 1997 : RG n° 718/96 ; Cerclab n° 673 ; Juris-Data n° 1997-042621 (décision rendue sous l’empire de la loi de 1978, sans référence au décret de mars 1978, seul le consommateur revendiquant l’art. 2 du décret), infirmant TGI Metz (1re ch. civ.), 21 décembre 1995 : RG n° 3648/93 ; Cerclab n° 669 (décision n’examinant pas le problème des clauses abusives, comme étant sans influence sur l’issue du litige).

V. aussi sans référence aux clauses abusives, sous l’angle de l’ancien art. 1134 C. civ. [1193 nouveau] : nullité de la clause par laquelle une banque, dans un contrat de Sicav, impose un service supplémentaire et institue une tarification au titre des droits de garde des titres, dès lors que cette stipulation constituait une modification unilatérale des conditions contractuelles initiales, contraire aux dispositions de l’ancien art. 1134 C. civ., en instaurant une facturation pour la gestion des comptes titres qui se réalisait jusqu’alors sans frais pour le titulaire. TI Quimper, 6 mai 1997 : RG n° 95/00515 ; jugt n° 349 ; Cerclab n° 3095 ; Juris-Data n° 1997-045162.

Clauses trompant le consommateur sur ses droits. Selon une solution désormais classique, le professionnel ne peut maintenir une clause illicite dans le contrat, ce maintien trompant le consommateur sur ces droits et créant un déséquilibre significatif par asymétrie d’informations (V. aussi ci-dessous pour les clauses trompant aussi le consommateur sur les conditions de l’alinéa 2 Cerclab n° 6109 et plus généralement Cerclab n° 6026). Dans cet esprit, une clause laissant croire que le professionnel disposerait d’un droit unilatéral de modification pourrait être déclarée abusive.

V. en ce sens : la Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour effet ou pour objet de laisser croire au consommateur que le professionnel a la possibilité de modifier les conditions du contrat en raison d’une erreur fût-elle matérielle. Recomm. n° 04-01/2° : Cerclab n° 2167 (traitement contre les insectes xylophages). § La Commission recommande l’élimination, dans les contrats de commerce électronique, des clauses ayant pour objet ou pour effet de faire croire que le professionnel est en droit de modifier unilatéralement les caractéristiques du bien à livrer ou du service à rendre. Recomm. n° 07-02/10 : Cerclab n° 2204 (contrats de vente mobilière conclus sur Internet et de commerce électronique ; clause contraire à l’ancien art. R. 132-2 C. consom., dans sa version antérieure au décret du 18 mars 2009).

Clauses modifiant le délai d’exécution du contrat. Pour une condamnation par la Commission des clauses abusives des clauses permettant de modifier unilatéralement la date d’exécution du contrat : Recomm. n° 04-01/3° : Cerclab n° 2167 (traitement contre les insectes xylophages).

Pour un arrêt de la Cour de cassation examinant une clause de délai indicatif sous l’angle de l’art. 3 du décret (implicitement, le choix d’une date différente de livraison est une modification de celle mentionnée au contrat) : est abusive une clause de délai indicatif, exonérant de surcroît le vendeur de toute responsabilité en cas de retard, par application des articles 2 et 3 du décret du 24 mars 1978, qui procure un avantage excessif au professionnel, en lui laissant en fait l’appréciation du délai de livraison et en réduisant le droit à réparation prévu par l’art. 1610 C. civ. en cas de manquement par le vendeur à son obligation essentielle de délivrance dans le temps convenu. Cass. civ. 1re, 16 juillet 1987 : pourvoi n° 84-17731 ; arrêt n° 866 ; Bull. civ. I, n° 226 ; Cerclab n° 2114 ; D. 1988. p. 49, note Calais-Auloy ; JCP 1988. II. 21000, note Paisant.

Clauses concernant les horaires d’utilisation des services. Les professionnels gérant des services offerts à un grand nombre d’usagers (ex. : établissements ouverts au public, transports routiers, ferroviaires ou aériens) peuvent être amenés à modifier les horaires initialement prévus. Ces aménagements ne peuvent a priori relever de l’évolution technique prévue par l’alinéa 2 de l’ancien art. R. 132-2 C. consom., mais il est également facile de comprendre que ces modifications peuvent relever d’une organisation générale de l’entreprise et donc d’une certaine forme de contrainte pesant sur le professionnel. Au minimum, si la modification est indispensable et qu’elle est importante, elle doit s’accompagner du droit pour le consommateur de résilier le contrat.

V. par exemple, pour la Commission des clauses abusives : Recomm. n° 87-03/III-2° : Cerclab n° 2158 (club de remise en forme ; recommandation d’éliminer les clauses permettant au professionnel gérant un club sportif de modifier le contrat, notamment quant aux horaires et aux activités, sauf à offrir au consommateur une faculté de résiliation et un remboursement prorata temporis).

V. pour les juges du fond : CA Rennes (aud. solen.), 19 novembre 2004 : Jurinet ; Cerclab n° 1787 (à défaut d’être précisés au contrat, les horaires d’ouvertures et les prestations offertes dans le cadre de la formule d’abonnement retenue par le consommateur ne sont pas contractuels ; une telle disposition du règlement intérieur est donc abusive, puisqu’elle permet au professionnel de modifier les horaires ou de supprimer certaines prestations, à sa discrétion, alors qu’inversement le consommateur en l’absence d’engagements clairs et définis du professionnel à cet égard, se trouve empêché de pouvoir en tirer argument pour se délier), reprenant la même solution que CA Rennes (1re ch. B), 30 mars 2001 : RG n° 00/01559 ; arrêt n° 351 ; Cerclab n° 1806, cassé par Cass. civ. 1re, 21 octobre 2003 : pourvoi n° 01-13239 ; arrêt n° 1279 ; Cerclab n° 2020 (cassation totale pour refus d’octroi de dommages et intérêts à l’association), infirmant TGI Brest, 9 février 2000 : RG n° 98/01245 ; Cerclab n° 344 (disposition interprétée restrictivement n’autorisant pas le professionnel à modifier unilatéralement et sans raison valable ces horaires qui entrent dans le champ contractuel).

Clauses préjudiciables au consommateur dans ses relations avec des tiers. Certains contrats (téléphonie, internet, etc.) affectent au consommateur des identifiants qu’il utilise dans ses relations avec les tiers. Leur changement par décision unilatérale du professionnel et sans motif est une modification minime au regard du contrat (tous les services restent disponibles) mais fondamentale dans l’usage effectif que le consommateur fait du service, notamment dans ses relations avec les tiers.

V. pour la Commission des clauses abusives : Recomm. n° 99-02 : Cerclab n° 2193 (téléphones portables ; n° 3 : changement de numéro d’appel sans préavis, motif, ni indemnité spécifiés au contrat).

Les décisions recensées ont largement admis ce caractère abusif. V. par exemple : est abusive la clause autorisant l’opérateur à modifier, de façon discrétionnaire et sans préavis, le numéro d’appel qui est un élément substantiel de la prestation de service et dont la stabilité est essentielle car il participe de l’identité de l’abonné à l’égard des tiers. TGI Nanterre (1re ch. A), 17 mars 1999 : RG n° 12004/98 ; Site CCA ; Cerclab n° 4013 ; D. Affaires 1999. 860, obs. V.A.-R. ; RJDA 1999/6, n° 729 (préavis permettant à l’abonné de prévenir ses correspondants). § Est abusive la clause autorisant l’opérateur à modifier le numéro d’appel « suite à des contraintes techniques », sans aucune précision, qui revient à lui conférer un pouvoir unilatéral de modifier le code de reconnaissance d’un de ses clients et de perturber, sans contrepartie, en violation des dispositions de l’ancien art. R. 132-2 C. consom., les relations de ce client avec les personnes à qui il a pu communiquer son numéro. TGI Grenoble (6e ch.), 7 septembre 2000 : RG n° 1999/05575 ; jugt n° 196 ; Site CCA ; Cerclab n° 3162 ; Juris-Data n° 2000-133385 ; D. 2000. 385, note Avena-Robardet (jugement visant également de façon erronée l’ancien art. R. 132-1 C. consom. qui ne concernait que la vente). § Est abusive la clause autorisant l’opérateur à modifier unilatéralement le numéro de l’abonné, dès lors qu’elle ne précise pas les motifs d’un tel changement en laissant l’opérateur libre d’agir arbitrairement et qu’elle ne prévoit aucune indemnité, en se contentant d’informer l’abonné un mois à l’avance tout en lui laissant la possibilité de résilier son abonnement. TGI Nanterre (1re ch. A), 10 septembre 2003 : RG n° 02/03296 ; Cerclab n° 3991 ; Juris-Data n° 2003-221400. § V. aussi dans le même sens : TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 21 février 2006 : RG n° 04/02910 et 04/08997 ; jugt n° 2 ; site CCA ; Cerclab n° 4024 (accès internet avec téléphonie ; est abusive au regard de l’ancien art. R. 132-2 C. consom. la clause autorisant le fournisseur à modifier unilatéralement le numéro téléphonique attribué pour des raisons techniques qui ne sont en aucune façon définies), infirmé par CA Paris (25e ch. B), 13 février 2009 : RG n° 06/06059 ; Cerclab n° 3145 (arrêt estimant que la clause avait été modifiée ou supprimée avant le jugement) - TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 30 septembre 2008 : RG n° 06/17792 ; jugt n° 5 ; Cerclab n° 4038 (suppression d’une clause définissant de manière trop large les motifs justifiant le changement de numéro d’appel), et sur l’appréciation de l’exécution du jugement CA Paris (pôle 4 ch. 8), 22 septembre 2011 : RG n° 09/25055 ; Cerclab n° 3344 (la nouvelle rédaction qui prévoit désormais que si, dans certains cas exceptionnels liés à des erreurs matérielles dans l’attribution de numéros, l’opérateur est contraint de modifier le numéro d’appel de l’abonné, il en informe l’abonné au plus tard un mois avant la mise en œuvre de la modification, qui circonscrit les cas dans lesquels le changement de numéro peut être décidé, remédie aux griefs retenus par le jugement du 30 septembre 2008 ; il appartiendra au juge du fond d’apprécier si ces nouveaux motifs justifiant le changement de numéro peuvent constituer une clause abusive ; l’arrêt estime aussi, confirmant le jugement sur ce point, que l’information de l’abonné sur sa faculté de résiliation et sur le point de départ de son exercice satisfont au jugement au fond), infirmant TGI Paris (JEX), 26 novembre 2009 : RG n° 09/83431 ; Dnd (jugement prononçant une astreinte).

Est abusive la clause d’un contrat de fourniture d’accès internet accordant au professionnel un droit discrétionnaire d’imposer une modification du pseudonyme de l’abonné, sans avoir à justifier d’un motif à ce changement. TGI Nanterre (1re ch. sect. A), 2 juin 2004 : RG n° 02/03156 ; site CCA ; Cerclab n° 3993 (association acceptant la nouvelle rédaction de la clause visant des cas précis ; N.B. le professionnel invoquait comme motif une éventuelle fusion avec un autre fournisseur), sur appel CA Versailles (1re ch. 1re sect.), 15 septembre 2005 : RG n° 04/05564 ; Cerclab n° 3146 ; Juris-Data n° 2005-283144 (clause plus discutée en appel). § Même sens : TGI Nanterre (6e ch.), 3 mars 2006 : RG n° 04/03016 ; site CCA ; Cerclab n° 3181 ; Juris-Data n° 2006-308052 (accès internet).

V. cependant en sens contraire, mais avec une interprétation restrictive de la clause : n’est pas abusive la clause autorisant l’opérateur à modifier le numéro d’appel après en avoir avisé l’abonné, dès lors que la modification doit répondre à une nécessité technique ou d’organisation du service et que l’abonné en est préalablement avisé. TGI Paris (1re ch. 1re sect.), 16 mars 1999 : RG n° inconnu ; Site CCA ; Cerclab n° 4023 ; D. Affaires 1999. 860, obs. V.A.-R. ; RJDA 1999/6, n° 729.

Clauses supprimant des droits du consommateur. Est abusive la clause permettant à la banque, sous la seule réserve d’en informer le client, de mettre de manière discrétionnaire fin à la procuration d’un mandataire qu’elle avait agréé. CA Douai (1re ch. sect . 2), 27 février 2008 : RG n° 06/07192 ; Cerclab n° 4203 (suppression partielle de la clause qui prévoyait d’autres hypothèses non contestables telles que la renonciation par le mandataire, la dénonciation par le mandant, la clôture du compte ou le décès du client), confirmant TGI Lille (2e ch.), 16 novembre 2006 : RG n° 06-03705 ; Cerclab n° 4202 (la banque, qui indique avoir complété cette clause, dans le sens d’une protection du client, en y ajoutant l’expression « pour des raisons de sécurité et sans avoir à motiver sa décision», sans cependant rapporter la preuve de la modification apportée, reconnaît implicitement le caractère déséquilibré de la clause en cause qui laisse à sa libre appréciation, les motifs de révocation).

Clauses supprimant des prestations. Pour des illustrations devant la Commission des clauses abusives : Recomm. n° 80-01/5° (location d’emplacement publicitaire ; recommandation de l’élimination des clauses visant à autoriser unilatéralement le professionnel locataire à suspendre ou à résilier le contrat) - Recomm. n° 85-03/B-22° : Cerclab n° 2155 (hébergement de personnes âgées ; recommandation de l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier unilatéralement l’objet du contrat par la suppression de certains services) - Recomm. n° 85-04/I-11° : Cerclab n° 3524 (assurance multirisques-habitation ; recommandation de l’élimination des clauses donnant à un assureur le droit de réduire unilatéralement les garanties promises ou d’accroître les franchises) - Recomm. n° 08-01 : Cerclab n° 2205 (voyages par internet ; 18 : suppression de certaines prestations, clause illicite, contraire à l’ancien art. R. 132-2 C. consom. et, maintenue dans le contrat, abusive) - Recomm. n° 08-03/D-22 : Cerclab n° 2207 (transport international régulier par autocar ; recommandation de l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au transporteur de modifier unilatéralement les caractéristiques du service à rendre, voire même d’en supprimer l’exécution ; clause évoquée prévoyant qu’en cas de suppression ou de défaillance du service, seul le montant du billet est remboursé). § V. aussi pour des clauses abusives, mais aussi illégales, dès lors que la réduction des prestations porte atteinte à un minimum légal : la Commission recommande que soient éliminées des contrats les clauses qui ont pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de réduire les prestations fournies à un niveau inférieur à celui prescrit par une disposition législative ou réglementaire. Recomm. n° 84-03, B-8° : Cerclab n° 2154 (hôtellerie de plein air).

Pour les juges du fond : est abusive la clause qui, insérée dans un article plus vaste consacré aux conséquences de l’arrêt d’une formule d’abonnement proposée par le fournisseur, laisse un délai de trente jours au consommateur pour résilier, choisir une nouvelle formule ou se voir imposer une formule par défaut, dès lors que la clause ne précise pas les raisons de cette modification unilatérale qui pour être valable doit être faite pour répondre à une évolution technique du service et proposée au même prix. TGI Nanterre (1re ch. sect. A), 2 juin 2004 : RG n° 02/03156 ; site CCA ; Cerclab n° 3993 (fourniture d’accès internet ; clause abusive en raison d’une rédaction imprécise, au regard de l’ancien art. R. 132-2 C. consom.), confirmé par adoption de motifs par CA Versailles (1re ch. 1re sect.), 15 septembre 2005 : RG n° 04/05564 ; Cerclab n° 3146 ; Juris-Data n° 2005-283144 ; Lamyline. § Est abusive la clause autorisant le dépositaire à interrompre le contrat sur simple appel téléphonique ou simple courrier en obligeant le déposant à reprendre ses biens dans les 72 heures. TGI Vienne, 22 juin 2000 : RG n° 375/99 ; Cerclab n° 414 (clause prohibée par l’art. R. 132-2 C. consom., en offrant au professionnel le droit de modifier unilatéralement les caractéristiques du service à rendre ; clause créant un déséquilibre significatif en permettant une résiliation discrétionnaire, sans indemnité, et dans un délai extrêmement court). § V. aussi : CA Paris (1re ch. B), 7 mai 1998 : RG n° 96/86626 ; arrêt n° 160 ; Cerclab n° 1103 ; Juris-Data n° 1998-023868 ; RJDA 8-9/98, n° 1058 ; D. Affaires 1998. 1851, obs. V.A.-R ; Lamyline (location saisonnière ; caractère abusif de la clause permettant de diminuer le nombre de couchages, alors que cet élément est un des points importants du contrat et qu’aucun élément conventionnel ne vient limiter le pouvoir unilatéral, discrétionnaire et sans contrepartie de l’agence), confirmant TGI Paris (1re ch.), 8 octobre 1996 : RG n° 15827/95 ; Cerclab n° 426 ; Juris-Data n° 1996-049942.

Clauses permettant l’adjonction de prestations. Le fait que les décisions de l’OPHLM s’imposent aux attributaires des logements ne vise que les règlements et mesures applicables aux parties communes des immeubles et ne peut concerner un contrat d’entretien des logements individuels ; impossibilité pour l’office d’imposer en cours de contrat un contrat d’entretien proposé pour les seules parties privatives sans un accord du locataire pour sa mise en application. CA Colmar (3e ch. civ. sect. B), 15 janvier 1998 : RG n° 95/05415 ; arrêt n° 3M9800059 ; Cerclab n° 1415 (accord pouvant résulter d’un engagement écrit ou d’une acceptation implicite, notamment lorsque le locataire a sollicité l’intervention de ce service et a bénéficié de ses prestations ; clause jugée non abusive dans le cadre de l’art. 4 de la loi du 6 juillet 1989), sur appel de TI Strasbourg 4 septembre 2005 : Dnd.

C. RÉGIME DES MODIFICATIONS AUTORISÉES

Présentation. En prohibant les clauses de modification unilatérale, le décret du 24 mars 1978 n’a jamais interdit des modifications résultant d’un accord des parties (V. Cerclab n° 6103), à condition que le consentement du consommateur soit donné de façon libre et éclairée.

En sens contraire, erroné : T. com. Paris (21 ch.), 4 février 2004 : RG n° 2003/001040 ; Cerclab n° 3622 ; Juris-Data n° 2004-268917 (jugement reprochant au propriétaire d’un navire, ayant conclu un contrat d’affrètement à temps pour une croisière, d’avoir accepté à la demande du client de reporter la date du voyage sans modifier les conditions de prix en conséquence, alors qu’elle proposait une prestation de qualité sensiblement inférieure, modifiant ainsi unilatéralement les caractéristiques du service à rendre, est contraire à l’ancien art. R. 132-2 C. consom.).

Pour deux avis évoquant un choix biaisé offert au consommateur : CCA (avis), 27 mai 2004 : avis n° 04-02 ; Boccrf ; Cerclab n° 3609 (crédit renouvelable avec mise à disposition d’une carte de paiement ; s’il est stipulé que l’emprunteur pourra s’opposer à cette variation, cette faculté de conserver les conditions tarifaires initiales est soumise à des conditions de forme et de délai strictes et entraîne la résiliation du contrat de crédit, de sorte que l’usage de cette faculté entraîne des conséquences suffisamment dissuasives pour que l’emprunteur ne l’exerce pas), sur demande de TI Bourganeuf, 21 avril 2004 : Dnd, et après avis TI Bourganeuf, 8 décembre 2004 : Dnd - CCA (avis), 27 mai 2004 : avis n° 04-03 ; Boccrf ; Cerclab n° 3610 (crédit renouvelable avec mise à disposition d’une carte de paiement ; même analyse).

Existence, opposabilité et preuve de la modification. Au-delà de l’appréciation de la validité de la clause de modification, la mise en œuvre de celle-ci peut également être contrôlée. Il convient notamment de s’assurer que la modification existe bien et qu’elle a été portée à la connaissance du cocontractant, à peine d’inopposabilité. Ces deux preuves incombent au professionnel.

Sur la nécessité d’une information personnalisée : est abusive la clause d’un contrat de compte de dépôt, qui se borne à prévoir l’information du client par voie de circulaire de modifications substantielles apportées à la convention, sans que le client ait été prévenu à l’avance et ainsi mis en mesure, avant leur application, de les apprécier pour ensuite mettre pertinemment en œuvre, dans le délai fixé, son droit de les refuser. Cass. civ. 1re, 28 mai 2009 : pourvoi n° 08-15802 ; Bull. civ. I, n° 110 ; Cerclab n° 2842 (clause limitant de façon inappropriée les droits légaux du consommateur de dénoncer la convention ; N.B. l’arrêt vise assez curieusement le point 1.b de l’annexe, alors que le point 2.b aurait été plus pertinent), cassant sur ce point CA Paris (15e ch. sect. B), 3 avril 2008 : RG n° 06/00402 ; Cerclab n° 4180 (une lettre circulaire est un moyen fiable permettant d’informer la clientèle et la clause laisse un délai de réflexion de trois mois suffisant pour prendre connaissance de la modification et pour la refuser).

Cassation de l’arrêt estimant que l’assuré a été mis en mesure de connaître l’étendue des garanties en l’absence de production du contrat initial qui ne permet pas de déterminer réellement les modifications alléguées par l’assureur et sans vérifier que la notice définissant les nouvelles garanties a bien été remise à l’assuré, condition déterminante de l’opposabilité des modifications apportées au contrat initial. Cass. civ. 2e, 16 juin 2011 : pourvoi n° 10-22780 ; Bull. civ. ; Cerclab n° 3438 (cassation pour violation des art. 1134 C. civ. ancien [1103 et 1193], L. 141-4 C. assur., ensemble l’art. 12 de la loi n° 89-1009 du 31 décembre 1989), cassant CA Bastia (ch. civ.), 4 novembre 2009 : RG n° 08/00402 ; Cerclab n° 3625.

Clauses prévoyant une acceptation tacite. Un des moyens les plus simples pour le professionnel de contourner la prohibition posée par l’ancien art. R. 132-2 C. consom. était de présenter la modification comme une offre faite au consommateur, tout en déduisant son acceptation de son seul silence ou de son absence de protestation passée un certain délai (sur les clauses de consentement tacite, V. plus généralement Cerclab n° 6077). Cette façon de faire suppose que le consommateur soit clairement informé de la proposition (ce qui exclut notamment qu’elle soit faite à l’occasion de l’envoi d’un autre document) et de la possibilité pour lui de la refuser, sauf à considérer que la proposition du professionnel soit alors assimilée à une résiliation du contrat (ce qui suppose d’en contrôler la possibilité et les conséquences).

La Commission des clauses abusives s’est toujours montrée réticente au regard des clauses d’acceptation tacite des modifications, quelle que soit la nature de celle-ci. Pour la position de principe : la Commission recommande que soient éliminées des contrats liant un professionnel à un non-professionnel ou consommateur les clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier à son gré des clauses d’un contrat, sans que le consommateur ait à exprimer de façon explicite son acceptation. Recomm. n° 94-01 : Cerclab n° 2186 (clauses dites de consentement implicite ; considérant n° 2 : certains professionnels envoient des documents qui sont censés être acceptés, sauf avis contraire exprimé par le consommateur dans un délai donné ; dans un tel cas, le silence ne saurait valoir consentement et le consommateur ne se trouve aucunement lié par ces nouvelles clauses). § Dans le même sens pour des clauses de modification du prix : la Commission recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre à l’émetteur de la carte de modifier unilatéralement la portée et le contenu de ses obligations, sans recueillir le consentement explicite du consommateur à ces modifications soit par la signature d’un nouveau contrat, soit par celle d’un avenant. Recomm. n° 94-02/II-7° : Cerclab n° 2187 (cartes de paiement ; considérant n° 26 ; clause prévoyant l’acceptation tacite de la modification par l’utilisation de la carte après connaissance des modifications : clause abusive ainsi que la commission l’avait signalé dans la recommandation n° 94-1). § La Commission recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet en cas de cession du contrat par le professionnel, de déduire du silence du consommateur, après un délai déterminé, son consentement implicite à de nouvelles conditions contractuelles. Recomm. n° 99-02/9 : Cerclab n° 2193 (téléphones portables ; clauses présentant faussement une modification des conditions contractuelles comme une cession, emportant obligation du consommateur à paiement sans « engagement exprès et préalable » contrairement, selon la Commission, à l’ancien art. L. 122-3 C. consom.).

Comp. CA Colmar (3e ch. civ. sect. B), 15 janvier 1998 : RG n° 95/05415 ; arrêt n° 3M9800059 ; Cerclab n° 1415 (bail HLM ; impossibilité d’imposer un contrat d’entretien des parties privatives sans l’accord du locataire, lequel peut résulter d’un engagement écrit ou d’une acceptation implicite, notamment lorsque le locataire a sollicité l’intervention de ce service et a bénéficié de ses prestations), sur appel de TI Strasbourg 4 septembre 2005 : Dnd.

Clauses écartant tout droit pour le consommateur de résilier le contrat. Certaines modifications peuvent être inévitables (ex. conséquence du comportement d’un tiers, comme la disparition d’une chaîne de télévision). Dans le même esprit que pour les modifications imposées par l’évolution technique au sens strict (V. Cerclab n° 6109), le consommateur doit pouvoir être indemnisé ou résilier le contrat si la modification est importante.

V. par exemple pour la Commission : Recomm. n° 98-01/1° : Cerclab n° 2191 (télévision par câble et à péage ; recommandation de l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier la liste des chaînes annoncées sans information préalable et sans offrir au consommateur la faculté de résilier son contrat pour ce motif).

V. aussi : la Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au vendeur de délivrer un meuble dont les caractéristiques sont différentes de celles prévues lors de la commande sans accorder à l’acheteur un droit de résolution de la vente. Recomm. n° 80-05/C-3° : Cerclab n° 2148 (considérant n° 7 ; clause déjà interdite par l’art. 3 du décret du 24 mars 1978 ; hypothèses visées : modification des dimensions, de l’essence ou de la teinte du bois, de la qualité du matériau, et des aménagements intérieurs du meuble ; les motifs précisent que le droit de résolution du contrat s’exerce « avec les conséquences de droit qui s’y rattachent »). § N.B. La clause de modification est abusive et les modifications envisagées ne peuvent être couvertes par l’exception relative à « l’évolution technique ». Elle a aussi pour effet d’exonérer le professionnel vendeur de son obligation de conformité, ce qui également abusif en vertu de l’ancien art. R. 132-1 C. consom. La solution posée par la Commission laisse perplexe en ce qu’elle n’évoque pas la possibilité d’une exécution forcée conforme au contrat. La recommandation doit peut-être être compris comme ayant voulu stigmatiser les clauses interdisant au consommateur d’agir en résolution du contrat et en réparation du préjudice causé par cette rupture, en limitant les conséquences de l’inexécution à une indemnisation.

Dans le même sens pour les juges du fond : est abusive la clause autorisant le fournisseur à modifier les identifiants, dès lors que cette modification unilatérale peut intervenir à tout moment, qu’elle qu’en soit la raison, sans prévoir en contrepartie une faculté pour le client de résilier le contrat. TGI Nanterre (6e ch.), 3 mars 2006 : RG n° 04/03016 ; site CCA ; Cerclab n° 3181 ; Juris-Data n° 2006-308052 (accès internet). § V. aussi : CA Paris (1re ch. B), 7 mai 1998 : RG n° 96/86626 ; arrêt n° 160 ; Cerclab n° 1103 ; Juris-Data n° 1998-023868 ; RJDA 8-9/98, n° 1058 ; D. Affaires 1998. 1851, obs. V.A.-R ; Lamyline (location saisonnière ; caractère abusif de la clause permettant au professionnel de modifier les conditions du séjour en cas de circonstances extérieures, non limitées à la force majeure, non compensée par la possibilité, limitée dans un laps de temps très bref, de résilier sa réservation, sans véritable dédommagement de son éventuel préjudice) - Jur. Prox. Thionville, 6 mai 2008 : RG n° 91-07-000063 ; Cerclab n° 1645 (école de coiffure ; clause de conservation des frais sur trois ans, quelle que soit la cause, alors que c’est l’école qui a déménagé ; caractère abusif de la clause qui ne réserve par la possibilité d’une révocation).

S’il est envisageable que le fournisseur soit contraint, du fait de tiers, de modifier le « bouquet » choisi par le consommateur, ces modifications ne sauraient intervenir sans notification préalable et sans faculté de résiliation, au risque de violer l’intention du contractant que constitue le consommateur et de lui retirer toute liberté contractuelle. TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 10 octobre 2000 : RG n° 99/11184 ; Site CCA ; Cerclab n° 3873 ; BRDA 2000, n° 20, p. 11 ; RJDA 2001/1, n° 94. § Est abusive au sens de l’ancien art. L. 132-1 [212-1] C. consom. la clause d’un contrat d’abonnement à des services de télévision et d’Internet par câble qui, autorise le professionnel à modifier sans notification préalable la composition des services audiovisuels, y compris le service de base. TI Vanves, 28 décembre 2005 : RG n° 11-05-000354 ; jugt n° 1358/05 (ou 1350/05) ; Cerclab n° 3098 (motivation assez peu explicite, les motifs évoquant la modification unilatérale de façon peu claire, alors que le dispositif vise l’impossibilité de résilier), suivant CCA (avis), 29 septembre 2005 : avis n° 05-05 ; Cerclab n° 3612 (avis analysant de façon plus détaillée la clause, en dissociant ses phrases : clause abusive au sens de l’ancien art. L. 132-1 [212-1] C. consom., dès lors qu’elle permet au professionnel, hors les cas prévus par l’art. R. 132-2 C. consom., de modifier et/ou de supprimer des services faisant l’objet du contrat, sans information préalable et sans offrir au consommateur la faculté de résilier le contrat ; clause au surplus illicite et contraire à l’ancien art. L. 121-84 C. consom. en ce qu’elle concerne la fourniture d’accès à l’Internet).

Pour une clause jugée valable (relative à la détermination des modalités d’exécution de l’obligation) : TGI Paris 9 octobre 2006 : RG n° 03/17492 ; Cerclab n° 3608 (assurance prévoyance obsèques ; absence de caractère abusif de la clause réservant au groupement lié à l’assureur le droit de choisir, le moment venu, l'entrepreneur de pompes funèbres qui exécutera le contrat, parmi les prestataires de services de son réseau, le souscripteur conservant sa liberté de choix sa vie durant, puisqu’il peut à tout moment et avec effet immédiat faire usage de la faculté de résiliation unilatérale qui lui est reconnue ; N.B. cette solution a été posée avant la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 qui permet le changement d’opérateur) - TGI Paris (1re ch. 3e sect.), 9 octobre 2006 : RG n° 03/17490 ; jugt n° 8 ; Cerclab n° 4258 (idem).

Clauses écartant toute indemnisation pour le consommateur. Est abusive la clause autorisant le fournisseur à modifier les identifiants pour des raisons d’ordre technique ou de sécurité, dès lors qu’elle prive l’usager de demander la réparation de tout préjudice du fait de ces modifications. TGI Paris (1re ch. sect. soc.), 21 février 2006 : RG n° 04/02910 et 04/08997 ; jugt n° 2 ; site CCA ; Cerclab n° 4024 (accès internet ; jugement visant de façon erronée l’ancien art. R. 132-1 C. consom. qui était réservé aux contrats de vente), infirmé par CA Paris (25e ch. B), 13 février 2009 : RG n° 06/06059 ; Cerclab n° 3145 (arrêt estimant que la clause avait été modifiée ou supprimée avant le jugement). § V. aussi : CA Paris (1re ch. B), 7 mai 1998 : RG n° 96/86626 ; arrêt n° 160 ; Cerclab n° 1103 ; précité.

Clauses pénalisant le consommateur lors de la modification imposée. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination, dans les contrats de transport routier ou ferroviaire urbain régulier, des clauses ayant pour objet ou pour effet d’imposer au consommateur, lors d’un changement de zone en cours d’abonnement, un mode de calcul des sommes dues qui bénéficie systématiquement au professionnel. Recomm. n° 08-03/A-4 : Cerclab n° 2207 (transport urbain régulier de passagers, routier et ferroviaire ; clause citée par la Commission prévoyant une prise d’effet le premier jour du mois concerné pour une hausse de tarif et le premier jour du mois suivant pour une baisse).

D. RÉGIMES DÉROGATOIRES

Ancien art. L. 121-84 C. consom. L’ancien art. L. 121-84 C. consom. (ord. n° 2011-1012 du 24 août 2011) disposait pour les contrats de services de communications électroniques que « tout projet de modification des conditions contractuelles de fourniture d’un service de communications électroniques est communiqué par le prestataire au consommateur par écrit ou sur un autre support durable à la disposition de ce dernier au moins un mois avant son entrée en vigueur, assorti de l’information selon laquelle ce dernier peut, tant qu’il n’a pas expressément accepté les nouvelles conditions, résilier le contrat sans pénalité de résiliation et sans droit à dédommagement, jusque dans un délai de quatre mois après l’entrée en vigueur de la modification [alinéa 1]. Pour les contrats à durée déterminée ne comportant pas de clause déterminant précisément les hypothèses pouvant entraîner une modification contractuelle ou de clause portant sur la modification du prix, le consommateur peut exiger l’application des conditions initiales jusqu’au terme de la durée contractuelle [alinéa 2] ». § N.B. Le texte a été repris par l’ordonnance du 14 mars 2016 dans le nouvel art. L. 224-33 C. consom. (seul l’art. L. 121-84 C. consom. a pu être combiné avec l’ancien art. R. 132-2 C. consom., puisque celui-ci a été abrogé par le décret du 18 mars 2009).

Commission des clauses abusives. La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de permettre au professionnel de modifier unilatéralement les conditions techniques et financières de la fourniture du service au consommateur sans prévoir la possibilité pour ce dernier de résilier le contrat sans pénalité. Recomm. n° 07-01/4° : Cerclab n° 2202 (accès internet « triple play » ; considérant 4° ; clauses visées imposant aux frais du consommateur des « mises à jour logicielles », voire un changement de matériel, pour des raisons techniques ; clause illicite, contraire à l’ancien art. L. 121-84 C. consom., et maintenue dans le contrat, abusive). § La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de réserver au professionnel la faculté de modifier de manière discrétionnaire le contenu du service offert au consommateur, en contravention avec les dispositions de l’ancien art. L. 121-84 C. consom. Recomm. n° 07-01/5° : Cerclab n° 2202 (accès internet « triple play » ; considérant 5° ; clauses visées prévoyant une modification, sans information préalable et en laissant croire que le consommateur ne peut résilier le contrat ; clause illicite, contraire à l’ancien art. L. 121-84 C. consom., et maintenue dans le contrat, abusive). § La Commission des clauses abusives recommande l’élimination des clauses ayant pour objet ou pour effet de réserver au professionnel le droit d’interrompre ou de restreindre l’accès au service, pourtant stipulé permanent ou illimité, alors même que cette interruption ne serait justifiée ni par les manquements contractuels du consommateur ni par des prescriptions légales impératives. Recomm. n° 07-01/6° : Cerclab n° 2202 (accès internet « triple play » ; considérant 6° ; clauses visées permettant de restreindre le service à la seule réception des appels en cas de consommations payantes anormalement élevées ou d’interrompre automatiquement une communication téléphonique ou une session d’Internet au-delà d’une certaine durée ; justifications impératives devant respecter les conditions prévues par le Code des postes et des communications électroniques pour les cas d’urgence, de protection de la défense nationale ou de la sécurité publique).

* Juges du fond. Pour une illustration : doit être rejetée la demande du client de maintenir les conditions initiales de son forfait illimité, dès lors que cette modification a été effectuée en application d’une clause conforme à l’ancien art. L. 121-84 C. consom. (délai de préavis, faculté de résiliation) et que le passage d’appels illimités vers les mobiles à dix heures d’appel par mois correspond aux « modification des conditions contractuelles » visées par le texte, et non une modification du service lui-même ; l’ancien art. R. 132-2 C. consom. n’est pas applicable dès lors que la loi n° 2004-669 du 9 juillet 2004 a pour objet et effet de soustraire les fournisseurs de service de communications électroniques au droit commun des contrats et aux règles applicables à ceux souscrits entre un professionnel et un non-professionnel, leur réservant un régime dérogatoire aux autres dispositions protectrices du Code de la consommation, une solution inverse qualifiant la clause d’abusive en sa partie relative à la modification des conditions contractuelles de fourniture du service revenant à qualifier d’abusif l’ancien art. L. 121-84 C. consom. CA Versailles (14e ch.), 9 septembre 2009 : RG n° 07/05200 ; Cerclab n° 2552 (téléphonie mobile ; transformation d’un contrat « 100 % illimité 24h/24 » prenant effet le 6 octobre 2005 par un forfait... dix heures par mois le 19 avril 2006 ; selon l’arrêt, l'ancien art. L. 121-84 C. consom. rend inopérantes les dispositions réglementaires des anciens art. R. 132-1 s. du même Code ; arrêt estimant que l’exigence d’un préavis et d’une faculté de résiliation sans frais était déjà prévue dans l’annexe 2-b à l’ancien art. L. 132-1 C. consom.), sur appel de TGI Nanterre (6e ch.), 18 mai 2007 : RG n° 06/10779 ; Dnd.