TI AIX-EN-PROVENCE, 23 janvier 2009
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3301
TI AIX-EN-PROVENCE, 23 janvier 2009 : RG n° 11-07-001180 ; jugement n° 75/09
(sur appel CA Aix-en-Provence (11e ch. B), 28 octobre 2010 : RG n° 09/03992 ; arrêt n° 2010/479)
Extraits : 1/ « Cette possibilité pour l'assureur d'accepter la demande d'assurance de l'emprunteur à un taux majoré, différent du taux de base de l'assurance figurant dans l'offre de crédit, est clairement et explicitement prévue par l'article 3 des conditions générales, valant notice d'assurance, que les époux X. ne contestent pas avoir reçues lors de remise de l'offre de crédit (cf. page 5 de l'offre le précisant).
Par lettre du 4 juillet 2005, soit le jour de la signature de l'offre de prêt, le CRÉDIT AGRICOLE a signifié à M. X. l'acceptation de sa demande d'assurance par la Société CNR ASSURANCES au taux majoré,
Il n'y a pas lieu de considérer que l'article 7 des conditions générales d'assurance prévoyant que l'assureur s'engage à payer au préteur les primes fixées par l'assureur constitue une clause abusive du fait que l'emprunteur aurait été contraint de donner son consentement sans connaître la nature de ses obligations, dès lors que les époux X. avaient en toute hypothèse la possibilité d'attendre la réponse de l'assureur voire de solliciter des informations complémentaires quant au coût de l'assurance avant de signer l'offre de prêt.
L'ensemble de ces constatations conduit à considérer que les époux X. étaient contractuellement tenus de s'acquitter du montant des primes fixées par la société d'assurance.
Les demandes tendant au remboursement d'une partie des primes versées ou à la fixation du montant de l'assurance à la somme de 33.865,18 € seront par conséquent rejetées. »
2/ Si les dispositions contractuelles applicables aux parties prévoyaient la possibilité pour l'assureur de fixer une prime d'assurance majorée, il doit cependant être constaté que ce dernier, se devait en vertu de l'article 3 des conditions générales d'assurances, informé par écrit l'assuré du taux de prime majoré ainsi que des risques couverts. […]
Il n'apparaît donc pas que les époux X. aient eu une information précise et complète du prêteur comme de l'assureur, avant la signature de l'offre de prêt intervenue le 4 juillet 2005, sur le montant de la prime d'assurance, constituant à l'évidence un aspect important de leur engagement, ce qui leur a manifestement fait perdre la possibilité d'envisager, en connaissance de cause, la souscription d'une assurance auprès d'un autre organisme, hypothèse explicitement envisagée par l'offre de prêt (cf. paragraphe Assurance Décès Invalidité page 5). »
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
TRIBUNAL D’INSTANCE D’AIX-EN-PROVENCE
JUGEMENT DU 23 JANVIER 2009
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11-07-001180. Jugement n° 75/09.
A l’audience publique du Tribunal d’Instance tenue le 23 janvier 2009, Sous la Présidence de Monsieur TRUC Nicolas, Juge d’Instance, assisté de Madame ANDREU Monique, Greffier, Après débats à l’audience du 28 novembre 2008, le jugement suivant a été rendu,
ENTRE :
DEMANDEUR(S) :
Monsieur X.
[adresse], représenté par Maître GASPARRI-LOMBARD-BOUSQUET, avocat au barreau de MARSEILLE
Madame X. née Y.
[adresse], représentée par Maître GASPARRI-LOMBARD-BOUSQUET, avocat au barreau de MARSEILLE
ET :
DÉFENDEUR(S) :
La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Provence
[adresse], représentée par AVO CADJI et Associés, avocat au barreau de AIX-EN-PROVENCE
Société Anonyme CNP Assurances
[adresse], représentée par SCP RIBON KLEIN DESPLATS MARTIN-LAVAL, avocat au barreau de AIX-EN-PROVENCE
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :
M. X. et son épouse née Y. ont souscrit le 4 juillet 2005 auprès de la Société CRÉDIT AGRICOLE un prêt immobilier d'un montant de 280.000,00 € à rembourser en 240 mensualités, assorti d'une assurance groupe garantissant les risques décès et invalidité dont le coût à été fixé dans l'offre de crédit à 33.865,18 €.
Soutenant que les primes d'assurance mensuelles de l'assurance dont ils se sont acquittés ne sont pas conformes au coût de l'assurance fixé par l'offre de crédit, X. et son épouse, née Y., ont fait assigner par actes d'huissier des 7 mai et 8 octobre 2008 la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL et la Société CNP ASSURANCES, assureur du crédit afin :
- que le coût de l'assurance soit fixé à 33.865,18 € soit 240 mensualités de 141,12 €,
- que les défenderesses soient solidairement condamnées à leur payer :
- pour la période du 2 août 2005 au 5 octobre 2006 : 2.469,45 € ((305,75 € - 141,12€) x 15 mois),
- pour la période du 1re novembre 2006 au 1er octobre 2007 : 517,00 € ((188,13 € - 141,12 €) x 11 mois),
- 5.000,00 € à titre de dommages et intérêts pour manquement à leur obligation d'information,
- 1.500,00 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
A l'audience du 28 novembre 2008, les époux X. ont soutenu à l'appui de leurs demandes :
- que leur action n'est pas prescrite, le montant des primes d'assurances ayant été contesté par lettre du 19 octobre 2006 ;
- que la prescription trentenaire est au demeurant applicable à l'interprétation des clauses du contrat ;
- que par lettre du 4 juillet 2005 le CRÉDIT AGRICOLE leur a fait part, sans autre précision, de l'acceptation par la Société CNP ASSURANCES de leur adhésion au contrat d'assurance « au tarif de base majoré en vigueur... » ;
- qu'ils devaient constater ultérieurement que les sommes prélevées au titre de l'assurance (305,75 € mensuels) n'étaient pas celles convenues lors de la conclusion du contrat (33.865,18 € soit une prime mensuel de 141,12 €),
- [minute page 3] qu'ils n'ont aucunement adhéré à de telles modifications, ayant une incidence sur le coût total du crédit ;
- que si la CAISSE DE CRÉDIT AGRICOLE a, de sa propre initiative en novembre 2006, réduit le montant mensuel de la prime d'assurance à 188,15 €, celui-ci n'est toujours pas conforme au contrat,
- que l'article 7 du contrat de crédit prévoyant que l'emprunteur s'engage, par anticipation, à payer les primes d'assurances aux conditions fixées par l'assureur, non portées à leur connaissance lors de la signature de l'offre de prêt, doit être jugée abusive au regard de l'article L. 132-1 du Code de la Consommation dès lors qu'il ne leur a pas été offert de résilier le contrat à la suite de la modification des conditions financières de l'assurance,
- que dès lors, seules les conditions de l'assurance déterminées par l'offre de crédit acceptée le 4 juillet 2005 leur sont opposables ;
- que la CAISSE DE CRÉDIT AGRICOLE a manqué à son obligation de renseignement et de conseil en ne les informant pas de façon claire sur la majoration du tarif d'assurance, la lettre d'information de la banque en date du 4 juillet 2005 ne mentionnant pas notamment le nouveau tarif majoré fixé par l'assureur.
La Société la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL a fait valoir :
- que l'action des époux X. est prescrite en application de l'article L. 114-1 du Code des assurances, la lettre fondant leur action étant datée du 4 juillet 2005, et les prélèvements des primes d'assurances dont le montant est contesté ayant commencé au mois d'août 2005,
- que les époux X. n'ont pas critiqué les relevés de leur compte faisant apparaître les primes d'assurance litigieuses,
- que le montant des primes a été réduit à 188,15 € à partir de l'année 2006 à des fins purement commerciales.
La Société la CAISSE RÉGIONALE DE CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL a ainsi conclu au rejet de toutes les demandes des époux X. et à leur condamnation au paiement de 1.500,00 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
La Société CNP ASSURANCES a conclu au principal à la prescription de l'action des époux X.
[minute page 4] Subsidiairement elle a soutenu
- que l'offre préalable de crédit du 23 juin 2005 précise que l'emprunteur s'engage à régler les primes de l'assurance au taux fixé par l'assureur et prévoit que celui-ci peut décider d'une majoration tarifaire,
- que les emprunteurs étaient donc parfaitement informés que le montant de l'assurance précisé dans l'offre de crédit n'était qu'indicatif et susceptible de modification par l'assureur en fonction des éléments médicaux portés à sa connaissance, l'état de santé de M. X. ayant en l'espèce justifié une surprime,
- que les époux X. ne sauraient ainsi remettre en cause le tarif des primes d'assurance,
- que n'étant pas le mandataire du CRÉDIT AGRICOLE, seul interlocuteur des emprunteurs, elle n'était tenue d'aucune obligation d'information ou de conseil envers ces derniers.
Elle a sollicité reconventionnellement une somme de 1.000,00 € en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
1/ La prescription de l'action :
Il convient de constater que la prescription biennale prévue par l'article L. 114-1 du Code des Assurances n'est applicable ni aux relations entre l'adhérent à une assurance de groupe et le souscripteur de l'assurance de groupe en l'absence de lien d'assurance, ni à l'action en responsabilité de l'assuré pour défaut d'information et de conseil relativement à l'assurance garantissant un prêt dès lors que celle-ci a trait à une période pré-contractuelle.
La prescription biennale de l'article L. 114-1 du Code des Assurances ne saurait donc être opposée aux demandes des époux X.
2/ Le montant des primes d'assurance :
Il résulte des pièces produites que les époux X. ont accepté le 4 juillet 2005 une offre de prêt immobilier, remise le 23 juin 2005, et assortie d'une assurance de groupe d'un montant estimé à 33.865,18 € (page 2 de l'offre de crédit) ce qui représente une prime mensuelle d'un montant de 141,12 €.
[minute page 5] Le paragraphe « Assurance décès invalidité » de l'offre de prêt (page 5) précise :
- que l'emprunteur s'oblige à régler les primes qui lui sont réclamées par le préteur et que leur montant peut être différent de celui figurant aux conditions financières de l'offre de crédit en raison notamment « de la majoration tarifaire liée à la décision de l'assureur »,
- que la prise d'effet du contrat d'assurance est soumise à l'acception de l'emprunteur par l'assureur.
Il doit être déduit de ces dispositions que le contrat d'assurance n'a pu être valablement formé qu'après acceptation de l'emprunteur par l'assureur qui avait la possibilité de déterminer un prime d'assurance différente de celle résultant de l'offre de crédit, compte tenu notamment des informations portées à sa connaissance quant à l'appréciation du risque, les éléments ayant en l'espèce conduit l'assureur à retenir une surprime étant le questionnaire de santé et les analyses médicales de M. X.
Cette possibilité pour l'assureur d'accepter la demande d'assurance de l'emprunteur à un taux majoré, différent du taux de base de l'assurance figurant dans l'offre de crédit, est clairement et explicitement prévue par l'article 3 des conditions générales, valant notice d'assurance, que les époux X. ne contestent pas avoir reçues lors de remise de l'offre de crédit (cf. page 5 de l'offre le précisant).
Par lettre du 4 juillet 2005, soit le jour de la signature de l'offre de prêt, le CRÉDIT AGRICOLE a signifié à M. X. l'acceptation de sa demande d'assurance par la Société CNR ASSURANCES au taux majoré,
Il n'y a pas lieu de considérer que l'article 7 des conditions générales d'assurance prévoyant que l'assureur s'engage à payer au préteur les primes fixées par l'assureur constitue une clause abusive du fait que l'emprunteur aurait été contraint de donner son consentement sans connaître la nature de ses obligations, dès lors que les époux X. avaient en toute hypothèse la possibilité d'attendre la réponse de l'assureur voire de solliciter des informations complémentaires quant au coût de l'assurance avant de signer l'offre de prêt.
L'ensemble de ces constatations conduit à considérer que les époux X. étaient contractuellement tenus de s'acquitter du montant des primes fixées par la société d'assurance.
Les demandes tendant au remboursement d'une partie des primes versées ou à la fixation du montant de l'assurance à la somme de 33.865,18 € seront par conséquent rejetées.
3/ L'obligation d'information :
Si les dispositions contractuelles applicables aux parties prévoyaient la possibilité pour l'assureur de fixer une prime d'assurance majorée, il doit cependant être constaté que ce dernier, se devait en vertu de l'article 3 des conditions générales d'assurances, informé par écrit l'assuré du taux de prime majoré ainsi que des risques couverts.
[minute page 6] Or, il ne résulte pas des pièces produites qu'une telle information ait été communiquée par écrit aux époux X. avant la signature de l'offre de crédit et leur adhésion définitive à l'assurance annexée au prêt : si le CRÉDIT AGRICOLE leur a bien fait parvenir une lettre datée du 4 juillet 2005 mais reçue le 7 juillet 2005 (cf. lettre du CRÉDIT AGRICOLE en date du 5 janvier 2007 le précisant) leur faisant part de l'acceptation de leur demande d'assurance par la Société CNP ASSURANCES « au taux majoré en vigueur », celui-ci n'est pas pour autant précisé dans cette correspondance conformément aux dispositions contractuelles susvisées.
Il n'apparaît donc pas que les époux X. aient eu une information précise et complète du prêteur comme de l'assureur, avant la signature de l'offre de prêt intervenue le 4 juillet 2005, sur le montant de la prime d'assurance, constituant à l'évidence un aspect important de leur engagement, ce qui leur a manifestement fait perdre la possibilité d'envisager, en connaissance de cause, la souscription d'une assurance auprès d'un autre organisme, hypothèse explicitement envisagée par l'offre de prêt (cf. paragraphe Assurance Décès Invalidité page 5).
Ces constatations conduisent à retenir une faute contractuelle tant du CRÉDIT AGRICOLE que de la Société CNP ASSURANCES, lesquelles seront solidairement condamnées à payer aux époux X. une indemnité arbitrée à 4.000,00 € à titre de dommages et intérêts.
4/ Les autres demandes :
L'équité requiert d'allouer 800,00 € aux époux X. en compensation de leurs frais non compris dans les dépens par application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Les circonstances du litige n'appellent pas le prononcé de l'exécution provisoire.
Les dépens seront laissés à la charge de la Société CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL et de la Société CNP ASSURANCES.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
Le TRIBUNAL, statuant en audience publique, par jugement contradictoire et en premier ressort ;
CONDAMNE solidairement la Société CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL et la Société CNP ASSURANCES à payer aux époux X. une somme de QUATRE MILLE EUROS (4.000,00 €) à titre de dommages et intérêts et une somme de HUIT CENTS EUROS (800,00 €) en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
[minute page 7] DIT que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de cette décision.
REJETTE toute autre demandes [N.B. conforme à la minute].
CONDAMNE solidairement la Société CRÉDIT AGRICOLE MUTUEL et la Société CNP ASSURANCES aux dépens de l'instance.
AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ EN AUDIENCE OU PAR MISE À DISPOSITION AU GREFFE LES JOUR, MOIS ET AN QUE DESSUS ET ONT SIGNÉ À LA MINUTE LE PRÉSIDENT ET LE GREFFIER PRÉSENTS LORS DU PRONONCÉ.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
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