CA NANCY (2e ch. civ.), 5 janvier 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 3558
CA NANCY (2e ch. civ.), 5 janvier 2012 : RG n° 11/00204
Publication : Jurica
Extrait : « La dispense de réitération de l'offre préalable, prévue par l'article L. 311-9 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à la loi du 28 janvier 2005, ne s'est jamais étendue aux nouvelles ouvertures de crédit opérées par voie d'un relèvement du découvert autorisé, ces nouvelles ouvertures de crédit ayant toujours nécessité la conclusion d'une nouvelle offre préalable.
En l'espèce, suivant l'offre préalable acceptée le 17 septembre 1999, Monsieur X. s'est vu accorder un crédit de 10.000 francs (soit 1.524,49 euros) sous forme de « découvert utile ». Le dépassement de ce montant n'était pas de droit, puisque le contrat stipulait que « sur demande expresse de l'emprunteur, le découvert utile pourra être augmenté en une fois ou par fractions successives jusqu'au montant du découvert maximum autorisé sous réserve que, depuis l'ouverture du crédit ou la précédente augmentation du découvert, l'une quelconque des conditions résolutoires suivantes n'ait pas été réalisée... ». La procédure ainsi instituée pour dépasser le découvert utile (nécessité d'une demande expresse de l'emprunteur) et la possibilité laissée au prêteur de refuser le dépassement démontrent que la limite du crédit octroyée par l'offre préalable est bien celle du découvert utile, soit 1.524,49 euros.
L'utilisation par « fractions » ne signifie pas, comme le prétend la société de crédit, que le « crédit utile » ne serait qu'une première fraction utilisable dans la limite d'une enveloppe de crédit de 7.622,45 euros (le montant du « découvert maximum autorisé »), mais elle doit être entendue comme la possibilité laissée à l'emprunteur de n'utiliser que par fractions l'enveloppe totale de crédit de 1.524,49 euros. C'est d'ailleurs ce qui s'est produit en l'occurrence : Monsieur X. a d'abord utilisé une première fraction de 1.155,41 euros (7.579 francs) en septembre 2009, puis une seconde de 256,11 euros (1 680 francs) en octobre 1999, etc. »
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE NANCY
DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 5 JANVIER 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/00204. Arrêt n° 23/12. Décision déférée à la Cour : jugement du Tribunal d'Instance de LUNEVILLE, R.G. n° 11-10-000279, en date du 30 septembre 2010,
APPELANTE :
SA FACET
prise en la personne de ses représentants légaux pour ce domiciliés au siège social, sise [adresse], représentée par la SOCIÉTÉ CIVILE PROFESSIONNELLE VASSEUR Barbara, avoués à la Cour, assistée de Maître Béatrice DUGRAVOT, avocat au barreau de NANCY
INTIMÉ :
Monsieur X.
né le [date], demeurant [adresse], n'ayant pas constitué avoué
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 10 novembre 2011, en audience publique devant la Cour composée de : Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre, Monsieur Christian MAGNIN, Conseiller, Monsieur Francis MARTIN, Conseiller, qui a fait le rapport, qui en ont délibéré ;
Greffier, lors des débats : Madame Caroline HUSSON ;
A l'issue des débats, le Président a annoncé que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 5 janvier 2012, en application du deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;
ARRÊT : Défaut, rendu par mise à disposition publique au greffe le 5 janvier 2012, par Madame Caroline HUSSON, Greffier, conformément à l'article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile ; signé par Madame Sylvette CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre et par Madame Caroline HUSSON, greffier ;
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Suivant l'offre préalable acceptée le 17 septembre 1999, la SA FACET a accordé à Monsieur X. un crédit permanent utilisable sous forme de découvert, dont le maximum autorisé était de 7.622,45 euros, avec un « découvert utile » fixé à 1.524,49 euros.
Plusieurs échéances n'ayant pas été honorées par l'emprunteur, la déchéance du terme a été prononcée le 14 avril 2010.
Par acte d'huissier du 5 juillet 2010, la SA FACET a fait assigner Monsieur X. devant le tribunal d'instance de Lunéville afin de le voir condamner, avec exécution provisoire, à lui payer la somme de 6.016,50 euros en principal, avec intérêts au taux de 15,48 % à compter du 14 avril 2010, outre une indemnité de 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Monsieur X. n'a pas comparu et ne s'est pas fait représenter devant le tribunal.
Par jugement rendu le 30 septembre 2010, le tribunal d'instance de Lunéville a déclaré irrecevable l'action en paiement de la SA FACET.
Le tribunal a motivé sa décision en relevant que la demande de la SA FACET était forclose, car le montant du découvert utile a été dépassé par Monsieur X. dès le 19 mai 2005, sans avoir jamais été restauré, alors que l'action en paiement n'a été engagée que le 5 juillet 2010.
La SA FACET a régulièrement interjeté appel de ce jugement par déclaration en date du 24 janvier 2011. Elle demande à la Cour d'infirmer le jugement déféré, de condamner Monsieur X. à lui payer la somme de 6.016,50 euros en principal, avec intérêts au taux de 15,48 % à compter du 14 avril 2010, outre une indemnité de 1.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Elle soutient que si la possibilité d'augmenter le montant du découvert utile sans établir une nouvelle offre de crédit doit être considérée comme une clause abusive, cette irrégularité devait, compte-tenu de la rédaction de l'article L. 311-37 du code de la consommation avant la loi du 11 décembre 2001, être soulevée dans les deux ans de la conclusion du crédit, ce qui n'a pas été le cas en l'espèce.
Elle ajoute que le montant du découvert maximum autorisé n'a jamais été dépassé, de sorte qu'il n'était pas utile de présenter une nouvelle offre de crédit à l'emprunteur pour dépasser le montant du découvert utile, l'information lui ayant été donnée dans l'offre initiale sur le coût d'une fraction de crédit utile supérieure à la première fraction convenue.
Elle fait enfin valoir que la sanction du défaut d'offre préalable n'est pas la forclusion mais la déchéance du droit aux intérêts.
Monsieur X. n'ayant pas constitué avoué suite à l'avis que le greffe lui adressé, la SA FACET a satisfait aux obligations des articles 902 et 911 du code de procédure civile en lui faisant délivrer, par acte d'huissier du 22 avril 2011, une assignation devant la Cour d'appel, ainsi que la notification de son appel et de ses conclusions (l'assignation à sa personne n'ayant pas été possible, l'acte a été remis en l'étude de l'huissier de justice instrumentaire).
Malgré ces diligences, Monsieur X. n'a toujours pas constitué avoué.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Vu les dernières écritures déposées le 12 avril 2011 par la SA FACET,
Vu la signification faite le 22 avril 2011,
Vu l'ordonnance de clôture rendue le 2 août 2011.
En appel, si l'intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond et la Cour ne fait droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où elle les estime réguliers, recevables et bien fondés.
Sur la forclusion de l'action en paiement :
La dispense de réitération de l'offre préalable, prévue par l'article L. 311-9 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à la loi du 28 janvier 2005, ne s'est jamais étendue aux nouvelles ouvertures de crédit opérées par voie d'un relèvement du découvert autorisé, ces nouvelles ouvertures de crédit ayant toujours nécessité la conclusion d'une nouvelle offre préalable.
En l'espèce, suivant l'offre préalable acceptée le 17 septembre 1999, Monsieur X. s'est vu accorder un crédit de 10.000 francs (soit 1.524,49 euros) sous forme de « découvert utile ». Le dépassement de ce montant n'était pas de droit, puisque le contrat stipulait que « sur demande expresse de l'emprunteur, le découvert utile pourra être augmenté en une fois ou par fractions successives jusqu'au montant du découvert maximum autorisé sous réserve que, depuis l'ouverture du crédit ou la précédente augmentation du découvert, l'une quelconque des conditions résolutoires suivantes n'ait pas été réalisée... ».
La procédure ainsi instituée pour dépasser le découvert utile (nécessité d'une demande expresse de l'emprunteur) et la possibilité laissée au prêteur de refuser le dépassement démontrent que la limite du crédit octroyée par l'offre préalable est bien celle du découvert utile, soit 1.524,49 euros.
L'utilisation par « fractions » ne signifie pas, comme le prétend la société de crédit, que le « crédit utile » ne serait qu'une première fraction utilisable dans la limite d'une enveloppe de crédit de 7.622,45 euros (le montant du « découvert maximum autorisé »), mais elle doit être entendue comme la possibilité laissée à l'emprunteur de n'utiliser que par fractions l'enveloppe totale de crédit de 1.524,49 euros. C'est d'ailleurs ce qui s'est produit en l'occurrence : Monsieur X. a d'abord utilisé une première fraction de 1.155,41 euros (7.579 francs) en septembre 2009, puis une seconde de 256,11 euros (1 680 francs) en octobre 1999, etc.
C'est le 19 mai 2005 qu'il a dépassé la limite de 1.524,49 euros, sans qu'elle fût jamais restaurée.
L'article L. 311-37 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au crédit dont s'agit, contracté en 1999, disposait que les actions engagées devant le tribunal d'instance devaient être formées dans les deux ans de l'événement leur ayant donné naissance, à peine de forclusion.
La défaillance de l'emprunteur était déjà considérée comme un « événement » au sens de l'article L. 311-37 tel qu'il était rédigé avant la loi du 11 décembre 2001.
Dans le cas d'une ouverture de crédit utilisable sous forme de découvert en compte, le dépassement du découvert autorisé, dès lors qu'il n'a pas été ultérieurement restauré, manifeste la défaillance de l'emprunteur et constitue le point de départ du délai biennal de forclusion.
Par conséquent, la SA FACET devait agir en paiement contre Monsieur X. dans les deux années ayant suivi le 19 mai 2005, soit avant le 20 mai 2007.
Or, elle n'a fait assigner Monsieur X. que le 5 juillet 2010.
Dès lors, la société de crédit est forclose en son action en paiement et le jugement déféré par lequel sa demande a été déclarée irrecevable sera confirmé.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :
La SA FACET, qui échoue en son action, supportera les dépens et sera déboutée de sa demande de remboursement de ses frais de justice irrépétibles.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LA COUR, statuant par arrêt de défaut prononcé publiquement par mise à disposition au greffe, conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile,
DÉCLARE l'appel recevable,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
DÉBOUTE la SA FACET de sa demande sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile,
LAISSE à la SA FACET la charge des dépens.
Le présent arrêt a été signé par Madame CLAUDE-MIZRAHI, Président de chambre à la Cour d'Appel de NANCY, et par Madame HUSSON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,
Minute en cinq pages.
- 6631 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 2 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Obligation de faire une offre
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