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TI AVRANCHES, 6 avril 2005

Nature : Décision
Titre : TI AVRANCHES, 6 avril 2005
Pays : France
Juridiction : Avranches (TI)
Demande : 04-000273
Décision : Sans
Date : 6/04/2005
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 27/08/2004
Décision antérieure : CA CAEN (1re ch. sect. civ. et com.), 19 octobre 2006
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CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 36

TI AVRANCHES, 6 avril 2005 : RG n° 04/000273

(sur appel CA Caen (1re ch. civ. et com.), 19 octobre 2006 : RG n° 05/01754)

 

Extraits : 1/ « Pour autant, le Tribunal souhaite indiquer que sur le fond, les articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation transposent en droit interne les dispositions de la directive n° 87-102 du Conseil du 22 décembre 1986 sur le rapprochement des droits nationaux en matière de crédit à la consommation. Ils ont donc pour finalité d'assurer, d'une part, la protection du consommateur et d'autre part, l'égalité de traitement des pratiques commerciales et concurrentielles au sein des pays de l'Union Européennes. Les règles du code de la consommation contiennent donc des impératifs d'ordre public de direction. Or, dans une telle hypothèse, le juge national est tenu, selon le droit communautaire, de veiller au plein effet des normes communautaires, au besoin en écartant les normes nationales contradictoires, même postérieures, ainsi que l'a jugé la Cour de Justice des Communautés Européennes le 9 mars 1978 (CJCE, SIMMENTHAL), décision ayant valeur normative. En outre, cette juridiction a confié au juge le soin de veiller au respect des normes communautaires même si le consommateur, par ignorance n'en demande pas l'application, par sa décision du 27 juin 2000 relative à la directive des clauses abusives (CJCE OCEANO GROUPO), qui pose un principe d'une telle généralité qu'il doit s'appliquer à la directive relative au crédit à la consommation. Par ailleurs, en droit interne, l'article 6 du code civil dispose qu'on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public et l'article 1134 du même code précise que seules les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Les dispositions en matière de crédit à la consommation sont d'ordre public, le législateur a donc manifestement une volonté de voir appliquer ces règles en tout état de cause. Aussi, il convient de considérer que le consommateur ne peut pas renoncer au bénéfice des protections prévues par des articles L. 311-1 et suivant du code civil, que ce soit explicitement ou tacitement par son silence. Le Tribunal a donc la possibilité, par jugement avant dire droit, de demander aux parties la production de pièces et leurs observations afin de respecter que les dispositions d'ordre public en matière de crédit à la consommation sont respectées. »

2/ « En l'espèce, la SA FRANFINANCE produit aux débats le contrat de crédit, un historique de compte depuis l'origine, un décompte de créance et une sommation de payer. La société ne justifie nullement de la réalisation de l'information annuelle prévue à l'article L. 311-9 du code de la consommation, Dès lors, elle doit être déchue de son droit aux intérêts. Toutefois, elle conserve les intérêts acquis au cours de la première année du contrat de crédit. »

 

TRIBUNAL D’INSTANCE D’AVRANCHES

JUGEMENT DU 6 AVRIL 2005

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 04-000273.

 

DEMANDEUR :

SA FRANFINANCE

[adresse], représentée par Maître BERLEMONT Anne-Marie, avocat au barreau d'AVRANCHES

 

DÉFENDEURS :

- Monsieur X.

[adresse], non comparant

- Madame Y. épouse X.

[adresse], non comparante

 

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Juge : MOGILKA Séverine

Greffier : SCHMOOR Marcel

DÉBATS : Après avoir entendu à l'audience publique du 19 janvier 2005 les parties présentes en leurs plaidoiries ou observations,

LE TRIBUNAL : A mis l'affaire en délibéré, Et, à l'audience publique de ce jour, 6 avril 2005, après en avoir délibéré conformément à la loi, a prononcé le jugement suivant

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                                                         (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] EXPOSÉ DU LITIGE :

Le 20 décembre 1997, la SA FRANFINANCE a présenté une offre préalable d'ouverture de crédit à Monsieur X. et Madame Y. épouse X., en qualité de co-emprunteur solidaire, valable quinze jours. Cette offre portait sur un découvert permanent d'un maximum autorisé de 30.000 francs soit 4.573,47 euros au taux effectif global. Monsieur et Madame X. ont accepté cette offre préalable, le jour même.

Par acte d'huissier en date du 27 août 2004, la SA FRANFINANCE a assigné Monsieur et Madame X., devant le Tribunal d'Instance d'AVRANCHES, aux fins d'obtenir, avec exécution provisoire, leur condamnation conjointe et solidaire au paiement de :

- la somme de 4.460,71 euros avec intérêts au taux contractuel de 15,84 % à compter du 2 juin 2004 ;

- la somme de 700 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, outre des dépens en ceux compris la sommation de payer en date du 16 juin 2004.

Par jugement avant dire droit en date du 20 octobre 2004, le Tribunal a invité les parties à présenter leurs observations sur l'application des dispositions de l'article L. 311-9 du code de la consommation.

A l'audience, la SA FRANFINANCE maintient ses demandes initiales.

Au soutien de ses prétentions, la SA FRANFINANCE invoque l'application des articles L. 311-10 et suivants du code de la consommation.

Elle explique que Monsieur et Madame X. ont cessé de régler les mensualités du découvert permanent et que malgré une sommation de payer, ils n'ont pas régularisé leur situation.

En défense, Monsieur et Madame X. n'ont pas comparu.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Aux termes de l'article 472 du nouveau code de procédure civile, si le défendeur ne comparait pas, il est néanmoins statué sur le fond ; le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l'estime régulière recevable et bien fondée.

Par ailleurs, il convient de noter que les parties n'ont présenté aucune observation suite au jugement avant dire droit.

[minute page 3] Pour autant, le Tribunal souhaite indiquer que sur le fond, les articles L. 311-1 et suivants du code de la consommation transposent en droit interne les dispositions de la directive n° 87-102 du Conseil du 22 décembre 1986 sur le rapprochement des droits nationaux en matière de crédit à la consommation. Ils ont donc pour finalité d'assurer, d'une part, la protection du consommateur et d'autre part, l'égalité de traitement des pratiques commerciales et concurrentielles au sein des pays de l'Union Européennes.

Les règles du code de la consommation contiennent donc des impératifs d'ordre public de direction.

Or, dans une telle hypothèse, le juge national est tenu, selon le droit communautaire, de veiller au plein effet des normes communautaires, au besoin en écartant les normes nationales contradictoires, même postérieures, ainsi que l'a jugé la Cour de Justice des Communautés Européennes le 9 mars 1978 (CJCE, SIMMENTHAL), décision ayant valeur normative.

En outre, cette juridiction a confié au juge le soin de veiller au respect des normes communautaires même si le consommateur, par ignorance n'en demande pas l'application, par sa décision du 27 juin 2000 relative à la directive des clauses abusives (CJCE OCEANO GROUPO), qui pose un principe d'une telle généralité qu'il doit s'appliquer à la directive relative au crédit à la consommation.

Par ailleurs, en droit interne, l'article 6 du code civil dispose qu'on ne peut déroger, par des conventions particulières, aux lois qui intéressent l'ordre public et l'article 1134 du même code précise que seules les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Les dispositions en matière de crédit à la consommation sont d'ordre public, le législateur a donc manifestement une volonté de voir appliquer ces règles en tout état de cause.

Aussi, il convient de considérer que le consommateur ne peut pas renoncer au bénéfice des protections prévues par des articles L. 311-1 et suivant du code civil, que ce soit explicitement ou tacitement par son silence.

Le Tribunal a donc la possibilité, par jugement avant dire droit, de demander aux parties la production de pièces et leurs observations afin de respecter que les dispositions d'ordre public en matière de crédit à la consommation sont respectées.

 

- Sur la demande en paiement de la société :

Aux termes de l'article L. 311-30 du code de la consommation, en cas de défaillance de l'emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu'à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l'emprunteur défaillant une indemnité, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l'application des articles 1152 et 1231 du code civil, d'un montant maximum de 8 % du capital restant dû.

[minute page 4] Par ailleurs, l'article L. 311-9 du code de la consommation exige que le prêteur indique trois mois avant l'échéance de l'ouverture de crédit, dont la durée est limitée à un an renouvelable, les conditions de reconduction du contrat. Le non-respect de cette information annuelle est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts.

En outre, en vertu de l'article 1152 du code civil, le juge peut même d'office modérer ou augmenter une clause pénale.

En l'espèce, la SA FRANFINANCE produit aux débats le contrat de crédit, un historique de compte depuis l'origine, un décompte de créance et une sommation de payer.

La société ne justifie nullement de la réalisation de l'information annuelle prévue à l'article L. 311-9 du code de la consommation,

Dès lors, elle doit être déchue de son droit aux intérêts. Toutefois, elle conserve les intérêts acquis au cours de la première année du contrat de crédit.

La déchéance du terme du contrat a eu lieu le 2 juin 2004.

Il résulte du décompte qu'à cette date, le capital restant dû était de 3.280,29 euros, et que les échéances impayées s'élevaient à la somme de 850 euros.

Ainsi, au 2 juin 2004, Monsieur et Madame X. étaient tenus au paiement de la somme de 4.130,29 euros.

Toutefois, il convient de déduire le montant des intérêts perçus entre le mois de décembre 1998 et la déchéance du terme qui s'élèvent à la somme de 3.814,46 euros (25.021,22 francs).

Par conséquent, Monsieur et Madame X. doivent être condamnés solidairement à verser à la SA FRANFINANCE la somme de 315,83 euros (4.130,29 – 3.814,46) avec intérêts au taux légal à compter du 16 juin 2004, date de la sommation de payer.

Par ailleurs, la SA FRANFINANCE demande la paiement de la somme de 330,42 euros au titre de l'indemnité de 8 % sur le capital restant dû.

Toutefois, une telle demande apparaît manifestement excessive au regard de l'économie du contrat.

La SA FRANFINANCE doit être déboutée de sa demande de ce chef.

 

- Sur les autres demandes :

L'exécution provisoire, prévue par l'article 515 du nouveau code de procédure civile, n'apparaît pas nécessaire.

Il n'y a donc pas lieu de l'ordonner.

[minute page 5] En outre, l'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile au profit de la SA FRANFINANCE.

Monsieur et Madame X., succombant à l'instance, doivent condamnés aux dépens de l'instance.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                            (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS,

Le Tribunal statuant publiquement, par décision réputée contradictoire, en premier ressort,

- CONDAMNE solidairement Monsieur X. et Madame Y. épouse X. à verser à la SA FRANFINANCE la somme de 315,83 euros au titre du crédit à la consommation suivant offre préalable en date du 20 décembre 1997 avec intérêts au taux légal à compter du 16 juin 2004 ;

- DÉBOUTE la SA FRANFINANCE de sa demande au titre de l'indemnité de 8 % du capital restant dû ;

- DIT n'y avoir lieu d'assortir la présente décision de l'exécution provisoire ;

- DÉBOUTE la SA FRANFINANCE de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

CONDAMNÉ Monsieur Patrick X. et Madame Y. épouse X. aux dépens de l'instance.