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CA POITIERS (2e ch. civ.), 20 mars 2012

Nature : Décision
Titre : CA POITIERS (2e ch. civ.), 20 mars 2012
Pays : France
Juridiction : Poitiers (CA), 2e ch. civ.
Demande : 11/03131
Décision : 12/212
Date : 20/03/2012
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 30/06/2011
Numéro de la décision : 212
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3736

CA POITIERS (2e ch. civ.), 20 mars 2012 : RG n° 11/03131 ; arrêt n° 212 

Publication : Jurica

 

Extrait : « qu'en effet, les pratiques commerciales de ventes sont imputées par Madame X. à la société CORTIX, et plus précisément à son représentant auquel elle reproche d'être venu à son domicile pendant trois heures pour la convaincre de signer les dits contrats sans lui exposer les contraintes qui y étaient liées, et en omettant notamment de préciser la durée totale de la convention ; que cette demande de nullité ne concernant que le contrat conclu avec la société CORTIX, qui n'est pas partie à la présente instance, faute d'avoir été mise en cause, elle ne peut être prononcée ;

Attendu surabondamment qu'il doit être observé que, le contrat souscrit par Madame X. ayant un rapport direct avec son activité professionnelle puisqu'il était destiné à faire connaître à une clientèle potentielle son gîte rural, les dispositions protectrices des articles L.121-1 et L.122-11 du Code de la consommation relatifs aux pratiques commerciales agressives et trompeuses, qui ne visent que les consommateurs, ne sont pas applicables ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE POITIERS

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 20 MARS 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/03131. Arrêt n° 212. Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 7 juin 2011 rendu par le Tribunal d'Instance des SABLES D'OLONNE.

 

APPELANTE :

SAS LOCAM

représentée par son Président en exercice domicilié en cette qualité au siège de la société, ayant pour avocat postulant Maître Jean-Pierre L., avocat au barreau de POITIERS, ayant pour avocat plaidant Maître Jean-Marc F., avocat au barreau de LYON,

 

INTIMÉE :

Madame Y. épouse X.

le [date] à [ville], ayant pour avocat postulant la SCP M. Francois M. Bruno P.-C. Stephanie, avocats au barreau de POITIERS, ayant pour avocat plaidant la SCP C. L. A., avocats au barreau de NANTES,

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 8 février 2012, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Jean CHAPRON, Président, Monsieur Guillaume DU ROSTU, Conseiller, Madame Nathalie PIGNON, Conseiller, qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT : - CONTRADICTOIRE - Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile, - Signé par Monsieur Jean CHAPRON, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu le jugement du tribunal d'instance des SABLES D'OLONNE du 7 juin 2011 qui a débouté la société LOCAM de l'intégralité de ses demandes à l'encontre de Madame X., et l'a condamnée à lui verser 500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu la déclaration d'appel de la société LOCAM du 30 juin 2011 et ses conclusions du 23 janvier 2012 demandant à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a écarté les revendications de Madame X., de le réformer pour le surplus, et de condamner Madame X. à lui verser la somme principale de 8.405,79 euros, outre 800 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile en première instance, et 1.200 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile en appel ;

Vu les conclusions de Madame X. du 24 novembre 2011 sollicitant à titre principal la confirmation du jugement, subsidiairement, que soit prononcée la nullité du contrat de location, au visa des articles L. 122-11 et suivants, L. 121-1, L. 121-21 et L. 121-23 du Code de la Consommation, et à titre très subsidiaire qu'une expertise soit ordonnée aux fins d'évaluer le site Internet réalisé par la société CORTIX pour son compte, de déterminer le coût de revient pour la société au regard des prestations effectuées, et dire si le prix payé pour la réalisation de ce site est en adéquation avec les prestations effectuées, et demandant enfin la condamnation de la société LOCAM à lui verser 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile ;

Vu l'ordonnance de clôture rendue le 3 février 2012 ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

Attendu que le 23 décembre 2008, Madame X., exerçant une activité de loueur de gîtes ruraux, a signé avec la société CORTIX, créateur de sites Internet :

- un bon de commande pour la création d'un site Internet de 3 pages, l'hébergement, l'administration et la maintenance du site ainsi qu'une demande de référencement sur les principaux moteurs de recherche,

- un contrat de licence d'exploitation de site Internet moyennant le versement de mensualités d'un montant de 161,46 euros par mois pour une durée ferme et irrévocable de 48 mois, les droits résultant du contrat pouvant être cédé à un cessionnaire ;

- un procès verbal de réception d'un hébergement Internet,

- une fiche de renseignement ;

Attendu que, par courrier du 31 décembre 2008, Madame X. a été informée par la société LOCAM, organisme de crédit, qu'elle venait de réaliser un financement avec cette société ; que par lettre recommandée avec accusé de réception du 29 janvier 2009, Madame X. a notifié à la société LOCAM sa volonté de résilier le contrat conclu le 23 décembre 2008 et a fait opposition au règlement des échéances mensuelles ; que par lettre recommandée du 12 mars 2009, la société LOCAM a mis en demeure Madame X. de régler les loyers impayés, lui indiquant par ailleurs qu'à défaut de règlement des impayés, le contrat litigieux se trouverait résilié à ses torts et que deviendrait exigible, outre les impayés, l'indemnité contractuelle de résiliation ; que Madame X. a déposé plainte le 17 mars 2009 à l'encontre de la société CORTIX entre les mains du Procureur de la République près le tribunal de grande instance de BORDEAUX ; que par courrier du 17 décembre 2010, Madame X. a été informée du classement sans suite de sa plainte ; que la société LOCAM a assigné Madame X. devant le tribunal d'instance des SABLES D'OLONNE qui a rendu la décision contestée ;

Attendu que la société LOCAM soutient que la société CORTIX ayant bien mis le site en ligne, la concomitance de signature des documents importe peu (bon de commande et procès verbal de réception), et qu'elle est bien fondée à se prévaloir de la résiliation anticipée du contrat pour défaut de paiement des loyers ;

Attendu que Madame X. fait valoir pour sa part la nullité du contrat de location du fait de pratiques commerciales agressives et trompeuses, ayant entraîné dans son esprit des confusions quant aux conditions financières du contrat, et quant à la personne de son cocontractant ; qu'elle prétend que le contrat serait également nul en l'absence des mentions prévues par l'article L. 121-23 du Code de la consommation pour les ventes à domicile, enfin en raison de l'absence de réception du site internet, ainsi que l'a relevé le premier juge ;

Attendu que selon l'article 1184 du Code civil, les conventions légalement formées font la loi des parties ;

Attendu en l'espèce que le contrat de licence d'exploitation du site Internet conclu entre Madame X. et la société CORTRIX stipule en son article 1 que « le client reconnaît au fournisseur la possibilité de céder les droits résultant du présent contrat au profit d'un cessionnaire et il accepte dès aujourd'hui ce transfert sous la seule condition suspensive de l'accord du cessionnaire. Le client ne fait pas de la personne du cessionnaire une condition de son accord. Le client sera informé de la cession par tout moyen et notamment par le libellé de la facture échéancier ou de l'avis de prélèvement qui sera émis. De convention expresse et sous les réserves ci-après énoncées, le cessionnaire devient propriétaire des biens immatériels liés au présent contrat, en l'occurrence le site Internet qui sera fourni au client.... » ; que Madame X. ne peut prétendre que le montage contractuel et financier aurait « entravé l'exercice de ses droits contractuels », dès lors que le contrat identifie tant le fournisseur du site que les bailleurs potentiels, parmi lesquels la société LOCAM, cessionnaire du contrat en vertu de l'article 1, et que le montant de chaque mensualité ainsi que la durée du contrat, et donc l'intégralité des conditions financières en sont précisées ;

Attendu par ailleurs que c'est à tort que Madame X. fait valoir que les pratiques commerciales de vente agressives et trompeuses utilisées par la société CORTIX à son encontre, de nature à vicier son consentement et à l'induire en erreur dans l'appréciation de la réelle portée de ses engagements contractuels, et ce dans le seul but à l'amener à conclure un contrat qu'elle n'aurait jamais contracté si elle avait été pleinement et clairement informée des conditions contractuelles, sont répréhensibles au sens des articles L. 121-1 et suivants et L. 122-11 et suivants du Code de la Consommation, et doivent entraîner la nullité du contrat de location litigieux par application de l'article L. 122-15 du même Code ; qu'en effet, les pratiques commerciales de ventes sont imputées par Madame X. à la société CORTIX, et plus précisément à son représentant auquel elle reproche d'être venu à son domicile pendant trois heures pour la convaincre de signer les dits contrats sans lui exposer les contraintes qui y étaient liées, et en omettant notamment de préciser la durée totale de la convention ; que cette demande de nullité ne concernant que le contrat conclu avec la société CORTIX, qui n'est pas partie à la présente instance, faute d'avoir été mise en cause, elle ne peut être prononcée ;

Attendu surabondamment qu'il doit être observé que, le contrat souscrit par Madame X. ayant un rapport direct avec son activité professionnelle puisqu'il était destiné à faire connaître à une clientèle potentielle son gîte rural, les dispositions protectrices des articles L. 121-1 et L. 122-11 du Code de la consommation relatifs aux pratiques commerciales agressives et trompeuses, qui ne visent que les consommateurs, ne sont pas applicables ;

Attendu que la société LOCAM a produit aux débats le procès-verbal de réception du site Internet daté du 23 décembre 2008, aux termes duquel Madame X. a déclaré avoir réceptionné le site d'hébergement « www.clients-cortix.com/vendee-gite-XX.com » ; qu'il lui incombe en conséquence de démontrer que, contrairement aux mentions de ce procès verbal, le site Internet fourni par la société CORTIX n'était pas opérationnel le jour de la signature du procès-verbal de réception, lequel déclenche, selon l'article 2 du bon de commande, d'une part l'exigibilité des échéances, et d'autre part pour le cessionnaire la faculté de règlement de la facture du fournisseur ; qu'elle ne produit aux débats aucune pièce de nature à démontrer que le site n'était pas opérationnel le jour du procès-verbal de réception alors que Madame X. ne démontre pas une quelconque impossibilité technique de mettre en ligne le site le jour même de la commande  ;

Attendu que Madame X. n'a pas usé de la possibilité qui lui était offerte par l'article 2 du contrat de contester dans les deux jours ouvrés la mise en ligne du site Internet ; qu'elle n'est dès lors pas fondée à invoquer un défaut de réception, non démontré, pour se soustraire à son obligation de paiement des échéances ;

Attendu, enfin, qu'à supposer que le site n'ait jamais été opérationnel, ce qui procède d'une allégation qui ne s'appuie sur aucun élément de preuve, il reste que la résolution du contrat de fourniture n'est pas intervenue ni ne peut être à présent prononcée, la société CORTIX n'étant pas aux partie à l'instance ;

Attendu, dans ces conditions, que le jugement entrepris sera infirmé et Madame X. condamnée à payer les sommes réclamées par la société LOCAM dont le quantum n'est pas discuté par l'intimée, la créance étant ventilée comme suit :

- loyers impayés :                     322,92 euros

- clause pénale :                       32,29 euros

- indemnité forfaitaire : 32 euros

- indemnité de résiliation :         7.289,62 euros

- clause pénale 10 % : 7           28,96 euros ;

Attendu que les intérêts sur les sommes dues n'étant pas sollicités par la société LOCAM, ils courront de plein droit à compter de la présente décision ;

Attendu que la demande subsidiaire d'expertise présentée par Madame X. est sans objet, dès lors qu'elle concerne l'exécution de ses obligations par la société CORTIX, laquelle n'est pas partie à la présente instance, et que la demande de nullité du contrat a, pour le même motif, été rejetée ;

Attendu enfin qu'il est équitable de laisser à la charge de la société LOCAM les frais exposés en première instance et en appel et non compris dans les dépens ; que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a alloué à Madame X. une indemnité fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile ; que Madame X., qui succombe, supportera les dépens de première instance et d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Infirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de la société LOCAM fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile ;

Statuant à nouveau,

Condamne Madame X. à payer à la société LOCAM la somme de 8.405,79 euros ;

Y ajoutant,

Déboute la société LOCAM de sa demande d'indemnité, en appel, fondée sur l'article 700 du Code de procédure civile ;

Condamne Madame X. aux dépens de première instance et d'appel, ces derniers étant recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,