CASS. CIV. 1re, 5 avril 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 3777
CASS. CIV. 1re, 5 avril 2012 : pourvoi n° 10-27531
Publication : Legifrance
Extrait : « Attendu que la cour d’appel qui a relevé, par motifs adoptés, que la preuve du caractère excessif de la vitesse du véhicule conduit par M. X. résultait des constatations faites par les militaires de la gendarmerie, notamment à partir de la longueur des traces de freinage et des témoignages recueillis, de sorte qu'elle ne s'est pas fondée exclusivement sur un rapport d'expertise, en a exactement déduit que la faute lourde qu'elle avait pu retenir à l'encontre de l'intéressé était exclusive du bénéfice de la clause litigieuse ; que le moyen, inopérant en ses trois premières branches et non fondé en ses deux dernières, doit être rejeté ». [N.B. première branche concerne l’article L. 132-1 C. consom.].
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR DE CASSATION
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU 5 AVRIL 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
N° de pourvoi : 10-27531.
DEMANDEUR à la cassation : Société Auto 44
DÉFENDEUR à la cassation : Monsieur X.
M. Charruault (président), président. SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat(s).
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique tel qu'il figure au mémoire en demande et est reproduit en annexe du présent arrêt :
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu, selon l'arrêt attaqué, (Rennes, 5 mars 2010), que M. X. a loué auprès de la société Auto 44, un véhicule automobile et a souscrit la garantie optionnelle « montant réduit de responsabilité », stipulée à l'article 7-1 des conditions générales, permettant le rachat partiel de la franchise « dommage » moyennant le paiement de la somme de 1.000 euros en cas de sinistre ; que le 1er juin 2003, M. X. a été impliqué dans un accident de la circulation, avec le véhicule loué et condamné pour homicide et blessures involontaires à une peine de 10 mois d'emprisonnement avec sursis, ainsi qu'à une suspension du permis de conduire pour une durée de 12 mois et à une amende de 500 euros pour défaut de maîtrise du véhicule ; qu'il a été également condamné à verser à la société Auto 44 la somme de 15.197,46 euros au titre des dommages matériels en raison de la déchéance de la garantie souscrite telle que prévue aux articles 7-2 et 3-2 des conditions générales imposant au locataire d'utiliser le véhicule en bon père de famille ;
RÉPONSE DE LA COUR DE CASSATION AU MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Attendu que la cour d’appel qui a relevé, par motifs adoptés, que la preuve du caractère excessif de la vitesse du véhicule conduit par M. X. résultait des constatations faites par les militaires de la gendarmerie, notamment à partir de la longueur des traces de freinage et des témoignages recueillis, de sorte qu'elle ne s'est pas fondée exclusivement sur un rapport d'expertise, en a exactement déduit que la faute lourde qu'elle avait pu retenir à l'encontre de l'intéressé était exclusive du bénéfice de la clause litigieuse ; que le moyen, inopérant en ses trois premières branches et non fondé en ses deux dernières, doit être rejeté ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X. aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat de M. X. et celle de la société Auto 44
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq avril deux mille douze.MOYEN ANNEXE au présent arrêt
ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils pour M. X.
RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait condamné l'exposant à payer à la société AUTO 44, franchisée EUROPCAR, la somme de 15.197,46 euros en principal, plus intérêts au taux contractuel, soit le taux légal majoré de 50 % à compter du 8 août 2005, à titre de dommages et intérêts ;
RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
AUX MOTIFS QUE la clause des conditions générales du contrat intitulée « utilisation du véhicule » portait engagement du locataire à utiliser le véhicule « en bon père de famille » conformément aux dispositions du Code de la route ; qu'en enfreignant une règle du Code de la route pour avoir été notamment déclaré coupable par le Tribunal correctionnel de [ville A.], dont la copie du jugement a été communiquée à l'instance, pour homicide involontaire par conducteur, blessures involontaires et conduite d'un véhicule à une vitesse excessive, le 1er juin 2003, Monsieur X. est tombé sous le coup de l'application de l'article 7-2 du contrat entraînant déchéance des garanties contractuelles souscrites ; que cette clause n'a pas un caractère abusif car elle précise de manière objective les cas où elle entre en œuvre au détriment du locataire qui est averti de devoir respecter pour en bénéficier l'ensemble des dispositions du Code de la route, qu'il s'agit d'une clause dont la portée est claire et compréhensible pour toute personne qui s'y engage ; qu'en outre, en tout état de cause, en commettant les délits les plus graves en matière de conduite d'un véhicule et un excès de vitesse dont l'importance a été mesurée à l'occasion de l'expertise ordonnée dans le cadre de la procédure pénale, qui révèle un dépassement de la vitesse autorisée de 40 à 55 km/h, Monsieur X. a commis une faute lourde excluant qu'il puisse bénéficier d'une clause limitative de responsabilité ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE Monsieur X. soutient que les termes de la clause de déchéance de garantie invoquée par la société demanderesse sont trop imprécis pour lui avoir permis d'avoir une exacte connaissance de l'étendue de sa garantie ; que l'article 7-2 des conditions générales du contrat de location souscrit le 28 mai 2003 stipule que le « non respect de l'une quelconque des obligations expressément stipulées dans les 2, 3-2, 4-2 des présentes conditions générales entraînera la déchéance des garanties contractuelles souscrites. Le ou les locataires seront alors responsables de la totalité du sinistre dans les conditions du droit commun de la responsabilité » ; que l'article 3-2 des conditions générales du même contrat indique : « vous vous engagez à utiliser le véhicule en bon père de famille…, conformément aux dispositions du Code de la Route » ; ces précisions sont suffisamment claires et précises pour ne créer aucune ambiguïté dans l'esprit du locataire du véhicule ; qu'il revient cependant à la SAS AUTO 44 franchisée EUROPCAR de prouver que le 1er juin 2003, Monsieur X. n'a pas eu un comportement de bon père de famille et n'a pas respecté les disposition du Code de la Route ; que la production du jugement correctionnel rendu le [date] par le Tribunal Correctionnel de [ville A.] justifie de ce que M. X. a été reconnu coupable et condamné pour avoir omis d'adapter sa vitesse à l'état de la chaussée, aux difficultés de la circulation ou aux obstacles prévisibles, ainsi que pour les délits d'homicide et de blessures involontaires ; que la réalité d'une vitesse excessive du véhicule conduit par M. X. ressort, dans la procédure établie par les militaires de la gendarmerie des circonstances mêmes de l'accident, de la longueur de ses traces de freinage (41 mètres) et des témoignages recueillis, notamment celui d'E. Y. ; que l'expert requis par le service enquêteur a permis d'établir que le système de freinage du véhicule loué n'était aucunement défaillant ; que la demande principale de la SAS AUTO 44 franchisée EUROPCAR est donc bien fondée en son principe mais également en son montant correspondant à l'indemnisation des dommages survenus au véhicule automobile loué, déduction faite de la franchise de 1.000 euros, outre les intérêts au taux contractuel, c'est-à-dire les intérêts au taux légal majorés de 50 % en application des dispositions de l'article 5 des conditions générales du contrat de location à compter de la première mise en demeure faite par lettre recommandée avec avis de réception en date de 8 août 2005 ;
MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
1°) ALORS QUE crée au détriment du locataire un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties et est donc abusive la clause qui permet au loueur d'écarter la stipulation limitant la responsabilité du locataire, prévue en contrepartie du paiement d'une prime, en cas de négligence dans la conduite, dès lors que son application n'est pas limitée à l'hypothèse d'une faute intentionnelle ; qu'en déclarant valable une telle clause, vidant la clause limitative de responsabilité de son contenu, la Cour d'appel a violé l'article L. 132-1 du Code de la consommation ;
2°) ALORS QU'en toute hypothèse les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs doivent être présentées et rédigées de façon claire et compréhensible ; qu'en faisant application de la clause des conditions générales qui excluait la limitation de la responsabilité du locataire, souscrite dans les conditions particulières, sans rechercher si le défaut de mention de cette exclusion au sein même de la stipulation limitant la responsabilité du locataire n'étaient pas de nature à rendre sa portée obscure et inintelligible, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 133-2 du Code de la consommation ;
3°) ALORS QU'en toute hypothèse les clauses des contrats proposés par les professionnels aux consommateurs s'interprètent, en cas de doute, dans le sens le plus favorable au consommateur ; qu'en faisant application de la clause qui excluait la limitation de la responsabilité du locataire s'il ne faisait pas usage du véhicule « en bon père de famille » « conformément aux dispositions du Code de la route », sans rechercher si les termes employés, qui ne faisaient référence à aucune circonstance ni aucun fait défini avec précision, n'étaient pas de nature à rendre sa portée obscure et inintelligible, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 133-2 du Code de la consommation ;
4°) ALORS QUE en affirmant, pour juger que Monsieur X. avait commis une faute lourde excluant la clause limitant sa responsabilité, que l'expertise ordonnée dans le cadre de la procédure pénale révélait un dépassement de la vitesse autorisée de 40 à 55 km/h, quand tel n'était pas le cas, le rapport de Monsieur Z., ordonné dans le cadre de la procédure pénale, se bornant à constater un « effort de freinage violent » et n'ayant pas permis d'orienter l'enquête sur le comportement du conducteur, la Cour d'appel a dénaturé le rapport d'expertise précité et violé l'article 1134 du Code civil ;
5°) ALORS QU'en toute hypothèse le juge ne peut, sans méconnaître le principe de l'égalité des armes et de la contradiction, se fonder exclusivement sur un rapport établi non contradictoirement pour justifier sa décision ; qu'en se fondant exclusivement sur l'expertise « BCA » pour affirmer que Monsieur X. avait dépassé la vitesse autorisée de 40 à 55 km/h, sans rechercher, comme elle y été invitée, si cette expertise n'avait pas été établi non contradictoirement à la demande de la société AUTO 44, franchisée EUROPCAR, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 16 du Code de procédure civile.