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TGI ORLÉANS, 4 juillet 2000

Nature : Décision
Titre : TGI ORLÉANS, 4 juillet 2000
Pays : France
Juridiction : Orleans (TGI)
Demande : 98/03355
Décision : 00/378
Date : 4/07/2000
Nature de la décision : Admission
Date de la demande : 3/12/1998
Décision antérieure : CA ORLÉANS, 12 novembre 2007, TGI ORLÉANS (ord. mise ét.), 27 février 2004
Numéro de la décision : 378
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3806

TGI ORLÉANS, 4 juillet 2000 : RG n° 98/03355 ; jugt n° 378

(sur appel CA Orléans, 12 novembre 2007 : RG n° 06/02728)

 

Extrait : « Attendu que la faute intentionnelle ou dolosive s'entend de celle qui implique que l'assuré a voulu non seulement l'action ou l'omission génératrice du dommage, mais encore le dommage lui-même ; Attendu que la charge de la preuve de la faute intentionnelle incombe à l'assureur qui oppose l'exclusion de garantie ;

Attendu que Monsieur Y a été poursuivi et déclaré coupable du chef unique de tentative d'assassinat ; Attendu que la société GROUPAMA ne rapporte pas la preuve que Monsieur Y ait poursuivi un autre but que celui d'assassiner son épouse qui a été la victime malheureuse de son dessein criminel et l'instrument involontaire de l'incendie ; Attendu qu'à défaut pour la société GROUPAMA de démontrer que Monsieur Y ait eu l'intention de mettre le feu au pavillon, il y a lieu de la condamner à garantir en exécution de la police d'assurance, les conséquences de l'incendie ;

Attendu qu'il convient d'ordonner une expertise à l'effet de déterminer les dommages résultant de l'incendie et d'en évaluer le coût ».

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D’ORLÉANS

JUGEMENT DU 4 JUILLET 2000

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 98/03355. Jugement n° 378.

 

DEMANDEURS :

Madame X. épouse Y.

née le [date] à [ville], de nationalité Française, demeurant [adresse], représentée par la SCP SACAZE GRASSIN MONANY, avocats au barreau de ORLÉANS et assisté par la SCP WOOG-SARI, avocats au barreau de PARIS

Monsieur Z. ès-qualités d'administrateur légal sous contrôle judiciaire de Madame X. épouse Y.

le [date] à [ville], de nationalité Française, demeurant [adresse], représenté par la SCP SACAZE GRASSIN MONANY, avocats au barreau de ORLÉANS et assisté par la SCP WOOG-SARI, avocats au barreau de PARIS

 

DÉFENDERESSE :

GROUPAMA ASSURANCES LOIRE BOURGOGNE,

dont le siège social est [adresse], représentée par la SCP BERGER TARDIVON, avocats au barreau de ORLÉANS

 

DÉBATS : à l'audience publique du 23 mai 2000,

[minute page 2] […].

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Président : Monsieur BERSCH

Greffier : Madame GARNAULT,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'assignation délivrée le 3 décembre 1998 à la société GROUPAMA Assurances Loire Bourgogne à la requête de Madame X. représenté par son tuteur Monsieur Z. ;

Vu les dernières écritures déposées par Madame X. et par son tuteur Monsieur Z. le 1er février 2000 et par la société GROUPAMA Assurances Loire Bourgogne le 22 mai 2000 ;

 

EXPOSÉ DU LITIGE :

Monsieur Y. a été condamné le [date] par la Cour d'Assises [département] pour avoir tenté d'assassiner son épouse Madame X. ;

Madame X. demande au tribunal de dire que la Compagnie GROUPAMA devra l'indemniser des conséquences dommageables de l'incendie survenu dans la maison où elle se trouvait, lorsque son époux a tenté de l'assassiner en l'enflammant. Elle sollicite également, la désignation d'un expert à l'effet de déterminer le montant des préjudices immobiliers et mobiliers résultant de l'incendie et réclame la condamnation de la société GROUPAMA à lui verser une indemnité de 300.000 francs et à lui payer 10.000 francs pour frais de procédure.

La société GROUPAMA qui dénie sa garantie au motif qu'elle n'a pas à répondre des dommages provenant de la faute intentionnelle de son assuré, conclut au déboutement des demandeurs et sollicite leur condamnation à lui payer la somme de 5.000 francs pour frais irrépétibles.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Attendu qu'il résulte de l'arrêt criminel de la Cour d'Assises du [département] du [date] que Monsieur Y. a été déclaré coupable de tentative d'assassinat sur son épouse et condamné pour ces faits ;

Attendu s'agissant des circonstances de la tentative d'assassinat, qu'il est constant que Monsieur Y. a arrosé son épouse [minute page 3] d'essence avant de l'enflammer ;

Qu'il est également constant que la maison dans laquelle se trouvait Madame X. située à [ville] [adresse] et qui est assurée auprès de la société GROUPAMA ainsi qu'une partie du mobilier meublant ont été incendiées à cette occasion ;

Attendu que pour s'opposer à la demande la société GROUPAMA prétend qu'elle ne peut pas être tenue à garantie dès lors, que le dommage provient d'une faute intentionnelle de l'assuré ;

Qu'elle fait valoir que Monsieur Y. investi de la détermination qui fut la sienne de retirer la vie à son épouse s'est donné tous les moyens d'y parvenir d'une part, en l'aspergeant d'essence et d'autre part, en laissant délibérément et après calcul, à proximité de la gazinière dont il avait ouvert le robinet, un bidon destiné à provoquer l'incendie du pavillon dans lequel Madame X. avait été enfermée ;

Attendu que l'article L. 113-1 alinéa 2 du Code des assurances dispose que l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré ;

Attendu que la faute intentionnelle ou dolosive s'entend de celle qui implique que l'assuré a voulu non seulement l'action ou l'omission génératrice du dommage, mais encore le dommage lui-même ;

Attendu que la charge de la preuve de la faute intentionnelle incombe à l'assureur qui oppose l'exclusion de garantie ;

Attendu que Monsieur Y a été poursuivi et déclaré coupable du chef unique de tentative d'assassinat ;

Attendu que la société GROUPAMA ne rapporte pas la preuve que Monsieur Y ait poursuivi un autre but que celui d'assassiner son épouse qui a été la victime malheureuse de son dessein criminel et l'instrument involontaire de l'incendie ;

Attendu qu'à défaut pour la société GROUPAMA de démontrer que Monsieur Y ait eu l'intention de mettre le feu au pavillon, il y a lieu de la condamner à garantir en exécution de la police d'assurance, les conséquences de l'incendie ;

Attendu qu'il convient d'ordonner une expertise à l'effet de déterminer les dommages résultant de l'incendie et d'en évaluer le coût ;

Attendu que l'incendie a incontestablement généré un préjudice matériel ;

Attendu cependant que Madame X. n’a fourni [minute page 4] aucun élément permettant d'en apprécier, même très approximativement, le montant ;

Qu'en conséquence, il y a lieu de ramener la provision qui lui sera allouée à la somme de 10.000 francs ;

Attendu que l'équité commande de condamner la société GROUPAMA assurances Loire Bourgogne à payer à Monsieur Z. ès-qualités de tuteur de Madame X. la somme de 6.000 francs en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement, par jugement contradictoire en premier ressort ;

Condamne la société GROUPAMA Assurances Loire Bourgogne à garantir, en exécution de ses engagements contractuels, les conséquences dommageables du sinistre incendie survenu le 6 décembre 1996 dans l'immeuble situé [adresse] ;

Condamne la société GROUPAMA Assurances Loire Bourgogne à payer à Monsieur Z ès-qualités d'administrateur légal sous contrôle judiciaire des biens de Madame X. la somme de 10.000 francs (dix mille francs) à titre de provision à valoir sur l'indemnisation du préjudice résultant de l'incendie ;

Ordonne une expertise ;

Commet à cet effet Monsieur A, demeurant [adresse] qui aura pour mission :

les parties et leur conseil dûment appelés ;

- de se rendre sur les lieux [adresse] ;

- de décrire les conséquences dommageables pour l'immeuble et les biens mobiliers du sinistre incendie ;

- d'estimer le coût des travaux de remises en état et la valeur des biens mobiliers dégradés ;

Dit que l'expert pourra se faire assister d'un sapiteur pour effectuer l'estimation des dégâts mobiliers ;

Dit que l'expert devra déposer un pré-rapport de ses opérations ;

[minute page 5] Dit que Monsieur Z. ès-qualités d'administrateur légal sous contrôle judiciaire des biens de Madame X. devra consigner, au greffe du tribunal avant le 1er septembre 2000, une provision de 10.000 francs (dix mille francs) à valoir sur la rémunération de l'expert ;

Dit que l'expert devra déposer son rapport au greffe dans les quatre mois de sa saisine, délai à l'issue duquel il sera, sauf prorogation dessaisi de sa mission ;

Condamne la société GROUPAMA Assurances Loire Bourgogne à payer à Monsieur Z. ès-qualités d'administrateur légal sous contrôle judiciaire des biens de Madame X. la somme de 6.000 francs (six mille francs) en application de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile ;

Condamne la société GROUPAMA Assurances Loire Bourgogne aux dépens ;

Accorde à la SCP SACAZE-GRASSIN, le droit prévu à l'article 699 du nouveau Code de procédure civile ;

Prononcé à l'audience publique du QUATRE JUILLET DEUX MILLE par Monsieur BERSCH, Juge assisté de Madame GARNAULT, Greffier.