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TI STRASBOURG, 22 mai 2009

Nature : Décision
Titre : TI STRASBOURG, 22 mai 2009
Pays : France
Juridiction : Strasbourg (TI)
Demande : 11-08-003278
Date : 22/05/2009
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 3/11/2008
Décision antérieure : CA COLMAR (3e ch. civ. sect. A), 29 mars 2010
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3840

TI STRASBOURG, 22 mai 2009 : RG n° 11-08-003278 

(sur appel CA Colmar (3e ch. civ. sect. A), 29 mars 2010 : RG n° 09/02857 ; arrêt n° 10/387)

 

Extrait : « En l'espèce, la clause sous « frais de scolarité » du contrat d'inscription signé entre les parties le 29 septembre 2007, qui prévoit que toute inscription acceptée entraîne obligation du règlement de la totalité des frais de scolarité du cycle, soit en l'occurrence le montant disproportionnellement élevé de 13.300 euros, ce nonobstant toute interruption, suspension ou décision de résiliation de l'étudiant et quelle que soit la cause, même pour cause de maladie, et qui laisse CENTRE EUROPE seule juge de faire droit à une demande de suspension ou de résiliation du contrat en cas de circonstances d'une gravité particulière, introduit, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

En conséquence, il y a lieu de dire et juger que la clause précitée du contrat des parties est réputée non écrite et ainsi de constater que la réclamation de la demanderesse de la somme de 13.300 euros au titre du solde intégral des frais de scolarité du cycle de formation, se trouve privée de fondement et ne peut qu'être rejetée. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE STRASBOURG

JUGEMENT DU 22 MAI 2009

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11-08-003278.

 

PARTIE DEMANDERESSE :

SARL SOCIÉTÉ ESTUDIA CENTRE EUROPE

[adresse] représenté(e) par Maître ALEXANDRE Gérard (C. 70), avocat du barreau de STRASBOURG

 

PARTIE DÉFENDERESSE :

Mademoiselle X. 

[adresse], représenté(e) par Maître MONHEIT Daniel, avocat du barreau de COLMAR

Monsieur Y.

[adresse], représenté(e) par Maître MONHEIT Daniel, avocat du barreau de COLMAR

 

Nature de l'affaire : Demande en paiement du prix ou tendant à faire sanctionner le non-paiement du prix

COMPOSITION DU TRIBUNAL : Madame Evelyne SAINT-EVE, Vice-Président Madame Marie-Claude OHLMANN, Greffier

DÉBATS : À l'audience publique du 27 mars 2009

JUGEMENT : contradictoire en premier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe par Madame Evelyne SAINT-EVE Vice-Président et signé par Madame Evelyne SAINT-EVE, Vice-Président et par Madame Marie-Claude OHLMANN, Greffier

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Par contrat signé en date du 29 septembre 2007 avec la société ESTUDIA CENTRE EUROPE, qui est un établissement d'enseignement supérieur privé, Mlle X. s'est inscrite au cours cycle d'expertise comptable diplôme d'état DCG, d'une durée de 3 ans.

M Y. père de l'étudiante, s'est porté caution solidaire, dans le même acte, pour le montant global du prix du cycle et il a réglé, à l'inscription, la somme de 1.100 euros.

Confrontée à des problèmes de santé, Melle X. a adressé, le 9 novembre 2007, une lettre de démission à la société ESTUDIA CENTRE EUROPE.

Se prévalant de la clause du contrat des parties suivant laquelle « toute inscription acceptée entraîne obligation du règlement de la totalité des frais de scolarité du cycle, nonobstant toute interruption, suspension ou décision de résiliation de l'étudiant et quelle que soit la cause », la société ESTUDIA CENTRE EUROPE a, par acte du 3 novembre 2008 et selon écrits du 26 janvier 2009, assigné Mlle X. et M Y. en paiement de la somme de 13.300 euros correspondant au solde du prix des trois années du cycle de formation, et en règlement d'un montant de 1.000 euros sur la base de l'article 700 du CPC .

Par mémoires du 22 janvier 2009 et du 25 mars 2009, les défendeurs ont conclu au débouté de l'intégralité de la demande, à la nullité de l'engagement de caution de M Y. et à la condamnation de la partie adverse au paiement d'un montant de 800 euros en application de l'article 700 du CPC, en arguant notamment du caractère abusif de la clause stipulant le règlement de la totalité des frais de scolarité du cycle en cas d'arrêt de la scolarité, même pour maladie.

Vu le dossier de la procédure, les pièces y annexées et les conclusions des parties auxquelles il est référé pour plus ample exposé des faits et des moyens

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Mlle X. justifie, par la production d'un certificat médical daté du 10 novembre 2007 et dont rien ne permet de mettre en cause la crédibilité, de la réalité des problèmes de santé psychique qui l'ont empêchée de poursuivre la scolarité à compter de cette date.

Elle a ajouté qu'elle est rentrée chez ses parents en quittant Strasbourg et qu'elle n'a effectué aucune autre formation durant l'année scolaire 2007/2008.

Les défendeurs ont souligné le fait que la société ESTUDIA CENTRE EUROPE ne s'est pas donné la peine de soumettre à l'examen de la commission de CENTRE EUROPE la demande de résiliation du contrat présentée par Mlle X. et d'autre part qu'après avoir réclamé la somme de 3.700 euros correspondant à la première année, la demanderesse n'a pas hésité à mettre en compte, dans le cadre de son assignation, la totalité des trois années du cursus, soit 13.300 euros.

Ce montant très élevé apparaît sans commune mesure avec la perte éprouvée et le gain dont a été privée la demanderesse du fait de la défection de l'étudiante, dès lors que la société [minute page 3] ESTUDIA CENTRE EUROPE conservait la possibilité de procéder à l'inscription de nouveaux étudiants, au moins à compter du début de l'année scolaire suivante.

Dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat (article L. 132-1 du Code de la Consommation).

L'annexe au code de la consommation comprend une liste indicative et non exhaustive des clauses qui peuvent être regardées comme abusives, liste qui comprend notamment les clauses ayant pour effet : e) d'imposer au consommateur qui n'exécute pas ses obligations une indemnité d'un montant disproportionnellement élevé.

Il a déjà été jugé qu'est abusive la clause d'un contrat passé avec un établissement d'enseignement prévoyant que l'élève doit payer la totalité de la scolarité alors même qu'une maladie ferait obstacle à l'exécution du contrat (Cour de Cassation, Civ. 1re 10 février 1998).

Les clauses abusives sont réputées non écrites.

En l'espèce, la clause sous « frais de scolarité » du contrat d'inscription signé entre les parties le 29 septembre 2007, qui prévoit que toute inscription acceptée entraîne obligation du règlement de la totalité des frais de scolarité du cycle, soit en l'occurrence le montant disproportionnellement élevé de 13.300 euros, ce nonobstant toute interruption, suspension ou décision de résiliation de l'étudiant et quelle que soit la cause, même pour cause de maladie, et qui laisse CENTRE EUROPE seule juge de faire droit à une demande de suspension ou de résiliation du contrat en cas de circonstances d'une gravité particulière, introduit, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

En conséquence, il y a lieu de dire et juger que la clause précitée du contrat des parties est réputée non écrite et ainsi de constater que la réclamation de la demanderesse de la somme de 13.300 euros au titre du solde intégral des frais de scolarité du cycle de formation, se trouve privée de fondement et ne peut qu'être rejetée.

En conséquence, il y a lieu de débouter la SARL ESTUDIA CENTRE EUROPE de toute sa demande, y compris de sa réclamation fondée sur l'article 700 du CPC.

Par contre, l'équité commande l'application de l'article 700 du CPC en faveur des défendeurs à hauteur d'un montant de 300 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal,

Statuant contradictoirement, en premier ressort, prononcé par mise à disposition au greffe.

[minute page 4] Constate que la clause contractuelle prévoyant à la charge de l'étudiant le paiement de la totalité des frais de scolarité des trois années de cycle d'études, nonobstant toute résiliation, même pour cause de maladie, présente un caractère abusif.

Dit et juge que cette clause abusive est réputée non écrite.

En conséquence :

Déboute la SARL Société ESTUDIA CENTRE EUROPE de toute ses demandes y compris de sa réclamation fondée sur l'article 700 du CPC.

Condamne la SARL Société ESTUDIA CENTRE EUROPE à payer aux défendeurs un montant de 300 euros (trois cents euros) en application de l'article 700 du CPC.

Condamne la SARL Société ESTUDIA CENTRE EUROPE au paiement des entiers frais et dépens de la procédure.

LE GREFFIER                                 LE VICE-PRÉSIDENT