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CA AIX-EN-PROVENCE (3e ch. B), 31 mai 2012

Nature : Décision
Titre : CA AIX-EN-PROVENCE (3e ch. B), 31 mai 2012
Pays : France
Juridiction : Aix-en-provence (CA), 3e ch. B
Demande : 11/10459
Décision : 2012/306
Date : 31/05/2012
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 14/06/2011
Numéro de la décision : 306
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3863

CA AIX-EN-PROVENCE (3e ch. B), 31 mai 2012 : RG n° 11/10459 ; arrêt n° 2012/306

Publication : Jurica

 

Extraits : 1/ « Le contrat garantissant la prise en charge des prêts comporte une clause (article 12 paragraphe 5) précisant qu'en cas de désaccord entre le médecin de l'assuré et le médecin de l'assureur sur le caractère de l'invalidité, les parties choisissent un troisième médecin pour les départager. Faute d'entente sur cette désignation le choix est fait par le président du tribunal de grande instance de l'assuré, à la requête de la partie la plus diligente, les frais de nomination de l'expert étant partagés par moitié entre les parties. Ces stipulations imposant un préalable amiable avant toute poursuite en justice ne présentent pas un caractère abusif dès lors qu'elles sont exemptes d'un quelconque déséquilibre significatif au détriment du consommateur. M. X., qui a recouru à la voie judiciaire pour obtenir la désignation d'un expert ne rapporte pas la preuve du caractère abusif des clauses qu'il dénonce. »

2/ « Il s'évince de ces éléments médicaux que M. X. remplit la condition tenant à son classement en seconde catégorie des invalides de la sécurité sociale ; en revanche, il ne remplit pas la condition contractuelle tenant à l'inaptitude définitive du fait d'une maladie, de se livrer à toute activité génératrice de rémunération ou de profit. Il ne saurait éluder les conditions contractuelles en se prévalant de la seule définition attachée par la sécurité sociale à la seconde catégorie des invalides. »

 

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

TROISIÈME CHAMBRE B

ARRÊT DU 31 MAI 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/10459. Arrêt n° 2012/306. ARRÊT AU FOND. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Grande Instance de TOULON en date du 10 février 2011 enregistré au répertoire général sous le R.G. n° 09/5142.

 

APPELANT :

Monsieur X.

demeurant [adresse], représenté par Maître Jean-Michel SIDER, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée aux lieu et place de la SCP SIDER, avoués à la cour, assisté de Maître Sophie DEBERNARD, avocat au barreau de MONTPELLIER

 

INTIMÉE :

COMPAGNIE AGPM VIE

SIRET 330 XX, prise en la personne de son représentant légal, sise [adresse], représentée par la SCP BADIE, SIMON-THIBAUT et JUSTON, avocats au barreau d'AIX-EN-PROVENCE constituée aux lieu et place de la SCP MJ DE SAINT FERREOL ET COLETTE TOUBOUL, avoués à la cour, plaidant par Maître MARC Christophe, avocat au barreau de MONTPELLIER

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 17 avril 2012 en audience publique. Conformément à l'article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur Michel CABARET, Conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.

La Cour était composée de : Madame Christine DEVALETTE, Présidente, Monsieur Gilles ELLEOUET, Conseiller, Monsieur Michel CABARET, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Lydie BADEL.

Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 31 mai 2012

ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 31 mai 2012, Signé par Madame Christine DEVALETTE, Présidente et Madame Lydie BADEL, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PROCÉDURE :

M. X. a souscrit, en 1974, auprès de l'AGPM-VIE un contrat d'assurances dit « contrat de carrière », renouvelé par avenants et couvrant les risques de décès et d'invalidité totale définitive, ainsi que le risque d'incapacité permanente partielle ou totale par accident.

A l'occasion de la souscription de contrats de prêts, en 1995, il a adhéré auprès du même assureur à trois contrats de garantie « spéciale prêt » couvrant les risques de décès, d'invalidité totale et définitive (ITD), et d'incapacité de travail temporaire et totale, moyennant le paiement d'une surprime en raison d'un suivi médical depuis décembre 1994 pour un problème cardiaque.

Le 7 janvier 2000, il a été placé en arrêt maladie en raison de l'aggravation de son état et à compter du 27 juin 2000, la Caisse de Sécurité Sociale l'a placé en maladie longue durée.

L'AGPM a pris en charge le paiement des prêts souscrits auprès du Crédit Agricole jusqu'à la fin de l'année 2002.

A compter du 1er janvier 2003, la Caisse de Sécurité Sociale l'a placé en retraite au titre de l'inaptitude, confirmée par la Médecine du Travail.

Ayant sollicité de l'assureur, la prise en charge du paiement des mensualités des crédits dans le cadre de l'invalidité totale et définitive (ITD), ce dernier a refusé sa garantie, en l'état de l'expertise réalisée par le Docteur A.

Par ordonnance en date du 23 septembre 2004, M. X. a obtenu la désignation du Docteur B. en qualité d'expert, lequel a évalué à 100 % son taux d'incapacité professionnelle, à 50 % son taux d'incapacité fonctionnelle, et à 70 % son taux d'incapacité professionnelle toutes professions.

Sur appel de l'AGPM, par arrêt en date du 27 juillet 2005, la Cour d'appel de Montpellier a déclaré la demande d'expertise judiciaire irrecevable, en ce qu'il appartenait à M. X., préalablement à la saisine d'une juridiction, de mettre en œuvre la procédure de conciliation obligatoire visée à l'article 12 du contrat de carrière

M. X. et l'AGPM s'étant rapprochés pour tenter de mettre en œuvre la procédure de conciliation, ils ont convenu que l'avis du Docteur B. constituerait l'avis du médecin de l'assuré.

En l'état de leur désaccord sur la mission dévolue au troisième expert, M. X. a obtenu avec l'accord de l'AGPM la désignation du Docteur C., suivant ordonnances rendues le 31 janvier et le 18 décembre 2008.

En lecture du rapport d'expertise de celui-ci, M. X. a fait assigner l'assureur pour obtenir sa condamnation à la prise en charge des échéances du prêt et à lui payer le montant du capital garanti au titre du contrat de carrière.

Par Jugement en date du 10 février 2011, le Tribunal de grande instance de Toulon l'a débouté de ses demandes.

Par déclaration du 14 juin 2011, M. X. a interjeté appel du jugement.

Vu les conclusions déposées le 29 août 2011 par l'appelant ;

Vu les conclusions déposées le 28 octobre 2011 par la Compagnie AGPM VIE, appelante à titre incident ;

Vu l'ordonnance de clôture en date du 3 avril 2012 ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Sur ce ;

Au soutien de son appel, M. X. invoque le caractère abusif des clauses contenues dans les contrats d'assurance en ce que l'article 5 du chapitre II du titre IV relatif aux risques garantis de la Garantie Spéciale Prêt stipule, que la reconnaissance de l'invalidité totale et définitive résulte d'un constat médical et que le classement dans la 3ème catégorie des invalides de la sécurité sociale entraîne, ipso facto, le classement ITD. Si le sociétaire est classé en 2ème catégorie des invalides de la sécurité sociale, il peut être classé en ITD à condition d'être explicitement reconnu inapte, par le médecin mandaté par l'assureur, à toute activité procurant rémunération ou profit.

En seconde part, il invoque le caractère abusif de la clause du contrat d'assurance de carrière qui stipule que la reconnaissance de l'invalidité totale et définitive résulte d'une décision de l'assureur au vu d'un dossier médical, étant précisé que pour la détermination de l'ITD, l'assureur pourra mandater un médecin expert.

Au soutien de ce moyen, il se prévaut de l'avis n° 90-01 de la Commission des clauses abusives et des dispositions des articles L. 132-1 et R. 132-2 du code de la consommation, en estimant que l'assureur s'est exclusivement fondé sur l'avis de son médecin conseil pour dénier sa garantie.

 

Le contrat garantissant la prise en charge des prêts comporte une clause (article 12 paragraphe 5) précisant qu'en cas de désaccord entre le médecin de l'assuré et le médecin de l'assureur sur le caractère de l'invalidité, les parties choisissent un troisième médecin pour les départager. Faute d'entente sur cette désignation le choix est fait par le président du tribunal de grande instance de l'assuré, à la requête de la partie la plus diligente, les frais de nomination de l'expert étant partagés par moitié entre les parties.

Ces stipulations imposant un préalable amiable avant toute poursuite en justice ne présentent pas un caractère abusif dès lors qu'elles sont exemptes d'un quelconque déséquilibre significatif au détriment du consommateur.

M. X., qui a recouru à la voie judiciaire pour obtenir la désignation d'un expert ne rapporte pas la preuve du caractère abusif des clauses qu'il dénonce.

Les conditions contractuelles de l'ITD imposent, a minima, d'une part, le classement en seconde catégorie des invalides de la sécurité sociale ou l'obtention d'un taux d'incapacité d'au moins 80 % par la COTOREP devenue MDPH, ou le placement en invalidité par un organisme équivalant et, d'autre part, l'inaptitude définitive du fait d'une maladie, de se livrer à toute activité génératrice de rémunération ou de profit.

Selon le docteur B., l'assuré était en incapacité totale de travail au cours de la période du 7 janvier 2000 jusqu'au 1er janvier 2003. A compter de cette date jusqu'au 30 novembre 2004, date de l'expertise, son taux d'incapacité professionnelle dans sa profession (VRP) était de 100 %, son taux d'incapacité fonctionnelle étant de 50 % et son taux d'incapacité professionnelle toutes professions était de 70 %.

Le professeur C., commis en qualité d'expert par ordonnances en date des 1er janvier et 18 décembre 2008, a pris connaissance des rapports du docteur A. (initialement commis par l'assureur) et du docteur B. et il a conclu que du fait de sa maladie, « M. X. n'est pas en état d'invalidité totale et définitive conformément à la définition contractuelle. (...) X. n'est pas dans l'impossibilité de reprendre une activité professionnelle à la suite de sa maladie. M. X. (ancien VRP) est éventuellement apte à une reconversion professionnelle dans un emploi sédentaire » ;

A la date du 1er janvier 2003, M. X. était dans l'impossibilité totale d'occuper une quelconque activité procurant gain ou profit, mais non définitive puisqu'il a bénéficié d'une intervention (chirurgicale : réparation valvulaire mitrale avec anneau de Carpentier) en 2006 (ni prévue ni prévisible en 2003).

Il s'évince de ces éléments médicaux que M. X. remplit la condition tenant à son classement en seconde catégorie des invalides de la sécurité sociale ; en revanche, il ne remplit pas la condition contractuelle tenant à l'inaptitude définitive du fait d'une maladie, de se livrer à toute activité génératrice de rémunération ou de profit.

Il ne saurait éluder les conditions contractuelles en se prévalant de la seule définition attachée par la sécurité sociale à la seconde catégorie des invalides.

Le jugement sera confirmé en ce qu'il a débouté M. X. de ce chef.

A titre subsidiaire M. X. se prévaut de la garantie incapacité de travail temporaire et totale prévue par l'article 7 du contrat spécial prêt.

Ces dispositions prévoient que l'adhérent est en état d'incapacité temporaire totale, lorsque, à l'expiration d'une période d'interruption continue d'activité de 90 jours, il se trouve dans l'impossibilité de reprendre une activité professionnelle à la suite d'une maladie, entraînant une perte de rémunération non déjà couverte par l'employeur ou par un autre organisme (mutuelle complémentaire, sécurité sociale). La prise en charge des échéances du prêt par l'assureur est liée à la perte, prouvée par l'assuré de rémunération, de traitement ou de solde de base.

Si M. X. démontre son état d'incapacité temporaire totale, en revanche, il ne rapporte pas la preuve de la perte de rémunération non déjà couverte par l'employeur ou par un autre organisme.

Le tribunal n'ayant pas statué de ce chef, il y a lieu de prononcer le débouté.

L'exercice d'une action en justice ou la défense à une telle action, constitue, en principe un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à une dette de dommages-intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol.

L'appel de M. X. n'étant pas caractérisé par l'une de ces qualifications, la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive formulée par la Compagnie AGPM VIE sera rejetée.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

Statuant publiquement par arrêt contradictoire

Confirme le jugement déféré,

Y ajoutant,

Déboute M. X. de sa demande fondée sur la garantie incapacité temporaire totale de travail ;

Déboute la Compagnie AGPM VIE de sa demande de dommages-intérêts ;

Condamne M. X. aux dépens de la procédure, qui seront recouvrés conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE       LA PRÉSIDENTE