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CASS. CIV. 1re, 30 mai 2012

Nature : Décision
Titre : CASS. CIV. 1re, 30 mai 2012
Pays : France
Juridiction : Cour de cassation Ch. civile 1
Demande : 11-12242
Date : 30/05/2012
Nature de la décision : Cassation avec renvoi
Mode de publication : Legifrance
Décision antérieure : JUR. PROXIM. MONTAUBAN, 24 novembre 2010
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CERCLAB - DOCUMENT N° 3888

CASS. CIV. 1re, 30 mai 2012 : pourvoi n° 11-12242

Publication : Legifrance

 

Extrait : « Vu l’article 16 du code de procédure civile ; […] Attendu que pour accueillir ces demandes, le jugement déclare abusive de manière irréfragable, en application de l’article R. 132-1 du code de la consommation, la clause relative à la suspension, en cas de perte du téléphone, du contrat d’abonnement téléphonique en cause, indiquant que « durant la suspension de la ligne, les redevances d’abonnement restent dues à Orange France » ;

Qu’en statuant ainsi alors qu’il résulte du jugement et des pièces de la procédure que les parties n’avaient pas été avisées du moyen, relevé d’office, tiré de l’existence d’une clause abusive, ni invitées à présenter leurs observations, la juridiction de proximité a violé le texte susvisé ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR DE CASSATION

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 30 MAI 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION                                      (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

N° de pourvoi : 11-12242.

DEMANDEUR à la cassation : Société Orange

DÉFENDEUR à la cassation : Madame X.

M. Charruault (président), président. Maître Georges, SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat(s).

 

MOTIFS (justification de la décision)                                                                 (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :  

 

Sur le moyen unique pris en sa première branche :

 

VISA (texte ou principe violé par la décision attaquée)                                        (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l’article 16 du code de procédure civile ;

 

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE                                                  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu, selon le jugement attaqué, que Mme X., qui avait souscrit le 13 mars 2008 un abonnement téléphonique pour une durée de vingt-quatre mois auprès de la société Orange, a déclaré la perte de son téléphone mobile le 25 mars 2009 ; que, reprochant à la société Orange France de lui avoir réclamé les mensualités suivantes, elle l’a assignée en sollicitant la résiliation du contrat, le paiement de dommages-intérêts et le retrait de son nom du fichier Preventel ;

 

RAPPEL DE LA DÉCISION ATTAQUÉE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Attendu que pour accueillir ces demandes, le jugement déclare abusive de manière irréfragable, en application de l’article R. 132-1 du code de la consommation, la clause relative à la suspension, en cas de perte du téléphone, du contrat d’abonnement téléphonique en cause, indiquant que « durant la suspension de la ligne, les redevances d’abonnement restent dues à Orange France » ;

 

CRITIQUE DE LA COUR DE CASSATION                                                       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Qu’en statuant ainsi alors qu’il résulte du jugement et des pièces de la procédure que les parties n’avaient pas été avisées du moyen, relevé d’office, tiré de l’existence d’une clause abusive, ni invitées à présenter leurs observations, la juridiction de proximité a violé le texte susvisé ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                                                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen : CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 24 novembre 2010, entre les parties, par la juridiction de proximité de Montauban ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant la juridiction de proximité de Castelsarrasin ;

Condamne Mme X. aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande ;

Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de Maître Georges ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente mai deux mille douze. 

 

 

ANNEXE : MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)              (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Moyen produit par la SCP Tiffreau, Corlay et Marlange, avocat aux Conseils pour la société Orange France.

 

RAPPEL DU DISPOSITIF DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN  (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

La SA ORANGE FRANCE reproche à la juridiction de proximité D’AVOIR, « déclaré, de manière irréfragable, la clause relative à la suspension en cas de perte du téléphone au contrat d’abonnement téléphonique du 13 mars 2008 indiquant que « durant la suspension de la ligne, les redevances d’abonnement restent dues à Orange France » abusive, en application de l’article R. 132-1 du Code de la consommation, prononcé la résiliation du contrat d’abonnement du 13 mars 2008 entre Madame X. et la Société Orange à compter du 11 mars 2009, débouté Orange France de sa demande en paiement de la somme de 223,96 € correspondant au paiement de l’engagement restant à courir jusqu’au 13 mars 2010 du contrat du 13 mars 2008 souscrit par Madame X., ordonné le retrait du fichier Préventel de Madame X. par la Société Orange France sous astreinte de 50 € par jour à compter de la signification du présent jugement, condamné Orange France à payer à Madame X. la somme de 100 € à titre de dommages-intérêts, condamné Orange France à payer à Madame X. la somme de 500 € sur le fondement de l’article 500 du Code de procédure civile et aux entiers dépens».

 

RAPPEL DES MOTIFS DE LA DÉCISION ATTAQUÉE PAR LE MOYEN       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

AUX MOTIFS QU’« en application de l’article 1134 du Code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, elles doivent être exécutées de bonne foi ; il est constant que, suite à la déclaration de perte de son téléphone faite par Madame X., la Société Orange a procédé à la suspension de sa ligne de sorte que les appels sortants sont devenus impossibles ; bien que Madame X., lors de la souscription de l’abonnement téléphonique, se soit engagée pendant 24 mois, Orange, en suspendant la ligne téléphonique, a suspendu son obligation de fourniture du service en contrepartie duquel elle peut réciproquement exiger un paiement ; en l’espèce, la Société Orange France a pris en considération la déclaration de perte du téléphone le 25 mars 2008 et a modifié les conditions d’utilisation de la ligne téléphonique de la requérante, de telle sorte qu’elle n’a fourni aucune des prestations pour lesquelles elle s’était engagée en contrepartie du paiement de la somme de 18 € par mois ; or, en application de l’article R. 132-1 du Code de la consommation, Orange ne peut contraindre Madame X. à exécuter son obligation de paiement alors qu’elle n’a pas fourni réciproquement le service correspondant, suite à la déclaration de perte du téléphone, qu’elle a considérée effective en empêchant Madame X. d’émettre des appels sortants ; cette manipulation technique est le fait de la Société Orange, qui a supprimé son obligation d’exécution de la prestation pour laquelle elle s’était engagée sans proposer ou conseiller à sa cliente une solution qui aurait permis la remise en service de sa signe ; il incombe, en effet, au vendeur professionnel, de prouver, qu’il s’est acquitté de l’obligation de conseil en lui imposant de se renseigner sur les besoins du client afin d’être en mesure de l’informer quant à l’adéquation de la suspension du contrat aux conséquences qui en sont prévues ; de plus, il apparaît que le contrat de vente du téléphone le 13 mars 2008 pour un prix de 22,20 € et le contrat d’abonnement, lié à ce contrat, prévoyant un engagement de 24 mois, présentent des obligations disproportionnées au regard des engagements respectifs des parties ; en effet, pour bénéficier d’une remise de 16,80 € sur le prix du téléphone portable, Madame X. a dû s’engager pendant 24 mois à payer un abonnement de 18 € par mois moyennant une remise de 2 € par mois ; l’avantage consenti à sa cliente par la société Orange France en contrepartie d’une souscription d’un contrat avec un abonnement de 24 mois correspond à une remise de 16,80 € sur le prix du téléphone mobile, une remise de 10 € pendant deux mois et de 2 € par mois pendant les 22 mois sur le contrat d’abonnement, soit la somme de 104,80 € sur la période de 24 mois ; la somme réclamée par la société Orange France, d’un montant de 223,96 € correspondant aux engagements de Madame X. sur une période de 24 mois, est réellement disproportionnée, eu égard aux circonstances de l’espèce dans le cas de perte du téléphone portable et aux avantages en résultant ; la clause figurant à l’article 11.3 des conditions générales du contrat stipulant que, « durant la suspension de la ligne, les redevances d’abonnement restent dues à Orange France », obligeant le client à respecter son engagement de paiement alors qu’aucune prestation n’est fournie en contrepartie doit donc être déclarée abusive ; en conséquence, les clauses relatives à la suspension en cas de perte du téléphone au contrat d’abonnement téléphonique du 13 mars 2008 indiquant que, « durant la suspension de la ligne, les redevances d’abonnement restent dues à Orange France », seront de manière irréfragable déclarées abusives en application de l’article R. 132-1 du Code de la consommation ; la suspension d’un contrat ne peut avoir pour effet de contraindre le client à payer une prestation qui n’a pas été fournie et la clause de suspension ne peut avoir pour conséquence de suspendre les obligations réciproques des parties ; en conséquence, Orange France sera déboutée de sa demande en paiement de la somme de 223,96 € correspondant à la période de fin d’engagement restant à parcourir jusqu’au 13 mars 2010 et le contrat d’abonnement du 13 mars 2008 sera résilié à compter du 11 mars 2009 (…) »,

 

MOYEN (critiques juridiques formulées par le demandeur)                                (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

ALORS QUE 1°), il ne ressort pas de l’exposé des moyens des parties que Mme X. ait soutenu qu’était abusive de manière irréfragable, au sens de l’article R. 132-1 du Code de la consommation, la clause des conditions générales d’abonnement à l’offre mobile d’ORANGE FRANCE selon laquelle « durant la suspension de la ligne, les redevances d’abonnement restent dues à Orange France » ; que dès lors, en relevant d’office ce moyen, sans avoir préalablement invité les parties et, en particulier, la SA ORANGE FRANCE, à présenter ses observations contradictoires, la Juridiction de proximité de Montauban a violé l’article 16 du Code de procédure civile.

ALORS QUE 2°), au surplus, n’est pas abusive, au sens des dispositions combinées des articles L. 132-1 et R. 132-1 du Code de la consommation, la clause de l’article « 11.3. » des conditions générales d’abonnement à l’offre mobile d’ORANGE FRANCE selon laquelle « durant la suspension de la ligne, les redevances d’abonnement restent dues à Orange France », dès lors que la contrepartie de celles-ci est prévue à la clause « 9.1. » desdites conditions générales, selon laquelle « Orange France met en place les moyens nécessaires à la bonne marche du service. Il prend les mesures nécessaires au maintien de la continuité et de la qualité du service de radiocommunication », en application de l’exposé des conditions générales selon lequel « le présent contrat a pour objet de définir les conditions de fourniture du service Orange par Orange France. Le service orange est un service de radiocommunication permettant à l’abonné d’accéder par voie hertzienne aux réseaux publics de télécommunications GSM et/ou 3G d’Orange France selon l’offre et le terminal choisi par l’abonné (…) » ; qu’ainsi, la suspension de la ligne de l’abonné, effectuée à sa demande, en cas de perte ou de vol de son mobile contenant une carte SIM/USIM et à son avantage, pour empêcher l’émission d’appels à son insu par des tiers, ne dispense pas la SA ORANGE FRANCE d’exécuter son obligation de maintenir l’accès au réseau, qui permet à l’abonné de reprendre l’émission et la réception de communications au moyen et dès la mise en service d’un nouveau mobile contenant une carte SIM/USIM ; que l’exécution de cette obligation par le fournisseur d’accès au réseau public des télécommunications a pour contrepartie l’exécution par l’abonné de son obligation de paiement des redevances prévues au contrat ; qu’en jugeant le contraire, sans procéder à un examen d’ensemble des conditions générales, notamment en ses clauses précitées et, par suite, en déboutant la SA ORANGE FRANCE de sa demande en paiement des redevances impayées par Mme X., la Juridiction de proximité de Montauban a privé son jugement de base légale au regard des articles 1134 du Code civil, L. 132-1 et R. 132-1 du Code de la consommation.

ALORS QUE 3°), il résulte de l’article 11.3 des conditions générales précitées en l’absence de déclaration de perte de son mobile contenant une carte SIM/USIM appartenant à la SA ORANGE FRANCE, le titulaire de la ligne reste débiteur envers la SA ORANGE FRANCE du coût des communications téléphoniques émises à partir de ce mobile contenant la carte SIM/USIM ; qu’en conséquence de quoi, la déclaration de perte de son mobile contenant une carte SIM/USIM, faite par Mme X. à la SA ORANGE FRANCE, faisait obligation à la SA ORANGE FRANCE de procéder immédiatement à la suspension de la ligne de Mme X., afin d’interdire toute émission de communications téléphoniques susceptibles d’être pratiquées par un tiers contre le gré de Mme X. ; qu’en imputant à la SA ORANGE FRANCE un manquement à un devoir d’information de conseil envers Mme X., au motif que, « suite de la déclaration perte du mobile qu’elle a considérée effective en empêchant Madame X. d’émettre des appels sortants », elle « a supprimé son obligation d’exécution de la prestation pour laquelle elle s’était engagée sans proposer ou conseiller à sa cliente une solution qui aurait permis la remise en service de sa ligne » (jugement attaqué, p. 3), quand cette remise en ligne dépendait de la seule circonstance de la déclaration par Mme X. à la SA ORANGE FRANCE de l’utilisation d’un nouveau mobile contenant une carte SIM/USIM, quelles qu’en fussent les conditions d’acquisition à titre gratuit ou onéreux, ce qu’elle ne pouvait ignorer, la Juridiction de proximité a violé les articles 1134 et 1147 du Code civil.