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CA BORDEAUX (2e ch. civ.), 24 octobre 2012

Nature : Décision
Titre : CA BORDEAUX (2e ch. civ.), 24 octobre 2012
Pays : France
Juridiction : Bordeaux (CA), 2e ch.
Demande : 11/03622
Date : 24/10/2012
Nature de la décision : Infirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 3/06/2011
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4008

CA BORDEAUX (2e ch. civ.), 24 octobre 2012 : RG n° 11/03622 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Il n'est pas contesté que M. X. s'est fait livrer ce matériel pour l'exercice de son activité d'architecte. L’article L. 132-1 du code de la consommation ne s'applique pas aux contrats de fournitures de biens ou de services ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par le contractant.

S'agissant en l'espèce de la fourniture de matériel informatique et de reprographie destiné à l'exercice de l'activité professionnelle de M. X., et ce, que M. X. soit ou non un spécialiste de l'informatique, le contrat de location litigieux se trouve dès lors exclu du champ d'application l'article L. 132-1 susvisé. La SELARL H. ès-qualités de liquidateur ne peut donc invoquer le caractère abusif des clauses du contrat, notamment de celles relatives à l'indemnité de résiliation et aux pénalités, ni sur le fondement de l’article L. 132-1 du code de la consommation ni au regard des recommandations de la commission des clauses abusives dans les contrats proposés aux consommateurs. »

 

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE

ARRÊT DU 24 OCTOBRE 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11/03622. Rédacteur : Madame Christine Rouger, Conseiller. Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la Cour : ordonnance rendue le 4 mai 2011 (R.G. n° 11/04) par le Tribunal de Grande Instance d'ANGOULEME suivant déclaration d'appel du 3 juin 2011.

 

APPELANTE :

LA SAS DE L. L. L.,

agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis [adresse], représentée par la SCP Luc B., avocats au barreau de BORDEAUX

 

INTIMÉS :

Monsieur X.,

demeurant [adresse], régulièrement assigné à domicile, non représenté

Madame Y. épouse X.,

demeurant [adresse], régulièrement assignée à personne, non représentée

LA SELARL H. L. & L.

prise en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de monsieur X. et de madame Y. épouse X., Mandataire judiciaire, demeurant [adresse], représentée par Maître M. de la SCP B. - M. - SCP, avocats au barreau de CHARENTE

 

COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile, l'affaire a été débattue le 26 juin 2012 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Christine Rouger, Conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de : Monsieur Jean-François BANCAL, Conseiller faisant fonction de Président, Madame Christine ROUGER, Conseiller, Madame Caroline FAURE, Vice-Présidente placée

Greffier lors des débats : Monsieur Hervé Goudot

ARRÊT : - par défaut - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de Procédure Civile.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par acte sous-seing privé du 12 mars 2009 M. X., architecte, a conclu avec la société DE L. L. L., ayant pour nom commercial COPYREX, un contrat de location portant sur la mise à disposition de matériel informatique moyennant un loyer trimestriel de 646 euros HT pendant 63 mois.

Suite à des impayés et après une mise en demeure du 5 janvier 2010 restée infructueuse, par acte du 16 mars 2010 la société DE L. L. L. a assigné M. X. en référé devant le tribunal de grande instance d'Angoulême aux fins de se voir autoriser à appréhender le matériel et d'obtenir une provision.

Un ordonnance de référé est intervenue le 16 juin 2010, mais le 11 juin 2010 M. X. a été placé en redressement judiciaire, Maitre Louis H. étant nommé mandataire judiciaire.

Après une nouvelle mise en demeure de restituer adressée le 7 juillet 2010, la société DE L. L. L. a déposé une requête en revendication auprès du juge-commissaire le 16 août 2010. Elle a également procédé à une déclaration de créance auprès de Maître H. pour un montant de 17.146,95 euros.

Le 27 octobre 2010 le juge-commissaire a dit recevable la requête en revendication et ordonné à M. X. de restituer le matériel à la société DE L. L.

Maître H. a sollicité la convocation des parties aux fins de fixation du montant de la créance de la société D. L. L.

Par jugement du 21 décembre 2010 la procédure de redressement judiciaire a été étendue à Mme Y. épouse X.

Le 4 mai 2011 le juge-commissaire a admis la créance de la société DE L. L. L. à titre chirographaire pour un montant de 2.317,86 euros au titre des seuls loyers échus et impayés et rejeté la demande pour le surplus.

La société DE L. L. L. a interjeté appel de cette décision le 3 juin 2011.

Par jugement du 10 juin 2011 le tribunal de grande instance d'Angoulême a converti la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire désignant la SELARL L. & Laurent H. ès-qualités de liquidateur judiciaire.

Par acte du 21 novembre 2011 la SELARL Louis H., ès-qualité de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de M. X. a assigné M. X. et Mme Y. née X. à comparaître devant la cour.

M. X., assigné à domicile et Mme Y. épouse X. assignée à personne n'ont pas comparu devant la cour. Le présent arrêt sera donc rendu par défaut en application des dispositions de l’article 474 du code de procédure civile.

Vu les dernières écritures signifiées le 21 juin 2012 par la société DE L. L. L., appelante,

Vu les dernières écritures signifiées le 20 juin 2012 par la SELARL L. & Laurent H., intimés,

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE, LA COUR :

Il ressort du contrat de location totale du 12 mars 2009 versé en original au dossier de l'appelante (pièce 1) que M. X., dit X., architecte exerçant sous forme libérale, s'est engagé à louer pour une durée irrévocable de 63 mois du matériel informatique constitué par un ordinateur DELL Optiplex 740 DT, un antivirus, un écran plat 19 pouces ainsi qu'un copieur numérique multifonctions MPC 2500, moyennant 21 loyer trimestriels de 646 euros HT.

Il n'est pas contesté que M. X. s'est fait livrer ce matériel pour l'exercice de son activité d'architecte.

L’article L. 132-1 du code de la consommation ne s'applique pas aux contrats de fournitures de biens ou de services ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle exercée par le contractant.

S'agissant en l'espèce de la fourniture de matériel informatique et de reprographie destiné à l'exercice de l'activité professionnelle de M. X., et ce, que M. X. soit ou non un spécialiste de l'informatique, le contrat de location litigieux se trouve dès lors exclu du champ d'application l'article L. 132-1 susvisé.

La SELARL H. ès-qualités de liquidateur ne peut donc invoquer le caractère abusif des clauses du contrat, notamment de celles relatives à l'indemnité de résiliation et aux pénalités, ni sur le fondement de l’article L. 132-1 du code de la consommation ni au regard des recommandations de la commission des clauses abusives dans les contrats proposés aux consommateurs.

La production en original devant la cour du contrat de location composé de trois pages d'un seul tenant comportant au recto les conditions particulières du contrat de location dûment signées de M. X., lequel y a apposé en outre son tampon professionnel, et, au verso, les conditions générales du contrat de location invoquées par la société appelante au soutien de sa demande d'admission de créance établit la connaissance de M. X. au moment de son engagement des dites conditions générales. Ces conditions générales comportent 16 articles parfaitement lisibles.

Il est en outre produit l'original de l'autorisation de prélèvement signée de M. X. le 12 mars 2009, avec son tampon professionnel en sus, autorisation de prélèvement qui se trouvait jointe au mandat de facturation et d'encaissement portant lui aussi la même signature de M. X. ainsi que son tampon professionnel par lequel il reconnaissait la société REX ROTARY comme mandataire du bailleur pour facturer et encaisser les sommes dues au bailleur au titre de la facturation hors loyer concernant les prestations de maintenance du copieur.

Les conditions générales, ainsi dûment approuvées par M. X. lors de la signature du contrat de location dont elles font partie intégrante lui sont donc parfaitement opposables.

La société DE L. L., société bailleresse exerçant sous l'enseigne COPYREX, a déclaré sa créance au passif du redressement judiciaire de M. X. le 7 juillet 2010 pour un total de 17.146,95 euros TTC se décomposant comme suit :

- 2.317,86 euros TTC au titre des loyers échus et impayés à échéance des 30 mai, 20 juillet 2009 et 20 janvier 2010

- 59,80 euros de frais d'activation de dossier

- 230,70 euros au titre d'une commission forfaitaire de 64 euros HT par retard de paiement

- 90,60 euros au titre des frais de rejet de prélèvement

- 13.134,54 euros TTC au titre de l'indemnité de résiliation égale à la somme des 17 loyers restant à courir jusqu'au terme du contrat

- 1.314,45 euros TTC au titre de la pénalité pour inexécution du contrat égale à 10 % du montant des loyers restant à courir.

La somme déclarée au titre des loyers échus et impayés ne fait l'objet d'aucune contestation.

 

1°/ Sur l'indemnité de résiliation et la pénalité de 10 % :

L'article 9.3 des conditions générales faisant partie intégrante du contrat signé prévoit qu'en cas de résiliation, outre l'obligation à restitution du matériel au bailleur, le locataire sera redevable, en réparation du préjudice subi, d'une indemnité égale à la somme des loyers restant à courir à la date de la résiliation jusqu'au terme initialement prévu du contrat, augmentée d'une pénalité pour inexécution du contrat égale à 10 % du montant hors taxes des loyers restant à courir avec un minimum de 250 euros.

Selon l’article 1226 du code civil : « La clause pénale est celle par laquelle une personne, pour assurer l'exécution d'une convention, s'engage à quelque chose en cas d'inexécution ». Elle est « la compensation des dommages et intérêts que le créancier souffre de l'inexécution de l'obligation principale » (article 1229 alinéa 1er du code civil). Et le juge peut, même d'office, modérer ou augmenter cette clause pénale (article 1152 alinéa 2 du même code).

Constitue une clause pénale susceptible de réduction, une clause qui prévoit une indemnité forfaitaire pour sanctionner un locataire de l'inexécution de son obligation de payer les loyers entraînant résiliation anticipée du contrat.

Tel est bien le cas ici pour la clause du contrat qui prévoit en cas de résiliation, outre l'obligation à restitution du matériel au bailleur, le paiement d'une indemnité en réparation du préjudice subi égale à la somme des loyers restant à courir à la date de la résiliation jusqu'au terme initialement prévu du contrat, augmentée d'une pénalité pour inexécution du contrat égale à 10 % du montant hors taxes des loyers restant à courir avec un minimum de 250 euros.

En l'espèce, le matériel loué a été livré le 14 avril 2009, le premier impayé datant du 20 avril 2009. La résiliation du contrat est intervenue le 9 février 2010, soit 9 mois après la mise à disposition. Le matériel loué a été restitué et il est demandé par ailleurs une indemnité d'utilisation pour restitution tardive. L'indemnité de résiliation à hauteur des 17 loyers trimestriels restant à échoir après la date de la résiliation pour un total de 13.134,54 euros TTC outre la pénalité pour inexécution du contrat égale à 10 % de ce montant de loyers à échoir, porte la somme réclamée à titre de clause pénale à 14.447,99 euros.

Le matériel ayant été récupéré, sans que soit précisé s'il a été revendu ou reloué ni dans quelles conditions et alors qu'il n'est justifié ni de son coût d'acquisition ni du coût effectif de son financement par la société bailleresse, la somme réclamée à titre de clause pénale toutes causes confondues est manifestement excessive.

Elle doit dès lors être réduite à de plus justes proportions afin d'indemniser le bailleur de la dépréciation du matériel récupéré après une utilisation de plusieurs mois ainsi que de la perte de retour sur investissement qu'il pouvait raisonnablement espérer de l'opération.

En l'absence de toute justification du coût de l'investissement réalisé et d'évaluation du matériel restitué, ce préjudice sera justement évalué, compte tenu des échéances de loyer échues et impayées retenues par ailleurs, à la somme de 5.000 euros TTC. La décision entreprise qui a rejeté la demande à ce titre estimant la clause pénale inopposable au débiteur doit donc être réformée.

 

2°/ Sur les frais divers :

Si l'article 9.3 du contrat de location prévoit que l'indemnité de résiliation sera majorée de toutes taxes applicables et de tous frais et honoraires exposés par le bailleur, il n'est justifié en l'espèce par la société bailleresse ni des frais d'activation du dossier sollicités à hauteur de 59,80 euros ni des frais de rejet de prélèvement facturés à hauteur de 25,25 euros HT par rejet.

En revanche, en application de l'article 4.8 du contrat, le débiteur est redevable d'une commission forfaitaire de 64 euros pour frais par retard de paiement, soit pour trois échéances impayées, d'une somme de 192 euros, le contrat ne prévoyant pas que cette commission est chiffrée hors taxe.

Il convient en conséquence, infirmant la décision entreprise de fixer la créance de la société DE L. L. L. au passif de la liquidation judiciaire de M. X. au titre des créances nées antérieurement à l'ouverture de la procédure collective à la somme de 7.509,86 euros TTC à titre chirographaire se décomposant comme suit :

- 2.317,86 euros TTC au titre des loyers échus et impayés au jour de l'ouverture de la procédure collective ;

- 192 euros TTC au titre des commissions sur trois impayés ;

- 5.000 euros TTC au titre des clauses pénales contractuelles pour résiliation anticipée.

 

3°/ Sur l'indemnité d'utilisation du matériel :

La société DE L. L. L. présente devant la cour une demande d'admission au passif de M. X. à hauteur d'une somme de 11.589,30 euros correspondant à une indemnité d'utilisation du matériel du fait du retard de restitution.

Cette créance n'a pas été mentionnée dans la déclaration du 7 juillet 2010.

La société DE L. L. L. ne précise pas s'il s'agit d'une créance antérieure soumise au régime de l’article L. 622-24 du code de commerce ou d'une créance postérieure à l'ouverture de la procédure collective soumise au régime de l'article L. 622-17 du même code.

En toute hypothèse, ayant obtenu le 27 octobre 2010 une ordonnance du juge-commissaire ordonnant la restitution par M. X. du matériel, la société DE L. L. L. ne justifie d'aucune diligence pour récupérer effectivement le matériel, alors que l'article 12 du contrat de location prévoit que, quelle que soit la cause de restitution, le matériel devra être rendu au lieu et à la date indiquée par le bailleur.

Et si elle a mis effectivement en demeure M. X. de restituer le matériel lors de la notification de sa résiliation du contrat, elle n'a déclaré aucune créance au titre de l'indemnité d'utilisation pour restitution tardive dans sa déclaration de juillet 2010 pour la période échue antérieurement à l'ouverture de la procédure collective.

Il convient en conséquence de débouter la société DE L. L. L. de sa demande d'admission au passif à ce titre.

 

4°/ Sur les dépens et les frais irrépétibles :

Les dépens de la présente procédure seront employés en frais de procédure collective. Dès lors les dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ne peuvent s'appliquer au cas d'espèce.

Chacune des parties succombant dans leurs prétentions, il n'apparaît pas inéquitable en l'espèce de laisser à leur charge la totalité des sommes exposées par elles et non comprises dans les dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement et par défaut :

Infirme l'ordonnance entreprise

Statuant à nouveau,

Déboute la SELARL H. ès-qualités de mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de M. X. et de Mme Y. épouse X. de ses demandes tendant à :

- voir déclarer réputées non écrites les articles 4.3, 9.3 et 12.1 des conditions générales du contrat de location du 12 mars 2009

- voir déclarer inopposables à M. X. et à sa liquidation judiciaire les conditions générales du dit contrat de location

Fixe, à titre chirographaire, la créance de la société DE L. L. L. au passif de la liquidation judiciaire de M. X. à la somme de sept mille cinq cent neuf euros et quatre vingt six centimes TTC (7.509,86 euros) se décomposant comme suit :

- 2.317,86 euros TTC au titre des loyers échus et impayés au jour de l'ouverture de la procédure collective

- 192 euros TTC au titre des commissions sur trois impayés

- 5.000 euros TTC au titre des clauses pénales contractuelles pour résiliation anticipée

Rejette le surplus des demandes de la société DE L. L. L.

Déboute la société DE L. L. L. et la SELARL H. ès-qualités de leurs demandes d'indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile

Dit que les dépens de la procédure seront employés en frais de procédure collective sans possibilité d'application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le présent arrêt a été signé par Jean-François Bancal, conseiller faisant fonction de président, et par Hervé Goudot, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.