CA AIX-EN-PROVENCE (2e ch.), 15 novembre 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 4035
CA AIX-EN-PROVENCE (2e ch.), 15 novembre 2012 : RG n° 11/10656 ; arrêt n° 2012/449
Publication : Jurica
Extrait : « Le contrat de vidéo-surveillance conclu par Monsieur X. est en relation directe avec son activité d'horticulteur car il avait pour but de sauvegarder le patrimoine de celle-ci, et peu importe que cette technique soit différente de celle de ladite activité et de l'intéressé. C'est donc à tort que Monsieur X. invoque le « déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties » de l’article L. 132-1 du Code de la Consommation, d'autant que sa mise à la retraite est un argument invoqué bien après la résiliation dudit contrat. »
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
DEUXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 15 NOVEMBRE 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/10656. Arrêt n° 2012/449. ARRÊT AU FOND. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de GRASSE en date du 10 janvier 2011 enregistré au répertoire général sous le n° 2010F92.
APPELANT :
Monsieur X.
né le [date], demeurant [adresse], représenté par la SCP MAYNARD SIMONI, avocats postulants au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Maître Claude LAUGA, avocat au barreau de GRASSE
INTIMÉES :
SAS LOCAM - LOCATION AUTOMOBILES MATÉRIELS,
dont le siège social est sis [adresse], représentée par la SELARL GOBAILLE & SARAGA-BROSSAT, avocats postulants au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, constituée aux lieu et place de la SCP PRIMOUT FAIVRE, avoué, précédemment constituée, plaidant par Maître Alain KOUYOUMDJIAN, avocat au barreau de MARSEILLE
SARL TELYS,
dont le siège social est sis [adresse], représentée par la SCP COHEN L. ET H. GUEDJ, avocats plaidants postulants au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 18 octobre 2012 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Monsieur FOHLEN, conseiller, a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de : Monsieur Robert SIMON, Président, Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller, Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 novembre 2012
ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 novembre 2012, Signé par Monsieur Robert SIMON, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
FAITS - PROCÉDURE - DEMANDES :
Le 10 avril 2007 Monsieur X. a pour son activité professionnelle d'horticulteur souscrit auprès de la SARL TELIS à l'enseigne ARTYS un « contrat de location » portant sur 1 enregistreur numérique, 1 moniteur écran, 4 caméras, 4 objectifs et 1 modem, pour une durée de 60 mois et un loyer mensuel de 182,00 euros HT lequel est encaissé par la SAS LOCAM. L'article 10 stipule la résiliation du contrat en cas de non-paiement des loyers, avec versement par le locataire des loyers restant dûs, ainsi que d'une indemnité de résiliation égale à 10 % des loyers TTC non encore échus. Le même jour Monsieur X. et la société TELIS ont souscrit un « contrat d'abonnement de vidéo-surveillance » pour une mensualité de même montant. Le procès-verbal de réception de matériels a été signé le 19 suivant.
La société LOCAM a résilié le contrat le 3 août 2009 pour défaut de paiement des loyers par Monsieur X. L'Avocat de ce dernier a par lettre du 12 suivant contesté auprès de la société TELIS l'engagement de son client et la durée du contrat. Le 14 septembre cette société a démonté l'installation.
Le 25 mars 2010 la société LOCAM a assigné devant le Tribunal de Commerce de GRASSE en paiement et résiliation Monsieur X., lequel a assigné la société TELIS le 17 mai suivant ; un jugement du 10 janvier 2011 a :
* débouté Monsieur X. ;
* condamné le même à payer à la société LOCAM la somme de 8.380,30 euros avec intérêts au taux légal à compter du 3 août 2009 ;
* ordonné à Monsieur X. de procéder à ses frais à la restitution du matériel à l'adresse du siège de la seconde dans le délai de 2 mois sous peine d'astreinte de 10,00 euros par jour de retard à compter de la signification ;
* condamné le même à payer au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile :
- la somme de 500,00 euros à la société LOCAM ;
- celle de 500,00 euros à la société TELIS.
Monsieur X. a régulièrement interjeté appel le 16 juin 2011. Par conclusions du 10 novembre suivant il soutient notamment que :
- il a signé le contrat daté du 10 avril 2007 mais post-daté, peu après avoir subi la destruction entière de son exploitation par un incendie survenu dans la nuit du 27 au 28 mars ; il était alors dans un état de faiblesse psychologique le rendant incapable de mesurer la portée de ses actes ; il n'aurait pas conclu pour 5 ans alors qu'il envisageait de cesser son activité d'horticulteur 2 ans plus tard le 31 mars 2009, ni sans possibilité de résiliation anticipée ;
- la télésurveillance est sans rapport direct avec son activité professionnelle, ce qui rend applicable l'article L. 332-1 [en réalité L. 132-1] du Code de la Consommation ; est abusive et donc nulle de plein droit la clause permettant à son seul cocontractant, mais pas à lui-même, de résilier le contrat avant terme ; la cessation de son activité est un motif légitime de résiliation du contrat.
L'appelant demande à la Cour d'infirmer le jugement et de :
- à titre principal :
* dire et juger qu'il a vu son consentement vicié par l'erreur ;
* dire le contrat nul en vertu de l’article 1109 du Code Civil ;
* condamner la société LOCAM à lui rembourser la somme de 4.368,00 euros correspondant aux 24 mois de loyers indûment payés ;
* débouter la même ;
- à titre subsidiaire :
* dire et juger que le matériel a fait l'objet d'une restitution à la société TELIS dès le 14 septembre 2009 ;
* dire et juger que la clause de résiliation unilatérale du contrat de télésurveillance est abusive ;
* dire et juger qu'il avait un motif légitime pour résilier le contrat ;
* dire et juger qu'il a valablement résilié le contrat dès le 12 août 2009 ;
* au besoin prononcer la résiliation judiciaire du contrat ;
* lui donner acte de ce qu'il reconnaît devoir l'arriéré à hauteur de 729,67 euros ;
* dire n'y avoir lieu à application de la clause pénale ;
* débouter la société LOCAM ;
- à titre principal et subsidiaire condamner in solidum la société LOCAM et la société TELIS à lui payer la somme de 4.000,00 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
Concluant le 2 septembre 2011 la SARL TELIS répond notamment que :
- pendant 2 ans Monsieur X. a réglé les échéances avec régularité sans émettre la moindre contestation ;
- l'intéressé est un professionnel expérimenté ayant l'habitude de négocier avec ses clients et fournisseurs et donc rompu à la vie des affaires ; il ne peut invoquer avoir donné son consentement par erreur, et ne démontre pas la faiblesse de son état psychologique ni l'extorsion de sa signature ;
- la clause de l'article 10 du contrat n'est pas soumise à l’article L. 132-1 du Code de la Consommation, puisque Monsieur X. a souscrit non comme consommateur mais en sa qualité de professionnel et en rapport direct avec son activité professionnelle ;
- Monsieur X. pouvait résilier le contrat en cas d'inexécution par son cocontractant, mais pas pour un autre motif, ni pour une prétendue cessation d'activité au 31 mars 2009 qu'il n'a pas invoquée alors au surplus qu'il a continué à payer les échéances jusqu'en mai suivant.
L'intimée demande à la Cour de :
- confirmer le jugement ;
- condamner Monsieur X. à lui payer la somme de 3.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
Concluant le 12 septembre 2011 la SAS LOCAM répond notamment que :
- elle est un organisme financier qui n'intervient pas directement dans le contrat entre Monsieur X. et la société TELIS ; la fraude invoquée par le premier (abus de faiblesse) n'est pas démontrée, l'intéressé s'étant engagé en connaissance de cause et ayant réceptionné le matériel dont il a pris possession et qui a fonctionné ;
- le Code de la Consommation est inapplicable à un contrat conclu par un professionnel pour les besoins de son activité ; Monsieur X. s'est engagé pour 60 mois et non pour 24.
L'intimée demande à la Cour, vu les articles 1134, 1139, 1146 et 1147 du Code Civil, de :
- débouter Monsieur X. ;
- dire le contrat valable, et rejeter la demande tendant à son annulation pour vice du consentement ;
- dire inapplicable le Code de la Consommation au litige ;
- confirmer le jugement ;
- condamner Monsieur X. à lui verser une somme de 800,00 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 septembre 2012.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE L’ARRÊT :
Monsieur X. ne démontre nullement ni que le contrat portant la date du 10 avril 2007 a été post-daté, ni que son consentement a été vicié lorsqu'il s'est engagé avec la société TELIS puisqu'un délai de 13 jours s'était écoulé depuis l'incendie de son exploitation, et qu'il exerce son activité d'horticulteur depuis le 12 novembre 1984 d'où une expérience des affaires ayant duré 22 années ; au surplus Monsieur X. n'a pas critiqué la réception des matériels faite le 19 avril suivant, non plus que les 2 interventions techniques de la société TELIS des 26 juillet et 27 septembre 2007, et surtout a régulièrement payé les loyers mensuels pendant plus de 2 ans sans émettre ni critique ni même observation sur la régularité de cet engagement.
Tant lors de ce dernier qu'au cours de ces plus de 2 ans Monsieur X. n'a écrit à la société TELIS ou à la société LOCAM pour invoquer son départ à la retraite le 31 mars 2009. En outre le premier loyer impayé date non d'avril 2009 mais du mois suivant, et l'intéressé n'a pas répondu à la notification de résiliation du contrat faite le 3 août et reçue le 5 qu'il prenait sa retraite. De plus si Monsieur X. a cessé son activité au 31 mars 2009 comme le précise le Registre du Commerce et des Sociétés, son numéro à ce dernier lors de la signature du contrat (XXX) a été repris à l'identique par le Répertoire SIRENE pour une activité également de lui ayant commencé le 10 avril suivant.
Le contrat de vidéo-surveillance conclu par Monsieur X. est en relation directe avec son activité d'horticulteur car il avait pour but de sauvegarder le patrimoine de celle-ci, et peu importe que cette technique soit différente de celle de ladite activité et de l'intéressé. C'est donc à tort que Monsieur X. invoque le « déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties » de l’article L. 132-1 du Code de la Consommation, d'autant que sa mise à la retraite est un argument invoqué bien après la résiliation dudit contrat.
Le jugement est confirmé pour avoir débouté Monsieur X. et l'avoir condamné à exécuter ses obligations contractuelles.
Enfin l'équité ne permet pas de rejeter en totalité les demandes des deux intimées au titre des frais irrépétibles d'appel.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
DÉCISION :
La Cour, statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire.
Confirme le jugement du 10 janvier 2011.
Condamne en outre Monsieur X. à payer au titre des frais irrépétibles d'appel :
* à la SARL TELIS une indemnité de 1.500,00 euros ;
* à la SAS LOCAM une indemnité de 800,00 euros.
Rejette toutes autres demandes.
Condamne Monsieur X. aux dépens d'appel, avec application de l’article 699 du Code de Procédure Civile.
Le GREFFIER. P/ Le PRÉSIDENT empêché, M. Baudouin FOHLEN, Conseiller
- 5870 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Notion d’activité professionnelle - Activité globale ou spécifique
- 5905 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Indices - Finalité du contrat - Protection et sécurisation de l’activité
- 5953 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation générale
- 5954 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation par activité
- 5955 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Protection de l’entreprise - Alarmes et surveillance : présentation par cour d’appel