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CA COLMAR (2e ch. civ. sect. A), 29 novembre 2012

Nature : Décision
Titre : CA COLMAR (2e ch. civ. sect. A), 29 novembre 2012
Pays : France
Juridiction : Colmar (CA), 2e ch. civ. sect. A
Demande : 11/03817
Décision : 764/2012
Date : 29/11/2012
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 21/07/2011
Numéro de la décision : 764
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2012-029967
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4067

CA COLMAR (2e ch. civ. sect. A), 29 novembre 2012 : RG n° 11/03817 ; arrêt n° 764/2012 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Il s'évince de l'ensemble de ces clauses claires et non équivoques, que la commune intention des parties était de rendre divisibles les deux conventions, de sorte que l'anéantissement de l'une ne peut priver de cause les obligations nées de l'autre. C'est vainement que la SARL MONT LIBAN qui est une société commerciale et n'a donc pas n'a pas la qualité de consommateur ou de non professionnel au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, (Civ. 1ère, 11 déc. 2008, pourvoi n° 07-18.128) prétend qu'il s'agirait d'une clause abusive. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE COLMAR

DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE SECTION A

ARRÊT DU 29 NOVEMBRE 2012

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 2 A 11/03817. Arrêt n° 764/2012. Décision déférée à la Cour : jugement du 30 juin 2011 du TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE de STRASBOURG.

 

APPELANTE et défenderesse :

La SAS LOCAM

prise en la personne de son représentant légal, ayant son siège social [adresse], représentée par Maîtres ACKERMANN & HARNIST, avocats à COLMAR

 

INTIMÉE et demanderesse :

La SARL MONT LIBAN

prise en la personne de son représentant légal, ayant son siège social [adresse], représentée par Maîtres HEICHELBECH, RICHARD-FRICK & CHEVALLIER-GASCHY, avocats à COLMAR

 

COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 18 octobre 2012, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Adrien LEIBER, Président, Madame Martine CONTE, Conseiller, Madame Isabelle DIEPENBROEK, Conseiller, qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats : Madame Laurence VETTOR

ARRÊT : Contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de Procédure Civile. - signé par Monsieur Adrien LEIBER, Président et Madame Nathalie NEFF, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Ouï Madame Isabelle DIEPENBROEK, Conseiller en son rapport,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

FAITS, PROCÉDURE et PRÉTENTIONS des PARTIES :

Le 12 novembre 2009 la SARL MONT LIBAN qui exploite un restaurant à Strasbourg a conclu avec la SARL WIN CO un contrat de prestation de conditionnement d'air et de location portant sur la fourniture d'un système de chauffage réversible.

La SARL WIN CO a cédé à la SAS LOCAM le contrat de financement.

Prétendant que le système de chauffage mis en place ne répondait pas à ses attentes, la SARL MONT LIBAN a fait citer les 25 mai et 24 septembre 2010 la SAS LOCAM et la SARL WIN CO devant le tribunal de grande instance de Strasbourg aux fins de voir, au terme de ses dernières écritures :

- prononcer l'annulation du contrat conclu avec la SARL WIN CO pour vice du consentement et manquement à son devoir d'information,

- condamner la SARL WIN CO au paiement d'une somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- ordonner la restitution de la somme de 861,12 euros versée à la SAS LOCAM,

- rejeter la demande reconventionnelle de la SAS LOCAM,

- subsidiairement, condamner la SARL WIN CO à la garantir de toute condamnation prononcée au bénéfice de la SAS LOCAM.

La SAS LOCAM a conclu au rejet de toute demande dirigée contre elle et a formé une demande reconventionnelle en paiement de la somme de 12.916,80 euros au titre des loyers et de 1.291,68 euros au titre de la clause pénale, outre intérêts, suite à la résiliation du contrat.

Par jugement réputé contradictoire en date du 30 juin 2011, la SARL WIN CO n'ayant pas comparu, le tribunal a rejeté l'ensemble des demandes.

La SAS LOCAM a interjeté appel de ce jugement le 21 juillet 2011 intimant uniquement la SARL MONT LIBAN qui a formé appel incident et provoqué contre la SARL WIN CO pour reprendre ses demandes initiales.

La SARL WIN CO a été assignée à personne habilitée le 30 décembre 2011.

Par conclusions déposées le 8 février 2012, la SAS LOCAM conclut à l'infirmation du jugement entrepris. Elle demande à la cour de dire qu'elle est étrangère au contentieux existant entre la SARL MONT LIBAN et la SARL WIN CO et d'accueillir ses prétentions de première instance qu'elle réitère. Elle conclut enfin au rejet de toute demande formée contre elle et sollicite le versement d'une indemnité de procédure de 1.200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions du 20 août 2012, la SARL MONT LIBAN conclut au rejet de l'appel, au débouté de la SAS LOCAM et à sa condamnation au paiement de la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur appel incident et provoqué, elle demande l'annulation de l'ensemble contractuel constitué par le contrat de prestation de conditionnement d'air et de location, la restitution par la SAS LOCAM de la somme de 861,12 euros et la condamnation de la SARL WIN CO au paiement de la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts ainsi qu'à la garantir, le cas échéant, de toute condamnation à intervenir au bénéfice de la SAS.

LOCAM. En tant que de besoin, elle sollicite une expertise technique. Elle sollicite enfin la condamnation de la SARL WIN CO au paiement d'une indemnité de procédure de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour rejeter la demande formée par la SARL MONT LIBAN, le premier juge a constaté d'une part, que les seuls documents produits relatifs au contrat ne permettaient ni de qualifier le contrat ni de déterminer les obligations respectives des parties et d'autre part, qu'aucun élément de preuve n'était produit s'agissant des prétendus vices du consentement.

De la même manière, le tribunal a considéré que la demande reconventionnelle de la SAS LOCAM ne pouvait prospérer sur la seule production de son courrier de résiliation.

La SAS LOCAM fait valoir qu'elle ne s'est portée cessionnaire que du seul contrat de location et que les échéances du contrat étant demeurées impayées, elle a notifié sa résiliation à la SARL MONT LIBAN par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 26 mai 2010.

Elle soutient que la SARL MONT LIBAN a été parfaitement informée de la cession par l'envoi d'une facture unique de loyers le 24 novembre 2009 et qu'elle peut donc lui opposer les conditions générales du contrat de location, notamment l'article 8 qui stipule que la réception par le bailleur du procès-verbal de réception du matériel attestant de sa conformité, emporte exécution définitive et irrévocable du contrat pour toute sa durée, sauf à informer le bailleur dans un délai de 48 h de la non conformité du matériel. Or le procès-verbal de livraison a été établi le 20 novembre 2009 et la première réclamation n'a été adressée à la SARL WIN CO que le 11 janvier 2010.

Elle en déduit que la signature du procès-verbal de réception sans restriction ni réserve emporte obligation de payer les loyers.

Elle ajoute que l'intimée, qui est une société commerciale, ne peut invoquer les dispositions du code la consommation et qu'elle ne peut se prévaloir d'une interdépendance des contrats, laquelle a été expressément exclue par les stipulations contractuelles qui précisent que l'attention du locataire a été attirée sur l'absence d'indivisibilité entre les conventions qui restent distinctes.

La SARL MONT LIBAN prétend que son consentement a été vicié par une erreur sur les qualités substantielles du matériel, dans la mesure où elle croyait acquérir un système de chauffage performant pour l'ensemble de ses locaux alors qu'en réalité, il s'agit tout au plus, d'un chauffage d'appoint ne couvrant que 15 % de ses besoins effectifs. Elle invoque également le dol, la SARL WIN CO l'ayant assurée que l'installation proposée était parfaitement adaptée à ses besoins et ayant omis de l'informer des caractéristiques essentielles du système proposé.

Elle fait valoir que les contrats de fourniture du matériel et de location font l'objet d'un seul et même contrat, et que dès lors la SAS LOCAM s'est totalement substituée à la SARL WIN CO pour l'exécution du contrat. Elle invoque l'indivisibilité des prestations qui font l'objet d'un même contrat comportant les conditions générales applicables aux deux prestations et d'un loyer unique et soutient qu'il y a bien interdépendance des contrats, nonobstant les dispositions contractuelles contraires, qui sont abusives et doivent être réputée non écrites. Elle ajoute que la jurisprudence visée par la SAS LOCAM relative aux effets du procès-verbal de livraison est sans emport, ni la livraison du matériel ni sa conformité n'étant contestées. Subsidiairement, elle sollicite la réduction de la clause pénale.

L'instance a été déclarée interrompue à l'égard de la SARL WIN CO le 20 septembre 2012 suite à son admission au bénéfice de la liquidation judiciaire.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 20 septembre 2012.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

La procédure étant interrompue à l'égard de la SARL WIN CO seules seront examinés les demandes formées par et contre la SAS LOCAM.

À hauteur de cour est produit l'original du contrat de prestations de conditionnement d'air et de location conclu le 12 novembre 2009 entre la SARL MONT LIBAN et la SARL WIN CO.

Il est établi que la SARL MONT LIBAN a été avisée le 24 novembre 2009 de la cession du contrat de location à la SAS LOCAM, qui lui a adressé une facture unique de loyers.

Pour s'opposer à la demande de la SAS LOCAM, la SARL MONT LIBAN invoque l'interdépendance des deux contrats qui sont établis sur un document unique et soutient que du fait de l'indivisibilité des obligations respectives, l'anéantissement de l'un des contrats emporte nécessairement la caducité de l'autre.

L'article 4 des conditions générales du contrat de location intitulé « autonomie du contrat » précise que :

- le locataire a été rendu attentif à l'indépendance juridique existant entre le contrat de location et le contrat de prestation de service concernant le bien loué,

- l'encaissement simultané de loyers et de redevances de prestation de services n'implique aucune indivisibilité entre les conventions qui restent distinctes,

- le locataire reconnaît que le contrat de prestation ou de fourniture qui a pu être signé n'est pas interdépendant du contrat de location et renonce expressément et irrévocablement à toute suspension de paiement des termes du présent contrat qui serait motivée par un litige avec le fournisseur ou le prestataire de service.

L'article 6 dispose que le bailleur a reçu mandat d'encaisser, en même temps que les loyers, les redevances dues aux prestataires de service à charge pour lui de les reverser mais qu'il n'assume aucune responsabilité dans l'exécution desdites prestations et que le locataire s'interdit de refuser le paiement des loyers pour toute cause fondée sur un contentieux lié à l'exécution ou à l'inexécution des prestations de service par le prestataire qui en est chargé.

Il s'évince de l'ensemble de ces clauses claires et non équivoques, que la commune intention des parties était de rendre divisibles les deux conventions, de sorte que l'anéantissement de l'une ne peut priver de cause les obligations nées de l'autre. C'est vainement que la SARL MONT LIBAN qui est une société commerciale et n'a donc pas n'a pas la qualité de consommateur ou de non professionnel au sens de l'article L. 132-1 du code de la consommation, (Civ. 1ère, 11 déc. 2008, pourvoi n° 07-18.128) prétend qu'il s'agirait d'une clause abusive.

Il n'est pas contesté que le matériel a été livré, que la SARL MONT LIBAN a cessé de payer les loyers et que la SAS LOCAM a, conformément à l'article 13 A du contrat, régulièrement prononcé la résiliation du contrat après une mise en demeure adressée par lettre recommandée avec accusé de réception le 26 mai 2010 restée vaine. La SAS LOCAM, est donc fondée, en application de l'article 13 B 2° du contrat à réclamer paiement des loyers impayés et à échoir ainsi que d'une indemnité de 10 % à titre de clause pénale.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté la demande de la SARL MONT LIBAN en restitution des loyers versés et de l'infirmer en ce qu'il a débouté la SARL MONT LIBAN de sa demande reconventionnelle. Cette demande sera accueillie, y compris en ce qui concerne la clause pénale de 10 %, dont le caractère manifestement excessif n'est pas démontré.

La SARL MONT LIBAN qui succombe supportera la charge des dépens de première instance et d'appel afférents à l'instance dirigée contre la SAS LOCAM, ainsi que d'une indemnité de procédure de 1200 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, sa propre demande de ce chef étant rejetée.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

CONSTATE l'absence de contestation quant à la recevabilité de l'appel principal et de l'appel incident ;

DÉCLARE l'appel principal bien fondé et l'appel incident mal fondé ;

CONFIRME le jugement du tribunal de grande instance de Strasbourg en date du 30 juin 2011 en ce qu'il a débouté la SARL MONT LIBAN de ses demandes dirigées contre la SAS LOCAM ;

INFIRME le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SAS LOCAM, de sa demande reconventionnelle ;

Statuant à nouveau de ce chef,

CONDAMNE la SARL MONT LIBAN à payer à la SAS LOCAM, la somme de 12.916,80 euros (douze mille neuf cent seize euros quatre vingt centimes) ainsi que la somme de 1.291,68 euros (mille deux cent quatre vingt onze euros soixante huit centimes) au titre de la clause pénale, lesdites sommes portant intérêts au taux légal à compter du 26 mai 2010, date de réception de la mise en demeure ;

DÉBOUTE la SARL MONT LIBAN de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile dirigée contre la SAS LOCAM ;

CONDAMNE la SARL MONT LIBAN aux dépens de première instance et d'appel afférents à l'instance dirigée contre la SAS LOCAM, ainsi qu'à payer à cette dernière la somme de 1.200 euros (mille deux cents euros) sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Le Greffier                Le Président