CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 20 décembre 2012
CERCLAB - DOCUMENT N° 4094
CA PARIS (pôle 4 ch. 9), 20 décembre 2012 : RG n° 11/03573
Publication : Juris-Data n° 2012-030442
Extrait : « Attendu qu'il résulte de ces éléments qu'il n'est établi, ni que M. X. a expressément sollicité une augmentation du montant du crédit consenti, ni que le prêteur pouvait contractuellement manifester son accord en ce sens, sans contourner les dispositions protectrices des articles L. 311-8 et suivants du code de la consommation (dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi du 1er juillet 2010 applicable à la cause) ; que surtout, une telle clause laisse penser que le prêteur ne doit pas, pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du crédit initial, délivrer à l'emprunteur une nouvelle offre que ce dernier doit formellement accepter, et que l'emprunteur ne dispose donc pas à cette occasion de la faculté, d'ordre public, de rétracter son acceptation ; qu'elle contrevient manifestement à l'objectif du législateur d'information de l'emprunteur sur l'ensemble des caractéristiques du crédit, et notamment la charge des remboursements, et du délai de réflexion ; que, créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, et ce au détriment du consommateur, elle s'analyse en une clause abusive, réputée non écrite conformément aux dispositions de l'article L. 132-1 du code précité ; qu'il en résulte que l'augmentation de l'ouverture de crédit en vertu de ladite clause est sans incidence sur la détermination du point de départ du délai de forclusion ».
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 4 CHAMBRE 9
ARRÊT DU 20 DÉCEMBRE 2012
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/03573. (3 pages). Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 décembre 2010 -Tribunal d'Instance de MONTREUIL-SOUS-BOIS - RG n° 11-10-000248.
APPELANTE :
SA BNP PARIBAS
représentée par son Représentant légal, Représentée par la SELARL GUIZARD ET ASSOCIÉS en la personne de Maître Michel GUIZARD (avocats au barreau de PARIS, toque : L0020), Assistée de la SELARL DOUCHET DE LAVENNE Associés en la personne de Maître Bénédicte DE LAVENNE-BORREDON (avocats au barreau de PARIS, toque : J131)
INTIMÉ :
Monsieur X.
Assignation devant la Cour d'Appel en date du 29 avril 2011 contenant dénonciation des conclusions délivrée Monsieur X. par remise à l'étude de l'huissier
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 14 novembre 2012, en audience publique, devant la Cour composée de : Monsieur Alain SADOT, Président, Mme Patricia LEFEVRE, Conseillère, Madame Joëlle CLÉROY, Conseillère, qui en ont délibéré
Greffier, lors des débats : Mme Léna ETIENNE
ARRÊT : RENDU PAR DÉFAUT - par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile. - signé par Monsieur Alain SADOT, président et par Mme Léna ETIENNE, greffier présent lors du prononcé.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Par arrêt du 27 septembre 2012 auquel il est ici fait référence pour l'exposé des faits et la procédure antérieure, la cour a ordonné le qu'une réouverture des débats afin de permettre à la société BNP PARIBAS de présenter toutes observations sur une éventuelle forclusion de son action en recouvrement de la créance née en exécution d'un contrat de crédit permanent consenti à Monsieur X. le 7 juin 2005.
Dans ses conclusions déposées le 9 novembre 2012, la société BNP PARIBAS soutient que le montant maximum autorisé de 9.500 euros constitue le montant du crédit consenti, et que l'augmentation de la réserve initialement fixée peut être accordée à l'emprunteur dans cette limite sur sa demande, qui n'a pas à être formulée par écrit. Elle soutient que le nouveau montant apparaît bien sur le relevé d'août 2005, et qu'une nouvelle offre n'était donc pas nécessaire.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Attendu que, comme déjà énoncé dans l'arrêt du 27 septembre 2012, selon offre préalable acceptée le 7 juin 2005, la société BNP PARIBAS a consenti à M. X. un crédit permanent, dénommé « Réserve Provisio » ; que si cette offre prévoit que le montant maximum autorisé par le prêteur est fixé à 9.500 euros, le paragraphe suivant énonce que la « Réserve Provisio » est de 1.500 euros, et que ce montant pourra évoluer dans la limite du montant maximum ;
Attendu que les conditions générales de cette prévoient que « l'augmentation du crédit... ne peut résulter du seul usage des moyens d'utilisation du crédit Réserve et doit faire l'objet d'une demande expresse de l'emprunteur » ; que la société BNP PARIBAS ne produit aucun courrier de M. X. contenant une telle demande, ni aucun autre élément établissant que l'emprunteur aurait expressément sollicité une augmentation du montant du crédit, d'autant que, comme déjà énoncé dans l'arrêt précédent, le relevé des opérations du mois d'août 2005 fait apparaître la mise à disposition de Monsieur X. d'un capital total de 1.620 euros depuis la date d'ouverture du crédit ; qu'il doit être ajouté que cet usage des moyens d'utilisation du crédit pour un montant supérieur à la réserve initialement fixée constituent certainement une violation des conditions de l'offre « Provisio », qui interdit toute possibilité d'augmentation de cette réserve conformément aux dispositions du deuxième alinéa du paragraphe B de l'article I de ces conditions générales ;
Attendu qu'il résulte de ces éléments qu'il n'est établi, ni que M. X. a expressément sollicité une augmentation du montant du crédit consenti, ni que le prêteur pouvait contractuellement manifester son accord en ce sens, sans contourner les dispositions protectrices des articles L. 311-8 et suivants du code de la consommation (dans leur rédaction antérieure à celle issue de la loi du 1er juillet 2010 applicable à la cause) ; que surtout, une telle clause laisse penser que le prêteur ne doit pas, pour chaque nouveau crédit que constitue l'augmentation du crédit initial, délivrer à l'emprunteur une nouvelle offre que ce dernier doit formellement accepter, et que l'emprunteur ne dispose donc pas à cette occasion de la faculté, d'ordre public, de rétracter son acceptation ; qu'elle contrevient manifestement à l'objectif du législateur d'information de l'emprunteur sur l'ensemble des caractéristiques du crédit, et notamment la charge des remboursements, et du délai de réflexion ; que, créant un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties, et ce au détriment du consommateur, elle s'analyse en une clause abusive, réputée non écrite conformément aux dispositions de l'article L. 132-1 du code précité ; qu'il en résulte que l'augmentation de l'ouverture de crédit en vertu de ladite clause est sans incidence sur la détermination du point de départ du délai de forclusion ;
Attendu que dans ces conditions, la révision du plafond du crédit consenti, c'est-à-dire de la « Réserve Provisio » ne pouvait être opérée que dans les formes prévues par les articles précités ; qu'en l'absence d'une telle offre, le dépassement du montant du crédit consenti, lorsqu'il n'est pas suivi d'une régularisation, constitue une défaillance de l'emprunteur qui fait courir le délai de la forclusion prévue par l'article L. 311-37 précité ;
Attendu qu'il ressort des mentions figurant sur les relevés mensuels produits par la société BNP PARIBAS que le premier dépassement du crédit consenti, caractérisé le 18 août 2005 lors d'un versement de 770 euros, n'a jamais été suivi d'une régularisation ayant pour effet de faire revenir le montant de la somme due à un niveau inférieur à 1.500 euros ; qu'au contraire, le solde débiteur n'a cessé de croître pour atteindre, notamment, les niveaux suivants :
- 25 août 2005 : 2.671,56 euros,
- 25 décembre 2005 : 3.548,65 euros,
- 25 mars 2006 : 5.353,28 euros,
- 25 juin2006 : 9.343,57 euros,
- 25 septembre 2006 : 9.651,29 euros,
- 25 janvier 2007 : 9.654,70 euros,
- 25 avril 2007 : 9.179,53 euros,
- 25 septembre 2007 : 9.177,50 euros,
- 25 décembre 2007 : 8.700,46 euros,
- 25 mars 2008 : 8.526,63 euros,
- 25 juin 2008 : 8.678,37 euros,
- 25 septembre 2008 : 9.170,71 euros ;
Attendu que l'action en paiement de la société BNP PARIBAS, qui n'a pas été exercée dans les deux ans suivant le premier incident de paiement non régularisé du 18 d'août 2005, se trouvait indubitablement atteinte par la forclusion ; qu'il convient donc de réformer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société demanderesse de ses prétentions de ce chef, alors que son action devait être déclarée irrecevable ;
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
RÉFORME le jugement rendu le 20 décembre 2010 par le tribunal d'instance de Montreuil-sous-Bois en ce qu'il a débouté la société BNP PARIBAS de sa demande en condamnation de M. X. au paiement d'une somme de 9.576,05 euros au titre d'un crédit permanent consenti le 7 juin 2005,
DÉCLARE irrecevable l'action engagée par la société BNP PARIBAS de ce chef,
CONDAMNE la société BNP PARIBAS aux dépens.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 5745 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Conséquences sur l’issue du litige - Effet rétroactif - Point de départ d’une forclusion - Illustrations
- 6632 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 3 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Respect du contrat
- 6633 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 4 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Clauses abusives