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TGI MARSEILLE (10e ch. civ.), 5 mai 2008

Nature : Décision
Titre : TGI MARSEILLE (10e ch. civ.), 5 mai 2008
Pays : France
Juridiction : TGI Marseille. 10e ch.
Demande : 07/00784
Décision : 08/219
Date : 5/05/2008
Nature de la décision : Rejet
Date de la demande : 17/01/2007
Décision antérieure : CA AIX-EN-PROVENCE (1re ch. A), 27 octobre 2009
Numéro de la décision : 219
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4137

TGI MARSEILLE (10e ch. civ.), 5 mai 2008 : RG n° 07/00784 ; jugt n° 219 

(sur appel CA Aix-en-Provence (1re ch. A), 27 octobre 2009 : RG n° 08/10513)

 

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MARSEILLE

DIXIÈME CHAMBRE CIVILE

JUGEMENT DU 5 MAI 2008

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 07/00784. Jugement n° 08/219.

COMPOSITION DU TRIBUNAL : L'affaire a été débattue le 17 mars 2008 en audience publique devant le Tribunal composé de : Madame Aurore POITEVIN, Président.

Greffier lors des débats : Madame Michèle VIDAL

Le Président entendu en son rapport. A l'issue de laquelle une date de délibéré a été fixée au : 5 mai 2008 Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aura lieu par mise à disposition au greffe le 5 mai 2008.

NATURE DU JUGEMENT : Contradictoire et en premier ressort, H.R.

[minute page 2]

EN LA CAUSE DE :

DEMANDERESSE :

Madame X.,

demeurant [adresse], représentée par Maître Paul MIMRAN, avocat au barreau de MARSEILLE,

 

CONTRE :

DÉFENDERESSE :

La SARL CARRÉ D'AIR,

dont le siège social est sis [adresse], prise en la personne de son Gérant en exercice, domicilié audit siège, représentée par Maître Antoine FORNET, avocat au barreau de MARSEILLE, pour avocat postulant et par Maître Gérard D'HERS, avocat au barreau de TOULON, pour avocat plaidant,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Vu l'assignation délivrée le 17 janvier 2007 par Madame X. à la SARL CARRÉ D’AIR,

Vu les conclusions de la SARL CARRÉ D’AIR signifiées le 7 septembre 2007 et reçues au greffe le 11 septembre 2007,

Vu les conclusions de Madame X. signifiées le 25 septembre 2007 et reçues au greffe le 26 septembre 2007,

Vu l'ordonnance de clôture en date du 7 janvier 2008 et le renvoi de l'affaire à l'audience du 17 mars 2008.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Attendu que suivant contrat en date du 20 mars 2006, Madame X. a acquis auprès de la SARL CARRÉ D’AIR un mobil-home au prix de 19.200 euros ;

Qu'il lui a été livré en avril 2006 ;

Qu'ayant constaté divers désordres (affaissement et distorsion du plancher entraînant le voilage des murs, fenêtres et plafond, décollage des fenêtres n'assurant plus l'isolation, châssis tordu), Madame X. a sollicité son assureur aux fins d'organisation d'une mesure d'expertise amiable ;

[minute page 3] Que l'expert a déposé son rapport le 23 octobre 2006 ;

Que Madame X. a alors assigné la SARL CARRÉ D’AIR devant le Tribunal de Grande Instance de Marseille par acte d'huissier en date du 17 janvier 2007 aux fins de voir :

- prononcer la résolution du contrat de vente précité,

- condamner la défenderesse à :

* lui restituer le prix de vente soit la somme de 19.200 euros avec intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2006, sous astreinte définitive de 100 euros par jour de retard à compter du jugement,

* faire procéder à l'enlèvement du mobil-home défectueux se situant sur son terrain sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement,

*lui délivrer une facture pour l'achat du mobil-home sous astreinte définitive de 150 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement,

* l'indemniser du préjudice de jouissance subi évalué à la somme mensuelle de 1.500 euros depuis le mois de mars 2006 et ce jusqu'au jugement,

* lui verser les sommes de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts et 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Qu'elle sollicite également le bénéfice de l'exécution provisoire ;

Que la SARL CARRÉ D’AIR s'est opposée à ces demandes et a sollicité à titre subsidiaire, l'organisation d'une mesure d'expertise judiciaire ;

Attendu que contrairement à ce que soutient la défenderesse, Madame X. n'invoque pas comme fondement à l'action engagée la garantie des vices cachés mais le manquement à l'obligation de délivrance du vendeur ;

Attendu que l'article 1184 du Code Civil précise :

« La condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l'une des deux parties ne satisfera point à son engagement.

Dans ce cas, le contrat n'est point résolu de plein droit. La partie envers laquelle l'engagement n'a point été exécuté, a le choix de forcer l'autre à l'exécution de la convention lorsqu'elle est possible, ou d'en demander la résolution avec dommages et intérêts.

La résolution doit être demandée en justice, et il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances » ;

Qu'aux termes des articles 1603 et 1604 du Code Civil, le vendeur a l'obligation de remettre à l'acquéreur une chose conforme aux dispositions contractuelles ;

[minute page 4] Attendu qu'en l'espèce, le contrat signé par les parties le 20 mars 2006 prévoyait que Madame X. achetait un mobil-home CARRÉ D’AIR ;

Que ce document ne précisait pas qu'il s'agissait d'un modèle ancien ou du modèle mis en exposition, de telle sorte que la demanderesse pensait légitimement acheter un mobil-home neuf ;

Que ne pouvant utiliser ledit bien, Madame X. a demandé l'organisation d’une mesure d'expertise ;

Que la SA EUREA a été missionnée et a déposé son rapport le 23 octobre 2006 ;

Que la SARL CARRÉ D’AIR en conteste les conclusions indiquant que les opérations expertales n'ont pas été menées contradictoirement ;

Mais attendu que la défenderesse reconnaît avoir été convoquée à l'accedit fixé et avoir assisté au début de la réunion ;

Qu'un technicien accompagnait le représentant de la SARL CARRÉ D’AIR ;

Que la défenderesse a choisi de partir avant la fin des investigations, excipant d'un climat délétère et d'une remise en cause systématique de ses observations ;

Qu'elle ne peut dès lors reprocher le caractère non contradictoire de l'expertise dans la mesure où elle a refusé d'y participer ;

Qu'en outre, elle ne verse aux débats aucune pièce de nature à remettre en cause les constatations et conclusions de l'expert précité ;

Que dans ces conditions, elle ne peut solliciter l'organisation d'une nouvelle mesure d'expertise ;

Attendu que l'expert Monsieur T. a fait les constatations suivantes :

« Le mobil-home et la terrasse sont calés à l'aide d'agglomérés de béton et de morceaux de bois déblais posés directement sur le terrain naturel. Généralement, les calages sont réalisés à l'aide d'un piètrement métallique réglable et adapté au modèle.

Les calages d'extrémité prennent appui sous l'aile des poutres du châssis, réalisées à l'aide d'un assemblage de tôles galvanisées pliées d'épaisseur 2 mm et démunies à ce niveau d'un élément raidisseur.

Ce dispositif non réalisé conformément aux règles élémentaires de résistance des matériaux provoque un affaissement ponctuel des poutres préjudiciables à la stabilité de l'ensemble, et de nature à provoquer une déformation du châssis.

[minute page 5] Par ailleurs les assemblages des tôles pliées sont réalisés à l'aide de points et cordons de soudure non protégés contre la corrosion et qui de ce fait se sont oxydés.

Au surplus, les points de soudure ont détruit la galvanisation d'origine du métal. La tranche des tôles pliées démunies de toute protection galvanisée est déjà affectée de corrosion.

Ce type d'ouvrage métallique ne peut être durablement protégé contre la corrosion que par trempage dans un bain de galvanisation après soudure des éléments.

Le niveau de l'attaque de l'oxydation est de nature à confirmer que cet assemblage de type artisanal date de plusieurs années.

Le bardage en pignon Sud est réalisé à l'aide de clins de bois vissés, dont les têtes de vis ont trop profondément pénétré à l'intérieur du bois provoquant un vieillissement prématuré de la fibre du bois.

L'habillage bois pour la fermeture du vide sous châssis reste inachevé.

La gouttière Ouest est démunie d'un talon d'about de sorte que l'eau ruisselle contre le bardage bois.

La position de cette même gouttière est telle qu'elle échappe à l'égout de toiture, notamment à l'aplomb de la baie coulissante devant la terrasse, provoquant un rideau d'eau à chaque pluie.

Ce défaut conjugué à une position de la terrasse bois située à un niveau trop élevé par rapport à l'appui de la baie coulissante démunie d'évacuation extérieure provoque des infiltrations d'eau à l'intérieur du mobil-home.

(...)

Les menuiseries PVC ne sont pas correctement calées dans le plan vertical. D'une manière générale, le PVC des fermetures est affecté de rayures, notamment au niveau du seuil de la baie, prouvant que ce mobil-home était déjà usagé avant son installation chez l'assurée (...) »

Qu'il conclut son rapport de la manière suivante :

« Le mobil-home de fabrication artisanale, au montage hasardeux et démuni de protection suffisante, était déjà usagé lors de l'acquisition par l'Assurée qui pensait l'avoir acheté neuf.

Le Tiers qui ne pouvait l'ignorer ne l'a pour autant pas porté à la connaissance de l'Assurée. Le contrat de vente n'en fait pas état »

Qu'il résulte ainsi de ce qui précède que la SARL CARRÉ D’AIR a livré à Madame X. un mobil-home ancien lequel comportait un certain nombre de désordres alors que la demanderesse souhaitait en acquérir un neuf et pensait que tel était le cas puisque le contrat de vente ne mentionnait nullement que le mobil-home vendu avait été exposé et avait servi ;

Que la SARL CARRÉ D’AIR a ainsi manqué à son obligation de délivrance d'une chose conforme aux stipulations contractuelles ;

[minute page 6] Qu'il résulte du rapport d'expertise que Madame X. ne peut user du mobil-home acheté ;

Que le manquement de la défenderesse à ses obligations contractuelles apparaît ainsi suffisamment important pour justifier que soit prononcée la résolution de la vente conclue le 20 mars 2006 ;

Que la SARL CARRÉ D’AIR devra alors procéder à l'enlèvement du mobil-home litigieux à ses frais et restituer à Madame X. le prix de vente réglé soit la somme de 19.200 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de l'assignation, en l'absence de mise en demeure adressée en ce sens à la défenderesse antérieurement à l'acte introductif d'instance, les courriers versés aux débats ne faisant état que des désordres constatés ;

Attendu qu'au vu de l'ancienneté du litige, il convient de fixer une astreinte définitive de 15 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision mais seulement pour la reprise du mobil-home ;

Attendu que la demande tendant à l'établissement d'une facture constatant le prix de vente du mobil-home devient sans objet du fait de la résolution de ladite vente ;

Attendu qu'il ne peut être contesté au vu des conclusions de l'expert que Madame X. n'a pu utiliser le mobil-home acheté dans lequel elle projetait d'habiter pendant le temps nécessaire à la réalisation de travaux à son domicile notamment en vue d'aménager quelques pièces en chambres d'hôtes ;

Qu'elle réclame en réparation du préjudice subi une somme de 1.500 euros par mois à compter du mois de mars 2006 et jusqu'au jugement. ;

Que cette demande ne peut prospérer sur la période précitée dans la mesure où elle ne justifie nullement de ce qu'elle devait habiter pendant tout ce temps dans le mobil-home ;

Qu'en effet, une fois les travaux d'aménagement de son logement terminés, elle avait vocation à le réintégrer puisque seulement une partie de sa maison devait lui permettre d'exercer son activité de location de chambres d'hôtes, comme cela résulte du courrier adressé par la demanderesse au maire de la commune où elle réside ;

Que Madame X. avait dans cette correspondance indiqué que les travaux devaient durer 6 à 8 mois ;

Que passé ce délai, il n'est nullement établi qu'elle devait user quotidiennement de son mobil-home ;

[minute page 7] Que dans ces conditions, l'indemnisation du préjudice de jouissance subi ne pourra être que forfaitaire ;

Qu'il sera ainsi alloué une somme de 4.500 euros à la demanderesse en réparation dudit préjudice ;

Attendu que Madame X. ne rapporte la preuve d'aucun autre préjudice notamment moral ;

Qu'elle sera ainsi déboutée de sa demande de dommages et intérêts supplémentaire ;

Attendu que l'équité commande de faire application des dispositions de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit de la demanderesse et de lui octroyer une somme de 1.500 euros sur ce fondement ;

Attendu que l'article 515 du Nouveau Code de Procédure Civile précise que le juge ordonne l'exécution provisoire lorsqu'il l'estime nécessaire et compatible avec la nature de l’affaire ;

Qu'en l'espèce, il convient eu égard à l'ancienneté du litige d'ordonner l'exécution provisoire de la présente décision ;

Attendu enfin que la SARL CARRÉ D’AIR succombant à l'instance sera déboutée de ses demandes et devra supporter les entiers dépens.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

LE TRIBUNAL,

Statuant en audience publique, par jugement contradictoire, en matière civile ordinaire, en premier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi,

PRONONCE la résolution de la vente intervenue le 20 mars 2006 entre la SARL CARRÉ D’AIR et Madame X. portant sur un mobil-home avec terrasse en bois attenante marque CARRÉ D’AIR ;

En conséquence,

CONDAMNE la SARL CARRÉ D’AIR à restituer à Madame X. la somme de DIX NEUF MILLE DEUX CENTS EUROS (19.200 euros) avec intérêts au taux légal à compter du 17 janvier 2007, correspondant au prix de vente ;

[minute page 8] DIT que la SARL CARRÉ D’AIR devra procéder à l'enlèvement du mobil-home se trouvant sur le terrain appartenant à Madame X., dans le délai de 2 mois à compter de la signification de la présente décision ;

DIT que passé ce délai, la SARL CARRÉ D’AIR sera redevable d'une somme de 15 euros par jour de retard ;

CONDAMNE la SARL CARRÉ D’AIR à verser à Madame X. la somme de QUATRE MILLE CINQ CENTS EUROS (4.500 euros) à titre de dommages et intérêts ;

CONDAMNE la SARL CARRÉ D’AIR à verser à Madame X. la somme de MILLE CINQ CENTS EUROS (1.500 euros) sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

ORDONNE l'exécution provisoire de la présente décision ;

DÉBOUTE Madame X. du surplus de ses demandes ;

DÉBOUTE la SARL CARRÉ D’AIR de ses demandes ;

CONDAMNE la SARL CARRÉ D’AIR aux dépens avec distraction au profit de Maître Paul MIMRAN, Avocat au Barreau de Marseille.

AINSI JUGÉ ET PRONONCÉ PAR MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA DIXIÈME CHAMBRE DU TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MARSEILLE LE 5 MAI 2008.

SIGNE PAR MADAME POITEVIN, PRÉSIDENT ET MADAME VIDAL, GREFFIER PRÉSENT LORS DE LA MISE A DISPOSITION AU GREFFE DE LA DÉCISION.

LE GREFFIER,        LE PRÉSIDENT,