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CA REIMS (ch. civ. 1re sect.), 7 mai 2007

Nature : Décision
Titre : CA REIMS (ch. civ. 1re sect.), 7 mai 2007
Pays : France
Juridiction : Reims (CA), ch. civ. sect. 1
Demande : 05/00299
Décision : 07/410
Date : 7/05/2007
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Juris Data
Numéro de la décision : 410
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2007-337511
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4231

CA REIMS (ch. civ. 1re sect.), 7 mai 2007 : RG n° 05/00299 ; arrêt n° 410

Publication : Juris-Data n° 2007-337511

 

Extrait : « Attendu qu'aux termes de l'alinéa 1 de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;

Attendu qu'est assimilé au consommateur le professionnel qui, à l'occasion de sa profession, passe un contrat dont l'objet n'est pas directement destiné à la mise en œuvre de son activité professionnelle, ce qui est manifestement le cas de Madame X. puisque son commerce portait sur la sonorisation et l'animation de spectacle d'amateur ;

Attendu que la durée du contrat soit 48 mois et l'absence de possibilité de rupture anticipée par Madame X. apparaissent manifestement abusives car elles lui interdisaient, même de manière justifiée, de mettre fin avant terme au contrat et de l'obliger à continuer d'acquitter une somme d'argent correspondant à une prestation qui ne lui était plus fournie ; Attendu que ces clauses créent indiscutablement un déséquilibre significatif entre les parties en conférant un avantage pécuniaire au prestataire dépourvu de toute contrepartie ;

Attendu que les clauses visées aux articles 12 et 22 du contrat du 31 mai 2001 doivent en conséquence être réputées non écrites au regard des dispositions de l'article L. 132-1 précité ».

 

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE CIVILE PREMIÈRE SECTION

ARRÊT DU 7 MAI 2007

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 05/00299. ARRÊT n° 410.

 

APPELANTE :

d'un jugement rendu le 22 novembre 2004 par le Tribunal de Commerce de TROYES,

Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE

[adresse], COMPARANT, concluant par la SCP GENET - BRAIBANT avoués à la Cour, et ayant peur conseil Maître Alain NIZOU-LESAFFRE, avocat au barreau de PARIS,

 

INTIMÉE :

Madame X.

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2006/XX du [date] accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de REIMS), COMPARANT, concluant par la SCP DELVINCOURT - JACQUEMET - CAULIER-RICHARD, avoués à la Cour, et ayant pour conseil Maître Vincent NICOLAS, avocat-au barreau de REIMS.

 

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ : Monsieur MAUNAND, Président de Chambre, Madame SOUCIET, Conseiller, Madame HUSSENET, Conseiller

GREFFIER : Madame Francine COLLARD, adjoint administratif, faisant fonction de Greffier lors des débats et Madame Maryline THOMAS, Greffier lors du prononcé,

DÉBAT : A l'audience publique du 11 avril 2007, où l'affaire a été mise en délibéré au 07 Mai 2007,

ARRÊT : Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 7 mai 2007 et signé par Monsieur Yves MAUNAND, Président de Chambre, et Madame THOMAS, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 1 - N.B. première page non paginée] FAITS, PROCÉDURE ET MOYENS DES PARTIES :

La SA CIPE FRANCE, dénommée ultérieurement la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE, a conclu le 31 mai 2001 avec Madame X. un contrat d'abonnement de télésurveillance pour le fonds de commerce de sonorisation, animation, spectacle amateur qu'elle exploitait sous l'enseigne « A. SPECTACLE » et le matériel a été livré et installé le 31 juillet 2001.

Le 24 août 2001 les locaux professionnels de Madame X. ont fait l'objet d'un cambriolage au cours duquel le matériel de sonorisation a été dérobé ;

Suite à cet événement, Madame X. a dû cesser ses activités faute d'outils de travail et de fonds suffisants pour le remplacer.

Estimant que la cause du contrat de télésurveillance avait disparu et que la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE n'avait manifestement pas rempli ses obligations, Madame X. a cessé de régler les mensualités ;

Se fondant sur les dispositions de l'article 22 du contrat du 31 mai 2001, la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE a, le 1er août 2002, mis en demeure Madame X. d'avoir à lui régler le solde des mensualités échues depuis 1er novembre 2001 et restant à courir jusqu'à la fin du contrat majorés de 10 %.

Aucun règlement n'ayant été effectué, la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE a fait donner assignation le 17 février 2004 devant le TRIBUNAL DE COMMERCE DE TROYES à Madame X. afin que soit constatée la résiliation de plein droit du contrat du 31 mai 2001 et ce, 8 jours après l'envoi de la mise en demeure du 1er août 2002 et que la défenderesse soit condamnée à lui payer la somme de 8.087,79 Euros avec intérêts à compter du 1er août 2002 avec capitalisation des intérêts échus, une indemnité de 1.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et à supporter les entiers dépens..

Madame X. s'est opposée aux réclamations formulées par la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE, a demandé au tribunal à titre principal de constater la disparition de la cause du contrat en cours d'exécution et à titre subsidiaire la non exécution de ses obligations par la demanderesse et sa condamnation à lui payer une somme de 3.000 Euros à titre de dommages et Intérêts pour action abusive et à supporter les entiers dépens.

Par jugement du 22 novembre 2004 le TRIBUNAL DE COMMERCE DE TROYES, estimant que le contrat de télésurveillance ne pouvait se poursuivre du fait de la disparition de sa cause principale, l'a déclaré nul, a débouté en conséquence la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE de toutes ses demandes, l'a condamné à payer à Madame X. une somme de 1.000 Euros à titre de dommages et l'intérêts et à supporter les entiers dépens.

[minute page 2] La Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE a interjeté appel du jugement du 22 décembre 2004. [N.B. comp. pour la date supra indiquant le 22 novembre]

Le 11 octobre 2008 la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE a régularisé des conclusions tendant à ce que la cour

- la déclare recevable et bien fondée en son appel et infirme le jugement du 22 décembre 2004 en toutes ses dispositions,

- constate que le contrat du 31 mai 2001 a été résilié de plein droit huit jours après l'envoi de la mise en demeure du 1er août 2002 et condamne en conséquence Madame X. à lui payer la somme de 8.087,78 Euros en principal avec intérêts à compter de la mise en demeure avec capitalisation des intérêts, une indemnité de 2.000 Euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et à supporter les dépens,

- déboute l'intimée de toutes ses réclamations.

Elle a fait valoir notamment :

- que la décision entreprise était contestable sur le principe dans la mesure où la cessation d'activité de Madame X. ne saurait être considérée comme ayant fait disparaître la cause dû contrat d'abonnement de télésurveillance qu'elle avait conclu ni lui permettre d'échapper aux engagements contractuels souscrits,

- que l'intimée ne démontre nullement que l'installation n'aurait pas fonctionné lors du cambriolage dont elle a été victime,

- qu'elle n'est nullement tenue à une obligation de résultat, le contrat visant expressément une obligation de moyen et qu'au surplus l'annulation de cette clause n'entraînerait pas l'annulation du contrat en son entier,

- que la mention de deux adresses différentes sur les deux exemplaires du contrat incombe à Madame X.,

- que le contrat régularisé le 31 mal 2001 a été conclu pour une durée irrévocable de 48 mois d'août 2001 à juillet 2005 et prévoyait en son article 22 qu'a défaut de paiement de l'une quelconque des mensualités, la résiliation interviendrait de plein droit huit jours après une mise en demeure restée sans effet et que le solde des mensualités non réglées et restant à courir majoré de 10 % deviendrait de plein droit et immédiatement exigible,

- que Madame X. n'a réglé que les mensualités des mois d'août à octobre 2001 et de juillet 2002 et n'a pas donné suite à la mise en demeure qui lui a été adressée par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 1er août 2002.

Par écritures du 11 octobre 2006, Madame X. a demandé à la Cour :

- de déclarer la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE tant irrecevable que non fondée en son appel,

- de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et de condamner l'appelante en tous les dépens.

[minute page 3] Elle a exposé :

- que lors du cambriolage du 24 août 2001 commis dans ses locaux, censés être mis sous la surveillance de la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE, son matériel de sonorisation a été dérobé ce qui ne lui a plus permis de continuer l'exploitation de son commerce de sonorisation, animation de spectacle amateur, qu'elle a cessé le 21 octobre 2001,

- qu'il ne peut être sérieusement admis que l'appelante puisse réclamer le règlement de sommes d'argent à titre de prestations non fournies, car cela signifierait qu'une seule partie satisferait à ses obligations en l'absence même de contrepartie de la part de son cocontractant, la cause ayant disparu en cours d'exécution du contrat,

- qu'au regard des dispositions de l'article 1131 du code civil, la demande de l'appelante ne peut donc prospérer,

- qu'en tous les cas le contrat d'adhésion qui lui a été soumis comporte manifestement des clauses abusives, créant un déséquilibre contractuel évident conduisant à ne générer finalement des obligations qu'a sa charge, qui ne peuvent trouver application,

- que la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE était bien tenue à une obligation de résultat qu'elle n'a manifestement pas respecté lors du cambriolage survenu le 24 août 2001,

- que c'est avec raison que les premiers Juges ont estimé abusive la procédure engagée à son encontre par la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE, le cambriolage étant intervenu dans le premier mois d'application du contrat de télésurveillance.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 4 avril 2007 ;

Les plaidoiries ont été entendues le 11 avril 2007 et le délibéré a été fixé au 7 mai 2007 ;

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

SUR CE :

Sur les demandes de la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE :

Attendu que le contrat de télésurveillance conclu le 31 mai 2001 entre la Société CIPE, aux droit de laquelle vient désormais la société ADT TÉLÉSURVEILLANCE, et Madame X. prévoyait :

- en son article 8 une obligation de moyen concernant le fonctionnement du matériel de détection et télésurveillance désigné à l'article 28, à l'exclusion de toute obligation de résultat concernant la prévention ou l'empêchement d'intrusion, de vol, de vandalisme ou d'incendie,

- en ses articles 12 et 22 une durée de 48 mois avec une possibilité de résiliation au seul profit de CIPE et une obligation pour le client de restituer te matériel et de lui verser une somme égale au montant des loyers impayés au Jour de la résiliation majorée des indemnités restant à courir jusqu'à la fin du contrat majorée d'une clause pénale de 10 % sans préjudice de tous dommages et intérêts qu'Il pourrait devoir ;

Attendu qu'aux termes de l'alinéa 1 de l'article L. 132-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet [minute page 4] ou pour effet de créer, au détriment du non-professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat ;

Attendu qu'est assimilé au consommateur le professionnel qui, à l'occasion de sa profession, passe un contrat dont l'objet n'est pas directement destiné à la mise en œuvre de son activité professionnelle, ce qui est manifestement le cas de Madame X. puisque son commerce portait sur la sonorisation et l'animation de spectacle d'amateur ;

Attendu que la durée du contrat soit 48 mois et l'absence de possibilité de rupture anticipée par Madame X. apparaissent manifestement abusives car elles lui interdisaient, même de manière justifiée, de mettre fin avant terme au contrat et de l'obliger à continuer d'acquitter une somme d'argent correspondant à une prestation qui ne lui était plus fournie ;

Attendu que ces clauses créent indiscutablement un déséquilibre significatif entre les parties en conférant un avantage pécuniaire au prestataire dépourvu de toute contrepartie ;

Attendu que les clauses visées aux articles 12 et 22 du contrat du 31 mai 2001 doivent en conséquence être réputées non écrites au regard des dispositions de l'article L. 132-1 précité ;

Attendu que le 24 août 2001 le cambriolage commis dans les locaux de Madame X., malgré le système de télésurveillance, et dont les auteurs n'ont pu être retrouvés a entraîné la cessation de l'activité professionnelle comme le justifie l'extrait du registre de commerce faisant état d'une radiation au 12 novembre 2001 pour cessation complète d'activité ;

Que dès lors et sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens soulevés par les parties tendant aux mêmes fins, il y a lieu de considérer que le contrat du 31 mai 2001 a cessé ses effets entre les parties pour un motif légitime à savoir la cessation de toute activité du commerce de Madame X. à la suite du cambriolage subi le 24 août 2001 ;

Que le jugement entrepris doit en conséquence être confirmé en ce qu'il a débouté la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE de ses demandes en principal relatives aux échéances dues depuis novembre 2001 jusqu'au terme du contrat, intérêts, majorations et frais ;

 

Sur la demande de dommages et Intérêts de Madame X. :

Attendu que c'est à juste titre que les premiers juges ont condamné la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE à verser à Madame X. une somme de 1.000 Euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, en soulignant que la demanderesse était parfaitement au courant de la cessation d'activité du commerce résultant des conséquences du cambriolage des locaux, objet de la télésurveillance ;

[minute page 5]

Sur l'article 700 du nouveau code de procédure civile :

Que compte, tenu des termes de l'arrêt, la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE ne peut bénéficier des dispositions de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

 

Sur les dépens :

Attendu que la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE supportera les entiers dépens de première Instance et d'appel ;

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Statuant publiquement et, par arrêt contradictoire,

Confirme, par substitution de motifs, le jugement du 22 novembre 2004 rendu par le TRIBUNAL DE COMMERCE DE TROYES ;

Déboute la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE de sa réclamation au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Condamne la Société ADT TÉLÉSURVEILLANCE aux dépens d'appel avec faculté de recouvrement direct au profit de la SCP DELVINCOURT JACQUEMET CAULIER RICHARD ; avoués à la Cour, conformément aux dispositions de l'article 899 du nouveau code de procédure, civile et de celles régissant l'aide juridictionnelle,

LE GREFFIER         LE PRÉSIDENT