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TI QUIMPER, 31 janvier 2013

Nature : Décision
Titre : TI QUIMPER, 31 janvier 2013
Pays : France
Juridiction : Quimper (TI)
Demande : 11-12-001028
Décision : 82/2013
Date : 31/01/2013
Nature de la décision : Sursis à statuer
Mode de publication : Juris Data
Numéro de la décision : 82
Référence bibliographique : Juris-Data n° 2013-002718
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4264

TI QUIMPER, 31 janvier 2013 : RG n° 11-12-001028 ; jugt n° 82/2013

Publication : Juris-Data n° 2013-002718

 

Extraits : 1/ « Il ressort, en premier lieu, de cet exposé que tant sous l'empire de la loi ancienne que de la loi nouvelle, le pouvoir réglementaire national a autorisé le recours à des clauses de variation unilatérale du taux d'intérêt selon « les variations en plus ou en moins du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature ou du taux qui figure dans les barèmes qu'il diffuse au public ». Il apparaît, en second lieu, que le législateur national a encadré ces clauses d'intérêt par l'obligation faite au prêteur d'informer l'emprunteur de la variation à venir du taux d'intérêt et de la faculté qui lui est offerte de mettre un terme au contrat en procédant, sans nouvelle utilisation, au remboursement des sommes prêtées assorties des intérêts au taux initial.

Dans deux avis du 17 mai 2004 relatifs à des ouvertures de crédit renouvelable assorties d'une carte de crédit, la Commission des clauses abusives, organisme d'État régi par les articles L. 534-1 et suivants du code de la consommation, a rendu deux avis aux termes desquels « la clause de variation du taux de l'intérêt est abusive en ce qu'elle ne soumet pas cette variation à des critères objectifs préalablement convenus ». Ces avis, consultatifs, ne lient pas les juridictions nationales.

La Chambre Commerciale de la Cour de Cassation a estimé, dans un arrêt du 3 mai 2006 (n° 02-11211) que « la clause pénale d'un contrat de prêt immobilier fixant le montant de l'indemnité due au prêteur par l'emprunteur dont la défaillance a entraîné la résolution du contrat ne peut revêtir un caractère abusif dès lors qu'elle a été stipulée en application des articles L. 312-22 et R. 312-3 du code de la consommation ». Dans un arrêt du 8 mars 2012 (n° 11-12089), la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation a s'agissant d'une ouverture de crédit au taux d'intérêt variable assortie d'une calte de crédit souscrite le 16 mars 1999, considéré, sans retenir le moyen soulevé par la partie défenderesse tiré du caractère abusif de la stipulation d'intérêt au contrat de crédit, que dès lors que la société de crédit avait, en vertu de ses obligations légales et réglementaires, adressé à l'emprunteur des lettres de reconduction du contrat l'informant du TEG qu'elle appliquait, le taux d'intérêt était déterminable et, partant, opposable à l'emprunteur.

Il se déduit de ces deux décisions que la juridiction suprême considère que la clause d'intérêt ne peut pas être qualifiée d'abusive tant qu'elle est conforme à un modèle réglementaire et que le prêteur a respecté ses obligations légales d'information du prêteur. Ainsi, nonobstant son obligation de garantir l'effectivité du droit de l'Union en matière de clauses abusives, le juge national se heurte à une présomption de régularité de la clause d'intérêt qui lui interdit d'en contrôler le contenu. »

2/ « La stipulation, insérée dans le modèle type des conditions générales des contrats offerts par la SA FINAREF, n'a pas fait l'objet de négociations individuelles. Elle ne donne aucune indication relative au montant et aux modalités de calcul et de variation « du taux de base que FlNAREF applique aux opérations de même nature, ou du taux qui figure dans les barèmes qu'elle diffuse auprès du public » dont elle fait état. Aucune information complémentaire n'est apportée dans le corps du contrat. La définition de ce taux de base est laissée à la libre appréciation du prêteur. Il n'évolue pas selon un taux de référence, extérieur aux parties, spécifié au contrat. Il n'est pas non plus précisé les circonstances susceptibles de motiver l'application d'un nouveau taux. Le prêteur peut à tout moment le faire évoluer. Ainsi, sans que soient stipulées de raisons valables au contrat, la stipulation d'intérêt autorise le prêteur à modifier de manière unilatérale, à sa discrétion, le taux des intérêts applicables dès lors qu'il en informe au préalable l'emprunteur laissé libre de résilier le contrat dans un délai restreint.

Faute pour l'emprunteur de s'opposer à la modification du taux débiteur, le nouveau taux s'impose à lui sans qu'il y ait consenti. Son silence autorise le prêteur à modifier unilatéralement le taux des intérêts, élément essentiel du contrat de prêt.

Aucune contrepartie à cette clause de modification unilatérale n'est prévue en faveur de l'emprunteur.

Dès lors, la stipulation d'intérêt est susceptible de caractériser, au détriment de l'emprunteur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat. Cette appréciation ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat de crédit ni sur l'adéquation entre le taux des intérêts, d'une part, et les montants prêtés en contrepartie, d'autre part.

Dans ces conditions, il convient de surseoir à statuer et de poser la question préjudicielle suivante : La directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs s'oppose-t-elle à une interprétation du droit national validant les clauses de variation unilatérale du taux des intérêts des contrats de crédit laissant, en l'absence de raisons valables spécifiées au contrat, à l'appréciation du prêteur les motifs de variation du taux et les modalités de son calcul, dès lors que ces clauses sont conformes à un intitulé défini par voie réglementaire et que l'emprunteur a respecté les prescriptions légales relatives à l'information de l'emprunteur en cours d'exécution du contrat ? ».

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

TRIBUNAL D’INSTANCE DE QUIMPER

JUGEMENT DU 31 JANVIER 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 11-12-001028. Jugement n° 82/2013.

 

DEMANDEUR(S) :

La Société CA CONSUMER FINANCE venant aux droits de la SA FINAREF

[adresse], Représentée par la SCP PETIT-LE DRESSAY et LECLERCQ, avocat au barreau de RENNES Substituée par Maître LAURET, Avocat au Barreau de QUIMPER.

 

DÉFENDEUR(S) :

Madame X. née Y.

Monsieur X.

[adresse], non comparants, ni représentés.

 

PRÉSIDENT : François LE MASNE de CHERMONT

GREFFIER : Brigitte GATIGNON

PLAIDOIRIES : 6 décembre 2012

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

[minute page 2] Suivant offre préalable acceptée le 18 octobre 2009, la SA FINAREF a consenti à Monsieur et Madame X. un prêt renouvelable assorti d'une carte de crédit.

Par acte d'huissier en date du 5 novembre 2012, la SA CA CONSUMER FINANCE venant aux droits de la SA FINAREF a fait assigner Monsieur et Madame X. afin d'obtenir leur condamnation solidaire au paiement de la somme de 4.483,01 € assortie des intérêts au taux de 12,12 % l'an à compter du 14 juin 2012 au titre du contrat de prêt et de la somme de 500,00 € au titre des frais irrépétibles, avec exécution provisoire.

A l'audience du 6 décembre 2012, la SA CA CONSUMER FINANCE a repris les prétentions énoncées dans l'assignation.

Interrogée sur le principe et l'opportunité d'une question préjudicielle relative à la directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs, la SA CA CONSUMER FINANCE a déclaré s'en rapporter à la décision du tribunal.

Les parties défenderesses citées à domicile, n'étaient ni présentes ni représentées.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS :

La réglementation de l'Union :

L'article 3 de la directive 93/13 dispose :

« 1. Une clause d'un contrat n'ayant pas fait l'objet d'une négociation individuelle est considérée comme abusive lorsque, en dépit de l'exigence de bonne foi, elle crée au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

2. Une clause est toujours considérée comme n'ayant pas fait l'objet d'une négociation individuelle lorsqu'elle a été rédigée préalablement et que le consommateur n'a, de ce fait, pas pu avoir d'influence sur son contenu, notamment dans le cadre d'un contrat d'adhésion.

Le fait que certains éléments d'une clause ou qu'une clause isolée aient fait l'objet d'une négociation individuelle n'exclut pas l'application du présent article au reste d'un contrat si l'appréciation globale permet de conclure qu'il s'agit malgré tout d'un contrat d'adhésion.

Si le professionnel prétend qu'une clause standardisée a fait l'objet d'une négociation individuelle, la charge de la preuve lui incombe.

[minute page 3] 3. L'annexe contient une liste indicative et non exhaustive de clauses qui peuvent être déclarées abusives.

L'article 4 de cette directive prévoit :

« 1. Sans préjudice de l'article 7, le caractère abusif d'une clause contractuelle est apprécié en tenant compte de la nature des biens ou services qui font l'objet du contrat et en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'à toutes les autres clauses du contrat, ou d'un autre contrat dont il dépend.

2. L'appréciation du caractère abusif des clauses ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation entre le prix et la rémunération, d'une part, et les services ou les biens à fournir en contrepartie, d'autre part, pour autant que ces clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible. »

L'article 5 de ladite directive se lit comme suit :

« Dans le cas des contrats dont toutes ou certaines clauses proposées au consommateur sont rédigées par écrit, ces clauses doivent toujours être rédigées de façon claire et compréhensible. En cas de doute sur le sens d'une clause, l'interprétation la plus favorable au consommateur prévaut. Cette règle d'interprétation n'est pas applicable dans le cadre des procédures prévues à l'article 7 paragraphe 2. »

Aux termes de l'article 6, paragraphe 1, de la même directive, « les États membres prévoient que les clauses abusives figurant dans un contrat conclu avec un consommateur par un professionnel ne lient pas les consommateurs, dans les conditions fixées par leurs droits nationaux, et que le contrat restera contraignant pour les parties selon les mêmes termes, s'il peut subsister sans les clauses abusives. »

L'article 7 de la directive 93/13 indique :

« 1. Les États membres veillent à ce que, dans l'intérêt des consommateurs ainsi que des concurrents professionnels, des moyens adéquats et efficaces existent afin de faire cesser l'utilisation des clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs par un professionnel.

2. Les moyens visés au paragraphe 1 comprennent des dispositions permettant à des personnes ou à des organisations ayant selon la législation nationale, un intérêt légitime à protéger les consommateurs de saisir, selon le droit national, les tribunaux ou les organes administratifs compétents afin qu'ils déterminent si des clauses contractuelles, rédigées [minute page 4] en vue d'une utilisation généralisée, ont un caractère abusif et appliquent des moyens adéquats et efficaces afin de faire cesser l'utilisation de telles clauses.

3. Dans le respect de la législation nationale, les recours visés au paragraphe 2 peuvent être dirigés, séparément ou conjointement, contre plusieurs professionnels du même secteur économique ou leurs associations qui utilisent ou recommandent l'utilisation des mêmes clauses contractuelles générales, ou de clauses similaires. »

Aux termes de l'article 8 de la directive 93/13, « les États membres peuvent adopter ou maintenir, dans le domaine régi par [cette] directive, des dispositions plus strictes, compatibles avec le traité, pour assurer un niveau de protection plus élevé au consommateur ».

Le paragraphe j) du point 1, de l'annexe de ladite directive, relative aux clauses visées à l'article 3, paragraphe 3, de celle-ci, mentionne « les clauses ayant pour objet ou pour effet : LB d'autoriser le professionnel à modifier unilatéralement les termes du contrat sans raison valable et spécifiée dans le contrat. »

La portée de ce paragraphe est précisée par le point 2 de l'annexe, spécifiant en son paragraphe b) que le paragraphe j) ne fait pas obstacle à des clauses selon lesquelles le fournisseur de services financiers se réserve le droit de modifier le taux d'intérêt dû par le consommateur ou dû à celui-ci, ou le montant de toutes autres charges afférentes à des services financiers, sans aucun préavis en cas de raison valable, pourvu que soit mise à la charge du professionnel l'obligation d'en informer la ou les autres parties contractantes dans les meilleurs délais et que celles-ci soient libres de résilier immédiatement le contrat.

Au point 26 de l'arrêt Océano Grupo Editorial et Salvat Editors (C-240/98 à C-244/98), la Cour a jugé que l'objectif poursuivi par l'article 6 de la directive 93/13, qui impose aux États membres de prévoir que les clauses abusives ne lient pas les consommateurs, ne pourrait être atteint si ces derniers devaient se trouver dans l'obligation de soulever eux même le caractère abusif de telles clauses. Dans des litiges dont la valeur est souvent limitée, les honoraires d'avocat peuvent être supérieurs à l'intérêt en jeu, ce qui peut dissuader le consommateur de se défendre contre l'application d'une clause abusive. S'il est vrai que, dans nombre d'États membres, les règles de procédure permettent dans de tels litiges aux particuliers de se défendre eux-mêmes, il existe un risque non négligeable que, notamment par ignorance, le consommateur n'invoque pas le caractère abusif de la clause qui lui est opposée. Il s'ensuit qu'une protection effective du consommateur ne peut être atteinte que si le juge national se voit reconnaître la faculté d'apprécier d'office une telle clause.

[minute page 5]

Le droit interne :

Le droit interne relatif aux clauses abusives :

L'article L. 132-1 alinéa 1 du code de la consommation prévoit que dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Aux termes de l'alinéa 3 de l'article précité, un décret détermine des types de clauses qui, eu égard à la gravité des atteintes qu'elles portent à l'équilibre du contrat, doivent être regardées, de manière irréfragable, comme abusives au sens du premier alinéa.

En vertu de l'alinéa 5, sans préjudice des règles d'interprétation prévues aux articles 1156 à 1161, 1163 et 1164 du code civil, le caractère abusif d'une clause s'apprécie en se référant, au moment de la conclusion du contrat, à toutes les circonstances qui entourent sa conclusion, de même qu'a toutes les autres clauses du contrat.

Selon l'alinéa 6, les clauses abusives sont réputées non écrites.

L'alinéa 7 prévoit que l'appréciation du caractère abusif des clauses au sens du premier alinéa ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat ni sur l'adéquation du prix ou de la rémunération au bien vendu ou au service offert pour autant que les clauses soient rédigées de façon claire et compréhensible.

L'alinéa 8 dispose que le contrat restera applicable dans toutes ses dispositions autres que celles jugées abusives s'il peut subsister sans lesdites clauses.

L'alinéa 9 spécifie que les dispositions de l'article L.132-1 sont d'ordre public, les parties ne pouvant y déroger.

En vertu du point 3 de l'article R. 132-1 du code de la consommation, dans les contrats conclus entre des professionnels et des non professionnels ou des consommateurs, sont de manière irréfragables présumées abusives, au sens des dispositions du premier et du troisième alinéa de l'article L. 132-1 et dès lors interdites, les clauses ayant pour objet ou pour effet de réserver au professionnel le droit de modifier unilatéralement les clauses du contrat relatives à sa durée, aux caractéristiques ou au prix du bien à livrer ou du service à rendre.

[minute page 6] Le paragraphe 2 de l'article R. 132-2-I du code de la consommation précise que le point précité ne fait pas obstacle à l'existence de clauses par lesquelles le fournisseur de services financiers se réserve le droit de modifier le taux d'intérêt dû par le non professionnel ou le consommateur ou dû à celui-ci, ou le montant de toutes les charges afférentes à des services financiers, sans aucun préavis en cas de motif légitime, pourvu que soit mise à la charge du professionnel l'obligation d'en informer la ou les autres parties contractantes dans les meilleurs délais et que celles-ci soient libres de résilier immédiatement le contrat ;

 

Le droit interne relatif aux clauses d'intérêt des contrats de crédit utilisables par fractions :

Les dispositions du code de la consommation, applicables au crédit dont il s'agit en l'espèce, souscrit le 18 octobre 2009, ont été modifiées par la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de transposition de la directive 2008/48/CE du 23 avril 2008 concernant les contrats de crédit aux consommateurs et abrogeant la directive 87/102/CEE,

L'article L. 311-13 ancien du code de la consommation imposait une rédaction de l'offre préalable de crédit conforme à des modèles types définis par voie réglementaire à l'article R. 311-6 ;

Le modèle type n° 4 annexé à l'ancien article R. 311-6 précité, prévoyait s'agissant des offres préalables de crédit renouvelable spécialement ouvert à cet effet, utilisable par fractions et assortie de moyens d'utilisation du compte, une clause de révision du taux d'intérêt ainsi rédigée

« Les intérêts sont calculés au taux nominal de :... %

Ce taux est révisable. Il suivra les variations en plus ou en moins du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature ou du taux qui figure dans les barèmes qu’il diffuse au public.

En cas de révision du taux, vous en serez préalablement informé par écrit (par courrier) avant la date d'application du nouveau taux.

Vous pouvez, dans un délai de trente jours après réception de cette information, sur demande écrite adressée au prêteur, refuser cette révision. Dans ce cas, votre droit à crédit prend fin et le remboursement du crédit déjà utilisé s'effectuera de manière échelonnée, sautait contraire de votre part, aux conditions applicables avant la modification que vous avez refusée. »

L'article L. 311-9 ancien, relatif aux ouvertures de crédit offrant à son bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de son choix, le montant du crédit consenti, indiquait en son troisième alinéa que « l'emprunteur doit pouvoir s'opposer aux modifications proposées, lors de la reconduction du contrat, jusqu'au moins vingt jours avant la date où celles-ci deviennent effectives, en utilisant un bordereau-réponse annexé aux informations communiquées par le prêteur ».

[minute page 7] Le quatrième alinéa spécifiait qu’« en cas de refus des nouvelles conditions de taux ou de remboursement proposées lors de la reconduction du contrat, l'emprunteur est tenu de rembourser aux conditions précédant les modifications proposées le montant de la réserve d'argent déjà utilisé, sans pouvoir, toutefois, procéder à une nouvelle utilisation de l'ouverture de crédit ».

L'article L. 311-9-1 ancien, disposait que, « s'agissant de l'opération de crédit visée à l'article L. 311-9, le prêteur est tenu d'adresser à l'emprunteur, mensuellement et dans un délai raisonnable avant la date de paiement, un état actualisé de l'exécution du contrat de crédit, faisant clairement référence à l'état précédent et précisant :

- la date d'arrêté du relevé et la date de paiement,

- la fraction du capital disponible,

- le montant de l'échéance, dont la part correspondant aux intérêts,

- le taux de la période et le taux effectif global,

- le cas échéant le coût des assurances,

- la totalité des sommes exigibles,

- le montant des remboursements déjà effectués depuis le dernier renouvellement, en faisant ressortir la part respective versée au titre du capital emprunté et celle versée au titre des intérêts et frais divers liés à l'opération de crédit,

- la possibilité pour l'emprunteur de demander à tout moment la réduction de sa réserve de crédit la suspension de son droit à l'utiliser ou la résiliation de son contrat,

- le fait qu'à tout moment l'emprunteur peut payer comptant tout ou partie du montant restant dû, sans se limiter au montant de la seule dernière échéance. »

L'article L. 311-18 nouveau, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010, renvoie pour tous les types de crédit, selon un modèle similaire à celui L. 311-13 ancien, à des textes réglementaires, les articles R. 311-5 et R. 311-5-1, qui définissent la liste des informations devant figurer au contrat de crédit.

S'agissant de la clause d'intérêt, l'article R. 311-5 e) contraint le prêteur à faire figurer les informations suivantes à l'offre préalable

« Le taux débiteur, les conditions applicables à ce taux, le cas échéant tout indice ou taux de référence qui se rapporte au taux débiteur initial, ainsi que les périodes, conditions et procédures d'adaptation du taux. Si différents taux débiteurs s'appliquent en fonction des circonstances, ces informations portent sur tous les taux applicables.

[minute page 8] Lorsqu'il s'agit d'un crédit renouvelable au sens de l'article L. 311-16, la mention suivante est ajoutée : « Ce taux est révisable. Il suivra les variations en plus ou en moins du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature ou du taux qui figure dans les barèmes qu'il diffuse auprès du public. En cas de révision du taux, vous en serez préalablement informé par courrier avant la date effective d'application du nouveau taux. Vous pouvez, dans un délai de trente jours après réception de cette information, sur demande écrite adressée au prêteur, refuser cette révision. Dans ce cas, votre droit à crédit prend fin et le remboursement du crédit déjà utilisé s'effectuera de manière échelonnée, sauf avis contraire de votre part, aux conditions applicables avant la modification que vous avez refusée. »

Les dispositions des articles L. 311-9 et L. 311-9-1 anciens sont reprises aux articles L. 311-16 et L. 311-21 nouveaux issus de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010.

L'article L. 311-16 nouveau, relatif aux ouvertures de crédit qui, assortie ou non de l'usage d'une carte de crédit, offre à son bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de son choix, du montant du crédit consenti, impose en son troisième alinéa qu'il soit spécifié à l'offre préalable l'obligation faite au prêteur d'indiquer à l'emprunteur, trois mois avant l'échéance, les conditions de reconduction du contrat.

Les alinéas 8 et 9 explicitent l'objet de cette information en indiquant :

« L'emprunteur doit pouvoir s'opposer aux modifications proposées, lors de la reconduction du contrat, jusqu'au moins vingt jours avant la date où celles-ci deviennent effectives, en utilisant un bordereau-réponse annexé aux informations écrites communiquées par le prêteur. (...)

En cas de refus des nouvelles conditions de taux ou de remboursement proposés lors de la reconduction du contrat, l'emprunteur est tenu de rembourser aux conditions précédant les modifications proposées le montant de la réserve d'argent déjà utilisé, sans pouvoir, toutefois, procéder à une nouvelle utilisation de l'ouverture de crédit ».

L'article L. 311-21 nouveau ajoute :

« En cas de modification du taux débiteur, l'emprunteur en est informé par écrit ou sur un autre support durable, avant que la modification n'entre en vigueur. Cette information indique le montant des échéances après l'entrée en vigueur du nouveau taux débiteur ainsi que, le cas échéant, toute modification du nombre ou de la périodicité des échéances.

[minute page 9] Lorsque la modification du taux débiteur résulte d'une variation du taux de référence, que le nouveau taux de référence est rendu public par des moyens appropriés et que l'information relative au nouveau taux de référence est également disponible dans les locaux du prêteur, les parties peuvent convenir dans le contrat de crédit que cette information est communiquée périodiquement à l'emprunteur. »

Il ressort, en premier lieu, de cet exposé que tant sous l'empire de la loi ancienne que de la loi nouvelle, le pouvoir réglementaire national a autorisé le recours à des clauses de variation unilatérale du taux d'intérêt selon « les variations en plus ou en moins du taux de base que le prêteur applique aux opérations de même nature ou du taux qui figure dans les barèmes qu'il diffuse au public ».

Il apparaît, en second lieu, que le législateur national a encadré ces clauses d'intérêt par l'obligation faite au prêteur d'informer l'emprunteur de la variation à venir du taux d'intérêt et de la faculté qui lui est offerte de mettre un terme au contrat en procédant, sans nouvelle utilisation, au remboursement des sommes prêtées assorties des intérêts au taux initial.

Dans deux avis du 17 mai 2004 relatifs à des ouvertures de crédit renouvelable assorties d'une carte de crédit, la Commission des clauses abusives, organisme d'État régi par les articles L. 534-1 et suivants du code de la consommation, a rendu deux avis aux termes desquels « la clause de variation du taux de l'intérêt est abusive en ce qu'elle ne soumet pas cette variation à des critères objectifs préalablement convenus ». Ces avis, consultatifs, ne lient pas les juridictions nationales.

La Chambre Commerciale de la Cour de Cassation a estimé, dans un arrêt du 3 mai 2006 (n° 02-11211) que « la clause pénale d'un contrat de prêt immobilier fixant le montant de l'indemnité due au prêteur par l'emprunteur dont la défaillance a entraîné la résolution du contrat ne peut revêtir un caractère abusif dès lors qu'elle a été stipulée en application des articles L. 312-22 et R. 312-3 du code de la consommation ».

Dans un arrêt du 8 mars 2012 (n° 11-12089), la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation a s'agissant d'une ouverture de crédit au taux d'intérêt variable assortie d'une calte de crédit souscrite le 16 mars 1999, considéré, sans retenir le moyen soulevé par la partie défenderesse tiré du caractère abusif de la stipulation d'intérêt au contrat de crédit, que dès lors que la société de crédit avait, en vertu de ses obligations légales et réglementaires, adressé à l'emprunteur des lettres de reconduction du contrat l'informant du TEG qu'elle appliquait, le taux d'intérêt était déterminable et, partant, opposable à l'emprunteur.

[minute page 10] Il se déduit de ces deux décisions que la juridiction suprême considère que la clause d'intérêt ne peut pas être qualifiée d'abusive tant qu'elle est conforme à un modèle réglementaire et que le prêteur a respecté ses obligations légales d'information du prêteur.

Ainsi, nonobstant son obligation de garantir l'effectivité du droit de l'Union en matière de clauses abusives, le juge national se heurte à une présomption de régularité de la clause d'intérêt qui lui interdit d'en contrôler le contenu.

 

Le litige et la question préjudicielle :

La SA CA CONSUMER FINANCE venant aux droits de la SA FINAREF, en réclamant la condamnation de Monsieur et Madame X. au paiement de la somme de 4.483,01 € assortie des intérêts au taux de 12,12 % à compter du 14 juin 2012, se prévaut de la clause d'intérêt stipulée au contrat de crédit.

Cette clause stipulée à l'article 2 des conditions générales est ainsi rédigée :

« Les intérêts sont calculés au taux nominal suivant :

(i) pour un montant de crédit effectivement utilisé :

- inférieur ou égal à 1.524 € : 1,20 % par mois (Taux effectif global annuel - TEG : 12,95 % par an),

- compris entre 1.524 et 4.500,00 € : 1,20 % par mois (TEG : 12,95 % par an)

- utilisé supérieur à 4.500 € : 1,020 % par mois (TEG : 12,95 % par an)

(ii) pour les achats ou prestations de service réalisés au moyen de la carte VISA TACTIK et remboursés dans les conditions prévues au 3.1.2. ci-après :

- supérieurs à 150 € et inférieurs ou égaux à 300 € : taux nominal mensuel : 1,016 % (TEG : 12,90 % l'an)

- supérieurs à 300 € et inférieurs ou égaux à 600,00 € : taux nominal mensuel : 0,866 % (TEG 10,90 % l'an),

- supérieur à 600,00 € : taux nominal mensuel : 0,713 % (TEG : 8,90 % l'an).

Ces taux, en vigueur à la date d'impression, sont révisables. Ils suivront les variations en plus ou en moins du taux de base que FINAREF applique aux opérations de même nature, ou du taux qui figure dans les barèmes qu'elle diffuse auprès du public. En cas de révision du taux, vous serez préalablement informé par écrit (courrier) avant la date effective d'application du nouveau taux. Vous pouvez, dans un délai de trente jours [minute page 11] après réception de cette information, sur demande écrite adressée au prêteur, refuser cette révision. Dans ce cas, votre crédit prend fin, et le remboursement du crédit déjà utilisé s'effectuera de manière échelonnée, sauf avis contraire de votre part, aux conditions applicables avant la modification que vous avez refusée. »

La stipulation, insérée dans le modèle type des conditions générales des contrats offerts par la SA FINAREF, n'a pas fait l'objet de négociations individuelles.

Elle ne donne aucune indication relative au montant et aux modalités de calcul et de variation « du taux de base que FlNAREF applique aux opérations de même nature, ou du taux qui figure dans les barèmes qu'elle diffuse auprès du public » dont elle fait état. Aucune information complémentaire n'est apportée dans le corps du contrat. La définition de ce taux de base est laissée à la libre appréciation du prêteur. Il n'évolue pas selon un taux de référence, extérieur aux parties, spécifié au contrat.

Il n'est pas non plus précisé les circonstances susceptibles de motiver l'application d'un nouveau taux. Le prêteur peut à tout moment le faire évoluer.

Ainsi, sans que soient stipulées de raisons valables au contrat, la stipulation d'intérêt autorise le prêteur à modifier de manière unilatérale, à sa discrétion, le taux des intérêts applicables dès lors qu'il en informe au préalable l'emprunteur laissé libre de résilier le contrat dans un délai restreint.

Faute pour l'emprunteur de s'opposer à la modification du taux débiteur, le nouveau taux s'impose à lui sans qu'il y ait consenti. Son silence autorise le prêteur à modifier unilatéralement le taux des intérêts, élément essentiel du contrat de prêt.

Aucune contrepartie à cette clause de modification unilatérale n'est prévue en faveur de l'emprunteur.

Dès lors, la stipulation d'intérêt est susceptible de caractériser, au détriment de l'emprunteur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties découlant du contrat.

Cette appréciation ne porte ni sur la définition de l'objet principal du contrat de crédit ni sur l'adéquation entre le taux des intérêts, d'une part, et les montants prêtés en contrepartie, d'autre part.

[minute page 12] Dans ces conditions, il convient de surseoir à statuer et de poser la question préjudicielle suivante :

La directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs s'oppose-t-elle à une interprétation du droit national validant les clauses de variation unilatérale du taux des intérêts des contrats de crédit laissant, en l'absence de raisons valables spécifiées au contrat, à l'appréciation du prêteur les motifs de variation du taux et les modalités de son calcul, dès lors que ces clauses sont conformes à un intitulé défini par voie réglementaire et que l'emprunteur a respecté les prescriptions légales relatives à l'information de l'emprunteur en cours d'exécution du contrat ?

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

Le Tribunal statuant publiquement par mesure d'administration judiciaire insusceptible d'appel :

Sursoit à statuer ;

Pose à la Cour de Justice de l'Union européenne la question préjudicielle suivante

La directive 93/13/CEE du Conseil du 5 avril 1993 concernant les clauses abusives dans les contrats conclus avec les consommateurs s'oppose-t-elle à une interprétation du droit national validant les clauses de variation unilatérale du taux des intérêts des contrats de crédit laissant, en l'absence de raisons valables spécifiées au contrat, à l'appréciation du prêteur les motifs de variation du taux et les modalités de son calcul, dès lors que ces clauses sont conformes à un intitulé défini par voie réglementaire et que l'emprunteur a respecté les prescriptions légales relatives à l'information de l'emprunteur en cours d'exécution du contrat ?

Ordonne, dans l'attente de la décision de la Cour, le retrait de la présente affaire du rôle du Tribunal ;

Dit qu'elle sera réinscrite à réception de la décision de la Cour ou à la demande de la partie la plus diligente.

LE GREFFIER         LE PRÉSIDENT