CA AIX-EN-PROVENCE (2e ch.), 4 avril 2013
CERCLAB - DOCUMENT N° 4388
CA AIX-EN-PROVENCE (2e ch.), 4 avril 2013 : RG n° 11/15107 ; arrêt n° 2013/151
Publication : Jurica
Extrait : « La société LE PONT C. n'est pas fondée à opposer à la société FRANFINANCE LOCATION l'inexécution par la société LGB CONCEPT de son engagement de « partenariat publicitaire » au regard de la clause 6.4 du contrat selon laquelle le locataire renonce à tout recours contre le bailleur en cas de défaillance dans l'exécution du contrat principal.
En outre, le « partenariat publicitaire » dont il est fait état dans un bon de commande qui semble affecté d'une erreur de date n'est pas concrétisé par un contrat définissant son objet, notamment les prestations publicitaires, et les obligations respectives des parties, et le liquidateur de la société LGB CONCEPT n'a pas été mis en cause.
L’article 132-1 du code de la consommation n'est pas applicable aux contrats conclus entre commerçants. »
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
DEUXIÈME CHAMBRE
ARRÊT DU 4 AVRIL 2013
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 11/15107. Arrêt n° 2013/151. Arrêt au fond. Décision déférée à la Cour : Jugement du Tribunal de Commerce de TOULON en date du 13 avril 2011 enregistré au répertoire général sous le R.G. n° 2009F648.
APPELANTE :
SARL LE PONT C.
prise en la personne de son gérant en exercice, dont le siège social est sis [adresse], représentée par la SCP COHEN L. ET H. GUEDJ, avocats postulants au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, plaidant par Maître Bernard AZIZA, avocat au barreau de TOULON
INTIMÉE :
Société FRANFINANCE LOCATION,
prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège social est sis [adresse], représentée par la SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, avocats postulants au barreau d'AIX-EN-PROVENCE
COMPOSITION DE LA COUR : L'affaire a été débattue le 28 février 2013 en audience publique. Conformément à l’article 785 du Code de Procédure Civile, Madame AUBRY CAMOIN, président a fait un rapport oral de l'affaire à l'audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de : Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président, Monsieur Baudouin FOHLEN, Conseiller, Monsieur Jean-Pierre PRIEUR, Conseiller, qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Viviane BALLESTER.
Les parties ont été avisées que le prononcé public de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 4 avril 2013
ARRÊT : Contradictoire, Prononcé par mise à disposition au greffe le 4 avril 2013, Signé par Madame Christine AUBRY-CAMOIN, Président et Madame Viviane BALLESTER, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
EXPOSÉ DU LITIGE :
Selon bon de commande daté du 6 février 2007, la SARL LE PONT C. qui exploite une boulangerie pâtisserie à [ville], a commandé à la société LBG du matériel informatique, le bon de commande prévoyant la remise par la société LBG d'un chèque de « partenariat publicitaire » de 4.350 euros 15 jours après l'installation du matériel et d’un chèque de 4.350 euros au 15e mois.
Le 7 février 2008, la SARL LE PONT C. a signé un contrat de location avec la société OPTELIA INTELLIS portant sur du matériel informatique consistant dans un écran LCD, un lecteur DVD, une imprimante alimentaire, un appareil photo numérique et un modulateur.
Le contrat prévoit une durée de location de 63 mois moyennant le paiement de 21 loyers trimestriels de 870 euros HT chacun soit 1.040,52 euros TTC, payables à compter du 1er avril 2008.
Le distributeur de ce matériel était la SARL LBG CONCEPT auprès de laquelle il a été acquis le 7 février 2008 par la société OPTELIA INTELLIS.
Par avenant du 7 février 2008 signé par la SARL LE PONT C., la société OPTELIA INTELLIS et la société FRANFINANCE, le locataire a accepté la substitution de la société FRANFINANCE au bailleur initial prenant effet le 14 février 2008.
Par acte sous seing privé du 14 février 2008, la société OPTELIA INTELLIS a vendu à la société FRANFINANCE le matériel informatique concerné grevé du contrat de location précité.
Après s'être acquittée des échéances des 1er avril 2008 et 1er juillet 2008, la société LE PONT C. a cessé tout règlement.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 août 2009, la société FRANFINANCE LOCATION a mis en demeure la société LE PONT C. de lui verser les loyers des échéances d'octobre 2008, janvier, avril et juillet 2009 pour un total de 4.984,14 euros
A défaut d'exécution, le contrat s'est trouvé résilié le 5 août 2009.
Concomitamment, la société LBG CONCEPT distributeur du matériel donné en location a été placée en redressement judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Marseille du 4 février 2009 puis en liquidation judiciaire par jugement du 8 juillet 2009.
Par acte du 23 octobre 2009, la SA FRANFINANCE LOCATION a fait assigner la SARL LE PONT C. devant le Tribunal de Commerce de TOULON aux fins de voir :
- condamner la société LE PONT C. à payer à la société FRANFINANCE LOCATION la somme de 19.768,60 euros en principal et indemnité de résiliation,
- dire que les intérêts seront notés pour mémoire jusqu'au règlement définitif à partir de la mise en demeure du 5 août 2009 jusqu'au parfait paiement,
- ordonner la restitution du matériel donné en location composé d'un écran LCD, un lecteur DVD, un modulateur, un appareil photo numérique et une imprimante alimentaire, ce sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,
- condamner la société LE PONT C. à la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens.
Par jugement contradictoire du 13 avril 2011, le Tribunal de Commerce a :
- constaté que le contrat commercial signé par la SARL LE PONT C. avec la société LBG CONCEPT fournisseur du matériel est distinct de celui signé avec la SA FRANFINANCE LOCATION,
- constaté que la société LBG CONCEPT n'a pas été appelée dans la cause,
- condamné la SARL LE PONT C. à payer à la SA FRANFINANCE LOCATION la somme de 18.047,40 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du décompte du 1er octobre 2009 jusqu'au règlement définitif,
- condamné la SARL LE PONT C. à payer à SA FRANFINANCE la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
- rejeté tous autres moyens, fins et conclusions,
- ordonné l'exécution provisoire du jugement à intervenir,
- condamné la SARL LE PONT C. aux dépens.
Par déclaration au greffe de la Cour du 20 août 2011, la SARL LE PONT C. a régulièrement relevé appel de cette décision.
Par conclusions du 24 novembre 2011, la SARL LE PONT C. demande à la Cour de :
- infirmer le jugement entrepris, et statuant à nouveau
A titre principal, au visa de l’article 1184 du code civil
- constater que la société LBG n'a pas exécuté sa prestation inhérente au contrat de partenariat publicitaire signé entre les parties,
- dire que les contrats intervenus entre la société concluante et les sociétés LBG CONCEPT, OPTELIA INTELLIS et FRANFINANCE LOCATION constituent une seule et même opération et sont résiliés,
- donner acte à la société concluante qu'elle ne s'oppose pas à la remise du matériel informatique à la SA FRANFINANCE LOCATION qui devra venir le récupérer dans les locaux de la concluante,
A titre subsidiaire, au visa de l'article 11 intitulé résiliation des conditions générales de location du matériel
- constater que le locataire n'a pas la possibilité de résilier le contrat pour une cause légitime, en l'espèce l'inexécution de ses obligations par la société LGB CONCEPT,
- constater que du fait de la liquidation judiciaire de la société LGB CONCEPT, le contrat de partenariat publicitaire est devenu inexécutable et rend légitime la rupture du contrat de location de matériel,
Vu l’article L. 132-1 du code de la consommation
- dire que la clause « article 11 résiliation » des conditions générales de location constitue une clause abusive et par conséquent non écrite,
- débouter la SA FRANFINANCE LOCATION de toutes ses demandes, fins et conclusions,
- condamner la SA FRANFINANCE LOCATION à payer à la société concluante la somme de 2.500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens.
La SARL LE PONT C. expose qu'elle a été démarchée par la société LBG CONCEPT aux fins de conclusion d'un contrat de partenariat publicitaire dans son fonds de commerce nécessitant du matériel informatique, et a signé le 6 février 2008 un contrat selon lequel la société LBG CONCEPT s'engageait à lui verser un premier règlement de partenariat publicitaire de 4.350 euros quinze jours après l'installation du matériel, un second règlement de 4.350 euros le quinzième mois puis un nouveau règlement le trentième mois suivant l'évolution du contrat, ainsi qu'à fournir le matériel informatique
Elle considère que le contrat de partenariat publicitaire qu'elle a signé avec la société LBG CONCEPT est étroitement lié avec le contrat de location de matériel informatique qui a été repris par la société FRANFINANCE LOCATION et que l'inexécution du contrat de partenariat publicitaire par la société LBG CONCEPT désormais en liquidation judiciaire la délivre de tout engagement à l'égard de la société FRANFINANCE par application de l’article 1184 du code civil.
A titre subsidiaire, elle soutient que la clause 11 du contrat de location prévoyant les conditions de la résiliation, dont se prévaut la société FRANFINANCE, est abusive en ce qu'elle crée un déséquilibre significatif dans les droits et obligations des parties alors qu'elle se prévaut d'un motif légitime.
Elle ajoute que la jurisprudence étend aux professionnels qui contractent dans un domaine sans lien avec leur domaine d'activité les dispositions légales relatives aux clauses abusives.
Par conclusions du 24 janvier 2012, la SA FRANFINANCE LOCATION demande à la Cour au visa de l’article 1134 du code civil, de :
- rejeter l'ensemble des demandes, fins et conclusions de la société LE PONT C.,
- infirmer partiellement le jugement entrepris et statuant à nouveau,
- dire n'y avoir lieu de faire application de l’article L. 132-1 du code de la consommation,
- ordonner la restitution du matériel sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,
- condamner la société LE PONT C. à payer à la société concluante les sommes suivantes :
* 4/162,08 euros au titre des loyers échus impayés
* 416,20 euros au titre de la clause pénale
* 351,50 euros au titre des intérêts arrêtés au 5 août 2009
* 14.355 euros à titre d'indemnité de résiliation
- confirmer le jugement entrepris en ses autres dispositions,
- condamner la société LE PONT C. à payer à la société concluante la somme de 3.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
- la condamner aux entiers dépens, ceux d'appel avec distraction.
La société FRANFINANCE LOCATION conteste l'existence du contrat de partenariat publicitaire dont fait état la société LE PONT C., et allègue qu'il s'agit sous un vocable fallacieux d'une incitation commerciale à signer un contrat de location de matériel et qu'elle n'est pas liée par les pratiques commerciales de la société LGB CONCEPT.
Elle ajoute que le contrat de location du matériel prévoit que l'exécution de ce contrat est juridiquement indépendant de celle du contrat principal, que le locataire n'est pas fondé à opposer à la société concluante des exceptions tirées de ses rapports avec son fournisseur et qui tiendraient notamment à l'inexécution du contrat de prestation ou au dysfonctionnement du matériel, et qu'elle est fondée à se prévaloir de la clause résolutoire
Elle fait observer enfin que l'indemnité contractuelle de résiliation est distincte de la clause pénale et s'applique en cas de résiliation unilatérale du contrat, et que l’article L. 132-1 du code de la consommation n'est pas applicable aux professionnels.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Aux termes de l'article 11 du contrat de location, le contrat est résilié de plein droit en cas de défaut de paiement d'une échéance et de toute somme due en vertu du contrat dans les huit jours qui suivent une mise en demeure restée infructueuse, et après qu'une mise en demeure de restituer le matériel loué adressée au locataire par lettre recommandée avec accusé de réception soit restée infructueuse.
Cette clause prévoit en outre que la résiliation entraîne de plein droit au profit du bailleur le paiement par le locataire en réparation du préjudice subi en sus des loyers impayés et de leurs accessoires, d'une indemnité égale aux loyers restant à échoir au jour de la résiliation majorée d'une somme forfaitaire égale à 10 % de l'indemnité à titre de clause pénale.
Par lettre recommandée avec mise en demeure reçue le 8 août 2009, la société FRANFINANCE LOCATION a adressé à la société LE PONT C. une mise en demeure conforme aux prescriptions de la clause 11 du contrat.
La société LE PONT C. n'est pas fondée à opposer à la société FRANFINANCE LOCATION l'inexécution par la société LGB CONCEPT de son engagement de « partenariat publicitaire » au regard de la clause 6.4 du contrat selon laquelle le locataire renonce à tout recours contre le bailleur en cas de défaillance dans l'exécution du contrat principal.
En outre, le « partenariat publicitaire » dont il est fait état dans un bon de commande qui semble affecté d'une erreur de date n'est pas concrétisé par un contrat définissant son objet, notamment les prestations publicitaires, et les obligations respectives des parties, et le liquidateur de la société LGB CONCEPT n'a pas été mis en cause.
L’article 132-1 du code de la consommation n'est pas applicable aux contrats conclus entre commerçants.
Il convient en conséquence de constater la résiliation du contrat de location au 5 août 2009, date de la mise en demeure restée infructueuse.
En exécution du contrat de location du 7 février 2008, la société LE PONT C. est redevable des loyers impayés s'élevant à la somme de 4.162,08 euros au 5 août 2009 outre intérêts arrêtés à la somme de 351,50 euros au 5 août 2009, et des loyers restant dus à titre d'indemnité de résiliation s'élevant à la somme de 14.355 euros outre intérêts arrêtés à la somme de 483,82 euros au 1er octobre 2009 soit un total de 19.352,40 euros.
La clause pénale manifestement excessive sera limitée à 1 euro soit une somme totale due par la SARL LE PONT C. de 19.353,40 euros.
Le jugement entrepris ayant omis de statuer sur la restitution du matériel, il convient d'ordonner la restitution de celui-ci par la société LE PONT C. à la société FRANFINANCE conformément aux dispositions du contrat de location rappelées par la lettre de mise en demeure du 5 août 2009, dans les termes du dispositif.
La société LE PONT C. qui succombe sera déboutée de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et supportera les entiers dépens.
Il convient en équité de condamner la société LE PONT C. à payer à la société FRANFINANCE LOCATION la somme de 1.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
La Cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme partiellement le jugement déféré et statuant à nouveau,
Constate la résiliation du contrat de location à la date du 5 août 2009,
Condamne la SARL LE PONT C. à payer à la SA FRANFINANCE LOCATION la somme de 19 353,40 euros ainsi ventilée :
- 4.162,08 euros au titre des loyers impayés arrêtés au 5 août 2009,
- 351,50 euros au titre des intérêts au 5 août 2009,
- 14.355 euros à titre d'indemnité de résiliation contractuelle,
- 483,82 euros à titre d'intérêts au 1er octobre 2009,
- 1 euro à titre de clause pénale,
Confirme le jugement déféré en toutes ses autres dispositions en ce compris les dépens,
Ajoutant
Ordonne la restitution par la SARL LE PONT C. à la SA FRANFINANCE du matériel informatique donné en location consistant dans un écran LCD, un lecteur DVD, un modulateur, un appareil photo numérique et une imprimante alimentaire, dans le délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt et passé ce délai, sous astreinte de 50 euros par jour de retard,
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes, fins et conclusions,
Déboute la SARL LE PONT C. de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL LE PONT C. à payer à la SA FRANFINANCE la somme de 1.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL LE PONT C. aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Le Greffier, Le Président,
- 5860 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de non professionnel - Personnes morales (avant la loi du 17 mars 2014) - Clauses abusives - Protection implicite
- 5877 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Critères - Clauses abusives - Critères alternatifs : conclusion entre professionnels ou commerçants
- 5943 - Code de la consommation - Domaine d’application - Bénéficiaire de la protection - Notion de professionnel - Illustrations - Contrats conclus pendant l’activité - Promotion de l’activité : publicité