TI PARIS (15e arrdt), 2 mars 1994
CERCLAB/CRDP - DOCUMENT N° 440
TI PARIS (15e arrdt), 2 mars 1994 : RG n° 2971/93
Extrait « Les tribunaux ayant la possibilité de saisir pour avis la commission des clauses abusives, doivent faire cas des avis déjà exprimées par cette Commission : en l'espèce, il est produit une recommandation estimant abusive la clause d'exclusion de responsabilité des clubs sportifs pour les vols commis dans les vestiaires. »
TRIBUNAL D’INSTANCE DE PARIS
QUINZIÈME ARRONDISSEMENT
JUGEMENT DU 2 MARS 1994
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 2971/93.
DEMANDEUR :
- Mademoiselle X.
demeurant [adresse], Représentée par Maître LORACH JEAN SERGE, avocat au barreau de PARIS
DÉFENDEUR :
- LA COMPAGNIE GYMNASE CLUB, S.A.
dont le siège social est situé [adresse], Représenté par Maître BOEDELS JACQUES, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DU TRIBUNAL : Président : Marie-Dominique ANDRIEU, JUGE
Greffier : Nathalie BENOIST
DÉBATS : Audience publique du 2 février 1994, contradictoire, en dernier ressort, prononcé publiquement par Marie-Dominique ANDRIEU, JUGE, assisté de Nathalie BENOIST, greffier.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
[minute page 2] Le 23 décembre 1993, Melle X. a assigné la société GYMNASE CLUB, poursuivant sa condamnation à lui payer 5.637,56 Francs en réparation de son préjudice matériel subi du fait du vol de son sac à main dans un casier du vestiaire du GYMNASE CLUB […], 3.000 Francs en indemnisation de son préjudice moral et 3.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile : elle demande qu'il soit jugé que pèse sur la société GYMNASE CLUB une obligation de surveillance, qu'il soit constaté que cette obligation a été violée, qu'il soit en conséquence dit que la responsabilité de la société GYMNASE CLUB est engagée pour inexécution de cette obligation contractuelle comme du fait qu'elle a vendu le cadenas défectueux, et que la clause d'exonération de responsabilité figurant au contrat est une clause abusive.
Melle X. expose qu'elle a souscrit un contrat d'abonnement avec la société GYMNASE CLUB, que lors de sa première fréquentation de la salle de sport […], elle a acquis à l'accueil un cadenas à code destiné à fermer le casier dans lequel elle devait déposer ses vêtements et affaires personnelles,
qu'après ses activités elle a retrouvé le casier ouvert, sans cadenas, et son sac à main disparu,
que celui-ci contenait une carte bleue un chéquier, ses papiers d'identité et carte d'étudiante, les clés de la serrure et de l'alarme de son domicile et un porte monnaie contenant 100 Francs en espèces,
et que la société GYMNASE CLUB a refusé de prendre en charge les conséquences de ce vol.
Melle X. soutient que le contrat d'abonnement souscrit avec la société GYMNASE CLUB contient une obligation accessoire de surveillance des affaires personnelles, que cette société avait le devoir de prendre toutes mesures pour assurer la sauvegarde des objets contenus dans les vestiaires,
que de plus elle avait vendu le cadenas et que se responsabilité de venderesse est engagée si celui-ci n'était pas propre à sa destination, qu'elle est donc tenue en raison du vice caché de la chose vendue.
Elle ajoute que la clause d'exonération de responsabilité en cas de vol dans les vestiaires est abusive et qu'elle est visée par une recommandation de la commission des clauses abusives.
La société GYMNASE CLUB s'oppose à la demande.
Elle dit d'abord la demande irrecevable au motif que le contrat qui qualifie le fait que les abonnés utilisent dans les vestiaires des casiers qu'ils ferment avec un cadenas leur appartenant n'est pas un contrat de garde ou de dépôt mais seulement une location qui ne crée aucune obligation de garde à la charge du propriétaire,
et ajoute qu'elle organise des rondes de surveillance dans les vestiaires, et qu'aucune faute ne peut lui être reprochée.
La société GYMNASE CLUB ajoute qu'une clause contractuelle écarte sa responsabilité et que Melle X. a souscrit ce contrat sans émettre aucune réserve ;
Elle poursuit que Melle X. ne rapporte pas la preuve de son préjudice.
La société GYMNASE CLUB conclut donc au débouté, entendant faire dire que les parties n'ont pas procédé à un dépôt volontaire et que la mise à disposition d'un casier de vestiaire s'analyse comme un bail excluant la responsabilité du bailleur en cas de vol.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
L'usage des installations sportives, objet principal du contrat d'abonnement avec la société GYMNASE CLUB implique que l'abonné quitte ses [minute page 3] vêtements « de ville » et ses affaires personnelles,
l'abonné n'a pas la possibilité de conserver ses affaires auprès de lui et d'exercer lui-même la surveillance, or il ne peut être réputé avoir renoncé à toute sécurité sur ses affaires même sans valeur particulière : il s'en remet donc au club pour organiser une surveillance efficace des locaux où sont déposées ses affaires.
Le contrat concernant la garde des affaires personnelles est donc un contrat de dépôt impliquant pour le dépositaire une obligation de résultat.
Les tribunaux ayant la possibilité de saisir pour avis la commission des clauses abusives, doivent faire cas des avis déjà exprimées par cette Commission : en l'espèce, il est produit une recommandation estimant abusive la clause d'exclusion de responsabilité des clubs sportifs pour les vols commis dans les vestiaires.
La responsabilité de la société GYMNASE CLUB apparaît donc engagée à l'égard de Melle X.
L'usage n'est pas de faire constater par écrit ou par témoins le contenu des affaires personnelles déposées dans un vestiaire.
L'existence d'un sac à main est difficilement contestable, et son contenu tel qu'inventorié dans la plainte déposée au commissariat est à la fois normal et établi par les frais exposés à la suite du vol et dont il est justifié : frais d'opposition sur chéquier et carte bleue, frais de changement de serrure...
Il doit donc être fait droit à la demande. Le préjudice moral apparaît évalué de façon excessive de même que l'indemnité en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS :
LE TRIBUNAL, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Condamne la société GYMNASE CLUB à payer à Melle X. 5.637,56 Francs en réparation de son préjudice matériel, 1.000 Francs en réparation de son préjudice moral et 2.000 Francs en application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile, ainsi qu'à supporter les dépens.
- 5998 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Normes de référence - Recommandations de la Commission des clauses abusives - Influence effective
- 5999 - Code de la consommation - Notion de clauses abusives - Cadre général - Normes de référence - Avis de la Commission des clauses abusives
- 6116 - Code de la consommation - Notion de clause abusive - Présentation par clause - Inexécution du contrat - Responsabilité du professionnel - Clauses limitatives et exonératoires - Droit antérieur au décret du 18 mars 2009 - Typologie selon la nature des obligations
- 6438 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Sport - Club de sport et de remise en forme