CEntre de Recherche sur les CLauses ABusives
Résultats de la recherche

CA AMIENS (1re ch. sect. 2), 8 octobre 2013

Nature : Décision
Titre : CA AMIENS (1re ch. sect. 2), 8 octobre 2013
Pays : France
Juridiction : Amiens (CA), 1re ch. sect. 2
Demande : 12/02379
Date : 8/10/2013
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 7/06/2012
Imprimer ce document

 

CERCLAB - DOCUMENT N° 4480

CA AMIENS (1re ch. sect. 2), 8 octobre 2013 : RG n° 12/02379 

Publication : Jurica

 

Extrait : « Les contrats conclus par un professionnel pour des prestations ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle se trouvent exclus du champ d'application de ces dispositions.

Au cas d'espèce, Madame X. a souscrit ses engagements auprès de la société PARFIP FRANCE dans le cadre de son activité professionnelle d'exploitante d'une écurie équestre pour la création d'un site internet destiné à faire la promotion publicitaire de cette activité par un référencement sur le moteur de recherche Google. Elle a signé le procès-verbal de réception de mise en ligne de son site internet en apposant sa signature en qualité de « chef d'entreprise ».

La circonstance qu'elle n'ait pas de connaissances particulières dans le domaine de l'informatique n'est pas suffisante pour considérer qu'elle se serait trouvée dans le même état d'ignorance que n'importe quel autre consommateur et lui conférer la qualité de « non professionnel » prévue à l’article L. 132-1 du code de la consommation.

En conséquence, le jugement doit être réformé en ce qu'il a fait application des dispositions légales protectrices de l’article L. 132-1 du code de la consommation au présent litige et considéré comme non écrites les clauses prévues aux articles 16 et 16-4 des conditions générales du contrat de licence d'exploitation du site internet en ce qu'elles créaient un déséquilibre au détriment de Madame X. »

 

COUR D’APPEL D’AMIENS

PREMIÈRE CHAMBRE SECTION 2

ARRÊT DU 8 OCTOBRE 2013

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 12/02379. APPEL D'UN JUGEMENT DU TRIBUNAL D'INSTANCE DE SENLIS DU 9 MAI 2012.

 

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE :

SAS PARFIP FRANCE

agissant poursuites et diligences de son représentant légal pour ce domicilié audit siège, Représentée par Maître Rémi GILLET, avocat au barreau de SENLIS, Plaidant par Maître Annie ALAGY, avocat au barreau de LYON

 

ET :

INTIMÉE :

Madame X.

Assignée le 11 avril 2013

 

DÉBATS : A l'audience publique du 4 juin 2013 devant M. RINUY, Président, et Mme LORPHELIN, conseillère entendue en son rapport, magistrats siégeant sans opposition des avocats, en vertu de l’article 786 du Code de procédure civile , qui ont avisé les parties à l'issue des débats que l'arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 8 octobre 2013.

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Mme ROUSSY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ : M. Le Président et Mme la Conseillère en a rendu compte à la Cour composée de M. RINUY, Président, Mme LORPHELIN et Mme DUBAELE, Conseillères, qui en ont délibéré conformément à la Loi.

PRONONCÉ PUBLIQUEMENT : Le 8 octobre 2013 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile ; M. RINUY, Président, a signé la minute avec Mme LAMARI, Greffier.

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DÉCISION :

Par un contrat de licence d'exploitation du 23 juin 2008, Mme X. a pris en location, pour une durée de quarante huit mois, un site internet auprès de la SAS PARFIP France. Ce contrat précisait que la société BLUESMART était le fournisseur d'accès.

Par un acte d'huissier du 15 mars 2011, la SAS PARFIP FRANCE a fait assigner Mme X. devant le tribunal d'instance de SENLIS aux fins de voir prononcer la résiliation du contrat de location à ses torts et obtenir, sous le bénéfice de l'exécution provisoire, sa condamnation à lui régler la somme de 7.353,94 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'acte introductif d'instance, outre la suppression du site objet du contrat.

Mme X. a demandé au tribunal de déclarer nulles et de nul effet pour être abusives les clauses insérées dans les articles 8 et 16-4 du contrat de licence du 23 juin 2008, ainsi que dans l'article 3 des conditions générales du contrat conclu le 23 juin 2008 avec la société BLUESMART.

 

Par un jugement du 9 mai 2012, le tribunal d'instance de SENLIS a :

- débouté la société PARFIP FRANCE de l'ensemble de ses demandes formées à l'encontre de Mme X. ;

- débouté Mme X. de sa demande de dommages et intérêts ;

- condamné la société PARFIP FRANCE à payer à Mme X. la somme de 250 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

- dit n'y avoir lieu à ordonner l'exécution provisoire du jugement ;

- condamné la société la société PARFIP FRANCE aux entiers dépens.

La société PARFIP FRANCE a formé appel de ce jugement par deux déclarations d'appel des 7 juin 2012 et 26 mars 2013.

Ces deux instances ont été jointes par une ordonnance du conseiller de la mise en état du 8 avril 2013 en raison de leur connexité.

 

Vu les ultimes conclusions de l'appelante conclusions transmises par RPVA le 28 mars 2013 et signifiées à l'intimée le 11 avril 2013, aux termes desquelles la société PARFIP FRANCE prie la Cour, au visa des articles 1134 et suivants du code civil , de :

- réformer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de ses demandes ;

- constater la résiliation du contrat de location aux torts de Mme X. ;

- condamner Mme X. à lui verser les sommes suivantes :

* 7.353,94 euros outre les intérêts de droit à compter de l'acte introductif d'instance ;

* 800 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

- condamner Mme X. à restituer le site Web objet du contrat à la société PARFIP FRANCE, la restitution s'effectuant par la suppression de la mise en ligne dudit site Web à la diligence de la société PARFIP FRANCE ou de telle société qu'il plaira de mandater ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté Mme X. de ses demandes de dommages et intérêts ;

- condamner Mme X. aux entiers dépens.

 

Mme X., qui a reçu, par dépôt en l'étude de l'huissier, le 24 juillet 2012, la signification d'une assignation contenant la notification de la première déclaration d'appel et, le 11 avril 2013, la signification de la seconde déclaration d'appel et les conclusions de l'appelante du 28 mars 2013, n'a pas constitué avocat. L'intimée n'ayant pas été assignée à sa personne, il convient de statuer par défaut.

 

L'affaire a été clôturée en cet état et a été fixée à l'audience du 4 juin 2013.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

CECI EXPOSÉ :

La Cour relève d'office, ainsi que le prévoit l’article 911 du code de procédure civile , la caducité de la première déclaration d'appel, à défaut pour l'appelante d'avoir signifié à l'intimée, qui n'a pas constitué avocat, ses conclusions du 22 août 2012 dans le délai d'un mois de leur dépôt au greffe de la Cour.

La seconde déclaration d'appel, régulièrement dénoncée à l'intimée le 26 mars 2013 par un acte d'huissier et portant signification des dernières conclusions de l'appelante, est recevable.

 

- Sur l'application des textes du code de la consommation sur les clauses abusives :

L’article L. 132-1 du code de la consommation dispose que, dans les contrats conclus entre professionnels et non professionnels ou consommateurs sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer, au détriment du non professionnel ou du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat.

Les contrats conclus par un professionnel pour des prestations ayant un rapport direct avec l'activité professionnelle se trouvent exclus du champ d'application de ces dispositions.

Au cas d'espèce, Madame X. a souscrit ses engagements auprès de la société PARFIP FRANCE dans le cadre de son activité professionnelle d'exploitante d'une écurie équestre pour la création d'un site internet destiné à faire la promotion publicitaire de cette activité par un référencement sur le moteur de recherche Google. Elle a signé le procès-verbal de réception de mise en ligne de son site internet en apposant sa signature en qualité de « chef d'entreprise ».

La circonstance qu'elle n'ait pas de connaissances particulières dans le domaine de l'informatique n'est pas suffisante pour considérer qu'elle se serait trouvée dans le même état d'ignorance que n'importe quel autre consommateur et lui conférer la qualité de « non professionnel » prévue à l’article L. 132-1 du code de la consommation.

En conséquence, le jugement doit être réformé en ce qu'il a fait application des dispositions légales protectrices de l’article L. 132-1 du code de la consommation au présent litige et considéré comme non écrites les clauses prévues aux articles 16 et 16-4 des conditions générales du contrat de licence d'exploitation du site internet en ce qu'elles créaient un déséquilibre au détriment de Madame X.

 

- Sur la demande en paiement :

Madame X. a signé le 6 août 2008 un procès-verbal de réception aux termes duquel elle a déclaré avoir pris connaissance de la mise en ligne du site internet, avoir vérifié sa conformité au cahier des charges et à ses besoins, en avoir contrôlé le bon fonctionnement, avoir obtenu la justification des demandes de référencement effectuées auprès des moteurs de recherche par le fournisseur et accepter le site internet et les prestations sans restriction, ni réserve. Elle se trouvait donc tenue de respecter les clauses du contrat de licence d'exploitation du site pendant toute sa durée, soit pendant quarante-huit mois. Elle n'établit pas que le site ne lui aurait pas donné satisfaction, ni que la société PARFIP aurait failli à ses obligations contractuelles.

En conséquence, elle ne pouvait pas résilier unilatéralement le contrat par l'envoi d'un courrier recommandé le 16 septembre 2008, ni suspendre le règlement des échéances en faisant opposition à leur prélèvement automatique sur son compte bancaire à compter du 1er octobre 2008.

Par un courrier recommandé du 14 avril 2010, dont Madame X. a accusé réception le 17 avril 2010, la société PARFIP FRANCE a résilié le contrat de licence d'exploitation du site internet pour non paiement des échéances, ainsi que l'article 16 des conditions générales du contrat lui en donnent la faculté.

Elle est fondée à obtenir la condamnation de Madame X. à lui régler les sommes suivantes :

- 2.726,88 euros au titre des échéances impayées du 1/10/2008 au 1/04/2010,

- 206,64 euros au titre des intérêts de retard,

- 4.018,56 euros au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation.

Seules les sommes de 2.726,88 euros et de 4.018,56 euros, exigibles dès la résiliation du contrat, seront assorties d'intérêts au taux légal à compter de la date de la délivrance de l'acte introductif d'instance, ainsi que l'appelante en forme la demande.

La somme réclamée au titre de la clause pénale apparaissant manifestement excessive en considération de la somme déjà prévue par le contrat au titre de l'indemnité de résiliation. Il convient de la réduire et d'allouer à la société PARFIP FRANCE une somme de 50 euros, somme qui sera assortie d'intérêts au taux légal à compter de l'arrêt.

Il convient en outre de faire droit à la demande de condamnation de Mme X. à restituer le site Web objet du contrat à la société PARFIP FRANCE, la restitution s'effectuant par la suppression de la mise en ligne dudit site Web à la diligence de la société PARFIP FRANCE ou de telle société qu'il lui plaira de mandater.

 

- Sur la demande de dommages et intérêts :

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a débouté Madame X. de sa demande de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral résultant des procédures mises en œuvre par la société PARFIP FRANCE pour le recouvrement de sa créance, dès lors que cette société n'a pas dépassé le cadre normal de la défense de ses intérêts, étant observé au surplus qu'en cause d'appel, elle a été admise pour l'essentiel en ses prétentions.

 

- Sur les dépens :

En considération du sens du présent arrêt, il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société PARFIP FRANCE à supporter les dépens de première instance et à régler une indemnité de 250 euros à Madame X. par application de l’article 700 du code de procédure civile , de condamner Madame X. à supporter les dépens de première instance et d'appel et de la débouter de sa demande d'indemnité pour ses frais de procès exposés devant le premier juge.

L'équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la société PARFIP FRANCE à hauteur de la somme de 800 euros.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La Cour, statuant publiquement, par défaut et en dernier ressort,

- Déclare d'office caduque la déclaration d'appel de la SAS PARFIP FRANCE du 7 juin 2012 ;

- Déclare recevable la déclaration d'appel de la SAS PARFIP FRANCE du 26 mars 2013 ;

- Confirme le jugement rendu le 9 mai 2012 par le tribunal d'instance de SENLIS en ce qu'il déboute Madame X. de sa demande de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral ;

- L'infirme en toutes ses autres dispositions ;

Statuant à nouveau,

- Déclare Madame X. mal fondée à invoquer les dispositions de l’article L. 132-1 du code de la consommation ;

- Condamne Madame X. à verser à la SAS PARFIP FRANCE les sommes suivantes :

* 2.726,88 euros au titre des échéances échues restées impayées du 1/10/2008 au 1/04/2010, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2011, date de l'acte introductif d'instance ;

* 4.018,56 euros au titre de l'indemnité contractuelle de résiliation, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mars 2011, date de l'acte introductif d'instance ;

* 206,64 euros au titre des intérêts de retard ;

* 50 euros au titre de l'indemnité de résiliation, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

- Condamne Mme X. à restituer le site Web objet du contrat à la société PARFIP FRANCE, la restitution s'effectuant par la suppression de la mise en ligne dudit site Web à la diligence de la société PARFIP FRANCE ou de telle société qu'il lui plaira de mandater ;

- Condamne Madame X. à régler à la SAS PARFIP FRANCE une somme de 800 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ;

- Déboute Madame X. de sa demande d'indemnité fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour ses frais de procès exposés en première instance ;

- Condamne Madame X. aux dépens de première instance et d'appel ;

- Accorde au profit de la SCP GILLET, avocats, le bénéfice des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le Greffier,                           Le Président,