CA BORDEAUX (1re ch. civ. sect. B), 28 novembre 2013
CERCLAB - DOCUMENT N°
CA BORDEAUX (1re ch. civ. sect. B), 28 novembre 2013 : RG n° 12/04941
Publication : Jurica
Extrait : « L’article L. 311-8 du code de la consommation dans sa version applicable au présent contrat à énonce que les opérations de crédit sont conclues dans les termes d'une offre préalable, remise en double exemplaire à l'emprunteur et que la remise de l'offre oblige le prêteur à maintenir les conditions qu'elle indique pendant une durée minimale de quinze jours à compter de son émission et l'article L. 311-9 du dit code ajoute que, lorsqu'il s'agit d'une ouverture de crédit qui, assortie ou non de l'usage d'une carte de crédit, offre à son bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de son choix, du montant du crédit consenti, l'offre préalable est obligatoire pour le contrat initial et pour toute augmentation de crédit consenti.
En l'espèce, la lecture du contrat permet de vérifier que le crédit initial n'était pas de 12.000 euros mais qu'il était de 1.501 euros. En effet, il était prévu dans les conditions générales du crédit, au titre du « découvert utile » que « l'emprunteur peut faire évoluer le découvert utile jusqu'au montant du découvert maximum autorisé à conditions que, depuis l'ouverture du crédit ou la précédente augmentation du découvert utile, aucun des événements suivants ne soit survenu : a) survenance d'un cas de suspension du droit à découvert (voir article II-9 ci-dessus, b) évolution de la situation financière de l'emprunteur, c) usage des moyens d'utilisation du compte en violation des conditions du présent contrat. L'augmentation du découvert utile ne peut résulter du seul usage des moyens d'utilisation du compte et doit faire l'objet d'une demande expresse de l'emprunteur ».
En l'espèce, il n'est pas fait état de demande d'augmentation du découvert utile qui devait être expresse. Au surplus l'augmentation du découvert utile n'est pas automatiquement accordée contrairement à ce que soutient l'organisme de crédit qui le subordonne à l'absence d'évolution de la situation financière de l'emprunteur. L'augmentation du découvert utile nécessitait dès lors un accord qui ne peut être tacite. […]
Enfin, même s'il est mentionné sur le contrat de prêt qu'il s'agit de crédit utilisable par fraction, la convention ne porte que sur le montant convenu de 1.500 euros, le montant maximal autorisé de 12.000 euros n'étant qu'une possibilité non acquise au jour de la signature de l'offre initiale, d'autant que le montant des fractions envisageables jusqu'à 12.000 euros n'était pas prévu et a fortiori convenu. Il sera considéré au vu de l'ensemble de ces éléments que le montant du crédit convenu était le montant initial convenu de 1.501 euros et non le montant maximum prévu de 12.000 euros.
Dans ces conditions, en l'absence de signature d'une nouvelle offre de crédit lors du dépassement du découvert de 1.501 euros initialement autorisé et de restauration ultérieure du crédit, le dépassement du crédit initialement autorisé constitue le point de départ de délai biennal de forclusion prévu par l’article L. 311-37 du code de la consommation.
Le point de départ du délai de forclusion doit être situé le 25 août 2006, date à partir de laquelle le découvert utile a été dépassé, ceci de manière constante. Le délai biennal est interrompu par la signification de l'ordonnance portant injonction de payer, soit en l'espèce le 11 février 2010. Le délai de deux ans étant expiré au 11 février 2010, l'action diligentée par la société BNP Paribas Personal Finance doit être déclarée forclose. »
COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE SECTION B
ARRÊT DU 28 NOVEMBRE 2013
ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
R.G. n° 12/04941. Rédacteur : Madame Catherine COUDY, conseiller. Nature de la décision : AU FOND. Décision déférée à la cour : jugement rendu le 6 janvier 2012 (R.G. n° 10-001194) par le Tribunal d'Instance de BORDEAUX suivant déclaration d'appel du 28 août 2012.
APPELANTE :
LA SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,
prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social, sis [adresse], Représentée par Maître William MAXWELL, membre de la SCP MAXWELL - MAXWELL - BERTIN, Avocats Associés au barreau de BORDEAUX,
INTIMÉ :
Monsieur X.,
né le [date] à [ville], de nationalité française, demeurant [adresse], Représenté par Maître Christophe GUILLAUMEAU, Avocat au barreau de BORDEAUX,
COMPOSITION DE LA COUR : En application des dispositions des articles 786 et 912 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 11 septembre 2013 en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Catherine COUDY, Conseiller, chargée du rapport,
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Monsieur Louis-Marie CHEMINADE, Président, Madame Catherine FOURNIEL, Président, Madame Catherine COUDY, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Marceline LOISON
ARRÊT : - contradictoire - prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
EXPOSÉ DU LITIGE (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
Suivant offre préalable acceptée le 23 mai 2005, la société CETELEM devenue BNP Paribas Personal Finance a consenti à monsieur X. un crédit reconstituable avec découvert maximum de 12.000 euros et un premier découvert utile de 1.501,00 euros au taux nominal conventionnel de 15 % (TEG de 16,18 %) remboursable en échéances mensuelles de 45,03 euros.
Monsieur X. ayant cessé le remboursement des échéances mensuelles, la déchéance du terme a été prononcée au 24 août 2009, suite à la lettre de mise en demeure du 17 août 2009 restée sans effet.
Par ordonnance du 23 décembre 2009, signifiée le 11 février.2010, le président du tribunal d'instance de Bordeaux a fait injonction à monsieur X. de payer à la BNP Paribas Personal Finance la somme de 4.581,11 euros en principal, outre 4,36 euros en intérêts et 106,96 euros au titre de l'assurance.
Monsieur X. a fait opposition à cette ordonnance portant injonction de payer, ainsi qu'il résulte du procès-verbal de réception d'une opposition par déclaration signé en date du 16 février 2010.
Par jugement du 6 janvier 2012, le tribunal d'instance de Bordeaux devant lequel monsieur X. a soulevé la forclusion de l'action et la déchéance du droit aux intérêts, a :
- déclaré recevable l'opposition formée par monsieur X.,
- mis à néant l'ordonnance d'injonction de payer en date du 23 décembre 2009,
- déclaré la SA PARIBAS forclose en son action,
- prononcé la déchéance du droit aux intérêts et condamné la SA BNP PARIBAS Personal Finance à restituer à monsieur X. la somme de 1.927,38 euros au titre des intérêts irrégulièrement perçus, avec intérêts au taux légal à compter de la perception desdits intérêts,
- débouté la SA BNP Paribas Personal Finance de l'ensemble de ses demandes,
- condamné la SA BNP Paribas Personal Finance à payer à monsieur X. la somme de 300 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens, en ce compris les frais de la procédure d'injonction de payer.
Le tribunal a relevé que le compte avait très vite fonctionné au delà du montant du découvert utile autorisé de 1501 euros, pour dépasser dès le 25 août 2006, la somme de 2.299,75 euros, date au delà de laquelle le montant susindiqué a été continuellement dépassé jusqu'à la clôture du compte sans qu'aucune offre modificative soit présentée conforme aux dispositions de l’article L. 311-9 du code de la consommation, et a conclu que le délai de deux ans pour agir courant à compter du mois d'août 2006 était dépassé lors de l'introduction de la demande, ajoutant qu'il importait peu que le montant maximum autorisé soit de 12.000 euros dans la mesure où une clause particulière prévoyait un découvert utile de 1.501 euros.
Il a par ailleurs considéré que la déchéance du droit aux intérêts devait être prononcée, non du fait de l'existence d'un taux d'intérêt révisable dans le contrat avec détail du mode de calcul, mais en application de l’article L. 311-33 du code de la consommation du fait de l'absence de présentation d'une offre préalable de crédit modifiant le contrat signé le 23 mai 2005 après dépassement du découvert autorisé dès le 25 août 2006 et du fait de l'irrégularité de l'information annuelle prévue à l'article L. 311-9 du même code, ce qui justifiait la condamnation de la banque à restituer les intérêts irrégulièrement perçus depuis le mois de mars 2006 avec intérêts légaux à compter du jour de leur perception.
Par déclaration du 28 août 2012, la BNP Paribas Personal Finance a interjeté appel total du jugement du 6 janvier 2012.
Après échange des conclusions des parties, l'ordonnance de clôture a été rendue le 28 août 2012 et a fixé l'affaire à l'audience du 11 septembre 2013 à laquelle elle a été retenue et plaidée et la décision a été mise en délibéré prorogé à ce jour.
Dans ses dernières conclusions déposées le 23 novembre 2012, la SA BNP Paribas Personal Finance demande à la cour de :
- dire et juger que l'action en paiement initiée par la société BNP Paribas était parfaitement recevable sans la mesure où le montant du découvert réellement consenti dès l'origine (12.000 euros) n'a jamais été dépassé, et que le premier incident de paiement non régularisé n'était pas antérieur de plus de deux ans à la date de signification de l'ordonnance portant injonction de payer rendue à l'encontre de monsieur X.,
En conséquence,
- réformer la décision déférée en ce qu'elle a jugé irrecevable l'action en paiement dirigée à l'encontre de monsieur X.,
- condamner monsieur X. sur le fondement de l’article L. 311-30 du code de la consommation, à payer à la société BNP Paribas Personal Finance anciennement dénommée Cetelem, au titre du dossier n ° 4350 XX XX 11100, la somme en principal actualisée au 5 octobre 2009 de 5.017,35 euros assortie des intérêts calculés au taux contractuel sur la somme de 4.688,07 euros à compter du 24 août 2009, date de la déchéance du terme, et au taux légal sur le surplus,
Par ailleurs,
- dire et juger que le prêteur n'est pas tenu de remettre à l'emprunteur une nouvelle offre préalable de crédit tant que le montant réellement consenti dès l'origine n'a pas été dépassé,
- constater également que le prêteur justifie avoir informé l'emprunteur trois mois avant la date anniversaire du contrat des conditions de reconduction annuelle de son compte,
En conséquence,
- réformer la décision déférée en ce qu'elle a prononcé la déchéance du droit aux intérêts,
Subsidiairement,
- dire et juger que les sommes respectivement dues par les parties ont nécessairement vocation à se compenser quand bien même la forclusion serait acquise et réformer la décision entreprise en ce qu'elle a condamné la société BNP Paribas Personal Finance à rembourser à monsieur X. la somme de 1.927,38 euros au titre des intérêts prétendument perçus de façon indue,
En tout état de cause,
- condamner monsieur X. à payer à la société BNP Paribas Personal Finance anciennement dénommée Cetelem la somme de 2.500 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
- condamner monsieur X. aux entiers dépens de première instance et d'appel sur le fondement de l’article 699 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que le point de départ du délai de forclusion biennal est bien le premier dépassement du crédit autorisé manifestant la défaillance de l'emprunteur, mais qu'en l'espèce, il convient de prendre en compte non le montant du dépassement du découvert utile mais le montant du crédit maximum autorisé, soit 12.000 euros, car il convient de se référer aux termes du contrat et prendre en considération le montant dont l'emprunteur pouvait effectivement disposer sans que le prêteur ne puisse s'y opposer et en l'espèce, le montant du crédit autorisé était bien de 12.000 euros, le montant de 1.501 euros de crédit utile pouvait être augmenté sans que la banque ne puisse s'y opposer sauf quelques cas expressément prévus et tenant au bon sens, et ce montant était prévu uniquement pour permettre le calcul des remboursements mensuels.
Elle soutient que l'offre préalable acceptée par monsieur X. est une offre préalable d'ouverture de crédit utilisable par fractions, ce qui suppose qu'il y ait plusieurs fractions.
Elle ajoute que le taux du crédit y est prévu, de même que le montant des remboursements (3 % minimum du montant emprunté) et souligne qu'il ne peut y avoir juridiquement défaillance tant que les mensualités sont remboursées, y compris si le découvert utile est dépassé car l'emprunteur ne fait qu'user de la faculté prévue au contrat, et que la déchéance du terme n'est pas envisageable dans de telles conditions.
Elle conclut dès lors sur ce point que le dépassement du crédit utile caractérisant la défaillance de l'emprunteur était le dépassement du crédit maximum accordé non atteint au cas d'espèce, et que le point de départ du délai de forclusion devait très classiquement être fixé à la date du premier incident de paiement non régularisé, soit le 6 juin 2008 comme il ressortait de l'historique des opérations, de sorte qu'il n'y avait pas forclusion.
S'agissant de la déchéance du droit aux intérêts contestée, elle soutient que l'article L. 331-9 alinéa 1 ancien du code de la consommation dans sa rédaction issue de la loi du 28 janvier 2005 imposait la signature d'une offre préalable pour toute augmentation de crédit, ce qui n'est pas le cas en l'espèce car le découvert maximum autorisé est de 12.000 euros et n'a jamais été dépassé, et que, le tribunal ayant motivé sa décision en se fondant sur un moyen non soulevé par Monsieur X. et non débattu, elle n'avait pu fournir les courriers d'information, envoyés de novembre 2005 à décembre 2008.
Enfin, elle s'oppose en toute hypothèse au remboursement des intérêts dans l'hypothèse où la déchéance du droit aux intérêts serait retenue en invoquant la compensation en exposant que l'irrecevabilité de l'action en paiement retenue par le tribunal ne fait pas disparaître la créance mais seulement le droit processuel d'ester en justice, de sorte que, en considérant que la créance de l'organisme prêteur était au jour de la résiliation d'un montant de 5.017,35 euros, c'est à dire supérieur au montant des intérêts prétendument indus, et en appliquant la compensation, et à supposer que la cour confirme le jugement sur la déchéance du droit aux intérêts, elle devra infirmer le jugement sur la condamnation au remboursement desdits intérêts pour 1927,38 euros en faveur de monsieur X.
Dans ses dernières conclusions déposées le 22 janvier 2013, monsieur X. demande à la cour de :
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
- constater la forclusion de l'action de la société Cetelem BNP Paribas Personal Finance,
- en outre, prononcer la déchéance du droit aux intérêts sur le remboursement des dispositions de l’article L. 311-33 du code de la consommation,
- ordonner la restitution des intérêts assortis du taux d'intérêt légal à compter du jour de leur perception, soit 1.927,38 euros,
- condamner la société Cetelem - BNP Paribas Personal Finance au paiement de la somme de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
- les condamner aux entiers dépens de l'instance,
- A titre infiniment subsidiaire, accorder les plus larges délais de paiement à monsieur X. sur le fondement des dispositions de l’article 1244-1 du code civil et faire application du taux d'intérêt légal après avoir supprimé le montant de l'indemnité de résiliation.
Monsieur X. sollicite la confirmation totale du jugement tant sur la forclusion, que sur la déchéance du droit aux intérêts et sur la condamnation au remboursement de ces intérêts.
Sur la forclusion, il expose que le délai de forclusion biennal de l’article L. 311-37 du code de la consommation courant à compter du premier incident non régularisé a été étendu aux contrats de crédit sous forme de découvert autorisé en compte reconstituable tels que définis par l'article L. 311-9 du même code et en matière de crédit utilisable par fractions sous forme de découvert reconstituable, et que le dépassement du crédit autorisé devait être tenu pour une échéance impayée manifestant la défaillance de l'emprunteur, sauf à préciser que le montant du dépassement devait s'apprécier par rapport au découvert utile autorisé.
Il soutient que la clause prévoyant un montant de découvert maximal autorisé de 12.000 euros est sans incidence car il convient de se référer au découvert effectivement autorisé pour apprécier la défaillance de l'emprunteur constituant le point de départ du délai de forclusion biennal, ainsi qu'en avait jugé la Cour de cassation le 28 novembre 2006.
Il considère que le crédit accordé ne peut être analysé comme un crédit à fractions périodiquement disponibles destiné à empêcher que l'emprunteur puisse utiliser la totalité de son découvert en une seule fois ou sur une période réduite.
Il soutient que la clause prévoyant un double plafond est abusive au sens de la directive 93-13 CEE du 5 avril 1993 et doit être réputée non écrite en application de l’article L. 132-1 du code de la consommation, car son application exclut l'examen des facultés contributives de l'emprunteur et permet à la banque de modifier le montant des mensualités à rembourser et le taux applicable sans signature de nouvelle offre et sans délai de rétractation, ce qu'avait estimé la cour de cassation dans un avis du 10 juillet 2006 conforme à l’avis de la commission des clauses abusives du 27 mai 2004, et que cette clause fixant un second plafond a pour seul objet d'accorder un avantage au seul prêteur afin de lui permettre d'échapper aux sanctions prévues par les textes.
Il estime qu'au cas d'espèce la clause prévoyant une faculté de découvert maximal de 12.000 euros doit être réputée nulle et conclut que dès lors le montant du découvert autorisé était bien de 1.501 euros, souligne que ce montant a été en permanence dépassé depuis le mois d'août 2006 et que le délai biennal était donc expiré au jour de l'introduction de l'action, ajoutant qu'au surplus le compte avait fonctionné de manière irrégulière en l'absence de demande expresse de dépassement du découvert autorisé, ce qui constituait un autre motif permettant de considérer que le découvert autorisé était bien de 1.501 euros.
S'agissant de la déchéance du droit aux intérêts, il considère que le plafond du découvert de 1.501 euros étant dépassé à compter du mois d'août 2006, le taux d'intérêt comme le montant des mensualités étaient modifiés, et en l'espèce divers, de sorte que l'organisme de crédit aurait dû faire signer une nouvelle offre de crédit permettant de modifier les conditions de la convention et que, ne l'ayant pas fait, il devait être fait application de l’article L. 311-33 du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sanction applicable au surplus du fait de la non-communication annuelle des conditions de reconduction du contrat (article L. 331-9 du code de la consommation ).
Enfin, monsieur X. fait valoir que la condamnation au remboursement des intérêts perçus de manière irrégulière doit être confirmée sans que ne puisse être invoquée la compensation entre les créances, laquelle exige deux créances certaines, liquides et exigibles, caractéristiques que la créance de l'établissement financier ne peut présenter en raison de la forclusion opposée et devant être constatée.
MOTIFS (justification de la décision) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur la forclusion :
Il ressort de l’article L. 311-37 du code de la consommation dans sa version antérieure à celle issue de la loi du 1er Juillet 2010 que les actions en paiement engagées devant le Tribunal d'instance au titre des crédits à la consommation doivent être formées dans les deux ans de l'événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.
Dans le cas d'une ouverture de crédit reconstituable et assortie d'une obligation de remboursement à échéances convenues, le point de départ de la forclusion se situe à la date de la première échéance impayée non régularisée manifestant la défaillance de l'emprunteur et dans le cas d'un crédit accordé par découvert autorisé, le dépassement du découvert autorisé manifeste la défaillance de l'emprunteur sauf régularisation par réduction du découvert ou signature d'une nouvelle offre de crédit.
En l'espèce, Monsieur X. a signé un contrat de crédit par découvert autorisé prévoyant un double plafond.
La difficulté opposant les parties porte sur le point de savoir si le plafond de crédit autorisé est de 1.500 euros ou de 12.000 euros.
Dans le premier cas, le plafond a constamment été dépassé depuis août 2006 jusqu'à 2009 en passant au seul titre du capital de 2.299,75 euros le 25 août 2006 à 4.042,48 euros le 31 juillet 2009.
Dans le second cas le plafond n'a jamais été atteint ni dépassé et il n'a pu y avoir défaillance qu'au jour de l'absence de paiement des échéances prévues pour le remboursement du crédit consenti.
L’article L. 311-8 du code de la consommation dans sa version applicable au présent contrat à énonce que les opérations de crédit sont conclues dans les termes d'une offre préalable, remise en double exemplaire à l'emprunteur et que la remise de l'offre oblige le prêteur à maintenir les conditions qu'elle indique pendant une durée minimale de quinze jours à compter de son émission et l'article L. 311-9 du dit code ajoute que, lorsqu'il s'agit d'une ouverture de crédit qui, assortie ou non de l'usage d'une carte de crédit, offre à son bénéficiaire la possibilité de disposer de façon fractionnée, aux dates de son choix, du montant du crédit consenti, l'offre préalable est obligatoire pour le contrat initial et pour toute augmentation de crédit consenti.
En l'espèce, la lecture du contrat permet de vérifier que le crédit initial n'était pas de 12.000 euros mais qu'il était de 1.501 euros.
En effet, il était prévu dans les conditions générales du crédit, au titre du « découvert utile » que « l'emprunteur peut faire évoluer le découvert utile jusqu'au montant du découvert maximum autorisé à conditions que, depuis l'ouverture du crédit ou la précédente augmentation du découvert utile, aucun des événements suivants ne soit survenu : a) survenance d'un cas de suspension du droit à découvert (voir article II-9 ci-dessus, b) évolution de la situation financière de l'emprunteur, c) usage des moyens d'utilisation du compte en violation des conditions du présent contrat. L'augmentation du découvert utile ne peut résulter du seul usage des moyens d'utilisation du compte et doit faire l'objet d'une demande expresse de l'emprunteur ».
En l'espèce, il n'est pas fait état de demande d'augmentation du découvert utile qui devait être expresse.
Au surplus l'augmentation du découvert utile n'est pas automatiquement accordée contrairement à ce que soutient l'organisme de crédit qui le subordonne à l'absence d'évolution de la situation financière de l'emprunteur.
L'augmentation du découvert utile nécessitait dès lors un accord qui ne peut être tacite.
Il sera ajouté que le montant des remboursements n'est pas précisément prévu en cas d'augmentation du découvert utile car il est seulement indiqué dans les conditions générales du crédit que l'emprunteur est tenu au remboursement mensuel choisi qui ne saurait être inférieur à 3 % du solde débiteur, avec un minimum de 15,24 euros.
Le montant initial du prélèvement était de 45,03 euros et a été dépassé à compter du mois d'août 2006, et même si le remboursement n'a pas dépassé 3 % du découvert monsieur X. n'a pas été en mesure d'en apprécier le montant précis antérieurement au dépassement.
Au surplus, le taux du crédit n'était pas connu de manière certaine car il était prévu un taux nominal de 17,76 % par an (TEG de 19,43 % l'an ou 0,0487 % par jour) jusqu'à 1.500 euros empruntés et un taux de 15 % par an au (TEG de 16,18 % l'an ou 0,0411 % par jour) au delà alors qu'en l'espèce, il a été appliqué des taux de 0,0420 % à 0,520 % au vu du décompte produit.
Enfin, même s'il est mentionné sur le contrat de prêt qu'il s'agit de crédit utilisable par fraction, la convention ne porte que sur le montant convenu de 1.500 euros, le montant maximal autorisé de 12.000 euros n'étant qu'une possibilité non acquise au jour de la signature de l'offre initiale, d'autant que le montant des fractions envisageables jusqu'à 12.000 euros n'était pas prévu et a fortiori convenu.
Il sera considéré au vu de l'ensemble de ces éléments que le montant du crédit convenu était le montant initial convenu de 1.501 euros et non le montant maximum prévu de 12.000 euros.
Dans ces conditions, en l'absence de signature d'une nouvelle offre de crédit lors du dépassement du découvert de 1.501 euros initialement autorisé et de restauration ultérieure du crédit, le dépassement du crédit initialement autorisé constitue le point de départ de délai biennal de forclusion prévu par l’article L. 311-37 du code de la consommation.
Le point de départ du délai de forclusion doit être situé le 25 août 2006, date à partir de laquelle le découvert utile a été dépassé, ceci de manière constante.
Le délai biennal est interrompu par la signification de l'ordonnance portant injonction de payer, soit en l'espèce le 11 février 2010.
Le délai de deux ans étant expiré au 11 février 2010, l'action diligentée par la société BNP Paribas Personal Finance doit être déclarée forclose.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
La demande d'application de l’article 1244-1 du code civil présentée à titre subsidiaire par monsieur X. s'avère dès lors sans objet.
Sur la déchéance du droit aux intérêts :
Monsieur X. ayant sollicité le remboursement des intérêts versés suite à la déchéance du droit aux intérêts, il convient de statuer sur ce point même si la BNP Paribas Personal Finance est forclose en son action.
L'article L. 311-33 dans sa rédaction antérieure à 2011, énonçait que :
« Le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l'emprunteur d'une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L. 331-8 à L. 311-13 est déchu du droit aux intérêts et l'emprunteur n'est tenu qu'seul remboursement du capital suivant l'échéancier prévu ; Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives des intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû. »
En l'espèce, le Tribunal avait motivé sa décision en visant l'absence d'information annuelle prévue à l’article L. 311- 9 du code de la consommation pour les crédits conclus pour un an et renouvelables sans que la BNP ait pu s'expliquer sur ce point.
Cette dernière a transmis en cause d'appel les lettres d'information adéquates, de sorte que la déchéance du droit aux intérêts n'est pas encourue de ce chef.
Le Tribunal a également prononcé la déchéance du droit aux intérêts en se fondant sur l'absence de remise d'une offre préalable telle que prévue à l’article L. 311-8 et L. 311-9 du code de la consommation.
Ce crédit intitulé crédit fractionné ne comportait en réalité un accord sur le seul montant de 1.501 euros, correspondant à une éventuelle première tranche.
Toute opération de crédit à la consommation doit donner lieu à une offre préalable en application de l’article L. 311-8 du code de la consommation et, comme indiqué plus avant dans la motivation relative au délai de forclusion, une offre préalable de crédit devait être prévue lors de l'augmentation du crédit consenti au delà de 1.501 euros.
En l'absence d'une telle offre signée, la sanction prévue à l’article L. 311-33 du code de la consommation doit être appliquée.
La déchéance du droit aux intérêts est encourue à compter du 25 août 2006 car à cette date, le crédit est passé de 1.485,85 euros à 2.299,75 euros.
Le montant des intérêts prélevés à compter de cette date ne fait pas l'objet de contestation et ressort du décompte produit.
Il sera dés lors jugé que la BNP Paribas Personal Finance devra restituer à monsieur X. la somme de 1.927,38 euros au titre des intérêts irrégulièrement perçus, avec intérêts au taux légal à compter de la perception desdits intérêts.
Sur la compensation :
La compensation peut être invoquée pour la première fois en cause d'appel.
Les articles 1289 et suivants du code civil prévoient que la compensation légale qui s'opère de plein droit n'a lieu qu'entre deux dettes qui ont également pour objet une somme d'argent, ou une quantité de choses fongibles de la même espèce, et qui sont également liquides et exigibles.
Le juge peut également ordonner la compensation entre deux dettes connexes, y compris si elles ne remplissent pas les conditions de la compensation légale, c'est à dire si elles ne sont pas liquides et exigibles, sauf à être certaines.
En l'espèce, la compensation judiciaire est possible car la présente décision consacre deux dettes certaines et connexes car nées du même contrat.
La banque BNP Paribas Personal Finance ne peut exiger le paiement du solde du compte du fait de la forclusion.
Cependant la forclusion éteint le droit d'agir, c'est à dire le droit permettant d'obtenir la condamnation du débiteur à son paiement, mais n'éteint pas la dette.
La dette de la BNP Paribas Personal Finance étant de 1.927,38 (outre intérêts) et celle de monsieur X. étant en capital de 288,32 euros (capital échu) plus 4.039,49 euros (capital restant dû), la compensation fait obstacle à la condamnation de la BNP au paiement de la somme de 1.927,38 euros
Le jugement contesté sera dès lors confirmé sur la forclusion, sur la déchéance du droit aux intérêts, sur l'indemnité allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens, mais sera infirmé en ce qu'il a condamné la BNP Paribas Personal Finance à rembourser les intérêts irrégulièrement perçus.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens :
Il n'apparaît pas inéquitable que la BNP Paribas Personal Finance conserve à sa charge les frais irrépétibles exposés en appel du fait de la forclusion et de la déchéance du droits aux intérêts prononcées.
Par contre, même si la compensation est appelée à jouer et fait obstacle à la condamnation de la banque à restituer les intérêts indûment perçus, monsieur X. a engagé des frais irrépétibles qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge car la cour a pour la plus grande partie confirmé le jugement contesté par son adversaire.
La BNP Personal Finance sera condamnée à lui payer une indemnité de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile.
Les dépens seront mis à la charge de la BNP Paribas Personal Finance déboutée de son appel pour l'essentiel de ses demandes.
DISPOSITIF (décision proprement dite) (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant publiquement par arrêt mis à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Après en avoir délibéré conformément à la loi :
- Déclare recevable l'appel interjeté par la BNP Paribas Personal Finance contre le jugement du 6 janvier 2012,
- Confirme le jugement du tribunal d'instance de Bordeaux en date du 6 janvier 2012 dans toutes ses dispositions sauf sur la condamnation prononcée à l'encontre la SA BNP Paribas Personal Finance au remboursement à monsieur X. des intérêts indûment perçus,
Y ajoutant :
- Déclare sans objet la demande présentée à titre subsidiaire par monsieur X. d'application de l’article 1244-1 du code civil ;
- Dit que la somme de 1927,38 euros correspondant aux intérêts indûment perçus par la BNP Paribas Personal Finance au titre du prêt consenti à Monsieur X., augmentée des intérêts au taux légal à compter de la perception desdits intérêts, se compense avec le montant de la dette à l'égard de la Banque BNP Paribas Personal Finance,
- Condamne la BNP Paribas Personal Finance à payer à monsieur X. une indemnité de 1.500 euros ( mille cinq cents euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et la déboute de sa demande d'indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile à l'encontre de monsieur X.,
- Condamne la BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens de la procédure d'appel.
Signé par Monsieur Louis-Marie Cheminade, président, et Madame Marceline Loison, greffier, à la quelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
- 5745 - Code de la consommation - Régime de la protection - Consommateur - Effets - Suppression de la clause - Conséquences sur l’issue du litige - Effet rétroactif - Point de départ d’une forclusion - Illustrations
- 6632 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 3 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Respect du contrat
- 6635 - Code de la consommation - Présentation par contrat - Banque - Crédit à la consommation - Crédits spécifiques - Crédit renouvelable - 6 - Clause de dispense d’offre (augmentation du crédit) - Notion d’augmentation du crédit