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CA LYON (1re ch. civ. A), 22 septembre 2011

Nature : Décision
Titre : CA LYON (1re ch. civ. A), 22 septembre 2011
Pays : France
Juridiction : Lyon (CA), 1er ch. civ.
Demande : 10/03658
Date : 22/09/2011
Nature de la décision : Réformation
Mode de publication : Jurica
Décision antérieure : CASS. COM., 13 novembre 2013, CASS. COM., 24 novembre 2015
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4629

CA LYON (1re ch. civ. A), 22 septembre 2011 : RG n° 10/03658 

Publication : Légifrance

 

Extrait : « En effet, selon la description de son activité, lorsque l’acheteur d’un véhicule décide de souscrire la garantie complémentaire proposée par le vendeur, il se voit remettre, en contrepartie du paiement du supplément demandé, un bulletin d’adhésion figurant dans un carnet de garantie à en-tête de la société NSA SAGE. 

En cas de panne, la société Mapfre Warranty reçoit le rapport du garage agréé auquel l’acheteur a eu recours, vérifie la validité de la garantie et s’assure que le coût du devis est conforme aux normes, puis autorise la réparation ou le remplacement de la partie défectueuse. 

Dès lors, qu’on retienne que cette société a une activité d’assurance, ce qui est par ailleurs la solution retenue par la Cour dans l’instance portant le n° RG 10/03515, ou qu’on considère qu’elle est sous-traitante du vendeur débiteur d’une garantie complémentaire après-vente, il reste qu’elle a souscrit auprès de la société Mapfre Asistencia une police dont l’objet est de « garantir le remboursement par la Compagnie au bénéficiaire des pertes financières occasionnées au titre d’une panne garantie par contrat sur les véhicules achetés chez un garage vendeur et pour lesquels un carnet de garantie a été délivré ». »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE LYON

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE A

ARRÊT DU 22 SEPTEMNRE 2011

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 10/03658. Décision du tribunal de grande instance de Lyon, Au fond du 31 mars 2010 : R.G. n° 08/14571.

 

APPELANTE

ADMINISTRATION DES IMPÔTS

représentée par le Chef des services fiscaux de Rhône-Alpes-Bourgogne, [adresse], représentée par la SCP LIGIER DE MAUROY- LIGIER, avoués à la Cour 

 

INTIMÉE

Société MAPFRE ASISTENCIA COMPANIA INTERNACIONAL DE SEGUROS Y REASEGUROS - SA

société de droit étranger dont l’établissement en France est [adresse], représentée par la SCP LAFFLY - WICKY, avoués à la Cour, assistée de la SELARL KAHN ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS 

 

Date de clôture de l’instruction : 17 mai 2011 

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 1er juin 2011 

Date de mise à disposition : 15 septembre 2011, prorogée au 22 septembre 2011, les avoués dûment avisés conformément à l’article 450 dernier aliéna du code de procédure civile. 

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré : - Michel GAGET, président, - Christine DEVALETTE, conseiller, - Philippe SEMERIVA, conseiller, assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier.

A l’audience, Philippe SEMERIVA a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile. 

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile, Signé par Michel GAGET, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire. 

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

EXPOSÉ DU LITIGE :

Considérant que la société Nuovi Servizi Auto, devenue société Mapfre Warranty, et dont l’établissement en France se nommait NSA Sage, se livrait à des opérations d’assurance, l’administration fiscale lui a notifié, au titre de la période comprise entre le 1er avril 2004 et le 31 janvier 2005, un redressement faisant application de la taxe sur les conventions d’assurances. 

La société Mapfre Warranty a, pour la période comprise entre le 1er janvier 2003 et le 31 mars 2004, souscrit une police d’assurance auprès de la société Mapfre Asistencia. 

Considérant que cette police relevait en réalité de la taxe sur les conventions d’assurances au taux prévu à l’article 1001-5° bis du code général des impôts, l’administration fiscale a notifié à la société Mapfre Asistencia, en application de l’article 385 de l’annexe III de ce code, un redressement que cette dernière a contesté. 

Après rejet de ses réclamations, la société Mapfre Asistencia a saisi le tribunal de grande instance de Lyon qui a, par le jugement entrepris : 

- dit que l’activité de la NSA SAGE (devenue Mapfre Warranty) entre bien dans le cadre des opérations d’assurances énumérées à l’article L. 321-1 du code des assurances, 

- dit que le contrat n° PP0XX03/01 conclu entre la société NSA et la société Mapfre Asistencia doit être soumis à la taxe sur les assurances, 

- dit cependant que le taux applicable est le taux de droit commun de 9 %, et non celui de 18 %, retenu par l’administration, 

- débouté le chef des services fiscaux de la direction de contrôle fiscal Rhône-Alpes-Bourgogne de sa demande de confirmation de la déclaration de rejet de la réclamation formée par la société Mapfre Asistencia, 

- prononcé la remise partielle des impositions à la mesure de cette rectification, 

- débouté la société Mapfre Asistencia de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile, des articles L. 208 et R. 207-1 du Livre des procédures fiscales et de l’exécution provisoire, 

- débouté les parties de toutes autres demandes, 

- partagé les dépens par moitié. 

* * *

L’administration est appelante principale, quant au taux applicable ; la société Mapfre Asistencia relève appel incident sur le principe même de la réclamation. 

* * *

La société Mapfre Asistencia expose en effet que Mapfre Warranty intervient dans le cadre de la garantie commerciale fournie par les vendeurs professionnels de véhicules d’occasion qui, certes, n’a pas un caractère légal, mais dont l’absence constituerait une clause abusive (Recommandation no 94-05) et qu’à ce titre, elle conclut des contrats afin d’assurer la réparation nécessaire en cas de panne ou de problème inhérent au véhicule vendu, mais jamais en cas d’accident, et soumet donc sa prestation à la TVA, de sorte que c’est à tort que le tribunal a retenu que son activité relèverait des opérations d’assurances énumérées à l’article L. 321-1 du code des assurances. 

Elle considère par ailleurs que si, dans le cadre du contrat considéré, l’acquéreur du véhicule peut mettre en œuvre l’action directe, ce n’est pas en tant qu’assuré, mais en qualité de créancier de l’obligation de garantie incombant au garagiste, dont la société Mapfre Warranty est elle-même débitrice, et qu’en conséquence, il n’existe aucune relation entre ce propriétaire et la société Mapfre Asistencia. 

La société Mapfre Asistencia soutient en outre que l’acquéreur ne paye nullement une prime d’assurance, ce coût étant supporté par le garagiste, et que la démonstration du Service est donc inexacte, la garantie qu’elle fournit ne pouvant être assimilée à une assurance couvrant les risques inhérents aux véhicules, puisqu’elle est déconnectée d’un tel type d’assurance. 

Elle en déduit qu’elle n’est, au plus, redevable que de la taxe sur les conventions d’assurance au taux de droit commun. 

Elle demande l’infirmation du jugement, subsidiairement sa confirmation quant au taux applicable, la remise des impositions, l’imputation sur les éventuels rechaussements maintenus de la taxe déjà acquittée, la compensation avec la TVA déjà payée et la condamnation du Service au paiement d’une somme de 7.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile. 

* * *

L’administration fiscale maintient que le contrat souscrit auprès de la société Mapfre Asistencia par la société Mapfre Warranty est un contrat d’assurance collectif répondant à la définition donnée notamment par CJCE, 25 février 1999, C-349/96 et que, s’il désigne NSA SAGE comme bénéficiaire de la garantie, il fait référence à l’article L. 112-1 du code des assurances ; elle soutient que l’acquéreur signe le bulletin d’adhésion et supporte le coût de la prime, alors que le garagiste n’accorde aucune garantie, de sorte qu’il s’agit d’une police souscrite pour le compte de qui il appartiendra, contenant une stipulation pour autrui et obligeant directement la compagnie d’assurance envers le propriétaire de la chose exposée au risque assuré. 

Elle estime qu’il résulte de l’article 1001, 5° bis du code général des impôts que le taux de 18 % est applicable à toutes les garanties incluses dans des contrats d’assurance couvrant des risques encourus par le propriétaire ou l’utilisateur d’un véhicule, et que si la Cour de cassation décide que la garantie défense-recours, bien que rattachée à un contrat d’assurance automobile, peut être taxable à 9 %, elle ne limite pas le champ d’application du texte précité aux seules garanties de responsabilité civile et dommages matériels. 

Elle en déduit qu’aucune autre exclusion spécifique résultant de la doctrine administrative ne vaut pour le cas présent, dans lequel la société NSA SAGE consent une garantie directement liée à une panne mécanique portant sur des véhicules automobiles et n’a pas pour objet de garantir une perte financière pour le garagiste vendeur, qui n’est par tenu d’une telle garantie, hors le cas de vice caché. 

M. le Chef des services fiscaux demande en conséquence de réformer le jugement en ce qu’il lui est défavorable et de condamner la société Mapfre Asistencia à payer la somme de 912.432 euros au titre de droits en litige et celle de 156.307 euros en intérêts de retard. 

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

MOTIFS DE LA DÉCISION : 

La société Mapfre Warranty n’étant pas partie au litige, il convient de retrancher le chef de jugement qualifiant expressément son activité. 

Au demeurant, cette qualification n’est pas déterminante pour l’examen du présent litige. 

En effet, selon la description de son activité, lorsque l’acheteur d’un véhicule décide de souscrire la garantie complémentaire proposée par le vendeur, il se voit remettre, en contrepartie du paiement du supplément demandé, un bulletin d’adhésion figurant dans un carnet de garantie à en-tête de la société NSA SAGE. 

En cas de panne, la société Mapfre Warranty reçoit le rapport du garage agréé auquel l’acheteur a eu recours, vérifie la validité de la garantie et s’assure que le coût du devis est conforme aux normes, puis autorise la réparation ou le remplacement de la partie défectueuse. 

Dès lors, qu’on retienne que cette société a une activité d’assurance, ce qui est par ailleurs la solution retenue par la Cour dans l’instance portant le n° RG 10/03515, ou qu’on considère qu’elle est sous-traitante du vendeur débiteur d’une garantie complémentaire après-vente, il reste qu’elle a souscrit auprès de la société Mapfre Asistencia une police dont l’objet est de « garantir le remboursement par la Compagnie au bénéficiaire des pertes financières occasionnées au titre d’une panne garantie par contrat sur les véhicules achetés chez un garage vendeur et pour lesquels un carnet de garantie a été délivré ». 

L’article 1er stipule qu’au sens du contrat, la société Nuovi Servizi Auto est le souscripteur et le bénéficiaire, que la « Compagnie » est Mapfre Asistencia et le courtier la société Alliance Optimale et l’article 7 que « par le terme perte financière, il faut entendre les sinistres pannes mécaniques garantis au titre du présent contrat ». 

Certes, comme l’a relevé le tribunal, cette police indique être « régie par les dispositions de l’article L. 112-1 du code des assurances ». 

L’administration souligne encore exactement que, selon le contrat, « le souscripteur s’engage à délivrer au garage vendeur, par l’intermédiaire du courtier, une information complète sur l’étendue et les limites du présent contrat, notamment en ce qui concerne les exceptions que la Compagnie pourrait opposer au souscripteur et au bénéficiaire, aux garages vendeurs et aux acheteurs ». 

Enfin, selon la convention de gestion (article 15), citée par l’administration, « dans l’hypothèse où la Compagnie se verrait attraite, soit seule devant une quelconque juridiction par un acheteur et/ou un garage par application de l’action directe, soit concomitamment avec le souscripteur/bénéficiaire et/ou le courtier, le souscripteur s’engage à fournir à la compagnie l’intégralité des documents et informations permettant à cette dernière d’assurer utilement sa défense ». 

De telles stipulations ne sont ni claires ni précises, puisqu’il en résulte tout à la fois que l’acheteur pourrait être l’assuré, conformément à la référence faite à l’article L. 112-1, et que pour autant il aurait, comme le garagiste, une faculté d’exercer une action directe, ce qui présuppose que ni l’un ou l’autre ne dispose d’un lien contractuel avec la Compagnie. 

Mais, face à ces incohérences, il faut en revenir à l’objet principal du contrat qui, lui, est clairement défini comme étant « la perte financière subi par le souscripteur », assorti d’une assurance de sa responsabilité dans l’hypothèse visée à l’article 15 de la convention de gestion. 

La référence à l’article L. 112-1 n’est prolongée par aucune stipulation permettant de considérer que l’acheteur (voire le garagiste) serait bénéficiaire dans le cadre d’une assurance pour compte, et il n’importe nullement que sur le carnet de garantie remis à l’acheteur figure les références du « contrat d’assurance n° PP0XX03/01 souscrit par NSA SAGE auprès de Mapfre Asistencia », cette indication n’ayant que le rôle d’informer cet acheteur de la cible d’une éventuelle action directe. 

Et il ne saurait se déduire de ces éléments que l’acheteur aurait « de facto adhéré à un contrat d’assurance pour compte » et l’analyse menée en ce sens, tant par les premiers juges que par l’administration, ne peut être adoptée. 

Il n’importe pas plus que les garanties soient cessibles ni que la convention de gestion invite le souscripteur à commercialiser la couverture d’assurance car, d’une part, cette cessibilité n’étant pas déterminante au regard de la question posée et, d’autre part, cette invitation ne pouvant à elle seule impliquer une couverture que la police ne prévoit pas. 

La police en question se borne à assurer la perte financière du souscripteur bénéficiaire, voire à couvrir sa responsabilité, au cas où elle pourrait être engagée. 

Il en résulte que, qu’on considère qu’elle est elle-même ou qu’elle est sous-traitante d’une prestation d’après-vente, la société Mapfre Warranty est ainsi assurée contre les risques d’une activité consistant à couvrir des pannes mécaniques susceptible d’affecter des véhicules terrestres à moteur. 

Toutefois, cette police n’institue pas une assurance pour compte. 

N’étant pas prétendu par l’administration qu’une assurance de ce type entrerait dans les prévisions de l’article 1001-5° bis du code général des impôts, en ce qu’elle couvrirait indirectement les conséquences d’une panne mécanique, une telle police ne relève pas des risques de toute nature relatifs aux véhicules terrestres à moteur. 

Le taux de taxation applicable est donc de 9 %. 

La taxe sur les conventions d’assurance et la TVA ne sont pas citées dans la liste limitative de l’article L. 204 du Livre des procédures fiscales ; par ailleurs, le droit à restitution de TVA n’est pas liquidé ; dans ces conditions, aucune compensation, contentieuse ou fiscale, ne peut être ordonnée. 

L’administration fiscale n’est pas reçue en son recours ; les dépens d’appel seront à sa charge. 

Il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile. 

Les chefs du jugement concernant les articles L. 208 et R. 207-1 du Livre des procédures fiscales ne sont pas contestés. 

Par ces autres motifs, il convient de confirmer le jugement entrepris, sauf en ce qui concerne le chef visant la société NSA SAGE, devenue la société Mapfre Warranty. 

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS

La Cour,

- Réforme le jugement entrepris en ce qu’il a dit que l’activité de la NSA SAGE entre bien dans le cadre des opérations d’assurances énumérées à l’article L. 321-1 du code des assurances, 

- Dit n’y avoir lieu à statuer de ce chef, 

- Confirme le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions, 

- Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes, 

- Condamne M. le Chef des services fiscaux ès qualités aux dépens d’appel, avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Laffly - Wicky, avoué. 

LE GREFFIER                     LE PRÉSIDENT 

Joëlle POITOUX                  Michel GAGET