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CA VERSAILLES (13e ch.), 3 avril 2014

Nature : Décision
Titre : CA VERSAILLES (13e ch.), 3 avril 2014
Pays : France
Juridiction : Versailles (CA), 13e ch.
Demande : 12/05626
Date : 3/04/2014
Nature de la décision : Confirmation
Mode de publication : Jurica
Date de la demande : 27/07/2012
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CERCLAB - DOCUMENT N° 4783

CA VERSAILLES (13e ch.), 3 avril 2014 : RG n° 12/05626

Publication : Jurica ; Legifrance

 

Extrait : « Il n'appartient pas à la cour de se prononcer sur le déséquilibre significatif des droits et obligations des parties invoqué par le liquidateur de la société Fourchet frigo en référence aux dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce qui fait l'objet d'une instance, selon les parties toujours pendante devant le tribunal de commerce de Paris. Et, à supposer que cette juridiction reconnaisse un tel déséquilibre, il serait sans incidence sur l'appréciation de la prescription de l'article L. 133-6 du code de commerce.

En effet, la fraude et l'infidélité supposent une volonté malveillante, une dissimulation ou une action délibérée de nature à empêcher le réclamant d'agir en temps utile.

L'attitude des sociétés Sofidis et Effel, dans les négociations menées entre les parties au sujet de la prise en considération de l'augmentation des tarifs du gazole dans les prix payés à la société Fourchet frigo, sont exemptes de ces caractéristiques, la position économiquement forte de ces sociétés et la dépendance économique invoquée de la société Fourchet à l'égard du groupe Casino ne constituant pas, en elles-mêmes et en dehors de tout autre élément, la fraude visée par le texte précité.

De même, le caractère potestatif du mécanisme de révision du prix des prestations de la société Fourchet ne peut être retenu puisqu'il a procédé d'une négociation précise et soutenue entre les parties spécialement à partir de 2008 et a été finalement arrêté par référence à des indices objectifs et extérieurs publiés par le CNR, excluant qu'il soit soumis à la seule volonté potestative des sociétés Sofidis et Effel.

En outre, les premiers juges ont à juste titre relevé que les courriers échangés pour la négociation de la révision des prix démontrent que M. B. connaissait parfaitement les dispositions légales de révision et notamment les références du CNR et doivent être suivis lorsqu'ils ont retenu qu'aucune manœuvre de la part des sociétés Sofidis et Effel n'était établie.

Ainsi, aucun élément du dossier ne permet d'admettre qu'une fraude ou une déloyauté ont pu empêcher le dirigeant de la société Fourchet frigo puis son liquidateur judiciaire d'agir plus tôt. »

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

 

COUR D’APPEL DE VERSAILLES

TREIZIÈME CHAMBRE

ARRÊT DU 3 AVRIL 2014

 

ÉLÉMENTS D’IDENTIFICATION DE LA DÉCISION       (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

R.G. n° 12/05626. Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 19 juin 2012 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE - R.G. n° 2010F01143.

La cour d'appel de VERSAILLES, a rendu l'arrêt suivant dans l'affaire entre :

 

APPELANTE :

Société MJ SYNERGIE mission conduite par Maître Geoffroy BERTHELOT, prise en sa qualité de liquidateur de FOURCHET FRIGO

Représenté(e) par Maître Pierre GUTTIN, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 - n° du dossier 12000517 et par Maître E.BULICH, avocat plaidant au barreau de PARIS

 

INTIMÉES :

- SAS SOFIDIS

agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

- SARL EFFEL

agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentées par Maître Martine DUPUIS de la SCP LISSARRAGUE DUPUIS & ASSOCIÉS, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 - n° du dossier 1250835 et par Maîtres R.FABRE et L.SERSIRON, avocat plaidant au barreau de PARIS

 

Composition de la cour : En application des dispositions de l'article 786 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue à l'audience publique du 21 janvier 2014 les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Madame Annie VAISSETTE, Conseiller chargé du rapport. Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de : Madame Marie-Laure BELAVAL, Présidente, Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller, Madame Annie VAISSETTE, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur Jean-François MONASSIER,

 

EXPOSÉ DU LITIGE                                                           (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

Par acte sous seing privé du 28 juillet 1999, la société Effel, qui appartient au groupe Leader price Franprix, a conclu un contrat avec la société Fourchet frigo par lequel la première confiait à la seconde une mission de « ramassage, réception, contrôle, agréage, entreposage, éclatement, préparation, transport et livraison des marchandises négociées par son service achat ». Le prix était fixé à une somme de 0,50 Francs/kilogramme pour des magasins situés dans une zone de 300 kilomètres au départ de Noves (13) et il était prévu que les tarifs transports seraient revus en cas d'augmentation de plus de 10 % du prix actuel hors taxe du gasoil (tarif actuel à l'achat : 3,20 Francs HT).

Les prestations d'entreposage et de préparation de commandes pour l'activité fruits et légumes de la société Effel étaient assurées par la société Fourchet logistique à partir de l'entrepôt de Noves et cette dernière les facturait à la société Fourchet frigo laquelle les incluait dans sa facturation de prestation de transport à la société Effel.

Des avenants des 1er septembre 2004 et 1er décembre 2006 ont prévu des augmentations de prix libellé en euros par tonne préparée pour l'ensemble des magasins livrés pour tenir compte notamment de la hausse du prix du carburant.

Par acte sous seing privé du 27 mai 2002, la société Sofidis, chargée de négocier l'acheminement des marchandises depuis les centrales d'achat jusqu'aux différents magasins Leader price exploités par ses filiales, a conclu un contrat de transport avec la société Fourchet frigo pour les produits surgelés moyennant un prix forfaitaire par palette fixé en annexe 3 en fonction des magasins destinataires. Un contrat identique a été signé le même jour pour les produits frais.

En 2007, les sociétés Fourchet frigo et Fourchet logistique ont été rachetées par la société Avanti logifroid dirigée par M. B. et à partir d'août 2008, la société Fourchet frigo a fait part de difficultés aux sociétés Effel et Sofidis et des négociations ont eu lieu pour une révision des conditions commerciales régissant les relations contractuelles.

Les sociétés Fourchet frigo et Fourchet logistique ont été mises en redressement judiciaire respectivement les 1er et 15 avril 2009 et deux jugements du 23 décembre 2009 ont arrêté les plans de cession de leurs fonds de commerce au profit de la société Zamenhof. La liquidation judiciaire des sociétés Fourchet frigo et Fourchet logistique a été prononcée le 31 mars 2010.

La société Fourchet frigo a assigné les sociétés Sofidis et Effel devant le tribunal de commerce de Nanterre par acte du 23 février 2010 afin de les voir respectivement condamner à lui payer les sommes principales de 1.015.251 euros HT et de 1.335.017 euros HT. Le liquidateur judiciaire de la société Fourchet frigo est intervenu volontairement devant le tribunal pour reprendre les demandes de cette société.

Par jugement du 19 juin 2012, le tribunal de commerce de Nanterre a :

- dit que le contrat conclu entre les sociétés Effel et Fourchet frigo n'est pas un contrat de transport et que les lois n° 2006-10 du 5 janvier 2006 et n° 2008-776 du 4 août 2008 ne s'appliquent pas à ce contrat,

- dit prescrites les demandes de la société Fourchet frigo et de son liquidateur judiciaire portant sur les prestations de transport antérieures au 23 février 2009 et les a déclarées irrecevables,

- débouté la société Fourchet frigo et son liquidateur judiciaire de leurs demandes pour les prestations postérieures au 23 février 2009,

- condamné la société Fourchet frigo et Maître Berthelot ès qualités à payer à chacune des sociétés Effel et Sofidis la somme de 5.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 27 juillet 2012, la société MJ synergie, prise en la personne de Maître Berthelot, agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société Fourchet Frigo, et M. B. ont relevé appel de ce jugement.

Par ordonnance du 5 décembre 2012, le conseiller de la mise en état a donné acte à M. B. de son désistement d'appel et a constaté l'extinction de l'instance entre M. B., d'une part, et les sociétés Sofidis et Effel, d'autre part.

Le 25 octobre 2012, la Selarl MJ synergies ès qualités, avait signifié des conclusions d'incident aux fins de sursis à statuer dans l'attente de la décision à intervenir du tribunal de commerce de Paris sur l'affaire l'opposant aux sociétés Effel, Sofidis et Franprix Leader price holding dans laquelle il invoque un déséquilibre significatif des droits et obligations des parties sur le fondement des dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce.

Par ordonnance du 13 février 2013, le conseiller de la mise en état a déclaré irrecevable la demande de sursis à statuer pour ne pas avoir été soulevée par le liquidateur judiciaire avant toute défense au fond.

* * *

La société MJ synergies, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Fourchet frigo, a conclu en dernier lieu le 13 novembre 2013 pour voir :

Vu l'article 24 de la loi n°95-96 du 1er décembre 1995 modifié par la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 et le paragraphe III du décret en Conseil d'Etat précisant les modalités d'application,

Vu les articles 1134 et 1147 du code civil,

Vu les articles L. 133-6, L. 420-2, L. 442-6-I-2) du code de commerce,

Vu les articles 378 et 1269 du code de procédure civile,

Vu la jurisprudence du tribunal de commerce de Nanterre et de la cour d'appel de Versailles en matière de « pied de facture gasoil »,

- dire la Selarl MJ Synergie es qualités recevable et bien fondée en ses écritures et pièces ;

- infirmer le jugement rendu le 19 juin 2012 par le tribunal de commerce de Nanterre en toutes ses dispositions et statuant à nouveau ;

- débouter les sociétés Sofidis et Effel de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions ;

En conséquence :

- condamner la société Sofidis à payer à la Selarl MJ Synergie es qualités la somme de 1.015.251 euros HT arrêtée au 1er janvier 2010 en application des dispositions de l'article 24 de la loi n° 95-96 du 1er décembre 1995 modifiée par la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006, majorée d'un intérêt au taux légal à compter de l'exploit introductif d'instance, détaillée ainsi qu'il suit :

* au titre de l'année 2006 : 219.774 euros,

* au titre de l'année 2007 : 229.769 euros,

* au titre de l'année 2008 : 370.850 euros,

* au titre de l'année 2009 : 194.857 euros,

- condamner la société Effel à payer à la Selarl MJ Synergie es qualité de liquidateur judiciaire de la société Fourchet frigo la somme de 1.335.017 euros HT arrêtée au 1er janvier 2010 en application des dispositions de l'article 24 de la loi n° 95-96 du 1er décembre 1995 modifiée par la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006, majorée d'un intérêt au taux légal à compter de l'exploit introductif d'instance, détaillée ainsi qu'il suit :

* au titre de l'année 2006 : 417.343 euros,

* au titre de l'année 2007 : 290.002 euros,

* au titre de l'année 2008 : 429.930 euros,

* au titre de l'année 2009 : 197.743 euros,

- condamner solidairement les sociétés Sofidis et Effel à payer à Selarl MJ Synergie es qualité de liquidateur judiciaire de la société Fourchet frigo la somme de 30.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner solidairement les sociétés Sofidis et Effel aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Au soutien de ses prétentions, la Selarl SMJ synergie, ès qualités, fait valoir en substance :

- que le contrat conclu entre les sociétés Fourchet frigo et Effel est un contrat de transport, la prestation de transport et de livraison de divers points de vente en fruits et légumes y figurant expressément et constituant l'obligation principale représentant les 2/3 du prix global, les autres n'étant qu'accessoires,

- que l'article 24 de la loi du 1er décembre 1995 modifié par la loi du 5 janvier 2006 est en faveur des transporteurs afin que les variations du coût du carburant soient neutres pour eux, le législateur ayant distingué deux cas de figure selon que les charges de carburant sont ou non identifiées au contrat :

* si les charges de carburant sont identifiées explicitement, l'indexation se calcule selon le mécanisme décrit par la loi sur la base des charges de carburant mentionnées au contrat (article 24 II),

* lorsque les charges de carburant ne sont pas identifiées ou lorsqu'il n'y a pas de contrat, il faut se référer aux publications du Comité national routier (CNR) pour déterminer au jour de la commande de transport, le prix du gazole, la part des charges de carburant dans le transport et l'indexation se calcule selon le mécanisme décrit par la loi, en fonction des indices publiés par le CNR,

- qu'en l'espèce, les contrats et avenants signés par les parties ne contiennent aucune disposition contractuelle identifiant les charges de carburant, de sorte que seul l'article 24 III est applicable et qu'il convient de déterminer les charges de carburant au jour de la commande par référence au prix du gazole publié par le CNR et à la part des charges de carburant dans le prix de transport, le jour de la commande devant en l'espèce être fixé à la date de signature des contrats et le calcul fondé sur l'indice CNR à cette date,

- que le déséquilibre des relations commerciales conforté par une situation de dépendance économique (le groupe Franprix leader price détenu par le groupe Casino ayant représenté jusqu'à plus de 75 % du chiffre d'affaires des sociétés Fourchet frigo et logistique) et le mécanisme purement potestatif de révision du prix suffisent à qualifier une fraude de nature à écarter la prescription annale,

- que la société Fourchet frigo est en conséquence légitime à demander la révision des comptes sur le fondement de l'article 1269 du code de procédure civile.

* * *

Par dernières conclusions signifiées le 28 novembre 2013, les sociétés Sofidis et Effel demandent à la cour de :

- Constater le désistement d'appel pur et simple de Monsieur B. le 28 novembre 2012,

- Constater l'ordonnance de désistement partiel du 5 décembre 2012 rendue par le conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Versailles,

En conséquence,

- Constater l'extinction de l'instance opposant Monsieur B. aux sociétés Effel et Sofidis et le dessaisissement de la cour à l'égard de l'appel susvisé,

- Constater l'ordonnance du 13 février 2013 ayant jugé irrecevable le sursis à statuer soulevé par la Selarl MJ Synergie en qualité de liquidateur judiciaire de la société Fourchet frigo rendue par conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Versailles,

En conséquence,

- Déclarer irrecevable la demande de sursis à statuer présentée par la Selarl MJ Synergie, en qualité de liquidateur judiciaire de la société Fourchet frigo,

Sur les demandes au fond

- Confirmer le jugement de première instance susvisé en toutes ses dispositions,

À titre subsidiaire, en cas d'infirmation du jugement susvisé,

Concernant la société Sofidis :

- Juger irrecevables l'ensemble des demandes de la société MJ Synergie ès-qualités de liquidateur de la société Fourchet frigo conformément à l'article 1269 du code de procédure civile ;

À titre subsidiaire, si les demandes sont jugées recevables,

- Juger que la société Sofidis a respecté les dispositions de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 modifiée par les lois n° 2006-10 du 5 janvier 2006 et n° 2008-776 du 4 août 2008 ;

À titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la cour considérait que le mécanisme mis en place par les parties n'était pas conforme aux dispositions de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 modifiée par les lois n° 2006-10 du 5 janvier 2006 et n° 2008-776 du 4 août 2008,

- Dire que l'indice CNR applicable n'est pas celui de la date de la signature du contrat conclu avec la société Sofidis mais celui de la date d'entrée en vigueur de la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 ;

- Dire qu'il n'y a pas lieu à régularisation ;

En conséquence,

- Débouter la société MJ Synergie ès-qualités de liquidateur de la société Fourchet frigo de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Sofidis ;

Concernant la société Effel :

- Juger que seule la prestation de transport doit être soumise à la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 ;

- Juger prescrites et irrecevables les demandes de la société MJ SYNERGIE ès-qualités de liquidateur de la société Fourchet frigo portant sur les prestations réalisées avant le 23 février 2009 ;

- Juger irrecevables l'ensemble des demandes de la société MJ Synergie ès-qualités de liquidateur de la société Fourchet frigo conformément à l'article 1269 du code de procédure civile ;

À titre subsidiaire, si les demandes sont jugées recevables,

- Juger que la société Effel a respecté les dispositions de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 modifiée par les lois n° 2006-10 du 5 janvier 2006 et n° 2008-776 du 4 août 2008 ;

À titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire la Cour considérait que le mécanisme mis en place par les parties n'était pas conforme aux dispositions de la loi n° 95-96 du 1er février 1995 modifiée par les lois n° 2006-10 du 5 janvier 2006 et n° 2008-776 du 4 août 2008,

- Juger que l'indice CNR applicable n'est pas celui de la date de la signature du contrat conclu avec la société Effel mais celui de la date d'entrée en vigueur de la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 ;

- Juger qu'il n'y a pas lieu à régularisation ;

En conséquence,

- Débouter la société MJ Synergie ès-qualités de liquidateur de la société Fourchet frigo de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société Effel ;

En tout état de cause,

- Débouter la société MJ Synergie ès-qualités de liquidateur de la société Fourchet frigo de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions à l'encontre des sociétés Effel et Sofidis ;

- Condamner la société MJ Synergie ès-qualités de liquidateur de la société Fourchet frigo au paiement d'une somme de 15.000 euros à chacune des sociétés Effel et Sofidis au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'appel et de première instance.

Les sociétés Sofidis et Effel font valoir en substance :

- que les dispositions de la loi de 2006 modifiée en 2008 désormais codifiées aux articles L. 3222-1 et suivants du code des transports ne s'appliquent qu'au contrat de transport et imposent d'identifier la part des charges de carburant dans le prix du transport et, dans un second temps, d'appliquer à cette part les variations d'un indice à choisir parmi ceux publiés par le CNR et que l'article 24 III ne s'applique que dans le cas où les parties n'ont rien prévu,

- que le contrat conclu le 28 juillet 1999 entre Effel et Fourchet frigo complété par une convention de location des locaux à Noves du 14 septembre 2009 ainsi que le contrat signé entre les mêmes parties le 1er septembre 2004 constituent des contrats « multi-services » et non un contrat de transport et que la description des prestations montre leur importance et leur autonomie par rapport au transport, le prix convenu étant un prix global pour l'ensemble des prestations fournies, que la loi du 5 janvier 2006 ne lui est donc pas applicable,

- que les conditions de l'action en reddition de compte de l'article 1269 du code de procédure civile ne sont pas remplies en l'absence de preuve rapportée d'une erreur ou d'une omission,

- qu'au regard de l'article L. 133-6 du code de commerce, les demandes de la société MJ Synergie sont prescrites pour la période antérieure au 23 février 2009, l'assignation ayant été délivrée le 23 février 2010,

- que les exceptions de fraude ou d'infidélité doivent être interprétées strictement et supposent une intention malveillante ou une action délibérée visant à priver le cocontractant de la possibilité d'agir en justice en temps utile, ce que les faits de l'espèce et les négociations menées entre les parties excluent, même à supposer le caractère potestatif du mécanisme d'indexation mis en place que les sociétés intimées contestent puisque le mécanisme de révision convenu fait appel à une formule mathématique et est donc objectif,

- qu'aucune régularisation n'est due en l'espèce puisque les parties ont contractuellement déterminé le mécanisme de prise en compte de la variation du coût du carburant conformément à l'article 24-II en janvier 2008 pour Sofidis et en juin 2008 avec effet rétroactif en mai 2008 pour Effel,

- que subsidiairement, les calculs proposés par l'appelante sont erronés car ils, se fondent sur l'indice CNR de la date de signature des contrats et que lorsqu'on prend en compte l'indice CNR de la date d'entrée en vigueur de la loi de 2006, il apparaît que les sociétés Effel et Sofidis ne sont débitrices d'aucune régularisation.

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux dernières conclusions signifiées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

 

MOTIFS (justification de la décision)                                   (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

DISCUSSION ET MOTIFS DE LA DÉCISION :

Sur les demandes relatives au désistement de M. B. et au sursis à statuer :

L'ordonnance déjà citée du conseiller de la mise en état du 5 décembre 2012 a donné acte à M. B. de son désistement d'appel et a constaté l'extinction de l'instance entre M. B., d'une part, et les sociétés Sofidis et Effel, d'autre part. La demande présentée aux mêmes fins par les sociétés Sofidis et Effel, aux termes de leurs dernières écritures, est en conséquence dépourvue d'objet puisque déjà tranchée et il n'y a pas lieu pour la cour de statuer à ce sujet.

Il en va de même s'agissant de l'exception de sursis à statuer déclarée irrecevable par ordonnance du conseiller de la mise en état du 13 février 2013 qui n'a pas fait l'objet de recours, étant au surplus relevé que la Selarl MJ synergie ne forme plus aucune demande de sursis à statuer aux termes de ses dernières conclusions.

 

Sur la qualification du contrat liant les sociétés Fourchet frigo et Effel :

Par le contrat signé le 28 juillet 1999, la société Effel a confié à la société Fourchet frigo une mission de « ramassage, réception, contrôle, agréage, entreposage, éclatement, préparation, transport et livraison des marchandises négociées par son service achat »; le contrat distinguait deux points en son article 1 : en premier lieu, le ramassage, contrôle, réception, entreposage, agréage et garde de la marchandise, et en second lieu, une mission de préparation et éclatement des commandes, transports et livraison des divers points de vente listés à la fin du contrat, au nombre de 42.

Par un acte du 1er septembre 2004, les sociétés Effel et Fourchet frigo ont repris à l'identique les termes du contrat précédent quant aux prestations convenues et à leurs modalités d'exécution mais ont modifié les tarifs de la prestation et prévu que les tarifs transports seraient revus en cas d'augmentation de plus de 10 % du prix actuel hors taxe du gasoil auquel il était fait référence. Les magasins destinataires des livraisons sont en outre passés au nombre de 60, l'amplitude géographique déjà importante augmentant encore.

Deux avenants à cet acte ont été élaborés, pour adapter le prix à la hausse du coût du carburant, toujours datés du 1er septembre 2004 ; seul l'avenant dit n° 2 signé des deux parties est à considérer qui prévoit un prix de 82,33 euros la tonne préparée pour l'ensemble des magasins (sauf pour celui de Bellegarde pour lequel un prix inférieur est fixé) et cet avenant stipule en outre que « les tarifs transports seront revus en cas de fluctuation importante du prix actuel hors taxe du gazole (tarif actuel à l'achat : 0,82 euros HT) ».

Par un avenant dit n° 3 du 1er décembre 2006, il a été convenu une rémunération de 91 euros la tonne préparée pour l'ensemble des magasins

Si comme le soutient la société Effel, le coût afférent au transport n'est pas formellement identifié dans le prix convenu au contrat lui-même et dans ses avenants successifs, il résulte de ces avenants comme des négociations ultérieures entreprises entre les parties au sujet de la tarification (voir les courriels échangés en juin 2008) que la préoccupation majeure a été la prise en compte de la hausse du prix du carburant et la manière de la répercuter dans les prix payés à la société Fourchet frigo, les autres aspects de la relation contractuelle n'étant pas ou peu abordés. Et même si les parties n'ont pas inscrit le détail et la répartition des coûts dans les contrat et avenants signés, elles les connaissaient parfaitement comme l'illustre le courrier électronique adressé le 6 juin 2008 par M. Roncier pour le compte de la société Effel à M. B. dirigeant de la société Fourchet frigo qui indique :

« comme vous le savez, le prix de la prestation Fourchet se décompose de la façon suivante tarifs rédigés 1er janvier 2008

0,03095 pour la préparation

0,06278 pour le transport Soit au total 0,09373. »

En conséquence, le nombre et le détail des prestations logistiques énumérés au contrat et repris par les avenants que les premiers juges ont soulignés pour écarter la qualification de contrat de transport ne peut dissimuler le fait que, se décomposant d'abord en collecte des fruits et légumes achetés par Effel, puis en transport et livraison des produits conditionnés vers des points de vente nombreux et éclatés géographiquement sur une vaste zone (par exemple Lyon, Chambéry, Marseille, Clermont Ferrand, Narbonne), la prestation de transport, par le temps passé et son coût qui atteignait 67 % du coût total facturé en 2008, constituait en réalité l'opération principale du contrat conclu, les prestations logistiques, certes nombreuses, n'en constituant que l'accessoire nécessaire pour assurer la conservation des produits, leur tri et la préparation des commandes des magasins.

En conséquence, le contrat liant les sociétés Effel et Fourchet frigo doit être qualifié de contrat de transport, étant précisé que cette qualification n'est pas contestée s'agissant des relations contractuelles des sociétés Sofidis et Fourchet logistique.

 

Sur la demande de révision des comptes fondée sur l'article 1269 du code de procédure civile :

La société MJ synergie, tout en invoquant les dispositions de l'article 24 de la loi du 1er décembre 1995 modifiée par la loi du 5 janvier 2006 relative aux charges de carburant, selon elle méconnues par les sociétés intimées, se prévaut également de l'article 1269 du code de procédure civile pour demander la révision des comptes.

Mais ce texte dispose qu'aucune action en révision de compte n'est recevable sauf si elle est présentée en vue d'un redressement en cas d'erreur, d'omission ou de présentation inexacte.

Et il faut préciser que l'erreur visée s'entend d'une erreur de fait.

Le litige opposant en l'espèce les parties est en réalité une action en paiement née du contrat de transport et fondée sur les dispositions légales précitées relatives à la variation du prix du carburant à laquelle les dispositions de l'article 1269 ne sont pas applicables en l'absence de toute erreur ou omission matérielle.

 

Sur la prescription de l'article L. 133-6 du code de commerce :

L'article L. 133-6 du code de commerce prévoit que les actions pour avaries, pertes ou retards, auxquelles peut donner lieu contre le voiturier le contrat de transport, sont prescrites dans le délai d'un an, sans préjudice des cas de fraude ou d'infidélité.

Sont également soumises à la prescription annale, sauf en cas de fraude ou d'infidélité, toutes les autres actions auxquelles le contrat de transport peut donner lieu.

En conséquence, l'action en paiement née des contrats de transport conclus par la société Fourchet frigo avec les sociétés Sofidis et Effel relève de la prescription annale.

Les sociétés Sofidis et Effel font valoir que l'assignation ayant été délivrée le 23 février 2010, la société MJ synergie est irrecevable à solliciter le paiement de prestations effectuées plus d'un an avant, c'est-à-dire antérieurement au 23 février 2009. Or, elles relèvent que les demandes portent sur des factures relatives à des prestations essentiellement réalisées en 2006, 2007 et 2008. Elles ajoutent que la fraude et l'infidélité doivent être interprétées strictement et supposent une action délibérée et une volonté malveillante absente en l'espèce des négociations entre les parties.

La Selarl MJ synergie, ès qualités, rétorque que le déséquilibre des relations contractuelles conforté par la dépendance économique du groupe Fourchet à l'égard du groupe Franprix Leader price auquel appartiennent les sociétés Sofidis et Effel est établi et que le mécanisme de révision du prix mis en place, purement potestatif, suffit à qualifier une fraude de nature à écarter la prescription annale.

Il n'appartient pas à la cour de se prononcer sur le déséquilibre significatif des droits et obligations des parties invoqué par le liquidateur de la société Fourchet frigo en référence aux dispositions de l'article L. 442-6-I-2° du code de commerce qui fait l'objet d'une instance, selon les parties toujours pendante devant le tribunal de commerce de Paris. Et, à supposer que cette juridiction reconnaisse un tel déséquilibre, il serait sans incidence sur l'appréciation de la prescription de l'article L. 133-6 du code de commerce.

En effet, la fraude et l'infidélité supposent une volonté malveillante, une dissimulation ou une action délibérée de nature à empêcher le réclamant d'agir en temps utile.

L'attitude des sociétés Sofidis et Effel, dans les négociations menées entre les parties au sujet de la prise en considération de l'augmentation des tarifs du gazole dans les prix payés à la société Fourchet frigo, sont exemptes de ces caractéristiques, la position économiquement forte de ces sociétés et la dépendance économique invoquée de la société Fourchet à l'égard du groupe Casino ne constituant pas, en elles-mêmes et en dehors de tout autre élément, la fraude visée par le texte précité.

De même, le caractère potestatif du mécanisme de révision du prix des prestations de la société Fourchet ne peut être retenu puisqu'il a procédé d'une négociation précise et soutenue entre les parties spécialement à partir de 2008 et a été finalement arrêté par référence à des indices objectifs et extérieurs publiés par le CNR, excluant qu'il soit soumis à la seule volonté potestative des sociétés Sofidis et Effel.

En outre, les premiers juges ont à juste titre relevé que les courriers échangés pour la négociation de la révision des prix démontrent que M. B. connaissait parfaitement les dispositions légales de révision et notamment les références du CNR et doivent être suivis lorsqu'ils ont retenu qu'aucune manœuvre de la part des sociétés Sofidis et Effel n'était établie.

Ainsi, aucun élément du dossier ne permet d'admettre qu'une fraude ou une déloyauté ont pu empêcher le dirigeant de la société Fourchet frigo puis son liquidateur judiciaire d'agir plus tôt.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré prescrites les demandes portant sur des prestations antérieures au 23 février 2009.

 

Sur les demandes en paiement pour les transports effectués à compter du 23 février 2009 :

Elles sont fondées sur les dispositions de l'article 23 de la loi n° 2006-10 du 5 janvier 2006 qui a modifié l'article 24 de la loi du 1er février 1995, dispositions amendées par la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 et incluses dans le code des transports aux articles L. 3222-1 et L. 3222- 2 qui disposent :

Article L. 3222-1 : Lorsque le contrat de transport mentionne les charges de carburant retenues pour l'établissement du prix de l'opération de transport, le prix de transport initialement convenu est révisé de plein droit pour couvrir la variation des charges liée à la variation du coût du carburant entre la date du contrat et la date de réalisation de l'opération de transport. La facture fait apparaître les charges de carburant supportées par l'entreprise pour la réalisation de l'opération de transport.

Article L. 3222-2 : À défaut de stipulations contractuelles identifiant les charges de carburant dans les conditions définies par l'article L. 3222-1, celles-ci sont déterminées, au jour de la commande de transport, par référence au prix du gazole publié par le Comité national routier et à la part des charges de carburant dans le prix du transport, telle qu'établie dans les indices synthétiques du Comité national routier. Le prix du transport initialement convenu est révisé de plein droit en appliquant aux charges de carburant la variation de l'indice gazole publié par le Comité national routier sur la période allant de la date de la commande de l'opération de transport à sa date de réalisation. La facture fait apparaître les charges de carburant.

La société MJ synergie soutient qu'en dépit de ce dispositif légal, la société Effel n'a accepté aucun dispositif de répercussion du carburant et que la société Sofidis était très loin de répercuter la totalité de la hausse car il n'existait qu'un système forfaitaire de hausse de « pied de facture gazole » fixé à 2 %. Il rappelle que M. B. n'a obtenu que de maigres aménagements au travers de la mise en place à compter de mai 2008 pour Effel d'un système de répercussion et d'un mécanisme d'indexation avec Sofidis en janvier 2008. Mais il prétend que ces mécanismes ne sont pas conformes aux dispositions précitées et rappelle que les contrats ne mentionnaient pas les charges de carburant, de sorte que l'article 24 III (article L. 3222-2 du code des transports) doit s'appliquer.

Les sociétés Sofidis et Effel répondent qu'en l'espèce, les parties ont contractuellement déterminé leur mécanisme de prise en compte de la variation du coût du carburant conformément à l'article 24 II de la loi de 1995 modifiée (article L. 3222-1 du code des transports) de sorte que l'article 24 III (article L. 3222-2 du code des transports) n'est pas applicable.

 

Sur ce :

Les contrats conclus avec Effel et Sofidis ont été signés respectivement en 1999 et 2002, antérieurement à l'entrée en vigueur des dispositions législatives invoquées, sans préciser la part du carburant dans les tarifs convenus, ni introduire de pied de facture de gazole, ce qui a été ultérieurement corrigé.

Il faut rappeler que les prestations de transport antérieures au 23 février 2009 ne peuvent plus faire l'objet de réclamations de la part de la Selarl MJ synergie ès qualités en raison de l'acquisition de la prescription, de sorte que les critiques portées contre le mode de prise en considération des hausses du gazole antérieurement à cette date sont sans emport.

Pour la société Sofidis, il résulte des écritures des parties, concordantes sur ce point, qu'en janvier 2008, les parties ont décidé d'abandonner le taux fixe antérieurement prévu pour la révision du prix et de revenir à un taux variable avec fixation d'une base 100 à compter du 1er janvier 2008, selon une formule d'indexation exposée par la société Sofidis et non contestée par l'appelante : (M-100) X 20 % + 2,5 %, étant précisé que M correspond au taux du mois, 100 à la base fixée le 1er janvier 2008, 20 % correspond au coût du gazole dans le coût de revient de Fourchet frigo, 2,5 % correspond à un minima garanti.

Ainsi, contrairement aux prétentions de la Selarl MJ synergie, il est établi que les charges de carburant étaient identifiées et que la variation des charges liée à l'évolution du coût du carburant entre la date de cet accord et la date de réalisation de l'opération de transport était couverte par la formule d'indexation mise en place en référence aux indices CNR, conformément aux exigences de l'article L. 3222-1 du code des transports.

Il en résulte que la demande en paiement fondée sur les dispositions de l'article L. 3222-2, dès lors sans application dans les relations des sociétés Sofidis et Fourchet frigo pour les prestations effectuées à compter du 23 février 2009, doit donc être rejetée.

Pour la société Effel, des négociations soutenues se sont déroulées en 2008 retracées par les courriers électroniques échangés en juin 2008 qui ont abouti à un accord récapitulé par un courriel du 13 juin 2008 émanant de Mme X. (pour le compte de Effel) dont il résulte que les parts relatives au gasoil étaient fixées à 23,35 % sur le coût total du transport, soit 15,65 % sur la prestation totale (préparation + transport) et que l'indice N-1 était retenu pour calculer le pied de facture du mois (exemple indice de mai 2007 pour calculer le pied de facture de mai 2008). M. B. dans sa réponse du 8 juin suivant a accepté ce processus en contestant seulement que la référence en 2009 soit l'année 2008 et non l'année 2007, étant précisé qu'une augmentation a finalement été convenue ultérieurement pour l'année 2009 comme l'indique la Selarl MJ Synergie dans ses conclusions renvoyant au tableau récapitulatif des hausses appliquées (sa pièce 7 ).

Il résulte de ces éléments qu'à compter de mai 2008, dans les relations entre la société Effel et la société Fourchet frigo, les charges relatives au coût du carburant étaient identifiées et une révision automatique du prix mise en œuvre prenant en compte les variations des charges de carburant selon une formule arithmétique faisant intervenir les indices publiés par le CNR, de sorte que là encore, les dispositions de l'article L. 3222-1 du code des transports ont été respectées. La demande en paiement, fondée sur les dispositions de l'article L. 3222-2 qui n'est pas applicable aux relations des sociétés Effel et Fourchet frigo, et ne pourrait concerner que les prestations effectuées à compter du 23 février 2009, doit donc être rejetée.

En tout état de cause, même à supposer applicable l'article L. 3222-2, les calculs présentés par le liquidateur judiciaire de la société Fourchet frigo sont erronés.

En premier lieu, eu égard à l'acquisition de la prescription, il faut répéter que seules les prestations effectuées à compter du 23 février 2009 sont à prendre en considération, alors que les calculs proposés par l'appelante commencent en 2006.

Ensuite, pour refaire les comptes et calculer l'indexation due en vertu de l'article L. 3222-2, le liquidateur de la société Fourchet frigo prend pour référence l'indice CNR en vigueur au jour de la signature de chacun des contrats initiaux, soit le 27 mai 2002 pour Sofidis et le 28 juillet 1999 pour Effel. Les sociétés Sofidis et Effel soutiennent à juste titre que ce mode de calcul ne peut être retenu.

En effet, ces dates sont antérieures à l'entrée en vigueur de la loi du 5 janvier 2006 sur les dispositions de laquelle sont fondés les calculs. Les charges de carburant devaient, à compter de l'entrée en vigueur de la loi du 5 janvier 2006, être déterminées, au jour de chaque commande de transport passée en exécution du contrat initial ou de l'avenant liant les parties, par référence au prix du gazole publié par le comité national routier et à la part des charges de carburant dans le prix du transport, telle qu'établie dans les indices synthétiques de ce comité, ce prix étant révisé de plein droit en appliquant aux charges de carburant la variation de l'indice gazole depuis la date de la commande jusqu'à celle de sa réalisation.

Aucune des parties ne rapporte aux débats les dates précises des « commandes » de transport passées à compter du 23 février 2009 ou des ordres de service en tenant lieu. Mais de toute façon, les calculs opérés par les sociétés Sofidis et Effel, en prenant en considération comme indices de départ ceux publiés à la date d'entrée en vigueur de la loi du 5 janvier 2006 (leur pièce 18), démontrent que les sociétés Sofidis et Effel ne sont débitrices d'aucune somme envers la société Fourchet frigo, le tableau de calcul des indexations mois par mois pour 2009 faisant au contraire apparaître une somme de 33.660 euros en faveur des sociétés donneuses d'ordres et le tableau établi sur la base des indices publiés à la date des dernières négociations tarifaires (2008) aboutit à des résultats encore plus défavorables pour la société Fourchet frigo puisqu'il en résulte une somme de 180.250 euros pour 2009 en faveur des sociétés Sofidis et Effel (pièce 19).

Et l'évolution du prix du gazole au long de l'année 2009 retracée par ces tableaux, confrontée à l'augmentation convenue et appliquée par les parties pour cette année (4,40 %), exclut que la société Fourchet frigo soit créancière d'une quelconque somme, même en se référant aux indices en vigueur au jour de chaque commande dont elle ne rapporte en tout état de cause pas la preuve qui lui incombe.

En conséquence, les demandes en paiement de la société Fourchet frigo relatives aux prestations de transport effectuées à compter du 23 février 2009 sont dépourvues de fondement et doivent être rejetées.

 

DISPOSITIF (décision proprement dite)                             (N.B. : mention ne figurant pas sur l’original)

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Vu les ordonnances du conseiller de la mise en état des 5 décembre 2012 et 13 février 2013, déclare sans objet les demandes relatives au désistement de M. B. et au sursis à statuer,

Infirme le jugement rendu le 19 juin 2012 par le tribunal de commerce de Nanterre en ce qu'il a dit que le contrat conclu entre les sociétés Effel et Fourchet frigo n'est pas un contrat de transport et que les lois du 5 janvier 2006 et 4 août 2008 ne lui sont pas applicables,

Statuant à nouveau de ce chef,

Dit que les contrat et avenants liant les sociétés Effel et Fourchet frigo constituent un contrat de transport soumis aux lois précitées,

Confirme le jugement en ses autres dispositions, sauf à ajouter que celles relatives à la prescription et au rejet des demandes en paiement de la Selarl MJ synergie ès qualités pour les prestations postérieures au 23 février 2009 valent, tant pour le contrat liant les sociétés Sofidis et Fourchet frigo, que pour le contrat liant les sociétés Effel et Fourchet frigo,

Ajoutant encore au jugement,

Condamne la Selarl MJ synergie, ès qualités, à payer aux sociétés Sofidis et Effel une somme globale de 10.000 euros au titre des frais d'appel non compris dans les dépens,

Rejette la demande de la Selarl MJ synergie, ès qualités, au même titre,

Condamne la Selarl MJ synergie, ès qualités, aux dépens et accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Marie-Laure BELAVAL, Présidente et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,         La PRÉSIDENTE,